5-1859/1

5-1859/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2012-2013

20 NOVEMBRE 2012


Proposition de loi modifiant la loi du 7 décembre 1998 organisant une police intégrée à deux niveaux en vue d'instaurer un droit d'interpellation auprès du Conseil de police

(Déposée par Mmes Cécile Thibaut et Freya Piryns)


DÉVELOPPEMENTS


La réforme des polices a retiré des conseils communaux le contrôle démocratique qu'il pouvait exercer sur la gestion de la police locale. Le législateur a, pour ce faire, créé des Conseils de police, véritable assemblée contrôlant l'exécutif des zones de police.

Les Régions, conformément à leur compétence de tutelle sur les communes, ont chacune défini un mécanisme d'interpellation citoyenne au conseil communal (1) . Le principe est donc répandu dans tout le pays.

Plus que jamais, le citoyen doit aussi avoir le droit de pouvoir directement interpeller les mandataires qui exercent la gestion et le contrôle de la police locale au sein du Collège de police à l'occasion des réunions de conseils de police. Pourquoi les citoyens auraient-ils le droit d'interpeller leurs mandataires sur des problèmes de propreté publique au sein du Conseil communal et pas sur les problèmes d'insécurité au sein de leur Conseil de Police ?

Quelques zones de police ont prévu, dans leur règlement d'ordre intérieur, une procédure d'interpellation citoyenne au conseil de police; mais cette possibilité n'existe pas dans toutes les zones de police du pays.

L'autorité publique a le devoir de répondre aux interrogations légitimes des citoyens. Instaurer le dialogue entre le politique et le citoyen au niveau local sur les questions de sécurité, c'est aussi une manière concrète de répondre à certains discours extrémistes visant à insécuriser les citoyens. La publication de la Fondation Roi Baudouin « Agir ensemble sur le sentiment d'insécurité » met en lumière l'importance de l'information et de la participation dans la diminution du sentiment d'insécurité.

La présente proposition de loi vise à promouvoir cette forme de participation citoyenne au sein des Conseils de police des zones mono- ou pluricommunales. La présente proposition de loi s'inspire des dispositions régionales en matière de droit d'interpellation au conseil communal.

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 2

Un nouvel article 27/2 est inséré à la loi du 7 décembre 1998 organisant une police intégrée à deux niveaux afin de prévoir une procédure d'interpellation citoyenne au sein des conseils de police des différentes zones du pays. Cette procédure permet aux habitants de la zone d'interpeller les conseillers de police et membres du Collège de police sur des questions relevant de leurs compétences.

Le premier paragraphe prévoit le principe d'un temps d'interpellation citoyenne au début de la séance du conseil de police.

Ce même paragraphe définit quels habitants peuvent interpeller les membres du collège de police de la zone dans laquelle ils vivent: il s'agit de, soit, toute personne physique de 16 ans au moins vivant dans la commune, ou une commune de la zone de police, soit, toute personne morale établie dans la commune, ou une commune de la zone de police et représentée par une personne physique que ne vit pas nécessairement dans les communes visées.

Il importe aux auteurs de la présente proposition de tenir compte des jeunes dans le processus de participation citoyenne. Ils visent donc à généraliser ce processus afin de leur permettre d'interpeller les mandataires de leur zone de police concernant la gestion et l'organisation de la police locale, matière qui les touche et les concerne tout autant que les majeurs d'áge.

La proposition de loi établit les critères de recevabilité d'une demande d'interpellation. L'objectif n'est pas de permettre aux habitants d'une zone d'utiliser ce système de participation citoyenne afin d'obtenir des informations qui sont confidentielles et couvertes par le huis clos, afin de tenir des propos contraires aux droits et libertés fondamentales ou afin d'obtenir des informations ou des conseils que d'autres services de la commune ou d'une des communes de la zone pourraient leur fournir.

En sus de ces critères de recevabilité fixés par la loi qui permettent de rejeter automatiquement une demande d'interpellation qui n'y répondrait pas, la proposition de loi prévoit la possibilité pour le Collège de police de déclarer une demande d'interpellation irrecevable dans l'intérêt de l'ordre public.

Les paragraphes 3 et 4 prévoient la procédure de prise en considération d'une demande d'interpellation et la procédure d'interpellation devant le conseil de police, ainsi que les modalités de réponse par le Collège de police et les possibilités de répliques de l'interpellant.

Les interpellations sont toujours publiques. Le huis clos ne peut donc être décidé pour le temps des interpellations.

Le texte proposé définit aussi les règles auxquelles la procédure d'interpellation est soumise en matière d'information et de publication.

Cécile THIBAUT.
Freya PIRYNS.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Dans la loi du 7 décembre 1998 organisant une police intégrée à deux niveaux, il est inséré un article 27/2, rédigé comme suit:

« Article 27/2

§ 1er. À l'ouverture de la séance du Conseil de police, en présence des membres du Collège et des conseillers de police, un temps d'interpellation est réservé aux habitants de la zone de police monocommunale ou pluricommunale.

Pour l'application du présent article, on entend par habitant: toute personne physique de seize ans accomplis inscrite au registre de la population d'une commune de la zone de police depuis six mois au moins, ou toute personne morale dont le siège social ou d'exploitation est localisé sur le territoire d'une commune de la zone de police et qui est représentée par une personne physique de seize ans accomplis.

§ 2. La demande d'interpellation devra répondre aux conditions suivantes:

1º elle doit être introduite par au moins un habitant visé au § 1er, alinéa 2;

2º elle doit être rédigé dans une des langues de la zone de police;

3º elle doit porter sur un objet relevant de la compétence de décision du collège ou du conseil de police

a) en matière d'organisation et de gestion du corps de police locale;

b) ou en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, conformément à l'article 10 de la présente loi;

4º elle doit être à portée générale.

Est irrecevable l'interpellation:

— relative à une matière qui relève de la compétence des séances à huis clos;

— relative à une matière qui relève de la compétence des services de police en matière judiciaire;

— qui ne respecte pas les droits de l'homme ou revêt un caractère raciste ou xénophobe;

— relative à une matière qui a fait l'objet d'une interpellation au cours des trois derniers mois;

— relative à une matière qui relève d'une des compétences du Conseil zonal de sécurité;

— qui constitue des demandes de documentation;

— qui a pour unique objet de recueillir des consultations d'ordre juridique.

Le Collège de police décide de la recevabilité de l'interpellation. Sans préjudice aux conditions d'irrecevabilité déterminées à l'alinéa précédent, le Collège de police peut, dans l'intérêt de l'ordre public, déclarer une demande d'interpellation irrecevable. Toute décision d'irrecevabilité est spécialement motivée en séance du conseil de police.

Pour le reste, la procédure de recevabilité des interpellations est réglée par les dispositions du règlement d'ordre intérieur.

§ 3. Pour être prise en considération, la demande d'interpellation devra être rédigée par écrit et comprendre un bref exposé du sujet. Toutes les pièces utiles à l'interpellation seront jointes à cette demande.

Dans la demande d'interpellation seront repris les noms de l'interpellant, des éventuels signataires et éventuellement de l'association représentée.

La demande d'interpellation devra être remise au Secrétaire du Conseil de police, au moins dix jours francs avant la date fixée pour la séance du Conseil de police.

Les demandes d'interpellation sont classées et numérotées par ordre d'arrivée dans les mains du Secrétaire du Conseil de police. Elles sont soumises dans cet ordre au temps d'interpellation.

La liste des demandes d'interpellation est communiquée aux membres du conseil de police avant chaque séance.

§ 4. Une copie des présentes dispositions et des dispositions du règlement d'ordre intérieur qui l'appliquent sera remise aux interpellants par le Secrétaire du Conseil de police lors de la remise de la demande d'interpellation.

§ 5. L'interpellant expose sa question en début de séance à l'invitation du président du conseil.

Un membre du Collège de police répond à l'interpellation au nom du Collège.

L'interpellant peut répliquer à la réponse, avant la clôture définitive du point de l'ordre du jour.

Les règles de prise de parole durant le temps d'interpellation sont prévues dans le règlement d'ordre intérieur.

§ 6. Sans préjudice à l'article 93, alinéa 2, de la Nouvelle loi communale, le temps d'interpellation est public.

Les interpellations sont transcrites dans le procès-verbal de la séance du Conseil de police.

Les interpellations sont publiées sur le site Internet de la zone de police ou au moyen d'une publication ad hoc.

§ 7. Le règlement d'ordre intérieur fixe les modalités d'application du présent article. »

26 octobre 2012.

Cécile THIBAUT.
Freya PIRYNS.

(1) Instauration d'un droit d'interpellation auprès du Conseil communal de la commune: Code de la démocratie locale (Moniteur belge du 14 mai 2012); ordonnance du Parlement bruxellois du 23 juillet 2006 (Moniteur belge du 24 août 2006) qui modifie l'article 89bis de la Nouvelle loi communale; Gemeentedecreet (2005, Hoofdstuk IIbis Voorstellen van burgers).