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Mme Zakia Khattabi (Ecolo). - Madame la ministre, nous avons appris incidemment, à l'occasion de deux faits d'actualité regrettables, à savoir deux évasions et les mouvements de grève qui ont suivi ainsi que l'incident avec le premier ministre marocain, que vous vous étiez rendue dernièrement au Maroc. À votre retour, vous avez déclaré ce qui suit : « J'étais au Maroc pour avoir des contacts avec le ministre de la Justice marocain. C'est aussi très important concernant le transfert des détenus. J'étais là aussi pour travailler et pour améliorer la situation dans nos prisons ».
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette rencontre, son contenu et les engagements mutuels pris ? Je serais curieuse d'apprendre en quoi elle aura pour effet d'améliorer la situation dans nos prisons car, à moins que vous ne nous annonciez une modification des termes du protocole de 2007, le nombre de détenus concernés par ce dernier est relativement limité, une dizaine tout au plus eu égard aux strictes conditions d'application de la loi. En effet, la loi ne s'applique qu'aux condamnés, les Marocains qui se sont installés en Belgique avant l'âge de douze ans, qui ont un enfant, un père ou une mère en Belgique, qui y ont séjourné cinq ans de manière ininterrompue, qui sont gravement malades ou qui ont le statut de réfugié ne pouvant par ailleurs être renvoyés vers leur pays d'origine.
Pouvez-vous nous confirmer le profil exact des détenus concernés et leur nombre ? Sont-ils des sans-papiers, illégaux ou étrangers, de nationalité exclusivement marocaine mais résidant légalement sur notre territoire ?
Mme Annemie Turtelboom, ministre de la Justice. - J'ai effectué une visite officielle au Maroc du 10 au 13 avril. Le point essentiel de ma visite était de toute évidence ma rencontre avec le ministre marocain de la Justice, M. Ramid. Cet entretien nous a permis d'examiner le large éventail des aspects qui constituent notre coopération en matière de justice avec le Maroc. Après la France, la Belgique est le deuxième principal partenaire du Maroc pour ce qui concerne la coopération en matière de justice et en matière civile et pénale.
Les problèmes avec un groupe relativement limité d'illégaux marocains et de prisonniers condamnés entraînent des répercussions très négatives sur l'image de la communauté marocaine légalement établie en Belgique ainsi que sur les Belges d'origine marocaine. Il est dès lors dans l'intérêt des deux parties que de bons accords ainsi qu'une bonne coopération s'établissent entre les deux pays, les deux administrations de la Justice et d'autres autorités concernées.
L'entretien avec le ministre marocain de la Justice concernait les points essentiels de notre coopération : le transfèrement de prisonniers condamnés marocains, la coopération en matière civile et pénale, l'échange d'informations en matière d'identification, la problématique des enlèvements internationaux d'enfants et la coopération renforcée.
Sur la base des critères du protocole, un premier paquet de treize dossiers a été transmis l'an dernier aux autorités marocaines. Trois dossiers ont été retirés : l'un en raison du fait que l'intéressé avait purgé sa peine et avait été expulsé vers le Maroc, les deux autres en raison du fait que les intéressés avaient fait appel de leur expulsion.
Un dossier pose problème quant à l'établissement de la nationalité de l'intéressé.
L'accord définitif du Maroc concernant le transfèrement de six prisonniers condamnés marocains a été obtenu au cours de la visite.
Les modalités pratiques du transfèrement de ces prisonniers condamnés ont dès lors été examinées avec le ministre de la Justice du Maroc. À cet égard, il importe qu'un accord politique soit conclu par les deux pays en vue de l'organisation de vols spéciaux protégés.
Les dispositions pratiques seront évaluées dans les prochains jours avec l'Office des étrangers ainsi que les SPF Défense et Justice.
Mme Zakia Khattabi (Ecolo). - Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui apporte une série d'éléments sur lesquels j'aurai l'occasion de revenir lors du développement d'autres questions.
J'aurais toutefois souhaité vous entendre plus longuement sur le profil exact des détenus. En effet, vous ne répondez pas à la question relative aux ressortissants de nationalité marocaine résidant légalement sur notre territoire. À la lecture du protocole, il s'avère qu'ils ne sont pas concernés. Vous conviendrez avec moi que s'ils devaient être renvoyés dans leur pays d'origine, ces Marocains subiraient une double peine. Étant donné qu'ils résident légalement sur notre territoire, il n'y a aucune raison de leur faire purger leur peine dans leur pays d'origine.
Par ailleurs, j'aurais également souhaité vous entendre sur l'idée qui circule actuellement selon laquelle ce type de protocole permettrait de vider nos prisons, ce qui laisserait sous-entendre qu'elles sont remplies de personnes issues de cette nationalité. Il est illusoire de le penser et dangereux de laisser cette information circuler dans la population.
Pour désengorger nos prisons, nous disposons d'une série de dispositifs qu'il vous est loisible de mettre en place. Cette idée que le transfèrement permettrait de vider nos prisons ne va pas dans le sens de vos déclarations, à savoir que les premières victimes d'images et de stéréotypes sont les Marocains de Belgique. À cet égard, j'aimerais vous entendre dire clairement que leur nombre est réduit et que, par conséquent, leur transfèrement ne résoudrait en rien le problème de la surpopulation carcérale.