5-2277/2

5-2277/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 2013-2014

19 NOVEMBRE 2013


Projet de loi portant réforme de la compétence, de la procédure et de l'organisation du Conseil d'État


AMENDEMENTS


Nº 1 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 2

Compléter cet article par un 4º rédigé comme suit:

« 4º à l'alinéa 3, les mots « aux actes et règlements visés au 2º » sont remplacés par les mots « aux actes et règlements visés à l'alinéa 1er, 2º ». »

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 2 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 6

Dans l'article 17 proposé, apporter les modifications suivantes:

A) dans la version française du § 1er, alinéa 2, 2º, supprimer les mots « dans la requête en annulation »;

B) au § 1er, remplacer l'alinéa 3 par ce qui suit:

« Par dérogation aux alinéas 1er et 2, la suspension ou des mesures provisoires ne peuvent être demandées après le dépôt du rapport visé à l'article 24. Toutefois, toute partie qui y a un intérêt peut dans ce cas adresser au président de la chambre saisie de la requête une demande motivée en vue d'obtenir la fixation de l'affaire en urgence. La demande de suspension ou de mesures provisoires introduite entre le dépôt du rapport et sa notification est assimilée à la demande motivée. Le président se prononce par ordonnance sur cette demande. Si l'urgence paraît justifiée, il fixe l'affaire à brève échéance et au plus tard dans les deux mois de la réception de la demande, et peut aménager les délais pour le dépôt des derniers mémoires. »;

C) compléter le § 4, alinéa 2, par les mots « ou des mesures provisoires »;

D) au § 6, supprimer les mots « dont la suspension est demandée », et remplacer les mots « ordonne la suspension ou confirme la suspension provisoire » par les mots « ordonne la suspension ou des mesures provisoires ou confirme la suspension provisoire ou les mesures provisoires »;

E) au § 7, insérer les mots « ou la demande de mesures provisoires » avant les mots « ayant été rejetée ».

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 3 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 7

Dans l'article 7, apporter les modifications suivantes:

A) modifier l'« article 7, 3 ° », en un « article 7, 4º », et l' « article 7, 2º », en un « article 7, 3º »;

;

B) après l'article 7, 1º, insérer un article 7, 2º, rédigé comme suit:

« 2º à l'alinéa 2, les mots « a pris connaissance de l'acte ou de la décision de portée individuelle » sont remplacés par les mots « s'est vu notifier l'acte ou la décision à portée individuelle; »;

C) dans la version française de l'alinéa inséré par le 2º de cet article, insérer les mots « ou un règlement » après le mot « acte » et, dans la version néerlandaise de ce même alinéa, remplacer les mots « een handeling » par les mots « een akte of een reglement »;

D) insérer un point 3º/1 rédigé comme suit:

« 3º/1 à l'alinéa 4, qui devient l'alinéa 5, les mots « alinéa 3 » sont remplacés par les mots « alinéa 4 »; ».

Justification

Les amendements sous A) et B) visent à réintégrer dans le projet de loi une disposition qui figurait à l'article 7 de l'avant-projet de loi approuvé en première lecture et qui n'a donné lieu à aucune observations de la part de la section de législation du Conseil d'État. Cette disposition a disparu sans motif entre les deux lectures. L'exposé des motifs du projet de loi y fait d'ailleurs expressément référence.

Pour les deux autres amendements, voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 4 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 8

À l'alinéa 7 de l'article 21 proposé, remplacer les mots « alinéa 2 » par les mots « alinéa 3 » et les mots « bij de betekening van het verslag van de auditeur of bij de kennisgeving van het feit » par les mots « met de kennisgeving van het verslag van de auditeur of van de mededeling ».

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 5 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 10

Modifier cet article comme suit:

A) au 2º, remplacer les mots « alinéa 2 » par « alinéa 3 » et, dans l'alinéa inséré par ce point, remplacer les mots « Le Roi » par les mots « L'arrêté royal visé à l'alinéa 1er »;

B) au 3º de cet article, supprimer les mots « devenu alinéa 3 » et, dans l'alinéa visé par ce point, remplacer les mots « du pro deo » par les mots « de l'aide juridique de deuxième ligne »;

C) au 5º de cet article, insérer les mots « ou d'un règlement » après les mots « d'un acte »;

D) insérer un point 5º/1 rédigé comme suit:

« 5º/1 au paragraphe 3, remplacer les mots « de l'article 17, § 4, » par les mots « du paragraphe 1er, alinéa 3 »; ».

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 6 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 11

À l'article 30/1 proposé, apporter les modifications suivantes:

A) au § 1er, alinéa 2, remplacer les mots « de l'indemnité de procédure » par les mots « de l'indemnité de procédure, en fonction notamment de la nature de l'affaire et de l'importance du litige »;

B) dans la version néerlandaise des alinéas 2 et 3 du § 2, remplacer les mots « de verliezende partij » et « de verliezende partijen » respectivement par les mots « de in het ongelijk gestelde partij » et « in het ongelijk gestelde partijen ».

Justification

L'amendement sous A) tend à expliciter la base légale sur laquelle le Roi devra se fonder pour adopter le projet d'arrêté royal visé par cette disposition. Comme le reste de l'article, il s'inspire directement de l'article 1022 du Code judiciaire, en tenant compte des particularités du contentieux objectif devant le Conseil d'État.

Pour l'autre amendement, voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 7 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 12

Insérer, dans le § 3 de l'article 36 proposé, un alinéa qui devient l'alinéa 1er, rédigé comme suit:

« § 3. La chambre qui a prononcé l'astreinte, peut, à la requête de l'autorité condamnée, annuler l'astreinte, en suspendre l'échéance pendant un délai à fixer par elle ou diminuer l'astreinte en cas d'impossibilité permanente ou temporaire ou partielle pour l'autorité condamnée de satisfaire à la condamnation principale. Pour autant que l'astreinte soit encourue avant cette impossibilité la chambre ne peut ni l'annuler ni la diminuer. »

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 8 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 13

À l'article 38 proposé, apporter les modifications suivantes:

A) au § 1er, insérer les mots suivants:

— dans la version française de l'alinéa 1er, les mots « ou le règlement » après les mots « l'acte »;

— à l'alinéa 3, les mots « ou un nouveau règlement » et « ou ce règlement », respectivement après les mots « nouvel acte » et « cet acte »;

B) remplacer:

— dans la version néerlandaise du § 1er, alinéa 1er, les mots « in het bestreden besluit » par les mots « in de bestreden akte of het bestreden reglement »;

— dans le § 1er, alinéa 4, les mots « de la décision » par les mots « de l'acte ou du règlement »;

— dans le § 4, alinéa 1er, les mots « l'acte attaqué » par les mots « l'acte ou le règlement attaqué »;

— l'alinéa 2 du § 4, par l'alinéa qui suit:

« Les autres parties peuvent, dans un délai de quinze jours à compter du moment où la section du contentieux administratif leur notifie la manière dont le vice a été corrigé, faire valoir leurs observations sur ce point. »;

— dans le § 4, alinéa 3, les mots « si la correction est entachée de nouveaux vices, l'acte attaqué ou, le cas échéant, l'acte refait, » par les mots « que la correction est entachée de nouveaux vices, l'acte ou le règlement corrigé ou, le cas échéant, refait ».

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 9 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 14

Remplacer le 6º, inséré par le point 3º de cet article, par ce qui suit:

« 6º avoir pendant vingt ans au moins exercé la profession d'avocat à titre d'activité professionnelle principale ou avoir exercé pendant vingt ans au moins une fonction dont l'exercice nécessite une bonne connaissance du droit, dont quinze ans au moins en qualité d'avocat. »

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 10 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 15

Dans l'alinéa 1er proposé, remplacer les mots « Les membres du Conseil d'État » par les mots « Cette dernière personne et les membres du Conseil d'État » et, dans la version néerlandaise de cet alinéa, remplacer le mot « examencommissie » par le mot « jury ».

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 11 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 33

Remplacer cet article par ce qui suit:

« Art. 33. Dans les mêmes lois, l'intitulé du titre IX, « Mesures en vue de résorber l'arriéré juridictionnel », inséré par la loi du 15 septembre 2006, est complété par les mots « et de faire face à l'augmentation du nombre de demandes d'avis ». »

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

Nº 12 DE MME MATZ ET CONSORTS

Art. 39

Remplacer cet article par ce qui suit:

« Art. 39. La présente loi entre en vigueur à la date de sa publication au Moniteur belge, à l'exception des articles 3, 6, 8, 9, 10, 6º, 12, 13 et 38, premier tiret, qui entreront en vigueur à une date fixée par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres et au plus tard le 1er mars 2014. Ces articles s'appliqueront à tout recours ou demande introduit à compter de cette date. »

Justification

Voir la note du Service d'évaluation de la législation.

En outre, il est précisé que l'entrée en vigueur de certaines dispositions de procédure sera fixée par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres, au plus tard le 1er mars 2014, de manière à laisser le temps d'exécuter ces dispositions et d'éviter une insécurité juridique liée à une application immédiate de la loi. À cet effet, celle-ci s'appliquera aussi à tout recours ou demande introduit après l'entrée en vigueur de ces dispositions.

Vanessa MATZ.
Dirk CLAES.
Mohamed DAIF.
Guido DE PADT.
Gérard DEPREZ.

Nº 13 DE MME FAES

Article 1er/1 (nouveau)

Insérer un article 1/1 rédigé comme suit:

« Il est inséré, dans les lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973, un article 5bis rédigé comme suit:

« Art. 5bis. La section de législation assure sans délai, par la voie d'un réseau d'information électronique accessible au public, la publication des avis qu'elle donne et qui sont mentionnés au présent titre.

Elle y joint les propositions et amendements aux propositions et projets auxquels ils se rapportent.

Si l'avis se rapporte à un avant-projet, la publication n'intervient qu'au dépôt du projet.

S'il se rapporte à un projet d'arrêté réglementaire, elle n'intervient que si celui-ci est publié au Moniteur belge.

Le Roi fixe, par arrêté, pris après avis conjoint du premier président et de l'auditeur général du Conseil d'État, les modalités concrètes de conception et d'établissement de ce réseau d'information électronique. Si aucun avis n'a été formulé six mois après la demande d'avis dont question au présent article, le Roi peut édicter l'arrêté sans recueillir l'avis concerné. » »

Justification

Le présent amendement reprend en partie le texte de la proposition de loi du 19 janvier 2004 modifiant les lois coordonnées sur le Conseil d'État en vue de la publication des avis de la section de législation et de la modification des modalités de la répartition des demandes d'avis adressées à cette section (doc. Chambre, nº 51-0708/001).

La proposition de loi précitée visait à apporter deux modifications aux lois coordonnées du 12 janvier 1973 sur le Conseil d'État. Le présent amendement se limite à la première modification.

D'une part, à l'instar de F. Delperée, nous proposons que, chaque année, les avis du Conseil d'État soient rassemblés et publiés dans un bulletin des avis du Conseil d'État.

Cette proposition trouve sa justification dans le fait que la section de législation doit, en règle générale, être obligatoirement consultée pour tous les projets de loi, de décret et d'ordonnance et, sauf en cas d'urgence, pour tous les projets d'arrêté royal, alors que cette consultation est facultative lorsqu'il s'agit de propositions de loi. Les avis du Conseil d'État ne sont pas publiés de façon systématique.

Doivent seuls être publiés, les avis portant sur des avant-projets de loi, de décret et d'ordonnance et des projets d'arrêté réglementaire qui font également l'objet d'un rapport au Roi ou à un gouvernement de Région ou de Communauté. Certains auteurs éminents déplorent que les avis du Conseil d'État ne soient pas publiés systématiquement (1) . Cette lacune empêche leur étude systématique. Or, il est important de pouvoir procéder à pareille étude, étant donné que de nombreux principes du droit constitutionnel ont été édictés par le Conseil d'État. Ou, pour reprendre les mots du professeur Velaers:

« Pour ceux qui en douteraient, cette étude montrera que la publication des avis du Conseil d'État, qui renferment une « mine d'or constitutionnelle », serait une bénédiction pour le développement de la pensée constitutionnelle de ce pays. De nombreux principes du droit constitutionnel ont en effet été édictés par le Conseil d'État. Lorsque surgissent des questions qui n'ont pas encore reçu de réponse, c'est le Conseil d'État qui trace de plus en plus souvent la voie à suivre, procédant par essais et erreurs et définissant peu à peu des directives précises pour l'ancrage constitutionnel de nouvelles tendances juridiques, politiques et sociales. » (2) (traduction)

Concrètement, nous proposons d'insérer dans les lois coordonnées sur le Conseil d'État un article 5bis, instaurant la publication annuelle de l'ensemble des avis de la section de législation du Conseil d'État. Le greffier en chef notifierait chacun de ces avis aux parlements et aux gouvernements.

Inge FAES.

Nº 14 DE MME THIBAUT

Article 1er/1

Insérer un nouvel article 5/1 dans les lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973, rédigé comme suit:

« La section de législation assure sans délai, par la voie d'un réseau d'information électronique accessible au public, la publication des avis qu'elle donne et qui sont mentionnés au présent titre.

Elle y joint les propositions et amendements aux propositions et projets auxquels ils se rapportent.

Si l'avis se rapporte à un avant-projet, la publication n'intervient qu'au dépôt du projet.

S'il se rapporte à un projet d'arrêté réglementaire, elle n'intervient que si celui-ci est publié au Moniteur belge.

Le Roi fixe, par arrêté, pris après avis conjoint du premier président et de l'auditeur général du Conseil d'État, les modalités concrètes de conception et d'établissement de ce réseau d'information électronique. Si aucun avis n'a été formulé six mois après la demande d'avis dont question au présent article, le Roi peut édicter l'arrêté sans recueillir l'avis concerné. »

Justification

Le présent amendement reprend le texte d'une proposition qui a déjà été adoptée par le Sénat le 27 novembre 2008 (doc. Sénat nº 4-247/5), moyennant les adaptations requises. Ce texte a été adapté dans la proposition de loi modifiant les lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973, en vue de la publication des avis de la section de législation (doc. Sénat, 5-1835/1).

L'article 28, alinéa 4, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973, dispose que le Conseil d'État assure la publication des arrêts de la section d'administration dans les cas, les formes et les conditions déterminés par arrêté royal. Cette disposition, qui a été insérée par la loi du 4 août 1996, a été mise à exécution par l'arrêté royal du 7 juillet 1997 relatif à la publication des arrêts du Conseil d'État, lequel dispose que cette publication doit se faire entre autres « via un réseau d'information accessible au public », c'est-à-dire en pratique le site web du Conseil d'État (http://www.raadvst-consetat.be).

En ce qui concerne les avis de la section de législation du Conseil d'État, que le professeur J. Velaers (De Grondwet en de Raad van State, afdeling wetgeving. Vijftig jaar adviezen aan wetgevende vergaderingen, in het licht van de rechtspraak van het Arbitragehof, Maklu, 1999, p. 13) qualifie de « mine d'or constitutionnelle », la loi ne prévoit pas d'obligation générale de publication. Le Conseil d'État considère que ces avis sont confidentiels dans les cas où leur publication n'est pas imposée par la loi (arrêt Noel, nº 38 279, 9 décembre 1991). Le professeur docteur M. Van Damme, président de chambre au Conseil d'État, souligne que la confidentialité des avis est la règle et la publication l'exception (Raad van State, afdeling wetgeving, Die Keure, 1998, p. 67).

Les avis doivent cependant être rendus publics dans certains cas (Velaers, p. 9). L'article 3, § 1er, alinéa 1er, des lois coordonnées, dispose que les avis doivent être annexés à l'exposé des motifs des avant-projets de lois, de décrets ou d'ordonnances, de manière à être publiés dans les documents de l'assemblée législative concernée. La même disposition prévoit que, lorsqu'un rapport au Roi ou à un gouvernement de communauté ou de région sur un arrêté réglementaire est publié au Moniteur belge, l'avis du Conseil d'État relatif à l'avant-projet d'arrêté doit être annexé au rapport, si bien que l'avis doit lui aussi être publié au Moniteur belge. En pratique, les avis demandés par les présidents des assemblées législatives sont également publiés dans les documents parlementaires.

Depuis l'insertion dans la Constitution d'une disposition accordant à chacun le droit de consulter tout document administratif (article 32 de la Constitution, inséré en 1993) et l'adoption entre autres de la loi fédérale du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration, il est possible de demander, par cette voie compliquée, à consulter les avis de la section de législation du Conseil d'État qui sont détenus par une autorité administrative. La Commission d'accès aux documents administratifs et l'assemblée générale du Conseil d'État, section d'administration (arrêt Jordan, nº 72 863, 31 mars 1998), ont déjà jugé que le principe de la publicité est applicable également aux avis du Conseil d'État, si bien que le détenteur de l'avis ne peut en refuser la publicité qu'en application d'une des dérogations qui ont été énumérées explicitement (Velaers, p. 10).

Par ailleurs, le Conseil d'État, section d'administration, a jugé, dans l'arrêt Gerfa (nº 63 464, 9 décembre 1996) qu'un avis de la section de législation est un élément obligatoire de la procédure d'élaboration d'un arrêté réglementaire et qu'il devait dès lors être intégré dans le dossier administratif qui est présenté par l'autorité dans le cas où cet arrêté fait l'objet d'une demande en annulation devant le Conseil d'État.

Le professeur M. Van Damme a écrit ce qui suit dans le livre qu'il a publié en 1998: « Le principe de la confidentialité des avis ne peut en tout cas plus être considéré comme allant de soi. Il n'empêche qu'en attendant une modification explicite de la loi sur ce point, le Conseil d'État même et certains auteurs continuent à être confrontés aux difficultés pratiques résultant de l'absence d'une obligation générale de publicité des avis de la section de législation » (Van Damme, p. 72) (Traduction).

Comme l'écrit le professeur J. Velaers, le législateur devrait imposer lui-même une obligation de publication pour garantir une réelle publicité des avis: « Ce serait l'expression d'une nouvelle culture politique. L'État de droit y trouverait son compte ! » (Velaers, p. 10) (Traduction).

Voilà la raison du dépôt du présent amendement qui, en instaurant l'obligation de publicité des avis, vise à rendre la législation plus transparente et à stimuler la science juridique. Les objections classiques du monde politique suivant lesquelles les avis peuvent contenir des données politiques sensibles ne paraissent pas vraiment pertinentes à l'auteure de l'amendement: en pratique, les projets de loi sont élaborés au niveau du gouvernement et ils ne sont envoyés au Conseil d'État que lorsqu'ils ont reçu une forme plus ou moins définitive. Le texte proposé vise bien entendu aussi à ce que le Conseil d'État publie à terme, sur Internet, tous les avis qu'il a rendus à ce jour, c'est-à-dire plus de trente mille.

Le présent amendement insère un nouvel article 5/1. La publication obligatoire ne vaut que pour les textes législatifs ou les arrêtés réglementaires ayant été adoptés par l'assemblée compétente. C'est pourquoi, l'article prévoit que les avis ne sont publiés qu'à dater de la publication des textes législatifs ou réglementaires concernés.

Afin que les arrêtés d'exécution soient en phase avec les réalités du terrain, il est prévu une procédure d'avis de la part des instances concernées du Conseil d'État.

De plus, l'entrée en vigueur de la loi doit, en outre, être concomitante à celle de l'arrêté royal visé au dernier alinéa de ce nouvel article 5/1.

Nº 15 DE MME THIBAUT

Art. 7

Dans cet article, insérer un point 1º/1 rédigé comme suit:

« Dans l'article 19 des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973, modifié par les lois des 6 mai 1982, 24 mars 1994, 25 mai 1999, 17 février 2005 et 15 septembre 2006, l'alinéa suivant est inséré entre l'alinéa 1er et l'alinéa 2:

« Sont réputés de plein droit avoir un intérêt suffisant, au sens de l'alinéa 1er:

1º) les personnes morales qui œuvrent en faveur de la protection de l'environnement et auxquelles, pour satisfaire aux obligations résultant du droit international, les législateurs compétents ont reconnu des droits de participation spécifiques dans le cadre du processus décisionnel en matière environnementale;

2º) les personnes morales qui œuvrent en faveur de la protection de l'environnement et qui, en exécution de règles internationales, sont autorisées par les législateurs compétents à solliciter l'adoption de mesures en cas de dommage environnemental réalisé ou imminent;

3º) sous réserve des alinéas 1er et 2, ainsi que de dispositions particulières relatives à la défense en justice d'un intérêt collectif, une personne morale de droit privé est, jusqu'à preuve du contraire, présumée justifier d'une lésion ou d'un intérêt au sens de l'alinéa 1er lorsqu'elle agit en vue de la défense d'un intérêt collectif et qu'elle établit, à l'appui de son recours, qu'elle remplit les conditions suivantes:

a) elle jouit de la personnalité juridique depuis au moins un an

b) elle poursuit de manière régulière, effective et durable des activités en rapport avec son objet social;

c) et elle agit en justice dans le cadre de son objet social, en vue d'assurer la défense d'un intérêt collectif en rapport avec cet objet. »

Justification

Le présent amendement reprend le texte de la proposition de loi modifiant les lois coordonnées sur le Conseil d'État en vue d'accorder aux associations le droit d'introduire une action d'intérêt collectif (5-1330/1)

1. La notion d'« intérêt »: problématique et principe

En vertu de l'article 19, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'État, « Les demandes, difficultés et recours en annulation et recours en cassation visés aux articles 11, 12, 13, 14 et 16, 1º à 6º, peuvent être portés devant la section du contentieux administratif par toute partie justifiant d'une lésion ou d'un intérêt ... ».

Bien que, dans sa jurisprudence, le Conseil d'État adopte une interprétation plus large de la notion d'intérêt que la Cour de cassation, les critères utilisés par le Conseil d'État pour définir cette notion sont ambigus et divergents (3) . Les associations qui intentent une action en défense d'un intérêt collectif défini dans leurs statuts, sont incapables de prévoir si le Conseil d'État déclarera l'action recevable ou non. La jurisprudence, parfois casuistique, est source d'une grande insécurité juridique pour le justiciable.

L'évolution de la technique, entre autres, entraîne une remise en cause du modèle de procédure « un contre un ». Aujourd'hui, de plus en plus d'actes peuvent, en effet, avoir une incidence sur un (plus) grand groupe de personnes. Leur effet ne se limite plus à un ou à quelques individus, contrairement à ce qui était le cas il y a un demi-siècle. La complexité de la société moderne et de l'économie engendre des situations dans lesquelles certains actes peuvent porter préjudice à un grand groupe de personnes. Ce préjudice peut être si restreint, pour chaque individu pris séparément, qu'il ne se justifie pas raisonnablement d'intenter une action. Parfois même, aucun individu ne dispose dans ce cas de l'intérêt requis pour ester en justice (4) . Alors, une association pourrait agir pour la collectivité.

Pour certains groupes sociaux, l'accès à la justice est très malaisé aujourd'hui. L'accès à la justice est souvent refusé aux groupes qui vivent en marge de notre société, ce qui leur fait courir le risque d'être encore plus marginalisés. Ce sont précisément les personnes qui ont le plus besoin de justice qui rencontrent le plus d'obstacles pour y accéder (5) . Les groupes marginalisés ne disposent pas de possibilités et de moyens financiers suffisants pour faire pression et revendiquer l'accès à la justice.

Les associations jouent un rôle important dans une démocratie. Les associations qui défendent un intérêt général ou collectif représentent un pan important de notre système social. Elles assurent une participation accrue de la population à toutes sortes d'évolutions de société ainsi qu'un soutien plus large, au sein de la population, en faveur de toute une série d'objectifs pertinents pour la société, comme la lutte contre le racisme, l'amélioration de l'environnement, la lutte contre l'exclusion sociale de groupes défavorisés, .. (6) . La démocratie tire bénéfice de ce que les citoyens puissent assumer des responsabilités par le biais d'associations, en permettant à celles-ci d'ester en justice pour défendre des intérêts qui dépassent l'intérêt individuel (7) .

L'amélioration de l'accès aux instances juridictionnelles (administratives) pour les organisations défendant un intérêt collectif relevant de leurs statuts aura une autre conséquence importante, à savoir qu'il y aura incontestablement un certain nombre d'effets démocratiques positifs non négligeables. Ainsi, la qualité des décisions prises par des autorités publiques peut s'améliorer, lorsque celles-ci ont conscience du fait que leur décision pourra être soumise à un contrôle légal renforcé des cours et tribunaux administratifs. Les possibilités accrues d'intenter une action sur la base d'un intérêt collectif (statutaire) font, apparemment, en sorte que l'administration se montre plus respectueuse de certaines lois et règles. La vigilance publique s'en trouve améliorée (8) .

Le présent amendement entend mettre fin au traitement différencié de différents groupes au sein de notre société et de rendre aisé l'accès aux tribunaux pour toutes les associations. Actuellement, il y a un besoin d'un réglementation uniforme à laquelle les associations puissent faire appel, pour autant qu'elles répondent à un certain nombre de conditions (cf. infra). L'article 19, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'État doit pour cela être adapté (9) .

Le présent amendement ne veut pas limiter le droit d'action collectif à certaines associations, telles que des groupements écologiques, par exemple. Les associations écologiques constituent l'un des groupes les plus actifs dans le débat sur l'accès à la justice pour les associations. À plusieurs reprises, elles ont lancé un appel pour que l'on s'attelle à la transposition, en droit interne, de la Convention d'Aarhus, qui a été signée par la Communauté européenne et ses États membres en juin 1998, et que la Belgique a ratifiée. En signant la Convention d'Aarhus, la Communauté européenne s'engage, dans son ensemble, à améliorer l'efficacité de sa politique environnementale. Pour atteindre cet objectif, il faut également que l'on crée les conditions pour assurer que l'acquis communautaire soit appliqué effectivement en matière environnementale. À cet effet, il convient de mieux faire respecter le droit environnemental et de donner à des groupes représentatifs qui militent pour la protection de l'environnement un meilleur accès à la justice en matière d'environnement (10) .

Le 3 janvier 2005, le Bond Beter Leefmilieu Vlaanderen a introduit une communication (11) au Comité d'examen du respect des dispositions de la Convention d'Aarhus, en lui demandant si la législation et la jurisprudence belges étaient conformes aux conditions de la Convention d'Aarhus. Dans ses draft findings and recommendations du 26 avril 2006, le Comité déclare: « ... the Committee is not convinced that Belgium fails to comply with the Convention. »

Les recommandations formulées par le Comité sont toutefois importantes:

« Therefore, the Committee, pursuant to paragraph 36 (b) of the annex to decision I/7, recommends the Party concerned to:

a) undertake practical and legislative measures to overcome the previous shortcomings reflected in the jurisprudence of the Council of State in providing environmental organizations with access to justice in cases concerning town planning permits as well as in cases concerning area plans; and

b) promote the awareness of the Convention, and in particular the provisions concerning access to justice, in the Belgian judiciary. »

L'auteure de l'amendement veut donner suite aux recommandations du Comité d'examen du respect des dispositions de la Convention d'Aarhus.

2. La notion d'« intérêt »: une jurisprudence disparate

Le droit actuel se caractérise par une jurisprudence disparate, à laquelle le législateur a réagi de manière peu cohérente et peu uniformisante (cf. infra). La jurisprudence du Conseil d'État et de la Cour d'arbitrage (actuellement Cour constitutionnelle) est généralement moins stricte que celle de la Cour de cassation. Cela tient à l'exigence d'un intérêt « né et actuel », imposée par l'article 18 du Code judiciaire et applicable aux actions introduites devant les cours ordinaires et les tribunaux. La législation applicable au Conseil d'État (12) et à la Cour constitutionnelle (13) ne fait pas mention d'un tel intérêt.

À partir de 1982, la Cour de cassation a commencé à se démarquer de plus en plus de la jurisprudence des tribunaux inférieurs, qui accordaient plus souvent l'accès à la justice à des associations souhaitant défendre des intérêts collectifs. À cet égard, la Cour a adopté un point de vue clair, qui peut être qualifié de strict et d'atomistique. C'est ainsi que, dans l'arrêt Eikendael, la Cour a refusé d'accorder l'accès à la justice à une personne morale, in casu une association qui œuvrait pour la protection de l'environnement, si elle poursuivait un objectif purement statutaire ou un intérêt général (tel que la protection de l'environnement). La Cour a exigé que l'association démontre l'existence d'un intérêt personnel et direct — c'est à dire un intérêt « propre ». Selon la Cour, l'intérêt propre d'une personne morale « ne comprend que ce qui concerne l'existence de la personne morale, ses biens patrimoniaux, et ses droits moraux, spécialement son patrimoine, son honneur et sa réputation (14)  ». En 1985, dans l'arrêt Neerpede, la Cour a confirmé sa jurisprudence contestée à plusieurs reprises par la doctrine (15) . Le législateur a tenu compte de la jurisprudence de la Cour en adoptant la loi du 12 janvier 1993 concernant un droit d'action en matière de protection de l'environnement.

Cette même association, qui, en 1982, devant la Cour de cassation, œuvrait pour la protection de l'environnement, avait introduit, en 1981, un recours en annulation auprès du Conseil d'État. Cette action a été déclarée recevable. Le Conseil d'État a estimé que la reconnaissance d'intérêts collectifs, qui sont distingués des intérêts individualisables des membres d'un groupe, entraîne la reconnaissance du droit qu'a ce groupe de défendre ses intérêts collectifs devant le juge, par le truchement d'une organisation qui le représente. Des associations qui œuvrent pour la protection de l'environnement, et qui sont mues par des intérêts se situant sur le plan des idées et ayant un caractère collectif plutôt que par des intérêts propres, peuvent agir pour l'intérêt général, in casu le souci de l'environnement (16) .

Dans son arrêt du 7 juin 2000, le Conseil d'État ne s'est pas prononcé sur l'existence d'un intérêt suffisant, mais a jugé que l'exposé des parties requérantes ne comportait pas suffisamment de données précises et concrètes pouvant indiquer que l'exécution immédiate de la décision attaquée pouvait leur causer un préjudice difficilement réparable dans le cadre de la réalisation de leur objet social. C'est pourquoi la demande a été rejetée (17) .

La notion d'« intérêt » est malgré tout également limitée par le Conseil d'État. Ainsi, celui-ci déclare que les ASBL doivent « démontrer un intérêt personnel, direct, actuel et licite ainsi que la qualité requise ». Selon le Conseil d'État, l'objectif que poursuit une ASBL ne peut coïncider avec « la défense de l'intérêt général même, pas plus qu'avec l'intérêt personnel des membres d'une association ». Sur la base de cette jurisprudence, différentes actions du mouvement écologique ont déjà été déclarées irrecevables (18) . Par contre, si l'action est intentée, par exemple, par un comité d'action local dont le champ d'action est clairement défini, le Conseil d'État estime qu'il y a bien un intérêt suffisant (19) . Toutefois, dans de nombreux arrêts du Conseil d'État, bien qu'il soit question d'un intérêt local, l'action en suspension est déclarée irrecevable (20) .

Le 28 mars 2003, le Conseil d'État a jugé qu'une fédération d'associations qui, en vertu de ses statuts, est constituée d'associations du secteur non-marchand, d'institutions dotées de la personnalité juridique et de personnes physiques représentant une association de fait dont les objectifs sont conformes à l'objet de la fédération, ne peut défendre les intérêts spécifiques de l'une des associations faisant partie de la fédération. Le Conseil a également estimé que, à première vue, les décisions attaquées portaient uniquement atteinte à des intérêts locaux et ne pouvaient être attaquées de manière recevable par une association faîtière d'associations de protection de la nature et de l'environnement (21) .

Dans son arrêt du 18 février 1993, la Cour d'arbitrage (actuellement, Cour constitutionnelle) a énuméré les conditions que doit remplir une association sans but lucratif pour pouvoir défendre un intérêt collectif devant le juge: l'objet social de l'association doit être d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général, l'intérêt collectif ne doit pas être limité aux intérêts individuels de ses membres, la norme entreprise doit être susceptible d'affecter cet objet, cet objet social doit être réellement poursuivi (ce que doivent faire apparaître les activités concrètes de l'association), et l'association doit faire preuve d'une activité durable, aussi bien dans le passé que dans le présent. En l'espèce, la demande a été jugée recevable (22) .

Le 4 mars 1996, la Cour d'arbitrage a jugé que l'ASBL « Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie », l'ASBL « Ligue des droits de l'homme » et l'ASBL « Syndicat des avocats pour la démocratie » poursuivaient un objectif qui ne se confond ni avec l'intérêt général ni avec l'intérêt individuel de ses membres. La Cour d'arbitrage a déclaré la demande d'annulation recevable, étant donné que l'objet social des associations était réellement poursuivi (23) .

En 2001, la Cour d'arbitrage a considéré que la preuve de l'existence d'un « lien suffisant entre l'objet social prédécrit et les dispositions attaquées pour justifier son intérêt au maintien de ces dispositions » suffisait pour justifier la recevabilité de l'action (24) .

Il ressort de ces exemples empruntés à la jurisprudence de la Cour de cassation, du Conseil d'État et de la Cour d'arbitrage que la jurisprudence des juridictions supérieures manque de cohérence. C'est également le cas en ce qui concerne les juridictions inférieures (25) .

Des jurisprudences contradictoires portent atteinte à la spécificité des associations et, partant, aux principes démocratiques si chers à notre État de droit. Les associations sont nées du besoin des hommes de s'unir pour défendre des intérêts communs. Gráce aux contacts étroits qu'elles entretiennent avec leurs membres, elles sont constamment au fait de ce qui se passe dans la société et peuvent réagir rapidement aux tendances qui s'y dessinent. Vis-à-vis de leurs membres, elles ont le devoir démocratique de dénoncer les situations injustes. Le rôle démocratique fragile qu'elles jouent dans notre société ne peut rester lettre morte. Il est inacceptable qu'une association ne puisse pas faire valoir devant un tribunal son droit de défendre l'intérêt collectif qu'elle poursuit.

D'où vient cette méfiance du juge ? D'une part, une jurisprudence négative témoigne de la crainte que l'octroi d'un droit d'action aux associations génère un afflux d'actions de mauvaise foi. Au vu de l'expérience française, tel ne s'avère cependant pas être le cas. Le nombre d'actions intentées par des associations de défense de l'environnement y est resté limité. D'autre part, on craint que le rôle du ministère public ne soit vidé de sa substance. L'objectif n'est toutefois pas de reprendre le rôle du ministère public par le biais d'actions collectives, dès lors que les associations ne poursuivent pas l'intérêt général, mais un intérêt touchant à la fois des intérêts privés et des intérêts généraux. En outre, à l'inverse du ministère public, les associations sont plus aptes à défendre de manière dynamique les intérêts de groupements, étant donné qu'elles sont souvent plus au fait de ce qui se passe dans la société (26) .

3. Le droit d'action collectif: une législation morcelée

La législation se caractérise aussi par un manque de cohérence. Pour répondre à la demande, formulée par certains groupes de la société, d'instaurer un droit d'action collectif, toute une série de lois ad hoc ont vu le jour, dont la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie, qui permet aux associations, jouissant de la personnalité juridique depuis au moins cinq ans et se proposant de défendre les droits de l'homme ou de combattre la discrimination, de réclamer devant le juge le respect de la loi; la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur, qui accorde un droit d'action collectif aux associations de commerçants, en vue de faire cesser des actes contraires à la loi précitée; la loi du 12 juin 1991 relative au crédit à la consommation, qui introduit un droit d'action collectif au profit des associations de consommateurs, qui peuvent ainsi également demander au juge de faire cesser des actes contraires à la loi précitée; et la loi du 12 janvier 1993, qui accorde un droit d'action en cessation similaire aux associations de protection de l'environnement.

Chaque loi fixe elle-même les critères auxquels les associations doivent satisfaire pour accéder à la justice. Il n'existe pas, à l'heure actuelle, dans le droit belge, de réglementation globale et uniforme en matière de droit d'action des associations. L'instauration de lois particulières réglant les droits d'action collectifs entraîne un morcellement du droit et porte, par conséquent, préjudice à son unité et sa clarté. Le présent amendement vise à mettre le holà à cette évolution, par une modification du droit judiciaire commun.

4. Le droit pour les associations d'intenter une action devant le Conseil d'État dans le but de défendre des intérêts collectifs

Pour les motifs exposés ci-dessus, concernant la sécurité juridique et la garantie des principes démocratiques de notre État de droit, le présent amendement vise à établir un droit pour les associations d'intenter une action devant le Conseil d'État, dans le but de défendre des intérêts collectifs. Un intérêt collectif est un intérêt qui dépasse l'intérêt personnel des membres de l'association.

Le présent amendement développe une série de critères qui, lorsqu'ils sont combinés, offrent suffisamment de garanties permettant d'empêcher que la condition de l'intérêt soit vidée de sa substance et que des actions malhonnêtes ou déraisonnables soient intentées. De plus, l'on met fin aux actions en justice des associations créées peu de temps avant le début de la procédure sans avoir pour objet, d'un point de vue structurel, de défendre des intérêts.

Les critères sont les suivants:

a. Les associations qui souhaitent introduire une action d'intérêt collectif doivent disposer de la personnalité juridique. La personnalité juridique reste, en effet, le gage d'un certain degré d'organisation et de stabilité. En outre, normalement, seuls des groupements ou des associations dotés de la personnalité juridique peuvent ester en justice. Une association de fait ne dispose pas de la qualité requise pour ester en justice. Si elle souhaite le faire, chaque membre doit agir séparément et justifier de son intérêt (l'association de fait n'étant pas considérée comme partie à la cause).

b. La personne morale doit être dotée de la personnalité juridique depuis plusieurs années au moment de l'introduction de l'action. La présente proposition propose trois ans.

c. La personne morale ne peut ester en justice que si son action s'inscrit véritablement dans la réalisation de son objet statutaire. L'objet statutaire de la personne morale ne peut être l'unique critère pour apprécier si une personne morale peut défendre un intérêt en justice. Ses activités réelles devront donner corps à la définition de l'objet statutaire de la personne morale.

d. L'objet statutaire de la personne morale doit être autorisé.

e. L'activité réelle de la personne morale doit être conforme à son objet social et avoir trait à l'intérêt collectif qu'elle vise à protéger. L'activité réelle peut ressortir de rapports d'activités, de procès-verbaux de réunions, de courriers adressés aux membres, de publications, de bulletins d'information et de contact, de coupures de presse, ... La condition de l'activité réelle doit s'entendre d'une manière souple et large.

En outre, l'article 9, paragraphe 2, alinéa 2, deuxième phrase, de la Convention d'Aarhus, prévoit une présomption (irréfragable) d'intérêt suffisant à agir en justice pour les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l'environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises à cette fin en droit interne. Les juridictions belges sont, en conséquence, obligées d'appliquer cette disposition de la Convention.

L'un des critères repris dans l'amendement, à savoir la condition de jouir de la personnalité juridique depuis au moins un an, peut, dans certains cas, rendre impossible le respect par la Belgique de ses obligations résultant du droit international et du droit de l'Union européenne. En effet, il se peut que les Régions n'imposent pas cette condition dans le cadre des procédures administratives en matière d'environnement. Dans ce cas, les organisations non gouvernementales concernées doivent, en vertu de l'article 9, paragraphe 2, de la Convention d'Aarhus et sur le fondement des directives européennes mettant en œuvre les dispositions de cette Convention, ainsi que sur la base de la directive 2004/35/CE, bénéficier de la présomption d'intérêt suffisant.

C'est pourquoi, l'amendement fait une distinction entre, d'une part, les personnes morales qui œuvrent en faveur de la protection de l'environnement et, d'autre part, les autres personnes morales.

L'amendement vise à compléter l'article 19, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'État, qui est actuellement libellé comme suit:

« Les demandes, difficultés, recours en annulation et recours en cassation visés aux articles 11, 12, 13, 14 et 16 peuvent être portés devant la section du contentieux administratif par toute partie justifiant d'une lésion ou d'un intérêt et sont soumis par écrit à la section dans les formes et délais déterminés par le Roi. »

Le présent amendement prévoit un certain nombre de critères qui, combinés les uns aux autres, doivent offrir des garanties suffisantes pour éviter que l'exigence d'un intérêt soit vidée de sa substance et pour exclure les actions malhonnêtes ou insensées.

Ainsi, une association ne peut ester en justice que si son action poursuit la réalisation de son objet statutaire. Ses activités réelles doivent donner corps à la définition de l'objet statutaire d'une association. Les associations qui souhaitent introduire une action d'intérêt collectif doivent être dotées de la personnalité juridique. Elles doivent avoir la personnalité juridique depuis trois ans au moment de l'introduction de l'action, avoir un objet statutaire autorisé et leurs activités réelles doivent être conformes à l'objet statutaire.

Nº 16 DE MME THIBAUT

Art. 10

Au point 5º, compléter l'alinéa proposé comme suit :

« et que la correction de l'acte vicié ne pourra porter atteinte à un tiers. »

Justification

À l'instar de la procédure de la boucle administrative aux Pays-Bas, l'auteure du présent amendement propose que la condition suivante soit reprise dans la procédure de la boucle administrative prévue dans le présent projet de loi: la correction de l'acte vicié ne pourra porter atteinte à un tiers.

Nº 17 DE MME THIBAUT

Art. 13

Compléter le § 2 de l'article 38 proposé par un 5°, rédigé comme suit :

« 5º la correction de l'acte vicié ne pourra porter atteinte à un tiers. »

Justification

Cfr. Justification de l'amendement sur l'article 10

Nº 18 DE MME THIBAUT

Art. 13

Compléter l'article 38 proposé par un § 5 rédigé comme suit :

« § 5 Lorsque la boucle administrative a été appliquée, les frais et dépens sont à charge de l'auteur de l'acte vicié et corrigé. »

Justification

Lorsque le requérant obtient actuellement l'annulation d'un acte illégal, les frais et dépens sont à charge de l'autorité publique. Pour l'auteure de l'amendement, la nouvelle procédure de la boucle administrative, qui reconnait l'illégalité d'un acte tout en donnant la possibilité à l'auteur de cet acte de le corriger, ne devrait pas instaurer une discrimination entre les recours en annulation sans boucle administrative (les frais et dépens sont à charge de l'autorité publique) et ceux avec boucle administrative. C'est pourquoi, le présent amendement prévoit que les frais et dépens sont à charge de l'autorité publique.

Nº 19 DE MME THIBAUT

Art. 38/1

Insérer un article 38/1 rédigé comme suit:

« Art. 38/1. L'arrêt examine le fondement de chacun des moyens soulevés par le requérant, ainsi que de tout moyen que le Conseil estime devoir soulever d'office, même si certains d'entre eux ne pourraient mener à une annulation plus complète qu'un moyen déjà déclaré fondé.

Par dérogation à l'alinéa 1, le Conseil peut se dispenser d'examiner un moyen qui requiert que soit posée une question préjudicielle. »

Justification

Une partie significative des difficultés de réfection des actes annulés par le Conseil d'État provient de ce que la Haute Juridiction ne tranche pas forcément tous les moyens qui lui sont soumis dans les recours. Selon un formule classique, le Conseil d'État estime qu'il n'y a pas lieu à statuer sur des moyens qui ne peuvent pas entraîner une annulation plus large que celle à laquelle conduit le moyen qu'il reconnaît fondé.

En conséquence, l'autorité administrative ne sait pas précisément quelles corrections il convient d'apporter à l'acte pour qu'il soit purgé de tous vices.

Une solution à ce problème est d'imposer au Conseil d'État de trancher tous les moyens du recours. Ainsi, si l'acte est annulé, la juridiction aperçoit s'il est possible, ou non, de refaire l'acte annulé et dans l'affirmative, à quelle condition la réfection est possible. L'autorité est d'autant mieux éclairée si le Conseil d'État fait usage de son pouvoir d'indication ou de son pouvoir d'injonction.

Il convient cependant de laisser au Conseil d'État la possibilité de ne pas trancher des moyens qui nécessitent une longue instruction parce qu'ils requièrent que soit posée une question préjudicielle à une autre juridiction.

Cécile THIBAUT.

(1) Velaers, J., De Grondwet en de Raad van State, vijftig jaar adviezen aan wetgevende vergaderingen, in het licht van het Arbitragehof, Maklu, p. 10, n° 4 et les auteurs qui y sont cités.

(2) Velaers, J., o.c., p. 13, n° 10.

(3) Larssen, C., « Het Verdrag van Aarhus en de toepassing ervan in het Belgisch recht — deel 2 », Tijdschrift voor Milieurecht, 2005, 509-510.

(4) Lemmens, P., « Het optreden van verenigingen in rechte ter verdediging van collectieve belangen », RW, 1984, 2002-2026.

(5) Moreau, T., « L'action d'intérêt collectif dans la lutte contre la pauvreté », JT, 1994, 493.

(6) Texte de la plate-forme « Recht op recht », appel lancé en faveur d'un meilleur accès à la justice pour les ONG, août 2000.

(7) Tavernier, J., ancien ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement dans le rapport de synthèse du colloque consacré à l'accès à la justice en matière d'environnement et au bilan de la loi du 12 janvier 1993 concernant un droit d'action en matière de protection de l'environnement, dix ans après son entrée en vigueur, colloque organisé par l'Association belge pour le droit de l'environnement et le ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement (de l'époque), Gand, octobre 2003.

(8) De Sadeleer, N., Roller, G., Dross, M., (2002) Access to justice in Environmental Matters, Final Report, (WWW) Commission européenne, Oko-instituut, p. 33-34, (http://www.oeko.de/elni/PDF-Files/Acces %20to %20Justice %20- %20final %20report.pdf) (25/01/06).

(9) La proposition de loi est basée sur l'article de Wagner, K., « Collectieve acties in het Belgisch recht », Tijdschrift voor Procesrecht en Bewijsrecht, 2001-4, 150-182. Ses développements reprennent également plusieurs éléments de cet article.

(10) Voir les développements de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'accès à la justice en matière d'environnement, déposée par la Commission le 24 octobre 2003, COM(2003) 624 final, 2003/0246 (COD).

(11) Communication du Bond Beter Leefmilieu ACCC/C/2005/11.

(12) Article 19, alinéa 1er, de la loi sur le Conseil d'État.

(13) Article 142, alinéa 3, de la Constitution, et article 2, 2o, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

(14) Cass. 19 novembre 1982, Arr. Cass., 1982-83, concl. E. Krings, Pas., 1983, I, 338 et RW, 1983-84, 2029, note J. Laenens.

(15) Cass., 25 octobre 1985, RW 1985-86, concl. E. Krings.

(16) Conseil d'État, 11 septembre 1981, VZW Werkgroep voor milieubeheer Brasschaat, RW, 1981-1982, 1876, note W. Lambrechts. Le Conseil d'État déclara que « la reconnaissance d'intérêts collectifs, qui doivent être distingués des intérêts individualisables des membres d'un groupe, a entraîné la reconnaissance du droit qu'a ce groupe de défendre ses intérêts collectifs, notamment devant le juge, par le truchement d'une organisation qui le représente, si du moins cette organisation a agi dans la procédure de la manière qui convient à sa nature juridique; qu'en présence d'une association déterminée capable d'ester en justice, le seul problème à résoudre consiste dès lors à vérifier si cette association a effectivement qualité pour agir en vue des intérêts collectifs qu'elle défend, en d'autres mots, si elle peut être considérée effectivement comme une organisation représentative du groupe dont elle veut défendre les intérêts ».

(17) Conseil d'État, 7 juin 2000, no 87 879, affaire A. 80.375/X-8447.

(18) Notamment les actions de Natuurreservaten VZW, De Wielewaal, VZW Regionale Aktiegroep Leefmilieu Dender en Schelde. Conseil d'État, 22 avril 1998, no 73 182; Conseil d'État, 13 octobre 1994, no 49 646; Conseil d'État 29 juin 1998, no 74 720.

(19) Conseil d'État 4 mars 1998, no 72 213; voir également le texte du programme d'action Recht op recht; oproep voor een betere toegang tot het gerecht voor NGO's.

(20) Conseil d'État 13 juin 2003, no 120 608, affaire A. 128.282/X-11 160. Dans cette affaire entre l'ASBL Natuurpunt — Wase Linkerscheldeoever et la commune de Beveren, la Région flamande et une SA, le Conseil d'État a estimé que les objectifs de l'ASBL « ... en raison de la portée absolue de ces objectifs ... À première vue, équivaut à l'actio popularis ... qu'il s'agit en la matière de travaux bien définis et d'actions en un lieu bien déterminé ... ». Selon le Conseil d'État, un intérêt local suffisamment délimité ne constitue pas, en l'occurrence, un motif suffisant pour déclarer l'action recevable.

(21) Conseil d'État, 28 mars 2003, no 117 681, affaire A. 125.960/X-11 094.

(22) Cour d'arbitrage, 18 février 1993, Moniteur belge, 3 mars 1993.

(23) Cour d'arbitrage, 4 mars 1993, Moniteur belge, 25 mars 1993.

(24) Cour d'arbitrage, 7 février 2001, ASBL Vlaamse Concentratie, no 10/2001, Moniteur belge du 1er mars 2001.

(25) Le 17 février 2005, le tribunal d'Anvers statua sur l'action introduite par De Ploeg, une association réunissant sept comités de quartier, conjointement avec Staten-Generaal, contre les travaux de construction effectués à la Kievitplein à Anvers. Les demandeurs firent valoir qu'ils n'avaient pas eu voix au chapitre pour ce qui est des travaux entrepris à la Kievitplein et que le projet de bureaux en cours empêchait toute saine combinaison d'habitat et d'espaces professionnels. Il n'a toutefois pas été statué sur le fond de l'affaire. Le juge déclara l'action des comités d'habitants irrecevable faute d'intérêt suffisant. Le jugement n'a pas encore été publié.

(26) Moreau, T., « L'action d'intérêt collectif dans la lutte contre la pauvreté », JT 1994, 490.