2-233 | Sénat de Belgique | 2-233 |
Avertissement: les passages en bleu sont des résumés traduits du néerlandais.
Déclaration du gouvernement sur sa politique générale
Présidence de M. Armand De Decker
(La séance est ouverte à 14 h 40.)
M. Frank Creyelman (VL. BLOK). - J'ai écouté cette déclaration du gouvernement avec une attention toute particulière. En effet, lorsqu'elle intervient à quelques mois seulement des élections, une déclaration sur la politique générale se transforme généralement en un exercice de rhétorique électorale. Sur ce point, je n'ai pas été déçu. Rarement, un gouvernement aura fait étalage d'autant de bonnes intentions, qui ne seront sans doute pas concrétisées. Ces promesses visent surtout à dissimuler les échecs du gouvernement sur les principaux points annoncés en 1999.
Sachant que l'emballage compte plus que le contenu et conscient que la réalité n'est pas des plus agréables, le gouvernement tente de la dissimuler au moyen de promesses et d'illusions. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres et il faut soigner la manière de présenter la politique aux citoyens. Aussi, le premier ministre met-il en évidence quelques points auxquels personne n'est opposé. Le relèvement des pensions minimales et la réduction des charges sociales dans le secteur horeca, voilà des thèmes porteurs mais qui, concrètement, ne représentent pas grand-chose.
Ce gouvernement est le champion de la démagogie et de la duperie. J'en veux pour exemple la référence au rapport des Nations Unies qui classe la Belgique au quatrième rang des pays les plus prospères. Je rappelle que lorsqu'il siégeait dans l'opposition, l'actuel premier ministre rejetait le classement des Nations Unies et ce, à juste titre, parce que rien n'indique qu'il soit vraiment révélateur de la prospérité, du bien-être de la population ni de la politique menée. En outre, qui peut affirmer qu'un tel classement est à inscrire au palmarès de la coalition arc-en-ciel ? N'est-il pas plutôt la conséquence d'une conjoncture économique internationale favorable ?
En dépit de ce classement, la vérité est que l'économie de la Belgique ne va pas bien du tout. Le chômage a augmenté tandis que la compétitivité de nos entreprises, les investissements et la confiance du consommateur ont diminué, particulièrement en Flandre, qui est le moteur économique du pays. Pour ce qui est de la Wallonie, on peut difficilement imaginer que l'emploi puisse encore y diminuer. Il ne reste pas grand-chose de l'État social actif, qui était pourtant l'un des grands objectifs du gouvernement. S'il est exact que notre pays n'exerce qu'une influence limitée sur la conjoncture économique internationale, il est tout aussi exact qu'on ne peut attribuer au gouvernement les résultats positifs enregistrés au cours des dernières années. C'est la conjoncture générale qui a permis à la coalition arc-en-ciel de se montrer généreuse et de gouverner à gauche. À l'avenir, les choses seront plus difficiles. Si la coalition actuelle devait être reconduite, il apparaîtra rapidement que dans des conditions économiques moins favorables, un gouvernement associant la gauche et les libéraux n'est pas en mesure de résoudre les vrais problèmes de la population. En tant que nationaliste flamand, j'en arrive à souhaiter que ce gouvernement sorte vainqueur des élections, de manière à en finir avec les utopies du gouvernement le plus gauchisant de tous les temps, encore que dans ce cas, ce sera à nouveau la Flandre qui devra payer la note.
Le premier ministre attend de la population qu'elle soit heureuse et satisfaite, mais après plus de trois ans de politique arc-en-ciel, il n'est est rien. Les citoyens auraient-ils compris que le gouvernement a fait des promesses tant à gauche qu'à droite, mais qu'elles n'ont pas été tenues ?
C'est trop facile de dire que si la population est mécontente, c'est parce qu'elle est aigrie. En quoi le fait de constater que la politique de sécurité a échoué témoigne-t-il d'aigreur ? Le gouvernement se voit contraint de manipuler les chiffres de la criminalité pour tenter de rendre crédible sa politique de sécurité et de justice.
Sous la pression des verts, les statistiques ne reprennent plus les délits liés à la drogue. La détention et l'utilisation de drogue ne font plus l'objet de procès-verbaux, ceux-ci étant remplacés par de simples notes ou communications qui ne sont plus transmises au parquet. Les services de police ont pour instruction de rédiger de moins en moins de procès-verbaux. De plus en plus, les petits délits font l'objet de simples notes, sans verbalisation, soi-disant pour décharger les parquets. Avec de tels procédés, il n'est pas étonnant que les chiffres de la criminalité diminuent.
Dans la plupart des villes, les policiers sont de moins en moins présents dans les rues, ce qui réduit les possibilités de contact pour les victimes de délits, sans parler de la plus faible probabilité d'arrêter les coupables.
Sachant que selon le professeur Ponsaers, la volonté de déclarer les faits criminels connaît une diminution sans précédent, il ne subsiste pas grand-chose des statistiques triomphales du gouvernement. Il semble en effet que les deux-tiers des cambriolages ne figurent pas dans les statistiques de la police et que seulement la moitié des cas de vols de sacs à main ou d'effraction de véhicules soient déclarés.
D'autres raisons expliquent la soi-disant diminution du pourcentage de la criminalité. Les processus de naturalisation et de régularisation ont pour conséquence une diminution du nombre d'infractions à la loi sur les étrangers. De même, l'absence d'élections en 2001 entraîne une diminution des infractions à la loi électorale.
La politique de justice et de sécurité a échoué à cause des concessions faites par le VLD aux partis de gauche, à cause de la diminution des moyens consacrés à la lutte contre la criminalité.
La capacité d'accueil des prisons n'a pas été augmentée, la tolérance zéro n'a pas été instaurée, une politique anti-drogue efficace fait toujours défaut. Toute la politique de sécurité est aux mains de la gauche dont on connaît l'approche particulière. Selon la gauche, la criminalité est la conséquence des situations d'exclusion. Selon la gauche, il n'y a pas de responsabilité individuelle, le comportement humain étant déterminé par le milieu et par les circonstances d'éducation. Cela revient à dire que les coupables sont des victimes qui ne peuvent faire l'objet de mesures répressives comme l'emprisonnement, mais qui doivent bénéficier d'un accompagnement par des assistants sociaux.
Le VLD est responsable d'avoir permis une telle politique de gauche. Le VLD a trahi ses électeurs en niant l'orientation plus à droite largement souhaitée en Flandre. Comme les autres partis flamands au pouvoir, le VLD aura à en payer le prix lors des élections.
Outre la politique de sécurité, le VLD a également échoué sur toute la ligne dans sa politique relative aux étrangers, en faisant le contraire de ce que voulaient les électeurs flamands. Le processus de régularisation a provoqué, en trois ans, un flux de demandeurs d'asile sans précédent. La Belgique, ou plus exactement la Flandre est en tête du peloton européen. Le premier ministre prétend que le nombre de demandeurs a été réduit de moitié, ce qui est faux. En réalité, ce gouvernement a permis à de très nombreux demandeurs d'asile d'entrer le pays, et leur a offert ensuite, sans condition, la nationalité belge, grâce à la loi d'acquisition accélérée de la nationalité qui a été approuvée par le VLD mais dont tout citoyen sensé souhaite la suppression.
Des milliers de nouveaux Belges peuvent aujourd'hui bénéficier tranquillement des nombreux avantages sociaux obtenus grâce au dur labeur des citoyens. Voilà en quoi consiste cette politique d'asile, en dépit de toutes les promesses électorales. Au total, le VLD a créé ainsi plus de 65.000 nouveaux Belges, sans parler des 70.000 illégaux qui ont été régularisés. Face à ces chiffres, le renvoi de quelques Roumains au moyen d'un avion de l'armée perd toute crédibilité, d'autant que l'on approche des élections.
Pour le reste, nous n'avons aucune raison de nous réjouir, certainement pas sur le plan communautaire. Ce gouvernement est non seulement le plus à gauche depuis des décennies, mais également le plus anti-flamand. Que reste-t-il des promesses du VLD concernant le renforcement des compétences flamandes en matière de soins de santé, d'aide aux familles et aux personnes âgées, d'emploi, de santé publique, d'environnement, de classes moyennes ? Les leviers de la sécurité sociale sont-ils aux mains des Flamands, comme promis ? M. Verhofstadt avait affirmé que la régionalisation de l'impôt des sociétés et de certains éléments de la sécurité sociale offrirait à la Flandre la possibilité de mener sa propre politique salariale. Il avait plaidé pour une autonomie complète en matière de revenus et pour une politique d'imposition propre aux régions. Rien de tout cela n'a été concrétisé. Par contre, la Flandre a obtenu « une bonne entente communautaire ».
La population est donc mécontente mais le gouvernement s'en étonne et considère qu'elle est aigrie. Aucun progrès n'a été fait en matière de politique des étrangers, de criminalité ou de justice, sans parler des concessions communautaires. Voilà le cadeau de la coalition arc-en-ciel aux électeurs flamands.
Le premier ministre nous reconnaît le droit d'être aigris mais il ne donnerait pas la Belgique aux aigris, c'est-à-dire aux électeurs et aux élus du Vlaams Blok. Mais nous n'avons pas besoin de cette Belgique. D'ailleurs, il n'appartient pas au gouvernement de décider à qui reviendra la Belgique. Ce privilège appartient aux électeurs qui décideront, en juin prochain, qui aura le droit de diriger le pays. Nous sommes convaincus qu'en dépit des manipulations médiatiques inouïes de ce gouvernement, la coalition arc-en-ciel sera déclarée en faillite. Pas un Flamand ne le regrettera.
M. Jean-François Istasse (PS). - Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Mahoux, retenu par d'autres devoirs.
D'emblée, au nom du groupe socialiste, je félicite le gouvernement car le budget 2003 prévoit, malgré les circonstances économiques et financières difficiles, des impulsions nouvelles sur le plan économique et sur le plan social. C'était primordial et nous sommes au rendez-vous. Il s'agit, en outre, d'un budget responsable car, contrairement à celui de la plupart des pays européens, les Pays-Bas, l'Allemagne et la France notamment, il est en équilibre.
Nous constatons avec satisfaction que des moyens complémentaires sont prévus pour dégager des politiques nouvelles en matière de pensions et des mesures concrètes en faveur de l'augmentation du salaire minimum. Pour le groupe socialiste, il était essentiel que la politique annoncée constitue un progrès pour nos concitoyens les plus faibles. Les pensions les plus modestes vont être revalorisées, tant celles des salariés que celles des indépendants, et nous pouvons marquer notre approbation. Le salaire minimum sera revu à la hausse par une diminution de la cotisation personnelle des travailleurs concernés. C'est en fait quelque 530.000 personnes qui verront ainsi leurs revenus augmenter de manière significative puisque, pour un salaire de 1.335 euros bruts, cela représente une augmentation de 25 euros par mois. Si nous sommes particulièrement attentifs au maintien du pouvoir d'achat des travailleurs, il faut également souligner que cette mesure intervient efficacement pour lutter contre les pièges à l'emploi combattus par Mme Onkelinx. Le gouvernement l'a bien compris puisque c'est la troisième augmentation qui intervient en la matière, après celles de décembre 1999 et avril 2000.
En matière de fixation des salaires, nous rejoignons le premier ministre quand il appelle les partenaires sociaux, les secteurs et les entreprises à prendre leurs responsabilités et à éviter ainsi une intervention de la loi. La négociation interprofessionnelle a déjà fait ses preuves dans notre pays, elle est un modèle pour tous les pays démocratiques et les acteurs en présence devront faire preuve d'audace et de créativité pour ficeler prochainement l'accord 2003-2004.
Nous approuvons également la mise en place de la banque-carrefour des entreprises. Elle devra en effet soulager les entreprises de nombreuses obligations administratives.
Dans le secteur de l'emploi, nous soutenons la décision de renforcer les mesures contre l'exclusion du travail qui ont rencontré beaucoup de succès.
Nous épinglerons dans ce volet social le doublement du congé de maternité pour les femmes indépendantes, assorti d'une indemnité doublée. Il était important de prendre en compte les difficultés rencontrées par cette catégorie de travailleurs et le groupe socialiste a d'ailleurs déposé à ce sujet plusieurs initiatives parlementaires au cours de cette législature. À cet égard, il nous paraît souhaitable que dans le régime des travailleurs indépendants la solidarité soit assurée à l'intérieur du secteur.
Le plan d'emploi destiné à promouvoir l'engagement de personnel dans les secteurs qui connaissent des pics d'activité comme l'horeca est également une mesure concrète positive et nous serons particulièrement attentifs au texte que proposera la ministre de l'Emploi en la matière.
Le groupe socialiste se réjouit particulièrement du montant retenu pour le financement de l'assurance maladie l'année prochaine ; 15,342 milliards d'euros sont en effet prévus. Cela représente une augmentation de quelque 6,5% par rapport au budget de l'année précédente alors que la norme légale est fixée à 2,5%. L'effort consenti est en fait de 37 milliards d'anciens francs, ce qui est appréciable.
De nouvelles initiatives verront donc le jour et le ministre des Affaires sociales a déjà lancé quelques pistes qui rencontrent notre approbation. Nous nous félicitons en effet du fait que certaines prestations aujourd'hui facturées aux patients hospitalisés seront désormais intégrées dans le prix de journée. Nous épinglerons également - c'est une première - la création d'un Fonds à destination des enfants gravement malades et qui sont, avec leur famille, confrontés à des situations souvent dramatiques.
Des moyens sont également accordés à la revalorisation des honoraires des généralistes. C'est une mesure positive, en ce sens qu'elle devrait faciliter la conclusion d'une convention médico-mutualiste pour 2003 et garantir, ce faisant, la sécurité tarifaire aux patients. Nous avons insisté sur l'importance des mesures de correction concernant la kinésithérapie. Le président de notre parti, M. Di Rupo, ne nous aurait d'ailleurs pas pardonné de ne rien avoir obtenu à cet égard. Ces mesures sont annoncées et nous nous en réjouissons.
Nous approuvons également les dispositions envisagées par le gouvernement dans le secteur des médicaments et nous sommes particulièrement attentifs aux mesures prises pour favoriser encore l'usage des médicaments génériques.
On a souvent entendu dire que la majorité arc-en-ciel bénéficiait d'une conjoncture favorable qui lui permettait de répartir les milliards entre ses différentes tendances. Or, malgré le renversement de la conjoncture, le budget qui nous est présenté ici est un budget sérieux et équilibré, qui permet à la Belgique de respecter ses engagements sur le plan international. Le progrès réalisé en dix ans sur ce plan est, en tous points, remarquable. Il y a dix ans en effet, notre pays atteignait un endettement record de 140%. En dépit d'efforts considérables, ce chiffre entraînait le budget dans le cercle vicieux de l'effet boule-de-neige : la dette s'autoalimentait et continuait à croître d'année en année, malgré des recettes supérieures aux dépenses.
Or, après dix années d'efforts, la dette est proche des 100% du PNB et a ainsi amorcé ce qu'il est convenu d'appeler une spirale vertueuse, phénomène exactement inverse à celui de la boule-de-neige. Autrement dit, chaque effort budgétaire se traduit par un effet positif plus que proportionnel à l'effort entrepris.
Cette réduction spectaculaire de l'endettement permet depuis quelques années de dégager des marges budgétaires au service d'une politique active. Et cette fois encore, le budget qui nous est présenté utilise à bon escient les marges libérées par cette stricte politique budgétaire.
Il faut toutefois rester vigilant. Chacun sait la réelle fragilité que connaît encore notre budget. Car à 100% du PNB seulement, l'endettement reste considérable et la situation budgétaire, fragile. Nous restons largement tributaires des mouvements de l'économie. Il faut donc à tout prix veiller à éviter un nouvel emballement, car ce sont toujours les moins nantis qui en paient chaque fois la facture, ce qui est, pour nous, une source de préoccupation. Il est donc indispensable de maintenir l'équilibre budgétaire.
La mobilité revêt également une grande importance aux yeux du groupe socialiste. Elle participe en effet à la fois du développement économique, pour lequel elle est essentielle, mais aussi et surtout de la qualité de vie, en particulier dans les villes.
La SNCB est, à cet égard, un élément incontournable d'une politique dynamique et efficace de mobilité. Il était donc indispensable que son avenir financier soit assuré, et cela de façon durable, de sorte qu'elle puisse répondre aux défis que l'on attend d'elle.
C'est pourquoi mon groupe se réjouit particulièrement du volet financier qui concerne les chemins de fer. J'étais parmi les sénateurs qui s'interrogeaient à cet égard ; ce budget nous donne une réponse aussi importante que rassurante.
Tout d'abord, les différentes enveloppes seront intégralement maintenues, telles que prévues l'an passé, soit 2 milliards 35 millions d'euros. La SNCB sera donc en mesure de poursuivre son programme de modernisation et d'amélioration du réseau et des services, ce qui permettra d'éviter un manque à gagner de 991 millions d'euros qui risquait de mettre la société en péril d'ici 2012.
Ensuite, la fameuse dette historique de la SNCB, qui a toujours pesé sur les comptes de la société et qui l'a empêchée de mener une véritable politique d'avenir, sera résorbée par l'État fédéral à partir de 2004. C'est une nouvelle très importante. En effet, compte tenu des énormes charges d'intérêts que cette dette fait peser sur l'entreprise, la reprise progressive de ces quatre milliards d'euros constituera une mesure fondamentale pour la SNCB. De ce point de vue, le plus tôt sera le mieux.
Enfin, sans mettre en péril l'achèvement des travaux du TGV, quelques dizaines de millions d'euros seront provisoirement prélevés sur ce poste budgétaire afin de favoriser les investissements essentiels à la sécurité.
Tous ces éléments permettent donc à la SNCB d'être une société performante et de mettre le réseau belge au plus haut niveau de qualité. Ce sont, me semble-t-il, des éléments indispensables pour une bonne politique de mobilité et pour le respect de l'usager des transports publics, mais aussi pour permettre à nos chemins de fer de relever les défis européens auxquels ils sont déjà confrontés.
Pour rester dans les entreprises publiques, la reconversion de Belgacom en une société moderne et performante doit également être soulignée. Elle permet de dégager un dividende exceptionnel de deux milliards d'euros dont une partie servira à financer le propre Fonds de pension de l'entreprise, consolidant ainsi, et sa reconversion, et la situation sociale de ses travailleurs, tandis que 500 millions d'euros iront au Fonds de vieillissement. Nous nous réjouissons de cette mesure préventive très importante.
La Poste est une des dernières entreprises publiques pour lesquelles une reconversion en profondeur doit être poursuivie pour répondre aux défis de demain. Nous ne répéterons jamais assez que ces nécessaires reconversions ne peuvent en aucune façon se faire au détriment des travailleurs de l'entreprise. Mais il est aussi évident qu'une telle réforme ne peut se faire sans moyens financiers considérables. C'est pourquoi nous nous réjouissons de ce que l'enveloppe prévue à cet effet - 300 millions d'euros - soit entièrement accordée à l'entreprise.
Nous sommes également fiers, en tant que socialistes, que la réforme fiscale porte principalement ses effets sur les bas et les moyens revenus grâce à une affectation de 21 milliards d'euros sur les 25 milliards d'euros acquis par cette réforme fiscale. C'est donc une réforme qui touche l'ensemble des revenus et qui permet de maintenir et même d'accroître le pouvoir d'achat des travailleurs. Nous y sommes particulièrement attachés.
Il nous semblait toutefois que compte tenu d'un certain retournement de conjoncture qui nous invite à revoir certaines dépenses à la baisse, il aurait peut-être été de bonne politique de reporter à des jours meilleurs la partie de la réforme relative aux salaires les plus élevés. Nous n'avons pas été suivis, mais les engagements pris ont été respectés.
En tant que sénateur de communauté, je voudrais aborder la situation financière des entités fédérées. C'est avec une certaine consternation que les Régions et Communautés ont appris que le Conseil supérieur des Finances allait leur réclamer, avec plusieurs années de retard et rétroactivement, des sommes considérables.
Cette pratique nous semble contestable ; elle risque en effet de mettre en péril la gestion même de ces entités fédérées qui ne peuvent naturellement pas tenir compte de pareils aléas dans leurs budgets.
On peut donc se réjouir que le gouvernement ait renoncé à donner un caractère rétroactif à cette mesure. Restent néanmoins la procédure non-contradictoire qui est contestée par les entités fédérées, en tout cas par la Communauté française et la Région wallonne, et l'effet rétroactif sur trois exercices.
Ces corrections imprévues vont rendre délicate la confection des budgets des entités fédérées et, plus généralement, leur situation financière. Il faudra y être très attentif.
Quant à la réforme des polices, le Premier ministre nous annonce la poursuite de l'examen des problèmes financiers et opérationnels. Il convient de rappeler les promesses qui ont été faites par le ministre de l'Intérieur - aucun municipaliste ne doit les avoir oubliées - quant au respect du principe de neutralité budgétaire pour les finances des communes.
Le groupe socialiste sera donc, plus que jamais, particulièrement attentif aux nouvelles décisions qui devront intervenir pour les communes ou les zones de police. Nous ne pouvons, dès lors, que nous réjouir de la constitution d'une provision à cet effet.
Concernant les contrats de sécurité et de prévention, notre groupe a toujours réclamé leur pérennisation via l'élaboration de programmes pluriannuels, ainsi que leur développement dans les zones rurales ou semi-rurales. En effet, il nous semble inacceptable que la délinquance, en quelque sorte bousculée dans les villes, se réfugie dans les campagnes, le problème étant alors déplacé sans être résolu. L'élaboration d'un plan d'action pour les zones rurales ne peut, pour ces raisons, qu'emporter notre adhésion.
Le volet international, qui a constitué l'introduction de la déclaration du premier ministre, a également retenu toute notre attention. Nous devons nous réjouir de l'augmentation octroyée à l'aide au développement. En augmentant le budget de 9%, nous devrions atteindre 0,7% du PNB dans les années à venir.
Par contre, en ce qui concerne le Fonds pour l'application de Kyoto, certaines des mesures préconisées posent problème, tant sur le plan éthique qu'environnemental.
Un mot enfin sur le problème de l'Irak, sur lequel s'est longuement étendu le premier ministre.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Que pensez vous des mesures du gouvernement relatives au budget de la Défense ? Estimez-vous le moment est approprié pour procéder à une restructuration de l'armée ? Sachant que celle-ci doit faire face à un surplus de coûts de quelques milliards, le fait de diminuer encore le budget risque de provoquer une crise dans la Défense et de créer des difficultés au ministre Flahaut. Quelle est l'opinion de votre groupe sur ce point ?
M. Jean-François Istasse (PS). - Je fais entière confiance au ministre Flahaut et au gouvernement pour assurer à la fois une maîtrise des budgets et une modernisation de notre armée. C'est un objectif qui est poursuivi depuis longtemps et le ministre Flahaut s'en acquitte parfaitement à l'heure actuelle.
J'en reviens à la question de l'Irak. Nous considérons depuis longtemps que l'embargo, tel qu'il est appliqué, a de graves conséquences sur les populations civiles. Nous voulons rappeler avec force que c'est par voie diplomatique que la crise doit être résolue. L'administration du président Bush mène une politique belliciste, qui va à l'encontre de la paix. Nous réaffirmons avec fermeté que le droit international, les règles de conduite que les États se sont eux-mêmes données à travers la Charte des Nations Unies et le fonctionnement de l'Organisation des Nations Unies, et donc les résolutions du Conseil de sécurité, doivent être respectés, partout, y compris et peut-être surtout au Moyen-Orient.
Je termine mon intervention en soulignant que le groupe socialiste enregistre avec satisfaction les décisions que le gouvernement a prises afin de rencontrer les exigences en matière de sécurité sociale et, particulièrement, en soins de santé.
Nous nous félicitons également des mesures touchant au salaire minimal et aux petites pensions. Il en est de même en ce qui concerne les objectifs et les efforts poursuivis en matière d'emploi.
Certes, la prudence budgétaire reste de mise mais les priorités doivent continuer à aller à la santé, à la sécurité des citoyens, à l'emploi et à la mobilité. Notre intervention prouve, je l'espère, que nous ne sommes définitivement pas dans le camp des aigris.
M. Frans Lozie (AGALEV). - Ce budget a été élaboré dans des circonstances difficiles. La situation économique est incertaine. Il s'agit d'un phénomène international dont notre pays subit, lui aussi, les conséquences.
La situation politique internationale est également incertaine. Outre la menace de guerre entre les États-Unis et l'Irak, d'autres conflits internationaux influencent la situation économique et le bien-être dans le monde. Je suis préoccupé par l'escalade dans le conflit entre Israël et les Palestiniens. En tant qu'Européens, nous devons accorder toute notre attention à ce problème. Ce qui se passe au Moyen-Orient est en opposition avec nos principes en matière de droit humanitaire et de gestion de conflits. Cela doit nous interpeller.
Il y a quelques semaines, je me suis rendu dans la région des Balkans, plus près de chez nous. La situation en Bosnie, au Kosovo et en Macédoine est également préoccupante.
Enfin, l'Afrique connaît une situation alimentaire et sanitaire catastrophique. L'Europe et la Belgique ne prennent pas suffisamment d'initiatives pour remédier à cette situation indigne. Ce n'est pas un hasard si c'est un Belge qui dirige la lutte contre le sida en Afrique, mais les réactions européennes restent trop distantes et insuffisamment engagées. Du point de vue humanitaire, la situation en Afrique est inacceptable.
Dans ce contexte défavorable, le gouvernement doit définir sa politique pour l'année prochaine.
Les élections arrivent. Nous devons voter le 15 juin 2003 et il y a encore beaucoup à faire. Il est clair que les élections ont une influence sur la déclaration du gouvernement et les débats qui s'y rapportent. La tension monte au sein de la majorité arc-en-ciel, mais la fièvre électorale augmente aussi dans l'opposition.
L'incertitude plane sur l'avenir de nos institutions, ce qui influencera les travaux, surtout au Sénat. L'avenir de ce dernier en tant qu'institution est incertain. Quelques lignes directrices ont déjà été esquissées pour l'avenir, mais le cheminement démocratique devra être suivi.
L'Europe me préoccupe davantage. La Belgique a toujours insisté sur le renouvellement interne et le renforcement des institutions européennes ainsi que sur la nécessité de l'élargissement de l'Union. Ce dernier progresse trop lentement, malgré les initiatives prises par la Belgique sur ce plan. J'ai confiance dans le gouvernement et les personnes qu'il a désignées pour préparer ce travail, entre autres M. Dehaene, qui a beaucoup de mérites sur ce plan.
La confection du budget 2003 ne fut pas chose aisée. Le gouvernement arc-en-ciel a pourtant réussi à prendre des décisions cohérentes pour la politique de 2003. Ce fut un exercice d'équilibre particulièrement difficile, surtout parce que nous voulions tenir parole. Cela donne peut-être une impression erronée à l'opposition et à la presse, selon lesquelles ce budget manquerait de perspectives d'avenir, ne serait pas innovant, etc. Il est exact qu'il ne contient pas beaucoup de nouveautés mais, dans la dernière étape, le gouvernement veut achever ce qu'il a commencé et dégager les moyens nécessaires à cet effet.
L'élaboration du budget fut un exercice d'équilibre difficile. Toute personne ayant quelque expérience politique peut difficilement espérer que la dernière discussion budgétaire et la dernière déclaration d'un gouvernement fournissent un projet totalement nouveau. Ce serait non seulement peu crédible, mais aussi antidémocratique. Nous devons réaliser les lignes politiques tracées. Dans quelques mois, l'électeur prononcera son jugement. Je ne doute nullement qu'il sera positif. Je vais énumérer quelques aspects positifs de cette politique.
La diminution des charges sur les personnes et le travail est maintenue. Le dynamisme des citoyens est ainsi stimulé. Nous devons cependant veiller à conserver des moyens suffisants pour financer les missions des pouvoirs publics.
Nous avons réussi à réformer la SNCB sur le plan structurel. Personne ne doute que le nouveau manager dispose des capacités nécessaires pour appréhender sérieusement les problèmes. On a veillé à ce que la SNCB reçoive les moyens indispensables à l'accomplissement de ses missions. Le problème de la dette doit être résolu dans un proche avenir.
Lors de son entrée en fonction, le gouvernement a dit qu'une opération de rattrapage était nécessaire pour augmenter le budget de la Coopération au développement. Malgré les circonstances budgétaires difficiles, aucune économie ne sera réalisée dans le domaine de la Justice et de la Coopération au développement. Dans ces départements, la croissance doit être garantie pour pouvoir atteindre la norme fixée.
Le gouvernement a pris des mesures pour préserver la qualité des aliments. Le budget dégage les moyens nécessaires pour garantir le contrôle effectué par l'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire. Le cadre du personnel de l'agence est actuellement complet et les travaux peuvent commencer.
Il y a également de nouveaux défis, comme le Fonds Kyoto. Nous ne devons pas espérer que tous les problèmes seront ainsi résolus, mais c'est en tout cas une première étape. La possibilité d'acheter des quotas d'émission existe, mais on n'a pas encore décidé si la Belgique en fera usage. Les ministres Verts mettront certainement tout en oeuvre pour l'éviter.
Le gouvernement a veillé, en bon père de famille, à disposer de moyens suffisants pour pouvoir réagir de façon appropriée lors de périodes difficiles. Les quotas d'émission échangeables sont l'un des moyens pouvant être gardés en réserve, mais ce n'est pas le moyen principal pour atteindre les normes de Kyoto.
Des mesures sociales indispensables ont aussi été prises. Plusieurs membres ont dit ce matin qu'en cette année d'élections, des cadeaux sont à nouveau distribués. Je ne suis pas d'accord. Le budget augmente effectivement une série de pensions et relève certains minima. Ce ne sont pas des cadeaux, mais des choses auxquelles les citoyens ont droit.
En revanche, ce que j'aurais considéré comme un cadeau, c'est la déductibilité totale des frais de restaurant. Cette mesure était proposée, mais elle n'a pas été retenue. Si je puis admettre que les personnes qui vont souvent au restaurant à titre professionnel puissent déduire une partie de leurs frais de restaurant, je ne puis accepter que ces derniers soient déductibles à 100%. Les personnes qui mangent chez elles, parce qu'elles sont au chômage ou pensionnées devraient dans ce cas avoir droit à une réduction d'impôt. Accorder une déductibilité totale revient à subventionner directement le secteur des restaurants.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Les frais de restaurant sont totalement déductibles pour les restaurants d'entreprises ou les clubs de football, alors que ce n'est pas le cas pour les autres restaurants.
Nous devons également examiner la situation des différents secteurs économiques. La diminution des coûts salariaux contribue à l'augmentation du volume de l'emploi. Le secteur horeca est celui qui compte le plus grand nombre de faillites. Nier le problème ne le résout pas.
Il ne s'agit pas de faire un choix entre augmenter les pensions les plus basses ou faire quelque chose pour le secteur horeca. Le gouvernement pouvait adopter les mesures proposées par le secteur horeca qui auraient eu certaines retombées positives. C'est le point de vue qu'a toujours défendu le ministre Daems, mais le poids qu'il représente dans la balance gouvernementale ne me semble pas très important. C'est la raison pour laquelle cette mesure n'a pas été prise, alors que pour Belgacom on trouve un milliard d'euros.
C'est le gouvernement qui a organisé les états généraux de l'horeca, mais sur le terrain rien ne se passe.
M. Frans Lozie (AGALEV). - Nous soutenons le plan du gouvernement visant à créer un statut spécifique et flexible pour le travail saisonnier et temporaire dans le secteur horeca.
Mme Jeannine Leduc (VLD). - Beaucoup de secteurs ont une longue liste de desiderata. Des choix doivent donc être opérés. En ce qui concerne l'horeca, nous avons opté pour l'emploi. Cette question se pose depuis des années. Le reste suivra sans doute plus tard.
M. Frans Lozie (AGALEV). - Si nous pouvons offrir à court terme un statut flexible au secteur horeca, lui permettant de gérer plus facilement les périodes d'activité intense, nous lui rendons un beaucoup plus grand service. (Exclamations de M. Vandenberghe).
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Le secteur horeca flamand réagit assez positivement à cette réforme. Il en est de même des organisations patronales UNIZO, VBO et VEV.
M. Frans Lozie (AGALEV). - Je suis d'accord avec le premier ministre ; il y a encore beaucoup de travail. Il faut encore exécuter, par exemple, la loi sur les droits des patients. La fonction de médiation, qui joue un rôle important dans la conciliation entre médecins et patients, doit être instaurée. La proposition de loi sur les exportations d'armes est pratiquement prête. Nous serons le premier pays à inscrire dans une loi le code de conduite européen. La sortie du nucléaire doit être réalisée. Une série d'initiatives parlementaires, dont la loi relative à la recherche scientifique sur les embryons, doivent être finalisées.
Agalev est actuellement dans la dernière année de sa première législature. Nous avons encore beaucoup de travail à réaliser. Malgré toutes les difficultés que nous avons rencontrées, nous voulons continuer à relever le défi. Le gouvernement peut compter sur nous pour la réalisation du programme que nous avons établi ensemble. Je suis heureux que la déclaration du gouvernement et le budget ne contiennent aucun projet entièrement nouveau, mais offrent la garantie que nous respecterons nos engagements. L'électeur se prononcera à ce propos l'année prochaine. J'attends ce moment avec une grande confiance.
M. Paul Galand (ECOLO). - Nous avons entendu une déclaration avec des accents libéraux indéniables, un fond social solide et des balises de développement durable fortes. Il me semble inutile de répéter au Sénat ce que le public et le gouvernement ont déjà entendu à la Chambre.
Comme sénateur, j'inscrirai mon propos dans une perspective à moyen terme. Je ne vous étonnerai dès lors pas en insistant sur les avancées en matière de développement durable.
Primo, le budget est en équilibre. On ne peut en dire autant des budgets de pays voisins. Cela prouve que la prudence dans la gestion n'est pas l'apanage d'un seul courant politique puisque le gouvernement Jospin s'y était tenu, que le gouvernement Raffarin ne la respecte pas et que le gouvernement arc-en-ciel s'y maintient malgré l'année électorale en perspective.
Secundo, l'objectif de 0,7% du PIB à consacrer à l'aide publique au développement est confirmé ; c'est essentiel car tant que la pauvreté totale est le lot d'un milliard d'êtres humains et tant que les inégalités sociales au sein des pays du Nord comme du Sud, et entre le Nord et le Sud, ne se résorbent pas, toute perspective de développement durable est hypothéquée. Cet objectif de 0,7% et celui d'avoir une politique cohérente de coopération Nord-Sud et d'équité sociale forment une base minimum indispensable. Trop de pays du Nord, confrontés à des difficultés budgétaires, reviennent en arrière sur ces objectifs. Des mises au point au niveau de l'Union européenne sont donc indispensables.
Tertio, le premier ministre a évoqué la situation internationale et les risques d'un conflit avec l'Irak mais on ne dira jamais assez combien l'aggravation terrible de la situation des populations palestiniennes et le climat d'insécurité qui pèse sur les civils en Israël sont les obstacles principaux à toute évolution pacifique et au développement socio-économique durable du Moyen-Orient. Il n'y a pas d'avenir pour la paix et un développement durable euroméditerranéen - cela nous concerne aussi - sans le respect du droit international pour tous et par tous ni sans l'équivalence dans l'application des pressions et des sanctions internationales.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Il faut aussi respecter la Constitution !
M. Paul Galand (ECOLO). - Je parle du Moyen-Orient, du respect du droit international. Nous reviendrons plus tard sur la Constitution. Je sais que M. De Batselier veut une Constitution spéciale pour la Flandre. Cependant, je suis d'accord avec vous, il vaudrait mieux veiller au respect de la Constitution belge pour tous.
La majorité arc-en-ciel fixe aussi des balises dans ce domaine essentiel qu'est la mobilité. Lors du conclave budgétaire, des décisions importantes ont été prises concernant la SNCB. Ces décisions ont été confirmées et exposées à la Chambre ce jeudi. L'entreprise disposera donc de plus de moyens afin de développer les services de mobilité et la sécurité. La dotation annuelle sera augmentée et une enveloppe supplémentaire de 1,5 milliard de francs sera accordée pour la réalisation du contrat de gestion. Le gouvernement a aussi décidé de créer un mécanisme légal garantissant la reprise de la dette de l'entreprise.
Sur le social, je rejoins tout à fait ce que M. Istasse a dit tout à l'heure.
Je veux souligner que le budget de l'assurance maladie - invalidité est garanti par un effort budgétaire très significatif. Nous savons que ce qui doit être réussi en priorité, c'est la revalorisation de l'acte intellectuel posé par un médecin et particulièrement par un médecin généraliste. En effet, si le budget est assuré pour cette année mais que les ajustements et les rééquilibrages internes ne sont pas réalisés, l'effort budgétaire manquera de rationalité. Seule une forte cohérence dans politique de santé publique nous garantira une réussite. L'acte intellectuel du médecin, la réflexion clinique de l'équipe soignante avant d'arrêter le choix des examens techniques et des interventions les plus judicieuses sont essentiels. Cet acte intellectuel peut éviter beaucoup de prestations inutiles.
Le Kenniscentrum ne suffira pas car, au moins dans le projet actuel, il fournira aux décideurs des informations surtout à partir de l'offre. Ce qu'il nous faut aussi comme décideur politique et législatif, c'est une évaluation permanente des besoins prévisibles de soins de santé, à partir des données démographiques, des données socio-économiques et des conditions de vie environnementales de la population. Selon nous, c'est là le rôle de l'Institut scientifique de santé publique et des observatoires provinciaux et locaux de santé.
Au sujet des droits du patient, l'application de la loi ne peut être retardée mais, en même temps, la loi sur les erreurs médicales doit aboutir avant la fin de la législature, sinon de nouvelles dépenses en examens complémentaires pour protéger les médecins vont faire exploser le budget des soins de santé.
Au sujet des soins palliatifs, j'attendrai bien sûr, dans un avenir le plus rapproché possible, la communication du gouvernement sur l'état d'avancement du plan des soins palliatifs, tel que prévu par la loi que nous avons votée, pour que le choix de finir ses jours à la maison ne coûte pas plus cher au patient et à ses proches que celui de mourir à l'hôpital.
Bien entendu, en tant que sénateur de Communauté, je me joins aux observations que M. Istasse a exprimées quant aux éventuelles répercussions dommageables sur les budgets des Communautés et des Régions. La majorité doit trouver une solution à cette problématique.
Enfin, monsieur Thissen, vous avez évoqué les indicateurs de pauvreté humaine dans les pays de l'OCDE. Vous pouvez constater que je ne suis pas systématiquement contre les propos de l'opposition démocratique. Vous avez raison : la classification de la Belgique en la matière n'est pas tellement honorable par rapport aux moyens disponibles. J'attendrai donc aussi, en complément de la déclaration du Premier ministre, le rapport bisannuel sur l'état de la pauvreté que M. Vande Lanotte doit nous fournir en tant que ministre de l'Intégration sociale. Ce rapport devrait nous permettre de suivre régulièrement l'évolution de la situation et de voir si les choix budgétaires et politiques que nous faisons visent non seulement à défendre la richesse globale et moyenne de la population, mais aussi à résorber la pauvreté et à permettre aux plus pauvres de rattraper la moyenne qu'un citoyen belge peut espérer. Vous avez raison d'attirer notre attention sur ce point.
M. René Thissen (CDH). - Vous pourrez peut-être aussi me donner raison sur un autre point. Dans votre argumentation sur l'équilibre du budget, vous nous dites que la Belgique est finalement un bon élève : alors que la France, l'Allemagne, etc., se permettent un déficit, nous ne nous le permettons pas. À nos yeux, c'est une contrainte absolument incontournable, parce que l'Allemagne et la France n'ont pas une dette qui dépasse 100% du produit intérieur brut. Pour rester dans les critères de Maastricht, nous sommes obligés de maintenir un déficit égal à zéro. Nous ne pouvons donc pas nous prévaloir du fait que nous sommes de bons élèves en respectant tout simplement le minimum qui nous est demandé.
L'objectif était d'avoir un certain surplus, notamment pour alimenter le fonds de vieillissement et lui permettre de se développer ; ce ne sera pas le cas, parce que le surplus budgétaire qui devait normalement être de 6% - idéalement d'au moins 6,5% - pour engendrer le cercle vertueux des économies, ne pourra pas être maintenu. Avec 5,5%, on n'atteint pas l'objectif de créer les réserves nécessaires pour le fonds de vieillissement.
M. Paul Galand (ECOLO). - Je constate en tout cas que ce gouvernement a été vertueux sur l'équilibre budgétaire, et cela n'a pas toujours été le cas dans le passé.
M. Jacques D'Hooghe (CD&V). - La déclaration de politique générale n'est rien d'autre qu'un pamphlet préélectoral visant à tromper la population en affirmant que tout va bien dans notre pays depuis que le gouvernement arc-en-ciel est en place. Annoncer de moins bonnes nouvelles n'est pas agréable, mais nous sommes forcés de réagir.
M. Verhofstadt donne des informations délibérément trompeuses à la population. Il fixe le taux de croissance à 2,1%, par exemple, en précisant, pour se couvrir, que, si nécessaire, ce taux sera adapté. J'appelle cela du sans-gêne. Dans la presse économique du week-end dernier, l'OCDE tire la sonnette d'alarme en ce qui concerne l'économie mondiale. Les perspectives pour la zone euro ne sont pas encourageantes. La Deutsche Bank a réduit ses estimations de croissance de 0,5% à 0,1% pour cette année et prévoit 0,6% pour 2003.
Chez nous, les bureaux d'audit et les réviseurs d'entreprises froncent les sourcils en voyant tant d'entreprises s'enfoncer dans le rouge. En septembre 2002, l'Institut national de statistique a enregistré 19,1% de faillites en plus qu'à la même époque l'année dernière.
Néanmoins, M. Verhofstadt vient dire ici que tout va bien et que, si ce n'était pas le cas, on procéderait à de légères adaptations. Je me demande quelle sera la réaction des gens, notamment de la Sabena, qui ont perdu leur emploi. Ces propos doivent être qualifiés de « propagande électorale éhontée ».
Le premier ministre dit également avoir économisé 1,5 milliard d'euros au lieu du milliard prévu, et que l'on a dégagé de la marge pour de nouvelles initiatives. Je crains que ce soit comme pour le secteur horeca, auquel on a fait miroiter des promesses, mais qui n'a rien vu venir.
Le premier ministre a aussi déclaré ne pas avoir reporté les dossiers délicats jusqu'après les élections, comme par le passé ; c'est un aveu important. Il a récemment annoncé à la légère des engagements qui seront réalisés sous la prochaine législature. Le public apprendra autrement où ce demi-milliard a été économisé, pour autant que ce chiffre corresponde à la réalité. Nous demandons au gouvernement de nous éclairer sur cette économie de 0,5 milliard.
« Pour la première fois depuis longtemps, les dépenses en assurance maladie restent dans les limites budgétaires » dit notre cascadeur. Dans des notes de juillet 2002 destinées au Conseil général de l'INAMI, on peut lire que les dépassements pour 2001 s'élèvent à 14,6 milliards de francs et que la situation dans ce secteur est très préoccupante. Affirmer maintenant que les dépenses 2002 resteront dans les limites budgétaires est une déclaration gratuite qui ne se vérifiera qu'au printemps 2003. En outre, tous les spécialistes indiquent que le budget 2002 sera aussi insuffisant. Si les affirmations du premier ministre sont exactes, pourquoi cette subite augmentation de 6,5% en assurance maladie ?
Le premier ministre prétend aussi donner un ballon d'oxygène aux pouvoirs locaux. Il ne dit pas qu'il emprunte davantage de centimes additionnels, sans intérêts. On prélève à présent 6,7% au lieu de 6% antérieurement.
Le premier ministre déclare qu'on n'a jamais autant déposé de projets et de propositions de loi au Parlement. Hélas pour lui, c'est un blâme. Il admet qu'à quelques mois de la fin de la législature, il y a encore beaucoup de travail. Il a perdu beaucoup de temps les premières années. Pour le gouvernement, les paroles sont plus aisées que les actes.
M. Verhofstadt se conduit comme une personne qui offre une tournée générale dans un café et qui quitte l'établissement avant de payer l'addition. Les autres clients doivent alors payer eux-mêmes leur consommation.
M. Jan Steverlynck (CD&V). - Nous attendons depuis quatre ans la concrétisation des promesses du gouvernement. Il est clair que nos entrepreneurs ne doivent pas compter sur le VLD.
Les tracasseries administratives devaient diminuer d'un quart. Cette objectif est ramené à une très vague promesse. Dans sa déclaration, le premier ministre réduit la simplification administrative aux plans pour l'emploi. Ces derniers sont une bonne chose mais, pour le reste, rien ne change. Des études et enquêtes font apparaître que, dans certains secteurs, comme la construction, il est même question d'un alourdissement administratif.
Des études démontrent que les tracasseries administratives constituent une des raisons principales pour lesquelles les nouvelles entreprises sont si peu nombreuses en Belgique. La Fédération royale du notariat belge tire aussi la sonnette d'alarme. La communication électronique entre le notariat et les autorités ne prend pas forme.
Le grand patron de Belgacom, John Goossens, estime que la Belgique devient un pays sous-développé en matière de télécommunications, alors que le gouvernement ne cesse de claironner qu'il veut être un exemple sur le plan de l'administration électronique. Des plans sont établis, des études sont commandées, mais arriver à des résultats est une autre paire de manches.
Il n'existe pas de plan concret pour combler le retard dans ce domaine. L'accès à internet est encore limité à une minorité de la population. La dualité de la société devient une réalité. Si le gouvernement prône tant l'administration électronique, on devrait s'attendre à ce que des mesures concrètes favorisant l'usage des moyens de télécommunications par toutes les couches de la population figurent dans sa déclaration. Un projet avait été déposé en ce sens mais il a été reporté. Les discussions des propositions de lois de la majorité relatives à un avantage fiscal pour les employeurs en cas d'achat d'un PC pour les travailleurs sont au point mort. En conséquence, des parlementaires du VLD et du MR ont récemment déposé une motion au Sénat appelant le gouvernement à faire davantage en matière de soutien à l'informatique et à reprendre les 30 propositions de la Fondation Roi Baudouin.
Le secteur des télécommunications stagne parce que le gouvernement ne répond pas à son appel. Le ministre Reynders trouve les propositions intéressantes mais il ne se passe rien.
Dans les semaines qui ont précédé les discussions budgétaires, différents ministres et les présidents du MR et du PS avaient promis d'améliorer le statut des indépendants. Le gouvernement a décidé d'augmenter les pensions les plus basses, dont celles des indépendants, et d'étendre à six mois le congé de maternité pour les femmes indépendantes, une mesure favorable aux femmes entrepreneurs, que le CD&V défendait. Mais il n'y a aucune vision derrière ces mesures. Le gouvernement se limite à prendre des mesures purement ponctuelles, sans établir de plan pour le statut social des indépendants. Le secteur a besoin d'un plan pluriannuel assorti d'un calendrier très strict. Le ministre des Entreprises reconnaît que le statut des indépendants et celui des salariés doivent être harmonisés, mais on n'en voit aucune trace dans le budget.
Dans la déclaration de gouvernement, on peut lire que le gouvernement fait un premier pas en ce qui concerne la suppression de la pénalisation financière des indépendants qui prennent leur pension avant l'âge de 65 ans. C'est en fait un acte symbolique car, pour que cette pénalisation de 15% de la pension soit supprimée, il faut avoir travaillé 45 ans comme indépendant. Qui, à l'âge de 60 ans, a travaillé pendant 45 ans ?
En outre, il n'est pas certain que ce qui est annoncé dans la déclaration du gouvernement se réalise effectivement. Le président du PS, M. Di Rupo, a en effet déclaré qu'un débat devait encore être mené en profondeur sur les mesures relatives aux indépendants et que l'on ne pouvait prendre des mesures dans la précipitation pendant les discussions budgétaires.
Il en va ainsi depuis l'entrée en fonction du gouvernement arc-en-ciel. Des études sont réalisées, des plans sont établis, des promesses sont faites, mais toujours dans un autre emballage. En ce qui concerne le statut social des indépendants, nous n'avons jamais vu le plan d'action promis à maintes reprises par le ministre Daems.
Nous constatons la même chose avec les états généraux de l'horeca. Beaucoup de bruit pour rien, pour un secteur qui remplit bien plus qu'une simple fonction économique.
Rien n'a été fait pour augmenter la rentabilité du secteur. La déductibilité des frais de restaurant n'a pas été portée à 100% et il n'y a pas de diminution de TVA en perspective.
L'horeca est déçu. Le texte que j'ai sous les yeux montre clairement que le budget fédéral ridiculise une fois de plus le secteur horeca. La rentabilité n'est pas améliorée et le secteur ne reçoit pas de ballon d'oxygène.
C'est encore plus grave que cela. Ce gouvernement réussit même à déposer des projets de lois au conseil des ministres qui entraînent une diminution de la pension.
Chacun sait que le gouvernement aime communiquer, mais il ose également faire des promesses qui ne se réaliseront jamais. À propos de l'avant-projet de loi relatif aux pensions complémentaires des indépendants, le ministre Daems persiste à annoncer, notamment sur son propre site internet, que les indépendants devront payer plus de cotisations pour la pension complémentaire, alors qu'il n'en est pas question dans le projet de loi soumis actuellement au Conseil d'État. Voilà la réalité.
Le gouvernement ose même proclamer des contre-vérités. C'est ainsi que le guichet unique pour entreprise serait une réalisation concrète du gouvernement électronique. Le Premier n'hésite pas à rejeter la responsabilité du retard sur les indépendants et sur les entrepreneurs alors qu'aucun projet de loi n'a encore été déposé. C'est aussi la réalité.
Ce gouvernement, dont les libéraux font partie, ne crée absolument pas un climat propice à l'entreprenariat. C'est pourtant essentiel dans cette période économique difficile.
Il y a un an, j'ai déjà souligné que le gouvernement faisait très peu de choses pour stimuler l'entreprenariat et maintenant, certains membres du VLD pensent comme moi.
Le députés du VLD proposent diverses mesures. Je n'en citerai qu'une. Le VLD préconise un plan par étapes assorti d'un calendrier strict et d'un financement réaliste en ce qui concerne le statut social des indépendants. Ces éléments sont cependant totalement absents de la déclaration gouvernementale du 8 octobre 2002. Un plan par étapes procure la sécurité aux entrepreneurs. Le CD&V préconise une amélioration de la protection sociale totale des indépendants tant en ce qui concerne le statut social obligatoire que les assurances complémentaires. Les discriminations entre salariés et indépendants au niveau du statut social doivent être éliminées, ce qui nécessite la mise en oeuvre d'un plan pluriannuel et d'un plan de financement adéquat.
Un plan pluriannuel a été annoncé mais, apparemment, le gouvernement n'est pas arrivé à un accord en ce qui concerne les discriminations à supprimer.
Où sont les mesures destinées à redresser l'économie ? La méfiance augmente. Les nouveaux chiffres font état d'une recrudescence du nombre de faillites. Le gouvernement ne doit-il pas contribuer à créer un climat propice à l'entreprenariat ? Cela ne profite pas uniquement à l'entreprise. Nos voisins du sud l'ont mieux compris que nous.
Le premier ministre français, Jean-Pierre Raffarin, a présenté un large éventail de mesures en faveur des petites et moyennes entreprises. En revanche, notre gouvernement pratique une information sélective. Il annonce que la Belgique est le quatrième pays le plus prospère au monde. Une telle attitude témoigne d'arrogance et d'autosatisfaction.
Malgré la mauvaise conjoncture en 2003, la majorité arc-en-ciel veut continuer son show des bonnes nouvelles. Le flux de propagande favorable doit être maintenu coûte que coûte malgré les protestations de plus en plus nombreuses fusant de part et d'autres. Je me réfère aux propos de Marc Nijs de la CCSP au sujet du plan Coperfin et à ceux de la Fédération des notaires en ce qui concerne la communication électronique. Entre-temps, le gouvernement s'obstine. Il fuit la réalité et crée son propre monde dans lequel les personnes qui ont des objections fondamentales à formuler sont considérées comme étant des négativistes aigris.
Comment doivent réagir les indépendants en incapacité de travail et réduits dès lors à vivre, avec toute leur famille, en dessous du seuil de pauvreté avec un revenu qui n'est pas plus élevé que le minimex ?
Nous attendons d'un gouvernement une politique constructive basée sur la réalité, une politique qui essaye d'offrir la sécurité en période de basse conjoncture. C'est pourquoi le maître mot du CD&V est sécurité : sécurité juridique, sécurité des revenus et sécurité d'emploi. C'est ce que veulent et attendent les gens.
Mme Mia De Schamphelaere (CD&V). - J'ai eu récemment l'occasion d'assister à un exposé d'un bureau de recherche et de communication réputé sur le style de communication du gouvernement. Le bureau comparait le style de communication du gouvernement à celui utilisé dans un village de vacances. Dans un village de vacances, certains problèmes peuvent se poser - principalement d'ordre organisationnel - mais aucun n'est grave. Tout peut être résolu, même très facilement. C'est sur cette base que j'ai écouté la déclaration gouvernementale. En effet, selon le gouvernement, il n'y a pas vraiment de problèmes sérieux. Celui qui en doute est un pisse-vinaigre. Tout va bien dans le village de vacances « Belgique ».
Qu'en est-il de la réalité, de tous ceux qui ne partagent pas ce sentiment ? Sont-ils les aigris ?
Qu'en est-il des travailleurs d'Alcatel, de Brepols, de Philips, de Seghers, de Delsey Airlines dont l'emploi est menacé ? Qu'en est-il des petits épargnants qui voient leurs maigres économies fondre comme neige au soleil suite à la crise financière ? Sont-ce là les aigris ?
Qu'en est-il des victimes de l'augmentation de la violence psychique à la maison, au travail et dans la circulation ? Qu'en est-il du nombre croissant de personnes seules dans la vie ? Qu'en est-il du nombre croissant de personnes dépendantes de l'alcool, des médicaments et des drogues légales ou autres ? Même nos enfants se voient administrer de la rilatine pour maîtriser leur stress naissant. Qu'en est-il du désespoir des suicidaires ? La Belgique est en tête des chiffres en ce qui concerne les suicides.
Effectivement, tout va bien en Belgique. Nous avons bâti un État social et nous avons un des meilleurs systèmes de sécurité sociale au monde. Nos citoyens ont la plus longue espérance de vie au monde, mais une longue vie ne signifie pas nécessairement une vie longue et heureuse.
Il n'existe pas de méthodologie politique du bonheur. La politique doit offrir des possibilités à l'initiative indépendante, à l'entreprenariat et à la créativité. Il faut prendre la concertation sociale au sérieux et confier des responsabilités aux acteurs sociaux. Le statut de bénévole doit enfin être réalisé.
La politique doit également donner des chances à une vie familiale. L'État social actif n'est pas réalisé. La pression du travail n'est pas répartie. Notre pays connaît le taux d'activité le plus haut parmi la tranche d'âge allant de 25 à 40 ans et le plus bas chez les personnes de plus de 55 ans. Bâtir une carrière, acquérir un logement, élever des enfants et entretenir le ménage, tout doit être mené de front. On n'a plus le temps de vivre et d'être simplement ensemble. Nous voulons que chaque travailleur puisse combiner facilement la vie de famille et le travail.
La politique doit inspirer la confiance. De nombreuses études sociologiques montrent que la confiance diminue dans notre société. Le capital social s'effrite. Une nouvelle salve de beaux discours du gouvernement n'y changera rien. Quelle confiance inspire une autorité qui, en une nuit, parvient à économiser un demi-million d'euros ou qui, dans une commission parlementaire compétente, n'est pas capable de donner les chiffres de la criminalité mais qui peut, tout à coup, les fournir lors d'un débat médiatisé ?
On ne peut plus se fier à aucune communication. Qu'il s'agisse de communications du gouvernement, de déclarations gouvernementales ou ministérielles, les citoyens sont toujours sur leurs gardes. De nombreuses promesses ont été faites aux indépendants, au secteur de l'horeca et aux allocataires sociaux, mais très peu ont été tenues.
Aujourd'hui, la politique est un combat entre styles de communication. Le style du village de vacances opposé à celui des travailleurs sérieux ou à celui des aigris. Qui ose entamer le vrai dialogue sur le malaise et l'aliénation au sein de notre société ? Qui ose parler franchement de l'isolement, du découragement et de l'indifférence de tant de gens ? Nous avons besoin d'un gouvernement qui parle de la réalité et qui offre une certitude, d'un gouvernement qui communique avec parcimonie mais avec force. Voilà ce que nous attendons avec impatience.
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Ma présidente de groupe, Mme Leduc, a adopté le ton qu'il fallait.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Je pensais que M. Van Quickenborne avait changé de parti. Il a visiblement aussi changé de groupe.
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Il s'est effectivement produit une rupture de tendance dans notre pays. Précédemment, nous comparions toujours notre pays aux Pays-Bas. Aujourd'hui, nous constatons que notre pays se porte mieux.
Notre situation s'améliore également en ce qui concerne la pression parafiscale. Pour ce qui est de la dette publique, nous devrions passer en dessous de la barre des 100% en 2003.
En ce qui concerne la prospérité et le bien-être, nous sommes à la quatrième place. En matière de déficit budgétaire, nous faisons un peu mieux que nos voisins. Notre pays sert de plus en plus d'exemple aux autres pays. Les indices mondiaux d'institutions indépendantes telle que l'OCDE nous encouragent. J'en suis fier.
M. René Thissen (CDH). - Vous ne tenez pas vraiment le même discours qu'en début de législature !
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Naturellement. Je constate qu'on a réalisé beaucoup de choses.
La situation de notre pays n'est pas devenue plus simple. L'économie mondiale se dégrade. Notre gouvernement le constate également. Il ne dit pas « Olé, olé » comme certains veulent le prétendent. Notre pays n'échappe pas à la dégradation de l'économie mondiale. La question est de savoir comment il faut réagir. Soit comme Mme De Schamphelaere qui a donné l'image d'un pays où l'isolement, la misère, la méfiance l'emportent ...
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Que dit le professeur Elchardus ?
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Le Pr Mark Elchardus n'est pas une référence pour le gouvernement. Par rapport à 1998, la confiance dans le parlement et le gouvernement a d'ailleurs crû. Regardez les chiffres. Ils sont certes encore alarmants mais ils augmentent. En vérité, le Roi jouit encore d'une meilleure note de confiance que le parlement mais il s'agit d'un autre débat.
Je vous le dis : le gouvernement ne laisse pas tomber les bras. Il ne passe pas son temps à se plaindre, il prend des initiatives mais il est en même temps conscient de ses responsabilités. Il veille à ne pas avoir de déficit budgétaire et travaille activement à la réduction de la dette.
Le débat d'aujourd'hui est plus qu'intéressant, les remarques de notre collègue Vandenberghe fournissent matière à discussion. Je reviendrai sur certains éléments. Cependant, j'ai des questions sur les inconsistances de certaines des observations de notre collègue et de son parti. Hier soir, M. Leterme, à la Chambre, estimait qu'il aurait mieux valu ne pas décider d'une baisse des impôts durant la période de haute conjoncture de 1999-2000. Pourtant, cette baisse d'impôts n'atteint son plein effet qu'aujourd'hui, au bon moment donc : le pouvoir d'achat des personnes augmente au moment même où l'économie faiblit.
Hier soir, à la Chambre, interrogé sur la manière dont il ferait des économies, le chef du groupe CD&V n'a avancé qu'une seule mesure : diminuer encore les cabinets ministériels. Ce n'est pas avec cette économie de un à deux milliards de francs belges que nous nous en sortirons.
M. Vandenberghe parle sans cesse de bulles de savon et cite à ce propos l'affaire Lernout & Hauspie. C'est dangereux car Lernout & Hauspie fut créée et soutenue lors de la précédente législature et des membres de son propre parti siégeaient au Conseil d'administration. Pour moi, il s'agit d'un mauvais exemple si l'on veut illustrer l'échec de la politique gouvernementale.
J'ai cependant encore quelques observations à faire sur la déclaration gouvernementale auxquelles le gouvernement pourra peut-être me répondre aujourd'hui.
Trois mesures ont été proposées en faveur du secteur horeca. La première était un assouplissement sur le plan du travail saisonnier. C'est en voie de réalisation. Le gouvernement promet en tout cas de déposer un projet de loi à ce sujet avant la fin de l'année. L'instauration d'un taux de TVA de 6% était la deuxième mesure. Nous savons cependant que cela demande l'accord de l'Union européenne et que l'Allemagne s'y oppose. La troisième mesure, à savoir l'augmentation de la déductibilité des frais de restaurant, n'est pas réalisée. Je demande donc au gouvernement de faire quelque chose pour redresser la situation actuelle qui est injuste. Celui qui se rend au restaurant à l'étranger peut déduire 100% de sa note, alors que seuls 50% peuvent être déduits s'il dîne dans le pays. La suppression de cette inégalité constituerait un progrès.
Nous devons être honnêtes et reconnaître qu'il subsiste un problème de chômage, surtout en Wallonie. Le chômage structurel en Wallonie et à Bruxelles reste trop élevé. Si nous ne réussissons pas à infléchir cette tendance, nous devrons peut-être aboutir à la conclusion qu'il est nécessaire de régionaliser la politique du marché du travail.
Le chômage en Flandre est conjoncturel et atteint 7,6% en septembre 2002. C'est inférieur à la moyenne européenne et directement lié aux fluctuations de la situation économique. Cela ne signifie cependant pas que nous devons nous reposer sur nos lauriers et ne pas poursuivre l'allégement des charges sociales alors qu'il existe des marges budgétaires pour le faire. Le taux d'activité s'améliore mais il faudra continuer à briser le tabou sur le travail des plus âgés.
Monsieur le secrétaire d'État, je me réjouis de vous voir parmi nous car ma dernière remarque porte sur le fonds Kyoto. Un fonds Kyoto va donc être créé, des moyens seront libérés pour l'achat de droits d'émission de CO2. L'opposition, spécialement M. Thissen, émet des doutes sur la nécessité de l'achat de tels droits. Par contre, le VLD a la plus entière confiance dans cette politique. J'espère que le gouvernement exécutera ses plans.
Il y a bien un problème pourtant. L'émission de CO2 doit baisser de 7,5% par rapport à 1990. Nous avons appris récemment qu'elle avait au contraire crû de 13,5%. Nous sommes pour l'instant à quelque 20% au-dessus de la norme à respecter. Le gouvernement a l'intention de renoncer totalement à l'énergie nucléaire. Le VLD a des doutes à ce sujet mais l'accord intervenu au sein du gouvernement doit être respecté. Nous aimerions néanmoins demander au secrétaire d'État d'élaborer un plan concret d'accompagnement de cette sortie du nucléaire dans lequel il sera tenu compte de la consommation d'énergie. Des sources d'énergie de rechange doivent être trouvées.
Je veux encore dire mon inquiétude à propos d'une mesure décidée dans le plan socio-économique du 18 janvier 2002 auquel s'est référé M. Thissen, à savoir le problème des options d'achat d'actions. Les règles concernant ces options ont été établies par le précédent gouvernement en 1998. Il fut alors décidé de lever un impôt sur ces options au moment de leur attribution. J'ai rencontré récemment des personnes qui doivent s'acquitter chaque année de 20.000 Euros d'impôt sur leur options d'achat. Au point 14 du plan en 21 points, le gouvernement avait promis de changer la loi de 1998 et de laisser le choix entre une imposition au moment de attribution des options ou au moment de l'exercice de l'option. Ce que le gouvernement a décidé actuellement ne me semble pas clair. Je ne vois pas bien non plus ce qui a été décidé pour réaliser ce qui figure au point 18 du plan en 21 points, à savoir la déduction fiscale pour les placements éthiques.
M. René Thissen (CDH). - Cela fait partie des 18 points sur 21 qui ne sont pas encore mis en oeuvre.
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Quatorze ou quinze points sont réalisés. J'espère que les autres le seront aussi.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Pourquoi n'avez vous pas signé notre proposition de loi ? Est-ce parce que vous appartenez maintenant à un parti de la majorité ?
M. Vincent Van Quickenborne (VU-ID). - Vous me l'avez présentée mais vous ne m'avez pas donné l'occasion de la cosigner : elle était déjà imprimée. Je verrai ce qu'elle contient quand nous en discuterons en commission.
Je suis sérieusement préoccupé de l'attitude de notre pays et de celle des États-Unis envers l'Irak, mais je suis peut-être encore plus inquiet quant à la cohérence de l'attitude du gouvernement.
Dans la déclaration gouvernementale on lit : « Nous voulons que la Communauté internationale épuise d'abord toutes les voies de recours possibles. C'est pour cette raison que les inspecteurs en désarmement des Nations Unies doivent pouvoir effectuer leur mission sans entraves et de manière inconditionnelle. Cette voie peut également conduire à un engagement militaire, mais nous devons tout mettre en oeuvre pour éviter la confrontation. Et nous pouvons éviter cela si l'Europe parle d'une voix. »
Nous y lisons encore : « Saddam Hussein dispose certainement d'armes chimiques et biologiques. » Hélas, le ministre des Affaires étrangères a dû retirer cette dernière phrase hier car il jugeait évident que la Belgique ne possède pas de preuves pour étayer une telle accusation. L'Institut des Études stratégiques du Royaume-Uni auquel le ministre a fait référence parle de manière constante d'une probabilité, d'une vraisemblance, mais non d'une certitude à ce sujet.
Reste à savoir quelle sera l'attitude de notre pays si une offensive est décidée sous un éventuel mandat des Nations Unies. Les paroles du ministre des Affaires étrangères prononcées hier sont humiliantes. Il a dit que pour ce qui le concerne, son appui sera total. Cela signifie donc qu'il y aura un appui mais qu'on ne doit plus discuter que des moyens à mettre en oeuvre.
Par ailleurs, j'entends les députés d'Agalev dire que notre pays n'appuiera aucune attaque et qu'il doit rester neutre dans ce conflit. Ils suivent en cela la position allemande qui reste inchangée. Je crains que le langage sibyllin du gouvernement ne compromette son avenir. Il eut mieux valu organiser un débat entre la majorité et l'opposition au parlement - et pourquoi pas au Sénat - pour définir une prise de position de sorte que chacun sache ce que veulent les autres et que la majorité essaie de se définir une ligne politique unique.
Quatre questions doivent être résolues pour établir une position claire : existe-t-il une menace immédiate de provenant d'Irak ? Comment s'explique l'actuelle attitude américaine vis-à-vis de l'Irak ? Quelles sont les conséquences pour le peuple irakien ? Quelles sont les conditions et les exigences que l'Europe et la Belgique peuvent imposer ?
Y a-t-il une menace directe de l'Irak ? Le gouvernement déclare que Saddam Hussein est un terrible dictateur. C'est vrai. Mais la question est de savoir si la situation en Irak constitue une menace pour notre pays, notre région, les États-Unis ou la communauté internationale. Les preuves apportées pour étayer l'existence d'une menace sont pour l'instant insatisfaisantes. L'Institut international d'études stratégiques ne parle avec constance que d'une menace vraisemblable. Le dossier présenté par le gouvernement britannique le 24 septembre 2002 ne donne pas beaucoup d'éléments neufs. Hans von Sponeck, qui fut commissaire des Nations Unies en Irak en 1998-1999, a eu l'occasion de visiter cet été deux des sites mis en cause dans les études. Il en ressort que ces sites ont été détruits. Peut-on encore parler d'une menace ?
Il est donc inadmissible que les États-Unis orchestrent une hystérie de masse et engagent une guerre psychologique. Notre pays peut-il s'associer à cela ?
Quelle est l'explication de l'attitude américaine vis-à-vis de l'Irak ? Selon les paroles mêmes d'un important sénateur républicain prononcées durant les auditions de juillet-août, il est clair que cette guerre est en premier lieu un combat pour les intérêts pétroliers. M. Richard Lugar disait donc : « ...we are going to run the oil business. We are going to run it well...we are going to make money; and it's going to help pay for the rehabilitation of Iraq because there is money there! » De surcroît, l'attitude de l'actuel gouvernement américain s'explique par la présence en son sein d'individus qui ont joué un rôle important dans la première guerre du Golfe. La politique de contrôle à partir de l'intérieur instaurée en son temps par M. Clinton est aujourd'hui remplacée par un discours sur le changement de régime, sur le changement par l'occupation.
L'attitude du gouvernement américain est contestable et doit nous inciter à réfléchir.
Il est frappant que dans tout ce débat sur l'Irak, nous faisons à peine référence à nos propres résolutions. Comme vous le savez, le 18 avril 2002 la Chambre a adopté à une très large majorité la résolution 1708 qui plaide sans restriction pour la levée de l'embargo contre l'Irak et l'élimination complète des armes atomiques au Moyen-Orient. De cela, nous n'avons quasiment rien entendu ici et je le déplore profondément.
Monsieur Vandenberghe, nous lisons nous aussi parfois les journaux étrangers. Dans l'International Herald Tribune, Nicholas Kristof, un journaliste du New York Times qui fait autorité, a écrit : « Il est exact que les Irakiens considèrent Saddam Hussein comme un terrible dictateur mais la haine que le monde arabe développe aujourd'hui contre les États-Unis est dix fois plus forte. » Tout résulte directement de la politique de deux poids deux mesures menée dans cette région, une politique inacceptable pour le monde arabe. Les résolutions des Nations Unies doivent être respectées par tous.
Il nous faut ensuite nous interroger sur ce que la Belgique et l'Union européenne peuvent faire contre la menace de conflit. Nous devons constater qu'il est impossible d'aboutir à un point de vue européen unique. Dans leur attitude devant la menace de guerre, les Pays-Bas, l'Espagne et l'Italie prennent une tout autre voie que la France ou l'Allemagne. Il reste à savoir quelle attitude doit adopter la Belgique. À mon avis, nous devrions avoir le courage de revenir aux résolutions que nous avons adoptées. Nous devons oser prendre explicitement une autre voie que celle tracée par les États-Unis et la Grande Bretagne.
La question est particulièrement importante car la nouvelle résolution présentée par les États-Unis et la Grande Bretagne n'est qu'une provocation. Ils veulent mettre le régime irakien dans une situation telle qu'il ne pourra en découler que la guerre. J'estime que notre pays doit faire preuve de modération et de prudence. Dans un discours prononcé récemment devant la première Chambre à La Haye, le président du Sénat avait choisi un bon point de départ.
Il est illusoire de penser que la colonisation du Moyen Orient par des interventions arbitraires, le changement des autorités, l'appui financier sélectif à des gouvernements corrompus, peut ramener la paix dans cette région. Dans son livre « Le Choc des civilisations », Samuel Huntington écrit que le monde est constitué de civilisations et de cultures différentes qui ont des rapports mutuels tendus. Une politique mondiale juste doit précisément consister à conserver cet équilibre précaire autant que possible grâce au maintien permanent d'une communication via le commerce et les échanges.
En ce sens la mondialisation est une victoire pour la paix mondiale. L'attitude que notre pays et l'Occident ont adoptée vis-à-vis de la Chine est un exemple à suivre.
L'adhésion à vrai dire tardive de ce pays à l'Organisation mondiale du commerce prévient la guerre et les conflits armés.
Nous restons soucieux du non-respect des droits humains en Chine mais ce n'est que lorsqu'on ouvre un pays au monde extérieur que les habitants peuvent développer des idées plus critiques et plus riches. Regardez donc les effets de la politique que l'Europe mène aujourd'hui, entre autres vis-à-vis de la Corée du Nord.
La démocratie au sens étroit de tenue régulière d'élections peut alors éventuellement apparaître. Le modernisme apporte la stabilité sans qu'une occidentalisation soit pour autant nécessaire.
Je pense que l'Europe et notre pays doivent prendre une autre voie que celle des États-Unis. Le fossé qui s'est créé entre nos deux continents depuis le 11 septembre 2001 s'est hélas élargi. Les Américains considèrent leur nation comme la clé de voûte tandis que les habitants du continent européen acceptent le droit international et la souveraineté partagée.
L'augmentation de la religiosité au États-Unis, qui y est un facteur important en politique, explique pourquoi les ennemis n'y sont pas seulement désignés comme une menace pour la sécurité nationale mais aussi comme une « source du mal ». Enfin, il semble que les Américains aient une prédilection pour la résolution des conflits les armes à la main. La diplomatie nous convient mieux.
La nouvelle voie européenne se présente différemment. Nous ne pouvons choisir de défendre nos intérêts à courte vue, nous devons faire un effort réel pour donner une chance à l'établissement de bonnes relations avec le Moyen Orient afin de combattre la pauvreté par des accords de commerce et pour libérer les citoyens des résidus de la politique coloniale. Il s'agit donc de la difficile recherche d'un équilibre entre les droits humains et le respect des autres civilisations. Mais n'abusons pas des mots « démocratie » et « droit humains » pour dissimuler d'autres desseins : le contrôle et l'impérialisme.
Si on veut une vraie paix au Moyen Orient, avec le maintien de l'État d'Israël, il n'y a qu'une seule voie : appliquer une politique « un poids, une mesure ». Cela se traduit par le respect des conventions internationales imposées par les Nations Unies. Cette règle vaut autant pour le président de l'Irak que pour le premier ministre israélien ou le roi de Jordanie. Le droit n'a pas de couleur politique et il n'est certainement pas là que pour le plus fort.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Dans son introduction, le premier ministre a fièrement fait référence à la bonne position de notre pays dans le Human Development Index du PNUD. Je rappelle les quatre indicateurs utilisés pour l'établissement de ce classement : l'espérance de vie à la naissance, le taux d'alphabétisation des adultes, le taux de scolarisation général et le PNB par habitant. À l'échelon international, ces indicateurs sont indubitablement de véritables critères de développement. Sont-ils cependant aussi des critères de progrès et de qualité de la politique nationale du pays ? Je n'en suis pas certaine. Lors d'un congrès du CD&V voici quelques semaines, nous avons tenté d'élaborer un nouveau critère de bonne gestion et nous avons adopté une résolution proposant un nouvel index.
Nous pensons que notre pays a besoin d'un tel indice mesurant la qualité réelle de la vie. Il requiert un nouvel instrument de mesure qui indique les progrès année après année. Cela signifie qu'on doit réfléchir aux indicateurs qui doivent être utilisés. Les indicateurs importants d'une société où l'on se sent bien sont par exemple la combinaison du travail et de la famille aussi bien pour les femmes que pour les hommes, les soins pour les malades et les personnes âgées - pensez aux listes d'attente -, le travail social volontaire orienté, la participation des enfants dans notre société et le sentiment de sécurité.
Si nous utilisions le sentiment de qualité de la vie comme nouveau critère, je ne suis pas sûre que nous obtiendrions un score positif. L'évolution négative est notamment la conséquence de l'introduction du crédit-temps qui doit remplacer l'interruption de carrière. Pour améliorer la qualité de la vie, on doit aussi tenir compte de paramètres essentiels tels que le doublement du congé parental, le congé d'allaitement, la prolongation du crédit-temps à au moins trois ans, une meilleure protection de la maternité des indépendantes, un cumul illimité des pensions de survie des veufs et des veuves ou le statut des aides à domicile. Ce dernier point fait l'objet d'une proposition de loi déposée par Mme De Schamphelaere. Ces dernières années, nous avons déposé nombre de propositions relatives à cette matière. Bien qu'elles auraient contribué à une amélioration réelle de la qualité de la vie, la majorité ne les a pas acceptées.
Nous regrettons que la déclaration gouvernementale et les engagements financiers qui y sont liés et qui sont repris dans le budget n'aient pas tenu compte des besoins des groupes-cibles.
Peu importe que la Belgique obtienne un meilleur résultat dans le Human Development Index, je crains que la qualité de vie des moins valides dans notre pays ne se soit pas améliorée. Sous le gouvernement Dehaene, les allocations des moins valides ont diminué de 1,8% par rapport aux salaires bruts. Nous constatons entre 1998 et 2000 une diminution de 4,6% pour les employés et de 2,9% pour les indépendants. Je crains que ces personnes ne se satisfassent pas des déclarations triomphalistes du premier ministre sur le Human Development Index. La qualité de la vie ne s'est nullement améliorée. Malgré les efforts importants en matière de soins de santé en général, la déclaration gouvernementale ne contient pas le moindre engagement en faveur de ce groupe-cible. Une gestion moderne requiert que les engagements se basent sur la situation concrète des groupes-cibles.
En outre, je regrette que le gouvernement ne s'occupe pas davantage des enfants. Il ne tient absolument pas compte des conclusions du Sommet qui a été consacré à New York aux enfants. La première recommandation formulée par le forum parlementaire est que chaque note budgétaire doit être accompagnée d'une note consacrée aux enfants, mais où est-elle ? Pour le CD&V, cette disposition doit être consacrée dans la loi. Nous avons déposé une proposition visant à une prise en compte des droits des enfants lors de l'élaboration du budget. Ce principe peut être étendu aux groupes de notre société.
Le premier ministre a déclaré à juste titre que la protection des périodes de maternité des indépendantes doit être améliorée. La durée du congé de maternité et le montant des allocations doivent être doublés. Cela correspond au contenu de la proposition que j'ai déposée au Sénat et qui a été adoptée lors du congrès du CD&V.
Mais cela ne suffit pas. De nombreuses mesures d'accompagnement s'imposent. Nous avons donc également déposé une proposition visant à introduire un revenu de remplacement durant la maternité et après l'accouchement. Nous proposons aussi qu'un « entrepreneur volant » puisse remplacer les indépendantes. Les mesures symboliques ne suffisent pas. Dans sa déclaration, le gouvernement ne s'occupe que du statut des conjoints aidants. Or, l'entreprenariat féminin doit devenir une priorité politique. Une culture d'entreprise favorable aux femmes doit voir le jour. Les entrepreneuses doivent pouvoir compter sur le même financement que les hommes. Une étude menée l'an dernier par la banque AMRO montre qu'elles ne bénéficient toujours pas d'un accès égal au crédit. Le statut social des indépendantes et des entrepreneuses doit être amélioré. Une attention particulière doit également être accordée aux femmes travaillant dans le secteur agraire. Où en est la représentation des femmes dans les conseils d'administration des entreprises économiques ? Notre proposition visant à introduire un quota n'a pas été soutenue par la majorité. Une étude menée auprès des micro-entrepreneurs du sud du pays montre que 80 à 90% des projets sont exclusivement masculins.
Nous réclamons un plus grand équilibre. Il faut accorder un soutien plus important à la participation d'entrepreneuses au commerce extérieur et aux missions. Enfin, des statistiques plus étendues sont nécessaires. Je remettrai au premier ministre notre plan politique global consacré à cette matière. Peut-être pourra-t-il encore, au cours des 23 semaines qui lui restent, oeuvrer à la promotion de l'entreprenariat féminin.
Le gouvernement a des ambitions internationales. J'espère que ses membres ne se contenteront pas de voyager. Notre chef de groupe s'est demandé pourquoi, depuis que le gouvernement actuel est au pouvoir, le nombre de voyages VIP à l'étranger a connu une inflation soudaine. On n'a pas répondu à sa question. Faire des grandes déclarations comme à Johannesburg ne sert à rien. Il est plus important de concrétiser ses engagements.
Nous constatons que le secrétaire d'État n'a pas reçu les 100 millions supplémentaires qui lui avaient été promis. Le budget de la coopération au développement augmente de 66 millions et passe à 782 millions. Cela représente une croissance de 9%. C'est certainement un pas dans la bonne direction. Malheureusement, le gouvernement ne peut tenir ses promesses récentes et augmenter le budget de 100 millions en 2003. La croissance promise en 2000 par le gouvernement ne devient effective que deux ans plus tard.
Je note que le cabinet de la coopération au développement garantit que les 66 millions supplémentaires sont exclusivement destinés à la coopération. Le ministre du Budget avait auparavant proposé certains artifices afin d'augmenter en apparence le budget de 100 millions. Le secrétaire d'État n'a heureusement pas cédé.
Certaines personnes veulent engager les moyens correctement, d'autres par le biais d'artifices. La politique africaine du gouvernement l'illustre également. Il veut contribuer à la paix et au respect des droits de l'homme dans la région des grands lacs. En même temps, il accorde un soutien pour le moins suspect à des projets d'investissements en poussant le Ducroire à donner sa garantie.
Le premier ministre dit à juste titre vouloir inscrire dans la loi la norme de 0,7% en faveur de la coopération au développement. Le CD&V a déposé une proposition en ce sens.
J'éprouve les plus grands doutes face à la culture politique du gouvernement. Je crains aussi que la réponse du premier ministre ne nous satisfasse pas. Sa déclaration n'offre à notre pays aucun projet portant une vision de l'avenir.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Tout d'abord, je tiens à m'excuser de n'avoir pu assister qu'à la fin du débat. J'avais d'autres rendez-vous à mon agenda. Ce matin, j'ai assisté à une réunion avec des députés de l'opposition et de la majorité pour trouver un accord sur les pensions alimentaires et le fonds permettant de les assurer.
Comme vous le savez, les députés des groupes démocratiques ont abordé cette question dans une proposition de loi. Chacun connaît le problème. Trop souvent la personne qui doit payer la pension ne la verse pas. Une réglementation permet aux CPAS de verser des avances mais ce système est limité aux enfants et ne vaut pas pour les conjoints et les conjointes. Nous avons donc élaboré un système sans recourir à un fonds budgétaire. Toute ma vie je me suis battu contre ces fonds et j'en ai supprimé des centaines quand j'étais ministre du Budget. Je trouvais qu'en créer un nouveau n'était pas une bonne idée.
Le CPAS octroiera toujours des avances au conjoint ou à la conjointe qui n'atteint pas un certain plafond de revenus mais le ministère des Finances les récupérera. Le CPAS ne s'en occupera donc plus mais ceci n'aura que peu d'effets. Aujourd'hui, sur les 280 millions de francs d'avances, 8 millions seulement sont récupérés. À l'avenir, ce sera le travail du fisc. Un dossier sera envoyé au ministère des Finances pour toute personne n'ayant pas droit à une avance.
Ce matin, j'avais aussi une concertation sociale. Je l'ai immédiatement quittée car le Parlement est bien entendu plus important. J'avais le consentement de MM. Cortebeeck, Vansteenkiste et Peeters. Je suppose donc que chacun était d'accord.
Mes collègues ici présents ce matin et cet après-midi m'ont remis une liste des différentes remarques qui ont été formulées et j'ai pu lire certaines interventions de ce matin, comme celle de M. Vandenberghe. Cela prouve que le Sénat est une institution efficace.
Je n'ai pas l'intention d'aborder tous les points mais bien de réfuter les critiques importantes qui parfois me font froncer les sourcils.
Je viens d'entendre une critique portant sur le budget de la coopération au développement qui augmentera de 9,3% en 2003. La proposition initiale prévoyait une croissance de 14% mais en ces temps financièrement difficiles nous devons réaliser des économies dans différents départements et nous n'avons pu atteindre ces 14%. Nous avons par contre inscrit les 9,3% dans la loi de manière à pouvoir, comme promis, respecter la norme de 0,7% en 2010.
En 2003, le budget de la Coopération au Développement représentera plus de 0,40% du PIB. À l'entrée en fonctions du gouvernement, ce budget n'en représentait que 0,20% - je n'accepte donc pas les critiques qui viennent d'être formulées à cet égard - contre 0,38% à l'heure actuelle et, je l'espère, 0,40% à la fin de cette année. La progression aurait peut-être pu être plus rapide mais nous avons en tout cas inversé la tendance systématique à la baisse que nous avons vécue des années durant.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Vous transformez mes propos !
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Nullement, c'est bien ce que vous avez dit.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - C'est une avancée mais le gouvernement n'est pas fiable : il promet de suivre un certain chemin puis il s'en écarte.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Qui est le plus digne de confiance, celui qui, comme votre parti, diminue le budget d'année en année ou ce gouvernement qui l'augmente ?
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Ce propos démagogique est indigne d'un premier ministre. Vous savez parfaitement que sous la législature précédente, on a oeuvré à la réorganisation de la Coopération au développement.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - M. Moreels m'a en effet raconté comment il a été traité sous le gouvernement précédent et notamment par le CVP. Nous pourrions l'inviter à venir nous l'expliquer.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Les accords conclus en coulisse ne sont pas les plus beau fleurons de la politique. Je ne veux pas entrer dans ce type de débat.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - C'est pourtant ce que vous êtes en train de faire !
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Pas du tout. Mon intervention porte sur les faits. La réorganisation était entamée mais votre gouvernement l'a remise en question en ouvrant le débat sur la régionalisation sans en expliquer ni l'impact ni les modalités, ce qui a eu pour effet de paralyser les gens du terrain.
Je suis disposée à débattre mais dans la correction et la transparence et non lors de séances nocturnes qui aboutissent à la conclusion d'accords dont le résultat est trois années d'instabilité. C'est ainsi que vous gérez la Coopération.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Ce que vous dites ne correspond pas du tout à la réalité du terrain. Les nouvelles initiatives, pourvues de moyens financiers, fleurissent. Sous la législature précédente, certaines ont dû être supprimées faute de moyens suffisants. Maintenant que nous disposons de ces moyens pour la CTB et l'AGCD, nous atteindrons le chiffre de 0,4% à la fin de cette année. Nous avons souscrit à un taux de croissance de 0,7%. Cela se traduit par toute une série de projets de coopération. Ces dix dernières années, les projets portant sur l'Afrique centrale ont été interrompus. Les gouvernements précédents ont coupé l'aide au développement de pays en proie à la dictature et où les droits de l'homme sont violés. C'est une politique à courte vue car s'il faut attendre la fin des violations des droits de l'homme en Afrique Centrale, on risque de ne jamais y faire de la coopération au développement. M. Boutmans a donc amorcé de nouveaux projets de coopération en Afrique centrale. Une liste de 25 pays de concentration a été établie. Il s'agit de projets concrets soutenus par des moyens suffisants. Je trouve donc étrange que nous recevions ici des leçons de membres de l'ancien parti gouvernemental qui a accepté la diminution systématique du pourcentage du PIB octroyé à la coopération au développement !
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Sans vouloir ouvrir le débat sur l'Afrique, nous sommes satisfaits que le premier ministre approuve un ancrage légal de la norme de 0,7% qui permettra le respect des engagements. Il nous faudra toutefois veiller à ce que des exigences qualitatives suffisantes soient inscrites dans la loi, de manière à éviter le recours à toute sorte d'astuces pour atteindre le chiffre de 0,7%.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Si Mme de Bethune avait manifesté la même sollicitude au cours des années précédentes, le budget consacré à la coopération au développement représenterait peut-être 0,4% du PIB à l'heure qu'il est.
Je n'accepte les arguments de l'opposition que s'ils ne sont pas contredits par les faits. Qu'a fait le gouvernement en matière d'entreprenariat féminin par exemple ?
Tout d'abord, les 120.000 conjoints aidants, pour la plupart des épouses d'indépendants, jouissent enfin d'un statut spécifique dont le coût sera supporté à plus de 80% par la communauté.
Ensuite, le gouvernement a supprimé la discrimination fiscale qui affectait les couples mariés. La première phase commencera en janvier 2003, la suppression complète étant prévue pour janvier 2004. Le gouvernement abolira d'autres types de discrimination dont les femmes font encore l'objet, notamment celles qui lancent une entreprise.
Enfin, nous allons déposer à la chambre le projet de réforme de l'impôt sur les sociétés. Les petites et moyennes entreprises débutantes bénéficieront pour la première fois d'avantages leur permettant d'investir rapidement des capitaux dans leur activité. Elles pourront ainsi se constituer des réserves exemptes d'impôts et pratiquer l'autofinancement. C'est une innovation.
Il y a certainement beaucoup d'autres bonnes idées en la matière mais ces trois mesures ont le mérite de rompre avec le passé, lorsqu'on n'y songeait même pas.
M. Jan Steverlynck (CD&V). - Je voudrais revenir sur le statut du conjoint aidant. Vous faites comme si rien n'avait été fait précédemment et que vous amélioriez considérablement la situation du conjoint aidant. Or ce n'est pas le cas. Pour que sa pension bénéficie du nouveau statut, l'intéressé doit avoir exercé une activité indépendante pendant trente ans. Souvent même, la pension diminuera. Un couple ayant exercé une activité indépendante pendant dix ou quinze ans ne pourra bénéficier de deux pensions séparées car la pension familiale reste plus élevée. À partir de maintenant, celle-ci ne sera plus calculée à 100% mais à 70% car 30% seront attribués au conjoint aidant.
Vous donnez l'impression d'avoir élaboré une réglementation spécifique pour le conjoint aidant mais c'est un mauvais calcul car à l'échelon familial, la pension tombera à 150 euros par mois. Telle est la réalité passée sous silence.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - La situation n'est pas du tout celle que vous peignez, monsieur Steverlynck. Vous limitez le statut social du conjoint aidant à la pension alors qu'il inclut toute une série d'autres éléments que vous auriez pu ajouter, comme les soins de santé, l'invalidité, l'incapacité de travail.
M. Jan Steverlynck (CD&V). - Il existe déjà un statut en matière de soins de santé, monsieur le premier ministre, et même un petit statut concernant l'incapacité de travail.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Si vous estimez que des améliorations peuvent être apportées, proposez-les donc au parlement.
M. Jan Steverlynck (CD&V). - Nous l'avons fait mais j'ai l'impression que le CD&V devrait peut-être d'abord vous offrir un cours gratuit sur les pensions.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Nous déposerons à la Chambre un projet de loi qui pourra être jugé et amendé tant par les députés que par les sénateurs. Si vous êtes d'avis que le nouveau statut ne peut affecter les droits garantis en matière de pension, je serai le premier à approuver un amendement en ce sens.
M. Vandenberghe nous fait un double reproche concernant l'évolution des finances publiques. Il considère que l'équilibre est insuffisant. Je lui fais remarquer que le gouvernement réalise pour la quatrième fois un budget en équilibre alors que la plupart des pays européens, et non des moindres, se situent dans le rouge.
Et M. Vandenberghe de s'en référer alors au pacte de stabilité, qui imposerait un excédent, comme s'il ignorait que la Commission européenne a déjà adapté certaines dispositions de ce pacte.
Le pacte de stabilité reposait sur une hypothétique croissance cumulée de 4,3% pour 2002 et 2003, ce qui, selon le Haut Conseil des Finances, nécessitait un excédent de 0,3% sur le budget. Le chiffre réel est de 2,8%, c'est-à-dire 1,5% de moins que les prévisions. Si nous appliquions les principes du Haut Conseil des Finances aux nouvelles données, nous pourrions enregistrer un petit déficit. Il faut avoir l'honnêteté intellectuelle de faire ce calcul.
Contrairement à d'autres pays, nous refusons d'élaborer un budget en déficit. Certains étaient pourtant demandeurs. Autrement dit nous sommes plus stricts que le pacte de stabilité et le Haut Conseil des Finances.
Cette rigueur qui s'explique par l'importance de la dette publique sera encore de mise pendant des années, jusqu'à ce que nous atteignions les fameux 60%.
On nous reproche de ne pas combler assez rapidement la dette publique. Nous devrions en 2003 descendre sous les 100%. Nous y serions déjà si nous n'avions pas repris dans la dette publique d'autres dettes, dont celle du logement social, et nous continuerons à le faire.
Les dettes de la SNCB sont un bon exemple à cet égard. Lorsqu'elles seront inférieures à 100% nous les inclurons dans la dette totale. À l'avenir, nous devrons également de plus en plus tenir compte des dettes du secteur des pensions. L'Union européenne renforce constamment ses normes en la matière.
Cela présente parfois des avantages, notamment sur le plan de l'emploi où la situation est malgré tout plus favorable que prévu.
Autre reproche, on dit que le budget est certes en équilibre mais que le budget fédéral présente toujours un léger déséquilibre. C'est exact. Les normes européennes portent sur l'État dans son ensemble, constitué de deux entités. La première englobe les départements et la sécurité sociale tandis que la seconde couvre les Régions, les Communautés et les communes. Le total de ces entités doit être en équilibre. On trouve scandaleux que la première présente encore un déficit de 0,3% mais en 1998, il atteignait respectivement 1,2 et 1,6%. Il a donc été divisé par quatre.
Pour 2003 les chiffres montrent que la croissance totale des revenus sera reversée aux Régions et Communautés conformément à la loi de financement. C'est ce qui a été voté au parlement. Malgré la réduction fiscale, les recettes seront supérieures de quelque 900 millions d'euros. Par conséquent, le léger excédent de 0,3% des Régions, Communautés et communes contrebalance le déficit de 0,3% de l'autre entité.
S'il est vrai que l'État fédéral présente un déficit, celui-ci était autrefois quatre fois plus important qu'aujourd'hui. Nous le résorberons progressivement et peut-être connaîtrai-je un jour une situation d'équilibre et un résultat final positif.
On nous objecte en outre que les mesures qui doivent rapporter 1,5 milliard d'euros ne comportent pas d'économies sérieuses. Je rappelle quand même que les 3% atteints lors des décennies précédentes provenaient essentiellement des recettes fiscales et de la vente des réserves d'or de la Banque nationale. Une analyse sérieuse de la politique d'assainissement suffit à le démontrer.
Cette tendance est en train de changer.
M. Jacques D'Hooghe (CD&V). - La politique d'assainissement actuelle consiste à vider les caisses de Belgacom.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Il faudra du temps si nous devons encore en retirer 300 milliards. Aujourd'hui, tout ce qu'on fait est octroyer un dividende spécial aux actionnaires que nous sommes. Belgacom est en effet la seule entreprise de télécommunications de l'UE qui se porte bien. Vous connaissez ce dossier aussi bien que moi, monsieur D'Hooghe, et vous savez que la majeure partie de l'argent issu de Belgacom ne profite pas à l'État belge mais au fonds de pension de Belgacom, dont les réserves correspondent ainsi aux obligations. Ce n'était pas le cas les années précédentes. Le versement du produit unique de la vente de Ben corrige cette situation. Les deux tiers du produit vont au fonds de pensions. On est bien loin de la vente de 300 milliards de réserves d'or.
On affirme que les économies ne sont pas sérieuses. J'admets qu'il s'agit d'une opération classique d'économies. De quoi s'agit-il ? Le plan de la Sainte-Anne, que j'avais élaboré à l'époque avec le CVP, portait sur 196 milliards de francs belges et comprenait tant des économies structurelles que des évaluations techniques. Jamais je n'ai entendu parler d'une opération portant uniquement sur des économies structurelles. Autrefois, il s'agissait parfois uniquement d'estimations techniques ! Une opération d'économies normale comporte toujours différents types de mesures. Pourquoi devrions-nous exclure les évaluations techniques ? Grâce à la diminution fiscale, certaines charges déductibles, qui augmentaient légèrement chaque année, seront désormais stables.
Passons au le problème de l'arriéré de paiements qui se pose au ministère des Finances. Sur les 2,1 milliards d'arriérés, la moitié est exigible dans les 12 mois et l'autre moitié ultérieurement. Nous avons mis au point un plan d'action destiné à réduire cet arriéré. Cela rapporte de l'argent. La hausse du prix des cigarettes, qui interviendra au 1er janvier 2003 à la suite d'une décision des producteurs, entraînera une hausse de la TVA et des accises.
Parmi les économies structurelles, nous pouvons citer la suppression d'un certain nombre de dépenses du plan d'investissements de la Régie des bâtiments. En matière de défense, nous pouvons réexaminer certains dossiers et adapter les programmes d'investissements en fonction de la nouvelle situation internationale apparue après le 11 septembre, laquelle nécessite l'achat d'un matériel différent de celui prévu initialement.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Je suis d'accord pour économiser dans le domaine de la défense et pour investir dans la prévention des conflits et la paix. J'insiste toutefois pour que l'on indemnise enfin les vétérans ayant contracté des maladies en ex-Yougoslavie. Le ministre Flahaut escamote ce dossier et refuse d'y apporter une solution, mais la presse nous rappelle à la réalité. J'espère que vous ferez de cette question une priorité. Quant aux problèmes actuels de défense que vous avez évoqués, nous devons pouvoir faire face aux conséquences d'une guerre chimique éventuelle.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Je suis parfaitement de votre avis. Nous examinerons ce dossier.
En ce qui concerne les mesures structurelles, on a prévu, pour les parastataux, différentes économies pour un montant de deux milliards. Je transmettrai au Parlement la liste complète de ces économies, qui fait quatre pages.
Contrairement à ce que l'on affirme, nous avons pris suffisamment de mesures structurelles. Malgré les conditions économiques actuelles, nous sommes parvenus à un excellent résultat. Affirmer que d'autres mesures sont nécessaires et que la dette doit diminuer plus rapidement est chose facile mais il faut alors préciser où ces économies supplémentaires doivent être réalisées. Les nouvelles propositions de dépenses que j'ai reçues entraîneraient un déficit de 0,6% plutôt qu'un équilibre. C'est ce qui s'est passé chez nos voisins du nord et du sud ainsi qu'en Allemagne. Nous ne suivrons pas cette voie. Nous avons fait des choix. Sur le plan économique aussi, un déficit constituerait un mauvais signal.
Sur le plan de l'activité économique, l'élément le plus important du budget est le fait que nous montrons que nous sommes l'un des seuls pays de l'Union européenne à maintenir l'équilibre budgétaire et que nous pouvons, en même temps, opérer une diminution des impôts, tant des personnes physiques que des sociétés, et ce pour un montant de 1,5 milliard d'euros.
Contrairement à ce qu'affirment d'aucuns, j'estime que nous agissons au bon moment. Alors que d'autres pays font actuellement marche arrière sur des mesures de diminution d'impôt parce que leur déficit est trop élevé, nous pouvons tenir notre parole et réaliser la réforme annoncée.
Ces mesures bénéficieront à toutes les catégories de citoyens ; 80 à 85% des mesures ont un impact direct sur les revenus faibles. Le crédit d'impôt, par exemple, est une sorte de subvention octroyée à des personnes qui travaillent, mais insuffisamment pour payer des impôts, et qui ne retireraient manifestement aucun avantage des diminutions de l'impôt des personnes physiques. Nous leur accordons donc également un avantage.
Il en est de même pour les indépendants. J'ai constaté que vous aviez parlé au cours de la discussion des mesures prises en leur faveur.
J'ai eu tout à l'heure une réunion avec M. Peeters de l'UNIZO. Il est très content des mesures prises. M. Mené est également satisfait parce qu'il constate enfin une augmentation des minima pour les pensions, soit 10% en termes réels.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Autrefois, on nous reprochait d'être un parti composé de différents groupes de pression.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Vous avez rouvert la porte à ces groupes, mais ils ne veulent pas revenir. Les partis de ce type ont fait leur temps. Les groupes de pression doivent faire autre chose que chercher à occuper une position de force dans un parti politique. Les forces vives de la société civile doivent être en contact avec l'ensemble des groupes sociaux et des partis politiques. Dans notre nouvelle démocratie, ces groupes jouent un rôle de défenseur et d'informateur. Leur réaction ne m'a donc pas étonné. Ils sont déjà bien plus loin que certains partis politiques qui, dans l'affolement, les ont exhortés à revenir.
On constate qu'ils sont satisfaits même s'ils ne trouvent pas que tout est bien. En cela, ils ont raison.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - D'où tirez-vous cette information ?
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Tous les journaux en ont parlé.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Mensonges systématiques à la tribune !
M. Luc Van den Brande (CD&V). - Je puis difficilement admettre que tout cela est vrai. Je ne peux pas m'imaginer que le premier ministre ait pu discuter sérieusement avec les partenaires sociaux alors que la concertation sociale n'a duré qu'une demi-heure.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Je puis comprendre qu'un communiqué dans lequel UNIZO fait part de sa satisfaction modérée puisse faire de la peine.
En 2003, les plus petites pensions connaîtront une croissance réelle de 5,3%. Durant cette législature, elles auront ainsi augmenté de 10%.
Nous avons décidé que la pénalisation ne s'appliquerait pas aux indépendants ayant une carrière complète. Il vaudrait bien sûr mieux supprimer tout à fait la règle de la pénalisation. Je puis seulement mettre un terme à l'injustice flagrante qui consiste à pénaliser les indépendants qui ont une carrière complète de 45 ans. Cette mesure ne concerne évidemment que peu de gens : ceux qui ont débuté une affaire à quinze, seize ou dix-sept ans et qui sont arrivés en fin de carrière. Ces mesures doivent enfin amorcer le débat sur la pénalisation.
M. Jan Steverlynck (CD&V). - La législation sur les pensions n'existe que depuis 1957. Certains indépendants n'ont pu commencer à cotiser qu'à dix-huit ans. Dix-huit plus quarante-cinq font soixante-trois. Un indépendant qui prend sa pension à soixante ans recevra donc toujours 15% de moins.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - C'est quand même mieux que 25% ! Votre parti a laissé subsister la pénalisation de 25%. Nous la réduisons et nous recherchons progressivement une solution.
M. Jan Steverlynck (CD&V). - Le gouvernement donne l'impression que la pénalisation est tout à fait supprimée. Quant au relèvement de 10% des petites pensions, le premier ministre oublie de dire que la liaison avec le revenu garanti aux personnes âgées a été supprimée.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Qu'avez-vous fait lorsque vous faisiez partie du gouvernement Martens ?
M. Luc Van den Brande (CD&V). - Le premier ministre oublie qu'il a eu une vie antérieure. Lorsqu'il était au Budget, les investissements publics ont diminué de 40%. Jamais, durant l'après-guerre, les crédits affectés à la recherche et au développement n'ont été aussi bas que lorsqu'il dirigeait ce département
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Je ne sais pas quel rapport cela avec la pension des indépendants, mais heureusement M. Van den Brande a rectifié la situation par la suite lorsqu'il était ministre-président du gouvernement flamand. Nous avons en tout cas progressé sur le plan de la pension des indépendants.
Les pensions mixtes restent un problème pénible. auquel on n'a pas remédié pendant des années. Aujourd'hui, même ceux qui ont une carrière mixte ont droit à la pension minimale.
Lorsque nous avons cherché une solution au problème de l'horeca, nous avons dû faire un choix entre deux mesures : augmenter la déductibilité fiscale, qui avait été ramenée de 100% à 50% durant la législature précédente, ou faire quelque chose pour le travail occasionnel. Nous avons opté pour la seconde. J'aurais voulu en faire davantage mais nous avons privilégié la mesure qui aurait l'impact le plus important sur un maximum d'établissements, donc y compris les restaurants ordinaires et les cafés.
Nous allons déposer un projet de loi prévoyant une plus grande flexibilité et une diminution spécifique des cotisations sociales. Nous devons veiller à ce que les mesures se fassent réellement sentir sur le terrain. Quant au problème de la TVA, il doit être réglé au niveau de l'UE. Avec le gouvernement français, nous insistons pour que la Commission rédige un rapport dans ce sens pour 2003.
S'il est vrai que nous n'avons pas tenu toutes nos promesses, nous avons cependant fait un pas énorme dans la bonne direction en ce qui concerne le statut des indépendants. Il reste du pain sur la planche, mais nous devons progressivement envisager un statut unique harmonisé, avec des règles identiques en matière de soins de santé, de pensions et d'allocations familiales.
Quant aux stock-options, le gouvernement entend prolonger le système, comme nous l'ont demandé les entreprises.
Je terminerai la longue série de questions par celles qui concernent la politique de l'emploi. Nous avons des résultats mais ils ne sont pas suffisants. Nos résultats proviennent des statistiques Eurostat et il est inutile de se disputer sur les chiffres, ceux d'Eurostat étant clairs. Il serait peut-être utile de distribuer une copie de la page 3 de ce rapport afin que tous disposent de ces chiffres qui sont de facto ceux de l'Union européenne. Nous y voyons que notre taux de chômage a baissé de 9,3% à 6,8% en 2002, ce qui représente une légère recrudescence par rapport aux 6,6% de 2001. Si nous comparons ces taux aux moyennes européennes, que ce soient celles des 12 ou des 15, nous ne pouvons que constater qu'ils leur sont inférieurs de 1,2 à 1,5%.
Hier, la discussion autour des chiffres fut interminable à la Chambre mais, à mon avis, une seule source statistique suffit, Eurostat, parce qu'elle utilise une définition unique pour tous les pays. Nous avons aujourd'hui dépassé les 4 millions de postes de travail en Belgique alors qu'ils n'étaient que 3,7 millions il y a quelques années.
Où est le problème ? Le taux d'activité est de 60% et il reste stable de 2000 à 2001. En 1998, ce taux n'était que de 57,3% et de 58,9% en 1999. Il y a donc réellement progrès mais ce n'est pas satisfaisant : nous devons atteindre les 70% selon les décisions européennes. Ce sera l'une des tâches les plus importantes du futur proche pour le gouvernement, le parlement et les partenaires sociaux. Des initiatives nouvelles devront être prises et nous avons commencé à en prendre : l'une des mesures nouvelles que nous proposons est la diminution des cotisations personnelles sur le salaire minimal de sorte que l'écart entre l'allocation de chômage et le salaire minimal net soit accru. Cette mesure encouragera le chômeur à accepter plus facilement une offre d'emploi.
Suite à une série de réunions avec les partenaires sociaux en septembre, pour préparer les décisions du conclave budgétaire, nous leur avons demandé de prendre des initiatives inédites lors de la conclusion des accords interprofessionnels et nous leur avons donc accordé une enveloppe de quelque 70 millions d'euros pour 2003-2004 provenant de la simplification des plans d'embauche. Cette simplification fera l'objet d'un projet de loi qui sera déposé prochainement au Parlement.
Mme Mia De Schamphelaere (CD&V). - Pour la troisième fois ?
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Non. J'ai présenté un plan voici deux ans. Les partenaires sociaux en ont discuté pendant deux ans. Nous sommes finalement parvenus à un accord. Je voulais présenter au Parlement un plan ayant l'assentiment de tous les partenaires.
La ministre Onkelinx traduira ce plan en un projet de loi qui sera prochainement déposé. À la demande des partenaires sociaux, la loi n'entrera en vigueur que le 1er janvier 2004. Ils veulent d'abord supprimer les 50 formulaires destinés aux entreprises, ce qui devrait être fait pour le 1er janvier 2003.
Le projet qui sera bientôt déposé comprendra plusieurs chapitres - dont une réduction structurelle des charges - et diverses mesures de simplification. Par exemple, les 19 plans pour l'emploi seront ramenés à un seul comprenant trois catégories. Cette simplification permettra de dégager 71 millions d'euros que les partenaires sociaux pourront affecter aux mesures décidées lors de l'accord interprofessionnel.
Mme Sabine de Bethune (CD&V). - Notre proposition de loi prévoyant la suppression des cotisations sociales pour la mère indépendante qui engage un assistant l'année de son accouchement peut-elle être intégrée dans ce plan ?
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Votre proposition n'a pas été intégrée dans le projet de loi mais il serait bon de les examiner conjointement. Il faut certes bien spécifier les groupes cibles. Ils ne doivent pas être trop étendus. En définissant trois catégories - une réduction fixe des charges, un doublement de la réduction de charges pour les bas salaires et les travailleurs âgés et un forfait de 4.000 euros pour les groupes cibles - nous avons tracé une ligne claire.
M. Philippe Monfils (MR). - Je voudrais simplement signaler que Mme de Bethune n'a pas le monopole du coeur. J'ai moi-même déposé une proposition de ce type depuis longtemps. Elle se trouve actuellement à la commission des Affaires sociales. C'est avec plaisir que j'examinerai la proposition de Mme de Bethune, mais j'entends que la mienne soit également traitée.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Je voudrais terminer par la question irakienne. Selon nos informations, une résolution peut être adoptée rapidement par les Nations Unies. Il est admis que cette crise doit être traitée dans le cadre de la Charte, du mandat et de la résolution sans tenir compte d'un quelconque mandat qu'un pays aura pu obtenir de son congrès. C'est un changement important par rapport à la situation d'il y a six semaines.
Je pense qu'une guerre en Irak est évitable. Les Européens ont un rôle important à jouer à cet égard. Lors du sommet organisé en octobre à Bruxelles, l'Union européenne doit donner un signal clair et unanime, notamment à l'adresse du régime irakien, pour que les armes soient localisées et puissent être démantelées. Ce signal est indispensable pour ramener le calme et lever l'incertitude, ce qui est capital si on veut que l'Europe et le reste du monde enregistrent de bons résultats économiques et sociaux dans les prochaines années.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Le troisième paragraphe de la déclaration de politique fédérale parle de la lutte contre l'aigrissement. En prenant la parole dans un débat que l'on n'a pas suivi, on ne connaît pas l'atmosphère du débat.
Quand il a dénoncé l'aigrissement, je me suis demandé pourquoi le premier ministre s'est montré si aigri en parlant de l'opposition. Dans une démocratie parlementaire, un débat avec l'opposition va de soi. Si solides qu'ils soient, les arguments du premier ministre perdent de leur force par le ton qu'il emploie pour les exposer. Le premier ministre se livre à une forme de sophisme et à une polémique qui ne répondent même pas aux règles de la rhétorique. Il utilise tout et son contraire pour produire un effet immédiat. Il recourt au sophisme quand il parle de la situation dans le passé. Il donne l'impression que le calendrier commence avec lui. On parle des années avant le gouvernement Verhofstadt et des années après le gouvernement Verhofstadt.
Le premier ministre répète à l'envi qu'il s'agit de ses choix et souligne que ceux-ci marquent une rupture par rapport au passé. C'est l'exemple type du sophisme. Le choix ne s'opère pas entre les options de l'actuel gouvernement et celles du précédent, mais entre les options de la majorité actuelle et celles de l'opposition actuelle.
En niant que certains partis de ce gouvernement ont participé à la majorité précédente, le premier ministre se livre à une forme de négationnisme inacceptable. Il dépeint le passé récent comme le Moyen-Âge obscur.
Nous sommes prêts à discuter mais la vision manichéenne que le premier ministre présente pour situer sa politique n'est pas conforme à la réalité. Ce gouvernement se distingue du précédent par sa recherche de l'effet. Sa gestion de la dette a toutefois avant tout un effet antisocial. Si M. Verhofstadt avait poursuivi la politique du gouvernement Dehaene, la dette ne serait plus aujourd'hui que de 93% du produit intérieur brut.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - Foutaise !
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - Mes chiffres proviennent de la Banque nationale. Si vous aviez poursuivi la politique du gouvernement Dehaene, vous disposeriez d'une marge budgétaire de 85 milliards de francs belges sans devoir prendre la moindre de vos mesures qui sont d'ailleurs toutes théoriques. Cette marge aurait été adaptée à la crise à laquelle nous avons à faire face.
Selon le directeur du FMI, la situation de l'Europe est dramatique ; la Belgique mérite mieux qu'un premier ministre qui parle de cette situation avec autant de désinvolture. Monsieur le premier ministre, vous n'avez pas pris les mesures adéquates. La comparaison avec les budgets déficitaires des autres pays européens ne tient pas car ceux-ci n'ont pas le ratio d'endettement des pouvoirs publics belges.
De plus, le taux d'emploi atteint à peine 54% en Wallonie et même pas 53% à Bruxelles. Alors qu'en 1999, l'État social actif constituait le thème central de votre programme, le taux d'emploi a diminué sous votre gouvernement. L'emploi chez les plus de 55 ans est trop faible pour supporter les charges. La politique de la dette et l'emploi sont les deux axes centraux de la politique qui permettent de maintenir l'équilibre du vaisseau de l'État, et non les quelques mesures positives ponctuelles prises par votre gouvernement. Or, votre politique n'est pas assez énergique en ce qui concerne ces deux axes centraux. Vous avez choisi de discuter de mesures ponctuelles au lieu de vous intéresser aux axes centraux.
Certes, toutes les mesures prises par ce gouvernement ne sont pas mauvaises. Le CD&V ne parle pas de la majorité dans les termes qu'emploie la majorité pour parler de l'opposition. Nous avons ainsi soutenu de nombreux projets du ministre de la Justice.
Certaines mesures sont toutefois des plus douteuses. Retenir un taux de croissance de 2,1% en période de crise économique nous paraît ainsi excessif.
Les recettes fiscales sont par ailleurs gonflées par des propositions d'évolution salariale compromettant la compétitivité de nos entreprises.
Le problème des dotations aux régions n'est pas abordé. On considère que les 0,4% seront compensés par les régions et communautés. Les trois régions ont saisi le comité fédéral de concertation du problème des dotations. Il n'y a donc pas encore de solution.
M. Guy Verhofstadt, premier ministre. - La détermination du RNB se déroule conformément à la loi de financement et n'influence pas le résultat budgétaire.
M. Hugo Vandenberghe (CD&V). - C'est exact mais la politique de la dette, le taux de croissance et la compétitivité de nos entreprises inquiètent, compte tenu des difficultés économiques actuelles.
J'en viens à l'arriéré fiscal. Le gouvernement a souvent dit qu'une perception accélérée des impôts et l'élimination de l'arriéré fiscal généreraient de 10 à 15 milliards de recettes supplémentaires. Il faut toutefois respecter de longues procédures. En outre, c'est surtout le manque de solvabilité qui pose problème pour la perception des arriérés d'impôts. Le contribuable n'a généralement pas les moyens de payer et une exécution forcée est impossible. Il s'agit donc de créances incertaines.
Dans les organismes parastataux, des économies de l'ordre de 2 milliards seraient réalisées sur les frais administratifs. Ce secteur ayant déjà réalisé beaucoup d'économies au cours des dernières années, je doute qu'il puisse encore économiser 2 milliards.
Quant à l'allégement de la fiscalité, il n'est pas certain, dans une situation économique pouvant être déflationniste, qu'il aura un effet mécanique sur la lutte contre la crise. Dans une situation déflationniste, on n'agit pas sur l'offre si bien que l'éventuelle hausse du pouvoir d'achat ne suffit pas à rétablir la confiance.
Le secteur horeca réclame avant tout la déductibilité des frais de restaurant. La discrimination dont certains indépendants de ce secteur font l'objet n'est pas éliminée.
J'ai étudié attentivement toutes les déclarations du premier ministre. Peut-on déduire de ces déclarations que la Belgique n'exclut pas un appui à une opération militaire, même si cette opération ne s'inscrit pas dans le cadre des décisions du Conseil de sécurité ? La déclaration de politique fédérale ne dit rien de ce point essentiel. Le premier ministre étant présent, il pourrait apporter des éclaircissements sur la position internationale de notre pays et les difficultés éventuelles qui nous attendent.
Je ne répéterai pas tous les points dont nous avons discuté ce matin. Il faut, dans certaines circonstances, laisser la polémique facile de côté. J'ai commencé par une réflexion sur l'aigrissement et je terminerai par là. Comme Giscard d'Estaing a un jour dit à Mitterrand « Vous n'avez pas le monopole du coeur », je dirai au premier ministre « Vous n'avez pas le monopole du sourire ».
-La discussion est close.
M. le président. - L'ordre du jour de la présente séance est ainsi épuisé.
Les prochaines séances auront lieu le jeudi 17 octobre 2002 à 10 h et à 15 h.
(La séance est levée à 18 h 30.)
Mme Taelman, pour raisons de santé, et M. Buysse, pour d'autres devoirs, demandent d'excuser leur absence à la présente séance.
-Pris pour information.