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Question écrite n° 5-1703

de Bert Anciaux (sp.a) du 10 mars 2011

au ministre de la Justice

Le nombre record de détenus dans les prisons belges

établissement pénitentiaire
détenu

Chronologie

10/3/2011Envoi question
19/4/2011Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-597

Question n° 5-1703 du 10 mars 2011 : (Question posée en néerlandais)

Cette semaine, la direction générale des prisons a annoncé que la barre des 11 000 détenus avait été franchie. La prison de Forest illustre cette surpopulation : elle compte actuellement 679 détenus alors qu'elle a une capacité de seulement 400 places. Cette prison dépasse donc sa capacité de près de 70 % !

Par le biais de bien d'autres questions, j'ai déjà confronté le ministre à cette situation inhumaine, intolérable, insoutenable et donc irréelle. Le ministre a toujours répondu avec beaucoup de bonne volonté, en proposant des projets concrets, mais envisage tout à moyen, voire à long terme. Dans l'intervalle, ce problème ne cesse de s'aggraver. Les limites de l'admissible ont déjà été franchies depuis très longtemps. Face à cette situation devenue totalement incontrôlable, les réponses volontaristes et bien intentionnées du ministre ne suffisent plus. Cette crise profonde appelle des mesures de crise directes ainsi qu'une politique de crise. Des solutions telles que la location temporaire de cellules à l'étranger ne répondent pas au caractère urgent de ces problèmes.

Le ministre estime-t-il comme moi que notre système carcéral peut être considéré comme totalement défaillant ? Estime-t-il qu'en raison de la conjonction de la surpopulation, du manque de personnel et de l'assistance physique et psychique lamentable, notre système carcéral présente toutes les caractéristiques d'une crise profonde et aiguë ? Partage-t-il mon analyse selon laquelle la négligence structurelle prolongée nécessite maintenant une politique urgente, voire de crise ? Est-il disposé à aborder ce point avec ses collègues et à prendre des mesures exceptionnelles à cet égard dès demain ? Quelle autre issue voit-il ?

Réponse reçue le 19 avril 2011 :

Le 1er mars 2011, la population carcérale totale s'élevait à 11 055 unités pour une capacité de 9 179.

L'augmentation de la population carcérale au cours de ces dernières décennies est un phénomène mondial.

Il ressort des statistiques annuelles du Conseil de l'Europe (le rapport "Space I" - statistiques 2008 - dernier rapport publié) que la Belgique se situe dans la moyenne en ce qui concerne le nombre de détenus par 100 000 habitants. Pour l'année 2008, ce nombre s'élevait à 92 alors qu'il s'élevait à 99 pour la France, 93 pour l'Italie, 152 pour l'Espagne, 98 pour la Grèce, et même 931 pour la Russie. En revanche, les pays scandinaves et les Pays-Bas enregistrent un score inférieur.

Bien que la population carcérale augmente encore dans beaucoup de pays européens, une tendance à la baisse se dessine déjà dans d'autres pays, dont les Pays-Bas.

Le pourcentage de surpopulation en Belgique oscillait entre 12 % et 19% dans les années 2008, 2009 et 2010, avec des pics en juin et décembre 2009. Avec la mise en service de Tilburg, en février 2010, le taux de surpopulation est alors tombé à 13 %. En février 2011, nous étions de nouveau à 17 %.

D'après le même rapport du Conseil de l'Europe, le taux de surpopulation notamment en France, en Italie, en Espagne et en Grèce est supérieur au taux enregistré en Belgique.

Le problème de la surpopulation et de l'augmentation de la population carcérale n'est absolument pas neuf et résulte d'une combinaison de nombreux facteurs, à savoir les évolutions sociales, la sous-capacité structurelle, la politique criminelle, la fixation de la peine, la détention préventive, etc.

Pour remédier aux conséquences néfastes de la surpopulation dans les prisons, nous oeuvrons à la concrétisation d'un Masterplan pour une infrastructure carcérale plus humaine.

Ce plan inclut aussi bien la réalisation de nouvelles constructions que l'extension de sites existants et le reconditionnement des bâtiments conservés.

Les déclarations de gouvernement des 21 décembre 2007 et 20 mars 2008 du gouvernement fédéral indiquaient explicitement la nécessité d’élaborer un plan d’action concernant l’exécution des peines et, en particulier, de s’atteler de façon accélérée à la surpopulation carcérale à laquelle nos établissements pénitentiaires sont confrontés.

En exécution de l'accord de gouvernement, le gouvernement a approuvé le 18 avril 2008 le Masterplan 2008 - 2012 - 2016 pour une infrastructure pénitentiaire dans des conditions humaines.

Le plan contient cinq grands points d'action :

- un programme de rénovation pour rétablir la capacité perdue ;

- la construction de cellules supplémentaires sur des sites existants afin de faire face à la surpopulation ;

- la construction de sept nouveaux établissements afin de faire face aux besoins croissants et de prévoir une capacité tampon de manière à pouvoir rénover des anciens établissements en toute sécurité ;

- la construction de six nouveaux établissements en remplacement des établissements fort vétustes ;

- un programme de rattrapage en matière de rénovation afin de garantir des conditions de vie sûres et humaines.

L'exécution du plan a débuté immédiatement après l'approbation de celui-ci.

La location temporaire de 650 cellules à Tilburg aide à maintenir l'augmentation de la surpopulation sous contrôle jusqu'à la réalisation de nouveaux bâtiments.

En outre, le nombre de condamnés sous surveillance électronique en tant que forme alternative d'exécution des peines a été augmenté de façon substantielle.

En ce qui concerne l'effectif du personnel dans les prisons, un projet portant sur l'encadrement harmonisé et objectivé du régime dans chaque établissement pénitentiaire a été lancé avec l'accord du Conseil des ministres du 18 février 2011.

Ce projet a également fait l'objet d'un protocole conclu le 6 octobre 2010 en Comité de secteur III – Justice entre l'autorité et les trois organisations syndicales représentatives.

Le protocole a été signé par toutes les organisations syndicales représentatives.

Outre une série d'autres éléments déjà exécutés, il est prévu dans le protocole que "l'autorité s'engage à lancer la discussion autour d'une approche globale pour les prisons (surpopulation, occupations de poste, coefficient, absentéisme, formation, redistribution des détenus, etc.), à partir de mi-novembre 2010, par prison et sur la base d'une méthodologie adaptée."