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Mme Marie Arena (PS). - Le virus de la striure brune qui attaque le manioc se propage très rapidement en Afrique depuis une quinzaine d'années. Or, la culture du manioc est une source très importante de nourriture et de revenus pour près de 300 millions d'Africains. Selon certains experts, les pertes provoquées par ce virus chez les producteurs africains s'élèveraient à plus de 75 millions d'euros par an. Dans un contexte de multiplication des sécheresses et de changement climatique, le manioc est une plante qui s'adapte bien et qui permettrait de rencontrer les besoins alimentaires de la population.
Or, le manioc est une plante négligée : il n'existe aucun centre international de recherche qui lui soit dédié comme il y en a pour le blé, le riz ou la pomme de terre. Le secteur privé ne s'intéresse guère au manioc.
Face à cette menace pour la sécurité alimentaire de l'Afrique subsaharienne, une conférence internationale réunissant experts et donateurs s'est tenue le 8 mai dernier en Italie. Plusieurs pistes ont été évoquées pour éradiquer ce virus : la création d'un centre de recherche international dédié au manioc, la rédaction d'un plan d'action, la mise au point d'un système de collecte et de transmission des informations afin d'éradiquer le virus, ainsi qu'un réseau de distribution de boutures certifiées de haute qualité, tout en travaillant sur des variétés plus résistantes aux maladies virales.
Étant donné que le manioc est un aliment très présent dans les pays de la coopération belge, je voudrais poser les questions que voici.
Comment la Belgique entend-elle agir concrètement pour aider à juguler la propagation de ce virus dans les pays partenaires de sa coopération ? L'axe « agriculture » est en effet une des priorités de notre coopération.
Pensez-vous que la création d'un centre de recherche international dédié au manioc soit une bonne idée ? Si oui, à quel niveau faut-il le proposer ? La Belgique, qui dispose gráce à ses centres universitaires - celui de Gembloux et l'Institut de médecine tropicale à Anvers - d'une certaine expertise, pourrait-elle jouer un rôle en ce domaine ?
M. Jean-Pascal Labille, ministre des Entreprises publiques et de la Coopération au développement, chargé des Grandes Villes. - Actuellement, deux centres internationaux de recherche agricole, tous deux membres du GCRAI (Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale) font de la recherche sur le manioc : l'IITA (International Institute of Tropical Agriculture) basé à Ibadan au Nigeria, et le CIAT (Centro Internacional de Agricultura Tropical) situé à Cali en Colombie.
Depuis la réforme du GCRAI, qui a commencé en 2009 et qui est soutenue par tous les bailleurs de fonds, dont la Belgique, un programme de recherche, intitulé Roots, Tubers and Bananas, a été développé. Il se focalise notamment sur la problématique de la culture du manioc.
Citons aussi le GCP21 (Global Cassava Partnership for the 21st Century), basé au CIAT, une initiative qui réunit régulièrement les chercheurs et institutions actifs dans le secteur du manioc ; la conférence internationale sur le manioc en 2008 à l'Université de Gand a bénéficié d'une subvention de la DGD.
Pour ces raisons, la création d'un nouveau centre de recherche uniquement dédié au manioc ne me semble pas opportune. Il faudrait, à mon avis, davantage se concentrer sur le développement et le soutien des initiatives et entités existantes.
La Belgique soutient la recherche agricole. En 2012, ce soutien se concrétisait par un budget de 9,3 millions d'euros. Notre pays appuie le GCRAI, notamment via les deux centres de recherche déjà mentionnés, ainsi qu'à travers le programme Roots, Tubers and Bananas.
Par ailleurs, à partir de 2013, une contribution est prévue pour un autre programme de recherche du GCRAI intitulé Humid Tropics, ainsi qu'un soutien spécifique pour la région des Grands Lacs. Ce programme, géré par l'IITA, prévoit des actions sur le thème du manioc en conjugaison avec le programme Roots, Tubers and Bananas. Les actions prévues se concentrent, entre autres, sur la recherche scientifique vers des variétés résistantes, la mise à disposition pour les centres nationaux de variétés améliorées et certifiées saines, ainsi qu'un transfert de connaissances vers ces centres et un suivi scientifique.
Dans nos pays partenaires, pour lesquels l'agriculture est un secteur prioritaire, on se concentre sur des activités de reproduction en milieu suivi et de distribution de boutures de variétés résistantes. Un appui aux centres nationaux de recherche et aux systèmes de vulgarisation est normalement intégré dans ce type d'interventions.
Mme Marie Arena (PS). - Je me réjouis d'entendre que la Belgique est en avance sur la conférence qui s'est tenue en Italie et qui faisait état d'un désintérêt pour le manioc. Je pense revenir dans une question écrite sur l'impact des nouvelles technologies et des nouvelles boutures résistantes dans les pays partenaires de notre coopération.
M. Jean-Pascal Labille, ministre des Entreprises publiques et de la Coopération au développement, chargé des Grandes Villes. - Encore un élément : lors du Forum économique congolais auquel j'ai assisté hier, il a été question du manioc dans le cadre du développement du Congo. C'est manifestement un dossier à suivre.