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Mme Zakia Khattabi (Ecolo). - Votée en mai 2011, la loi autorisant les transactions financières en matière pénale avait été vivement dénoncée par les écologistes. Cette loi permet en effet aux plus fortunés d'échapper à des poursuites moyennant le paiement d'une certaine somme. Nous assistions donc à la mise en place d'une véritable justice de classe taillée sur mesure pour la criminalité en col blanc.
Nous en avons eu confirmation lors du dénouement d'une affaire évoquée par Le Canard enchaîné et largement relayée depuis lors par la presse belge. Dans ce cas, une transaction pénale a permis à la 234ème fortune mondiale - condamnée pour fraude fiscale dans « l'affaire Tractebel » - d'échapper à la prison moyennant le versement de 23 millions d'euros.
Au-delà de ce dossier, je souhaiterais faire l'état des lieux de la situation des transactions financières en matière pénale depuis l'élargissement de la loi.
Madame la ministre, combien de transactions ont-elles été menées depuis l'entrée en vigueur de la loi ? Quelle est la nature de ces transactions ? À quel moment des procédures pénales ont-elles été conclues ? Quels montants ont-ils été versés en contrepartie et à quoi ces montants seront-ils affectés ?
Mme Annemie Turtelboom, ministre de la Justice. - Depuis la modification de la loi du 6 mai 2011, l'extinction de l'action publique moyennant le paiement d'une somme d'argent est possible tant qu'aucune décision définitive n'est intervenue - y compris en cas de pourvoi en cassation - et pour autant que la personne ayant commis les faits soit disposée à indemniser le dommage causé.
Une circulaire commune de la ministre de la Justice et du Collège des procureurs généraux a été approuvée le 24 mai 2012.
L'extension de la transaction permet de résoudre de façon réaliste de nombreux problèmes liés à la complexité du dossier, à la capacité des différents acteurs et à la longueur des procédures pénales.
L'extension de l'extinction de l'action publique moyennant payement d'une somme d'argent - EEAPS - a déjà été appliquée à quatre reprises dans l'arrondissement d'Anvers et à cinq reprises dans celui de Bruxelles.
En réponse à des questions parlementaires antérieures, j'ai fait savoir que l'État belge avait perçu entre juin 2011 et juin 2012 environ 40 607 540,42 euros pour l'arrondissement d'Anvers et 24 777 746 euros pour celui de Bruxelles par le biais de l'EEAPS. Le bref délai imparti pour la réponse à votre question ne m'a pas permis d'actualiser ces montants. Je ne manquerai pas de vous communiquer ultérieurement les derniers chiffres.
Pour répondre à votre dernière question, je vous informe que les montants perçus dans le cadre des transactions reviennent au Trésor public.
Mme Zakia Khattabi (Ecolo). - Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Vous indiquez que le délai ne vous a pas permis de donner plus de détails. Je rappelle que j'avais déposé une question écrite voici déjà un mois sur ce sujet.
Vous savez certainement que mon groupe a déposé une proposition de loi visant à abroger l'élargissement de la transaction pénale. De manière générale, le message envoyé par ce gouvernement au justiciable sur la politique de la justice est totalement flou. D'une part, on élargit la transaction pénale mais, d'autre part, on souhaite alourdir les peines pour certaines infractions qui ne nous semblent pas devoir nécessiter un alourdissement de la peine.
Au mieux, votre politique est floue et vous avancez à l'aveugle ; au pire, vous confirmez notre analyse et votre gouvernement assume la mise en place d'une nouvelle justice, une justice de classes.