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Mme Marie Arena (PS). - L'aspartame est un édulcorant artificiel faible en calories. En Europe, il est utilisé dans de très nombreux produits alimentaires. Selon certaines études, cet édulcorant pourrait avoir des effets négatifs sur la santé, particulièrement dans le cas des femmes enceintes, car il accroîtrait le risque d'accouchement prématuré. Il pourrait aussi entraîner une augmentation du nombre de cancers.
Une récente étude, réalisée par un chercheur italien cancérologue à l'Institut de recherche sur le cancer à Bologne, montre une augmentation des cancers du foie et des poumons chez la souris.
Le 8 janvier dernier, dans un projet d'avis scientifique, l'Autorité européenne de sécurité alimentaire a balayé toutes ces études « alarmistes ». Cette agence considère qu'aux niveaux actuels d'exposition, l'aspartame ne pose aucun problème de toxicité pour les consommateurs.
En octobre 2011, un rapport d'audit de la Cour des comptes européenne a révélé de graves conflits d'intérêts au sein de l'EFSA, particulièrement mise en cause en raison de liens étroits entretenus par certains de ses experts avec le lobby des géants de l'agroalimentaire : Monsanto, Unilever, Syngenta, Bayer, Nestlé, etc.
Il semblerait qu'aujourd'hui encore, l'indépendance des experts de cette agence soit mise en cause. Rappelons qu'il s'agit du bien-être de l'ensemble de la population européenne.
Disposez-vous, madame la ministre, d'études contradictoires ? De manière générale, quelle est la position du gouvernement belge quant à l'indépendance de l'EFSA ?
Mme Laurette Onkelinx, vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de Beliris et des Institutions culturelles fédérales. - Vous intervenez sur un thème d'actualité, celui de la problématique des conflits d'intérêts chez les experts.
Vous serez heureuse d'apprendre que l'EFSA est l'un des organismes au sein desquels les conflits d'intérêts sont combattus de la manière la plus vive. Cette agence pratique des règles particulièrement strictes à l'égard de ses experts. Par exemple, c'est l'un des premiers organes d'avis à avoir mis en ligne les déclarations d'intérêts et les biographies de ses experts.
L'EFSA veille aussi à améliorer la transparence de ses avis en organisant une consultation publique, comme dans le cas de l'aspartame. Chacun peut ainsi réagir au contenu de l'avis qui, à ce stade, est provisoire.
Comme vous le savez, l'EFSA a entamé un travail de réévaluation de tous les additifs alimentaires et pour ce faire, elle prend évidemment en compte toutes les études récentes.
Concernant cet édulcorant, la Belgique - plus spécifiquement l'Institut scientifique de la santé publique - a, en 2010, réalisé une étude intitulée : « Étude des édulcorants de table et estimation de l'apport total des édulcorants par la population belge ». Selon cette étude, la consommation d'édulcorants - y compris d'aspartame - est très largement inférieure à la dose journalière admissible fixée.
Voici quelques mois à peine, un colloque consacré à l'indépendance des experts a été organisé en concertation avec le Conseil supérieur de la santé. Les échanges y furent très intéressants. Des propositions de loi ont également été déposées à la Chambre en la matière. Nous travaillons actuellement sur divers sujets : adaptations au règlement d'ordre intérieur, déclarations d'intérêts, transparence, etc. L'objectif est d'accroître cette indépendance et de justifier dès lors d'autant plus le caractère incontestable des études menées.
Mme Marie Arena (PS). - Je remercie la ministre pour les explications données. Je suis bien entendu rassurée de constater que la Belgique réalise elle-même ce travail sur l'indépendance des experts. Les lobbies de l'agroalimentaire sont, on le sait, puissants. Nous devons garantir que les avis donnés aillent dans le sens de la protection des citoyens belges et européens, et non dans l'intérêt des groupes agroalimentaires.