5-1841/2 | 5-1841/2 |
20 NOVEMBRE 2012
I. INTRODUCTION
Le projet de loi « modifiant la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement et à l'accès aux systèmes de paiement et d'autres législations dans la mesure où elles sont relatives au statut des établissements de paiement, des établissements de monnaie électronique et des associations de crédit du réseau du Crédit professionnel », qui relève de la procédure bicamérale facultative, a été déposé à la Chambre des représentants le 2 octobre 2012 (doc. Chambre, nº 53 2431/1) et adopté par celle-ci le 14 novembre suivant, par 79 voix contre 34 et 11 abstentions.
Le projet de loi « modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque Nationale de Belgique », qui relève de la procédure bicamérale obligatoire, a été adopté le même jour par la Chambre des représentants, par 115 voix et 9 abstentions (doc. Chambre, nº 53 2432/1).
Les deux projets ont été transmis le 14 novembre au Sénat, qui a évoqué le 19 novembre le projet relevant de la procédure bicamérale facultative.
Conformément à l'article 27.1, alinéa 2, du règlement du Sénat, la commission a entamé l'examen des projets de loi avant le vote final à la Chambre des représentants. Cet examen a eu lieu les 13 et 20 novembre 2012.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE M. HENDRIK BOGAERT, SECRÉTAIRE D'ÉTAT À LA FONCTION PUBLIQUE ET À LA MODERNISATION DES SERVICES PUBLICS, ADJOINT AU MINISTRE DES FINANCES, ET DE M. SERVAIS VERHERSTRAETEN, SECRÉTAIRE D'ÉTAT AUX RÉFORMES INSTITUTIONNELLES ET À LA RÉGIE DES BÂTIMENTS
Les deux projets de loi précités tendent à assurer la transposition de la directive 2009/110/CE relative à la monnaie électronique (connue également sous le nom de « directive E-Money ») (1) .
Cette transposition devait être effectuée pour le 30 avril 2011 au plus tard, mais la période d'affaires courantes a provoqué ce retard. Les deux projets de loi ont donc un caractère urgent. C'est pourquoi le gouvernement demande au Parlement le traitement d'urgence de ces dossiers.
La directive 2009/110/CE comporte deux parties:
1. une première partie qui prévoit les conditions de l'accès à l'activité des établissements de monnaie électronique et de son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ceux-ci et
2. une deuxième partie qui impose aux émetteurs de monnaie électronique un certain nombre d'obligations envers les détenteurs de celle-ci.
1. Projet de loi nº 5-1841/1
Partie 1
La directive 2009/110/EG est transposée par le projet de loi nº 5-1841/1 notamment en modifiant la loi du 21 décembre 2009 sur les établissements de paiement, où un nouveau registre est introduit, relatif à l'accès à l'activité d'émission de monnaie électronique et le statut des établissements de monnaie électronique. La Banque Nationale de Belgique est chargée de surveiller la conformité des articles de ce nouveau registre.
Lorsqu'on lit la définition de « monnaie électronique » dans la directive et le projet de loi, on pourrait se demander ce qu'il y a lieu d'entendre concrètement par « monnaie électronique ». En effet, la notion de monnaie électronique est définie de manière assez générale, dans des termes plutôt abstraits, si bien qu'à première vue, on ne sait pas clairement quels sont exactement les instruments de paiement qui sont visés par la définition légale.
Le considérant (8) de la directive précise à cet égard: « La définition de la monnaie électronique devrait comprendre à la fois la monnaie électronique ayant pour support un dispositif de paiement que le détenteur de monnaie électronique a en sa possession et celle qui est stockée à distance sur un serveur et gérée par le détenteur de monnaie électronique par l'intermédiaire d'un compte spécifique de monnaie électronique. La définition devrait être assez générale pour ne pas nuire à l'innovation technologique et pour englober non seulement la totalité des produits de monnaie électronique disponibles aujourd'hui sur le marché, mais également les produits qui pourraient être développés à l'avenir. »
La monnaie électronique est donc un équivalent numérique de l'argent liquide qui est stocké sur un support électronique (card based) ou sur un serveur distant (server based). Un des types les plus courants de monnaie électronique est le « porte-monnaie électronique », sur lequel les utilisateurs stockent de faibles montants d'argent sur leur carte de crédit ou sur une autre carte à puce pour effectuer des petits paiements (par exemple Proton en Belgique, ou Chipnik aux Pays-Bas). La monnaie électronique peut également être enregistrée sur des téléphones mobiles (et utilisée au moyen de ceux-ci) ou un compte de paiement sur Internet (comme Paypal). À l'étranger, on peut citer l'exemple de la « carte Oyster » pour le réseau de transport à Londres, ou la très populaire « Octopus-card », une carte de type « smart card », qui est utilisée à Hong-Kong. Cette carte existe déjà depuis le 1er septembre 1997, et était initialement utilisée comme titre de transport et comme moyen de paiement dans les transports publics. Les fonctions de la carte ont été progressivement étendues, de sorte que la carte peut également être utilisée pour le paiement des parkings automatiques, ainsi que dans les restaurants et les cinémas. En outre, la carte est également utilisée comme moyen d'identification pour l'accès dans des bâtiments.
Les applications de la monnaie électronique sont donc multiples et étroitement liées à l'évolution technologique. Cela explique aussi pourquoi la notion de monnaie électronique est définie de manière abstraite dans la directive et dans la loi en projet, afin qu'elle reste « technologiquement neutre ». Il est un fait que la réglementation est souvent à la traîne par rapport à l'évolution technologique.
Le législateur européen a modifié le cadre juridique introduit par la directive 2000/46/CE (2) , car certaines de ses dispositions auraient entravé la création d'un véritable marché intérieur pour les services relatifs à l'émission de monnaie électronique. Le statut d'établissement de monnaie électronique n'a connu effectivement qu'un succès modeste en Europe, et en particulier en Belgique, où il n'y a que deux établissements de monnaie électronique qui ont obtenu un agrément, à savoir HPME (Hi-Media Porte Monnaie Électronique) et Tunz.Com.
Les principales modifications qui sont introduites par la directive 2009/110/CE, concernent le statut de surveillance prudentielle des établissements de monnaie électronique et visent à simplifier ce statut. Ainsi, les établissements de monnaie électronique ne forment plus une catégorie spécifique d'établissements de crédit et les dispositions de la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit ne s'appliquent plus à ces institutions.
En outre, le capital initial requis pour obtenir un permis d'établissement de monnaie électronique est réduit. En revanche, l'établissement de monnaie électronique doit disposer en permanence des capitaux (exigences de fonds propres), afin de garantir une protection suffisante aux consommateurs, et des exigences plus strictes sont fixées en matière de gestion saine et prudente. En outre, des dispositions plus strictes sont applicables pour la protection des fonds des détenteurs de monnaie électronique.
Une autre modification importante réside dans l'introduction de la possibilité pour les établissements de monnaie électronique d'exercer d'autres activités commerciales qui ne se rapportent pas nécessairement à l'émission de monnaie électronique, sans devoir isoler ces activités dans une autre entité.
Le régime d'exemption déjà prévu dans la directive 2000/46/CE a été revu et ne concerne plus que les établissements de monnaie électronique qui émettent un petit volume de monnaie électronique (5 millions d'euros au maximum).
Partie 2
La deuxième partie du projet de loi nº 5-1841/1 transpose les dispositions du titre III de la directive 2009/110/CE « Émission et remboursement de la monnaie électronique » et traite directement de la relation contractuelle entre les émetteurs de monnaie électronique et les titulaires d'argent électronique. Cela concerne en particulier:
1) l'émission de monnaie électronique à la valeur nominale de l'argent reçu par le titulaire;
2) l'interdiction d'accorder des intérêts; et
3) l'obligation et les conditions de remboursement de la monnaie électronique par l'émetteur au titulaire.
Compte tenu de l'étroite parenté de cette matière avec les services de paiement et vu la nature des dispositions en question, il a été décidé de les intégrer dans la loi du 10 décembre 2009 relative aux services de paiement. Le contrôle de leur respect fait l'objet d'une répartition de compétences entre le SPF Économie et la Banque nationale.
En guise d'amendement au projet de loi relatif à la monnaie électronique, le gouvernement a proposé, lors de la discussion à la Chambre, d'apporter une série de modifications au statut des banques coopératives qui faisaient historiquement partie du « réseau du Crédit professionnel », qui a disparu dans les faits.
Les amendements, tels qu'ils ont été approuvés à la Chambre des représentants, tiennent compte de l'avis du Conseil d'État nº 52.296/2 du 31 octobre 2012 (doc. Chambre, nos 53-2431/4 et 53-2431/5). Cela concerne les articles 114 et 115 du projet de loi à l'examen.
Le régime proposé permet de s'affranchir plus facilement du statut du Crédit professionnel, mais continue à prévoir le versement à l'État d'une « prime de départ ».
Lors du contrôle budgétaire de mars 2012, le gouvernement avait déjà entrevu la possibilité de réaliser une opération win-win, à savoir, d'une part, permettre aux établissements concernés qui le souhaitent de changer de statut plus facilement et de retrouver une place à part entière dans le paysage bancaire et, d'autre part, engranger une recette immédiate pour le budget. Au terme de plusieurs mois de discussions avec les établissements concernés, le gouvernement est parvenu, il y a quelques jours, à un consensus à ce sujet et a estimé que le nouveau régime de départ devrait déjà entrer en vigueur fin novembre pour permettre aux établissements bancaires qui le souhaitent de démissionner du réseau cette année encore, auquel cas une recette supplémentaire pourrait être engrangée immédiatement pour le Trésor en 2012.
Pour être complet, il convient aussi de signaler que si toutes les associations de crédit devaient être sorties du champ d'application de la loi d'ici fin 2013, un « nettoyage » légistique de la loi de 1996 serait envisageable. En effet, un certain nombre de dispositions seraient alors devenues sans objet.
Pour le reste, le secrétaire d'État renvoie à la discussion approfondie qui a été menée à ce sujet à la Chambre des représentants. Étant donné qu'une décision du conseil d'administration de l'établissement concerné est suffisante et que le gouvernement escompte que l'opération en question lui permettra de dégager des recettes pour le budget 2012, il insiste sur l'importance que le projet de loi à l'examen soit approuvé très rapidement.
2. Projet de loi nº 5-1842/1
Le projet de loi soumis à la procédure bicamérale obligatoire modifie l'article 36/22 de la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique afin de tenir compte de l'instauration du nouveau statut prudentiel pour les établissements de monnaie électronique. Le projet de loi règle l'introduction d'un recours auprès du Conseil d'État conformément à la procédure accélérée contre certaines décisions de la Banque. Cela concerne concrètement les décisions prises par la Banque vis-à-vis des établissements de monnaie électronique dans le cadre de demandes d'agrément des établissements souhaitant obtenir le nouveau statut ou dans le cadre de la surveillance prudentielle exercée par la Banque sur l'exercice des activités de ces établissements.
III. DISCUSSION
A. Projet de loi nº 5-1841/1 modifiant la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement et à l'accès aux systèmes de paiement et d'autres législations dans la mesure où elles sont relatives au statut des établissements de paiement, des établissements de monnaie électronique et des associations de crédit du réseau du Crédit professionnel (article 78 de la Constitution)
1. Réunion du 13 novembre 2012
Questions et observations des membres
Mme Maes déduit de l'exposé introductif que dorénavant, les établissements de monnaie électronique auront également la possibilité d'octroyer des crédits. Cette possibilité est-elle instaurée à la demande du secteur lui-même ? Dans l'affirmative, ces crédits seront-ils enregistrés ou des plafonds seront-ils appliqués (200 euros) ? En cas de limitation de l'obligation d'enregistrement, l'intervenante aimerait quand même savoir pourquoi aucune extension de cette obligation n'a été prévue.
Réponse de M. Hendrik Boogaert, secrétaire d'État à la Fonction publique et à la Modernisation des Services publics, adjoint au ministre des Finances
Le projet de loi entend instaurer, pour les établissements de monnaie électronique, un système identique à celui qui existe pour les établissements de paiement. Il transpose la directive 2007/64/CE qui prévoyait la possibilité pour les établissements de paiement d'octroyer des crédits liés à des services de paiement et soumis à des conditions très spécifiques: le crédit doit avoir été remboursé dans les douze mois et doit être lié à des services de paiement. La directive 2007/64/CE prévoit également que tant les établissements de monnaie électronique que les établissements de paiement peuvent exercer n'importe quelle activité commerciale. Ils sont donc autorisés à octroyer des crédits. La Banque nationale n'exercera toutefois aucun contrôle prudentiel sur cette activité. Ce contrôle sera exercé par d'autres instances compétentes, comme le SPF Économie. On a fait le choix de ne pas fixer de plafonds. Le projet de loi se limite à transposer strictement la directive européenne. Il y a certes dans le projet de loi une disposition qui prévoit que lorsqu'un établissement exerce des activités commerciales autres que les services de paiement ou l'émission de monnaie électronique, il doit recevoir l'autorisation de la Banque nationale qui vérifie si les activités en question sont dûment réglementées et si elles sont supervisées par une autre autorité belge.
Répliques
Mme Maes déclare que la réponse du secrétaire d'État ne fait qu'ajouter à son inquiétude, car elle constate que la surveillance des activités en question est encore plus morcelée. Or, ce qui importe, surtout en période de crise, c'est d'avoir une bonne vision d'ensemble des systèmes existants en matière d'octroi de crédits et de la manière dont la surveillance est organisée. L'intervenante ne peut donc que déplorer cette évolution.
2. Réunion du 20 novembre 2012
Questions et observations des membres
M. Morael a un certain nombre de questions et de remarques à formuler au sujet des dispositions concernant les activités relatives au Crédit professionnel. Un certain nombre de dispositions du projet de loi nº 5-1841/1 concernent en effet trois associations de crédit du réseau du Crédit professionnel. Ces associations ont le statut de société coopérative et pourraient, en payant une sorte de « taxe de sortie » — dans la presse, on avance un montant de 120 millions d'euros pour les trois associations de crédit — être libérées de leur statut de société coopérative. Elles seraient ainsi déchargées d'un certain nombre d'obligations contraignantes.
L'intervenant aimerait toutefois savoir quelles sont les conséquences d'une telle opération pour les coopérants qui détiennent différents types d'actions, à savoir des actions A et des actions B. Quel pouvoir de décision auront encore ces détenteurs d'actions ? Pourront-ils encore disposer librement de leurs actions ou seront-ils soumis à certaines restrictions ?
Réponse de M. Servais Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles et à la Régie des bâtiments
Les banques qui sont concernées concrètement par l'opération visée dans le projet de loi sont les suivantes:
Onderling Beroepskrediet (OBK), qui a été repris récemment par BKCP, établissement qui fait lui-même partie d'un groupe français qui, outre OBK, a repris aussi Citibank Belgium;
Antwerps Beroepskrediet (ABK), qui a été repris l'année dernière par la banque J. Van Breda & Cº;
Le Crédit professionel du Hainaut (CPH), qui lui-même a repris la Caisse d'épargne de la ville de Tournai.
À la suite de l'abandon du statut coopératif, les actions B disparaîtront et les porteurs de ces actions se verront verser leur apport nominal au moment où l'établissement abandonnera le statut coopératif. En ce qui concerne les rares actions A qui sont encore en circulation dans le public, leurs titulaires recevront également une somme correspondant au montant de l'apport nominal.
Répliques
M. Morael déduit de la réponse du secrétaire d'État que les porteurs des actions ne pourront donc plus les vendre après que l'établissement aura abandonné le statut coopératif.
Le secrétaire d'État répond que la disparition du statut coopératif coïncidera avec celle des actions coopératives. Il ne s'agit en l'espèce que d'un nombre limité d'actions vu que OBK, ABK et BKCP ont déjà été repris par des groupes. Seul CPH compterait encore quelques actionnaires privés, mais ces derniers disparaîtront eux aussi probablement en même temps que le statut coopératif.
M. Daems souhaite savoir si, vu qu'il reste encore un certain nombre d'actionnaires privés, ces derniers auront la faculté de contester en justice le paiement à la valeur nominale. Dans l'affirmative, a-t-on pris en compte ce que peuvent représenter les conséquences financières d'une telle action en justice ? Quand on sait que les trois sociétés devraient payer 120 millions d'euros pour abandonner le statut coopératif, il faut bien se dire que si elles font la démarche, c'est qu'elles n'y perdent pas, bien au contraire.
Mais si un actionnaire privé est obligé de céder ses actions pour une somme correspondant au montant nominal de leur apport parce qu'il est mis fin au statut coopératif, alors que la valeur réelle de ces actions est supérieure, les intérêts de ce particulier sont lésés selon M. Daems.
M. Degroote constate que les institutions concernées abandonnent le statut coopératif au profit du statut de société anonyme. Cela signifie-t-il que les actions A seront converties en actions d'une société anonyme et qu'une sorte d'« offre publique de retrait forcé » sera faite pour les actions publiques restantes ?
M. Morael revient à sa question initiale: supposons qu'une société coopérative abandonne son statut pour adopter la forme d'une société commerciale. Dans ce cas, le coopérateur qui souhaite renoncer à ses actions sera rémunéré à hauteur la valeur nominale de son apport. Mais si le coopérateur ne quitte pas la société, il devient porteur d'actions d'une société anonyme. Que peut alors faire l'actionnaire de ces actions ?
M. Daems estime que la question cruciale est de savoir ce qu'il advient de la valeur intrinsèque de l'établissement après le changement du statut, étant donné que la loi autorise de procéder à un tel changement de manière unilatérale, moyennant le paiement d'une taxe. L'intervenant suppose que cette valeur reste suffisante. Si ce n'était pas le cas, l'on ne paierait pas une taxe d'un montant considérable pour modifier le statut. Une deuxième question importante est de savoir ce qu'il advient des actionnaires individuels qui, du fait de la modification du statut de l'établissement, sont nomément exclus et devront se contenter de la valeur nominale de leur apport.
Le secrétaire d'État indique que le régime de départ est un régime volontaire. Les établissements peuvent décider de ne pas abandonner le statut coopératif. En outre, les actionnaires des sociétés coopératives n'ont jamais droit à une plus-value. Ils ont un apport nominal et ne sont rémunérés qu'à hauteur de la valeur nominale de cet apport en cas de départ. Le projet de loi à l'examen donne une base légale permettant d'abandonner le statut de société coopérative sous certaines conditions. Il exige en outre une décision du conseil d'administration de la société coopérative. Si certains actionnaires estiment qu'une décision du conseil d'administration leur est préjudiciable ou a lésé leurs intérêts d'une manière ou d'une autre, l'arsenal complet du Code des sociétés est à leur disposition. Ils peuvent, en d'autres termes, entreprendre des démarches en justice et saisir le tribunal compétent en la matière, en l'espèce le tribunal de commerce, afin de faire valoir certains droits.
En outre, le secrétaire d'État souligne à propos de la question de M. Daems relative à la valeur intrinsèque de l'établissement que cette dernière n'est en fait pertinente que pour CPH, vu que les autres banques ont été reprises avec des moins-values parce qu'elles étaient en difficulté. Par le passé, CPH a incorporé à plusieurs reprises des réserves dans ses fonds propres, en sorte que les actionnaires n'auraient pas été lésés.
Le secrétaire d'État déclare partir du principe que le régime de départ, qui est rendu possible par le projet de loi, sera appliqué par les établissements précités. C'est ce qui est ressorti des discussions qui ont eu lieu entre le gouvernement et les établissements concernés. Comment expliquer que ces établissements soient disposés à appliquer ce régime de départ, alors que cela leur coûtera de l'argent et que l'État belge en tirera un avantage budgétaire ? D'une part, parce que cela leur procurera des avantages en termes de synergies et, d'autre part, parce que cela leur donnera la possibilité de fusionner avec les établissements bancaires auxquels ils appartiennent déjà commercialement. Au terme de cette opération, ces établissements pourront déployer des activités qu'ils ne pouvaient pas exercer de jure jusqu'à présent.
M. Morael déclare ne pas être satisfait de la réponse fournie par le secrétaire d'État; il propose dès lors à la commission de poursuivre ultérieurement l'examen des projets de loi et demande au secrétaire d'État de revenir la semaine prochaine devant la commission afin de présenter une réponse plus étayée.
Le secrétaire d'État renvoie à la réponse qu'il vient de donner et met une nouvelle fois l'accent sur les avantages que procurera le régime de départ prévu par le projet de loi. Tant que les établissements en question n'abandonnent pas le statut coopératif, ils sont dans les faits voués à disparaître et ils sont privés de la possibilité de déployer des activités commerciales. En outre, les établissements concernés ont fait savoir de manière informelle au gouvernement qu'ils sont intéressés par les possibilités créées par le projet de loi et qu'ils sont prêts à participer au système. En réaction, le gouvernement a revu le prix — qu'il avait fixé précédemment à 46 millions d'euros — afin de le porter à 102 millions d'euros et non à 120 millions d'euros, comme l'ont dit certains commissaires.
M. Degroote demande au secrétaire d'État de préciser comment ces 102 millions d'euros seront répartis entre les établissements concernés.
M. Morael souhaite que sa proposition prévoyant de reporter d'une semaine la suite de la discussion relative aux projets de loi soit mise aux voix en commission.
M. Daems déclare que pour sa part, l'examen des projets de loi en commission peut se pousuivre, mais qu'il souhaiterait une ventilation des chiffres par établissement, ainsi que M. Degroote l'a demandé.
Le secrétaire d'État indique qu'aujourd'hui, les établissements bancaires ne sont plus prêts à injecter de l'argent dans les sociétés coopératives et qu'ils sont même allés jusqu'à suggérer qu'on leur permette d'abandonner le statut coopératif sous certaines conditions afin qu'ils puissent déployer des activités commerciales d'une manière correcte. En ce qui concerne le mode de calcul, l'intervenant renvoie à l'article 115 du projet de loi, qui précise cette formule explicitement.
Concernant la question de savoir si les actionnaires d'une société coopérative seront lésés ou s'ils recevront la part qui leur revient en cas de sortie du réseau du Crédit professionnel, le secrétaire d'État tient à apporter un certain nombre de précisions.
Dans le régime actuel, l'actionnaire d'une société coopérative ne peut jamais percevoir des revenus qui excèdent son apport. Le rendement est plafonné à un intérêt maximum fixé par le conseil supérieur de la coopérative; aucune plus-value ne peut être distribuée et, en cas de liquidation, tout est versé au fonds de participation. La reprise par un autre établissement du réseau est la seule possibilité, et il n'y a plus de candidats à la reprise. On peut renvoyer à cet égard à l'article 58 de la loi de 1996.
L'actionnaire d'une société coopérative assume, en revanche, le risque de l'entreprise dans son intégralité et peut difficilement le partager avec un nouvel investisseur. Si une entreprise se trouve confrontée à des difficultés financières, aucun investisseur extérieur au réseau ne sera prêt à injecter un supplément de capital car il ne pourra compter lui aussi que sur un rendement limité à son apport.
Il n'y a plus guère d'actionnaires dans les sociétés coopératives. Chez ABK, le capital s'élève à 3,7 millions d'euros et il est détenu dans sa quasi-totalité par la Banque J. Van Breda & Co; chez OBK, le capital est de 0,8 million d'euros et est entre les mains de quelques particuliers; à la BKCP, le capital de 55 millions est détenu intégralement par CPsa et donc par le Crédit Mutuel Nord Europe (CMNE). Le CPH est le seul établissement où un capital de 52 millions demeure encore entre les mains d'actionnaires du public.
La réglementation prévoit une protection supplémentaire pour les actionnaires du public; aucune taxe de départ ne doit être payée pour les réserves — jusqu'à concurrence d'un montant égal à 50 % de l'apport des actionnaires — qui ont été constituées dans le but de garantir à ceux-ci une meilleure protection. Le CPH a constitué cette réserve en augmentant le capital.
La loi sur les sociétés restera d'application après la transformation éventuelle de la société en société anonyme. À cet égard, les actionnaires auront droit à la part de capital qui leur revient. Au CPH, il n'y aura pas de dilution de l'actionnariat; les actionnaires conserveront leur part dans les réserves.
La proposition de reporter l'examen des projets de loi nos 5-1841 et 5-1842 est rejetée par 8 voix contre 1 et 2 abstentions.
B. Projet de loi nº 5-1842/1 modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque Nationale de Belgique (article 77 de la Constitution)
Ce projet de loi n'a donné lieu à aucune discussion supplémentaire en commission.
IV. VOTES
A. Projet de loi nº 5-1841/1 modifiant la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement et à l'accès aux systèmes de paiement et d'autres législations dans la mesure où elles sont relatives au statut des établissements de paiement, des établissements de monnaie électronique et des associations de crédit du réseau du Crédit professionnel (article 78 de la Constitution)
L'ensemble du projet de loi est adopté par 9 voix contre 2 et 1 abstention.
B. Projet de loi nº 5-1842/1 modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque Nationale de Belgique (article 77 de la Constitution)
Les articles 1er et 2 du projet de loi sont adoptés par 11 voix et 1 abstention.
L'article 3 est adopté par 9 voix et 3 abstentions.
L'ensemble du projet de loi est adopté par 11 voix et 1 abstention.
Confiance a été faite à la rapporteuse pour la rédaction du présent rapport.
La rapporteuse, | Le président, |
Fabienne WINCKEL. | Ludo SANNEN. |
A. Le texte adopté par la commission du projet de loi nº 5-1841/1 modifiant la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement et à l'accès aux systèmes de paiement et d'autres législations dans la mesure où elles sont relatives au statut des établissements de paiement, des établissements de monnaie électronique et des associations de crédit du réseau du Crédit professionnel (article 78 de la Constitution), est identique au texte adopté par la Chambre des représentants (voir le doc. Chambre nº 53-2431/9).
B. Le texte adopté par la commission du projet de loi nº 5-1842/1 modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque Nationale de Belgique (article 77 de la Constitution) est identique au texte adopté par la Chambre des représentants (voir le doc. Chambre nº 53-2432/4).
(1) Directive 2009/110/CE du Parlement européen et du Conseil européen du 16 septembre 2009 concernant l'accès à l'activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements, modifiant les directives 2005/60/CE et 2006/48/CE et abrogeant la directive 2000/46/CE.
(2) Directive 2000/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 septembre 2000 concernant l'accès à l'activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements.