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Mme Marie Arena (PS). - Depuis le 21 décembre, à la suite d'une décision de la Cour de Justice européenne, les compagnies d'assurance ne peuvent plus faire de distinction entre les hommes et les femmes pour fixer le montant des primes des assurances décès.
Plusieurs assureurs ont décidé de saisir cette opportunité pour imposer de nouveaux critères à la souscription à une assurance de ce type, notamment l'indice de masse corporelle (IMC). À titre d'information, sachez qu'une personne de 1,80 mètre est en surpoids à partir de 80 kg et obèse à partir de 90 kg. Allianz et Axa prendront ainsi en compte à l'avenir ce critère et d'autres comme le lieu de résidence.
Monsieur le ministre, il me semble que de tels critères induisent des pratiques discriminatoires inacceptables. En effet les personnes à forte corpulence n'ont pas forcément des comportements « irrespectueux » de leur capital santé. Elles seraient, par le seul fait de leur IMC, condamnées à payer une prime plus élevée. N'y a-t-il pas là une forme de discrimination, d'autant qu'il est avéré que l'IMC varie en fonction du sexe, de l'áge et des origines ethniques ? Par ailleurs, les sportifs ont des IMC supérieurs à la moyenne alors que leur indice santé est meilleur.
Il en va de même pour le lieu de vie. Sur quel critère peut-on définir qu'un lieu de vie est meilleur pour la santé qu'un autre ? A-t-on le choix de son lieu de vie ? Les citadins sont-ils plus vulnérables ? Les ruraux sont-ils plus exposés aux risques de contamination des pesticides ? Si une antenne GSM placée dans votre périmètre constitue un risque pour votre santé, votre prime d'assurance sera-t-elle adaptée en conséquence ? Dans ce cas, la surprime doit-elle être payée par l'assuré, l'État ou l'employeur qui soumet la personne à un risque professionnel plus important ? Les opérateurs de téléphonie mobile devront-ils prendre cet élément en considération lorsqu'ils installent des antennes ?
Monsieur le ministre, avez-vous eu des contacts avec le secteur des assurances à ce sujet et, dans l'affirmative, pouvez-vous nous en dire davantage sur leurs intentions ? Par ailleurs, comment pourriez-vous empêcher de telles pratiques qui sont, à mon sens, discriminatoires ? Enfin, l'autorité de contrôle pourrait-elle prouver que les différents critères qui sont avancés par les assurances sont de nature à apporter des données statistiques actuarielles objectives ? Ce n'est en effet qu'à ce titre-là qu'ils pourraient être pris en considération.
M. Johan Vande Lanotte, vice-premier ministre et ministre de l'Économie, des Consommateurs et de la Mer du Nord. - La question de la non-discrimination entre les hommes et les femmes est un peu malencontreuse dans le cas qui nous occupe. Les femmes devront en effet payer leur assurance-vie aussi cher que les hommes alors qu'il est objectivement démontré que leur espérance de vie est supérieure.
L'Observatoire des prix a été chargé de suivre l'évolution des prix des assurances. La discrimination se définit comme étant une différenciation non justifiée. Une différenciation est autorisée si elle se base sur des éléments objectifs, qui font en sorte qu'un risque est plus élevé. Dans tous les autres cas, elle est interdite.
Il est à craindre que certaines différenciations soient utilisées dans le but d'augmenter les prix. Nous pourrons éventuellement intervenir a posteriori sur la base des constatations de l'Observatoire des prix, la réglementation européenne sur les assurances nous défendant explicitement d'intervenir a priori. Il s'agit de règles très strictes, un peu trop à mon sens.
Cela étant, le client qui estime que son risque a été surévalué peut demander que l'assureur le modifie mais l'assureur, pour sa part, ne pourra lui imposer un changement une fois le contrat signé.
En tout état de cause, je partage votre préoccupation, n'étant pas totalement convaincu que la situation évoluera correctement.
Mme Marie Arena (PS). - Comme vous, je trouve que cette restriction a posteriori est assez malvenue dans la mesure où il aurait été préférable de demander des suivis statistiques objectifs avant que l'assurance puisse pratiquer des différenciations. Comme ce n'est malheureusement pas le cas, je demande que l'autorité de surveillance, par le contrôle des prix ou la FSMA, puisse exiger de la part de ces assurances qu'elles se fondent sur des données statistiques objectives leur permettant de fournir une justification par rapport aux montants des primes demandés.
Il semble que la Belgique soit le seul pays européen qui intègre cette donnée de la masse corporelle. Celle-ci est utilisée actuellement aux États-Unis, mais rarement en Europe. Il faudrait donc analyser les pratiques européennes et éventuellement introduire, comme ce fut le cas pour la discrimination à l'égard des femmes, des recours auprès de la Cour de Justice européenne qui permettraient de compléter le dossier relatif à cette pratique discriminatoire.