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27 MARS 2012
I. INTRODUCTION
Le projet de loi qui fait l'objet du présent rapport et qui relève de la procédure bicamérale optionnelle a été déposé initialement à la Chambre des représentants le 24 février 2012 par le gouvernement (doc. Chambre, nº 53-2081/1).
Il a été adopté par la Chambre des représentants le 22 mars 2012, par 80 voix contre 36 et 14 abstentions. Il a été transmis au Sénat le 23 mars 2012 et évoqué le jour même.
La commission de la Justice était saisie des articles 73 à 78, 85 à 99 et 106.
La commission de la Justice a examiné le présent projet en même temps que le projet de loi-programme (II) (doc. Sénat, nº 5-1546/1), qui relève de la procédure bicamérale obligatoire.
Conformément à l'article 27.1, alinéa 2, du règlement du Sénat, la commission a entamé l'examen des articles des deux projets de loi avant le vote final à la Chambre des représentants. La commission a examiné les articles dont elle était saisie au cours de ses réunions des 21 et 27 mars 2012, en présence de la ministre de la Justice et du secrétaire d'État à la lutte contre la Fraude sociale et fiscale.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE LA MINISTRE DE LA JUSTICE
A. Responsabilité solidaire pour les dettes salariales (articles 73 à 78 de la loi-programme I et articles 2 et 3 de la loi-programme II)
Le titre 7 de la loi-programme (I) concernant la lutte contre la fraude instaure un régime de responsabilité solidaire pour le paiement de la rémunération tout en étendant le régime de responsabilité solidaire existant en matière de dettes sociales et fiscales (article 30bis de la loi sur l'ONSS, article 400 du CIR).
En termes généraux, le régime de responsabilité solidaire pour le paiement de la rémunération implique que plusieurs personnes sont redevables du paiement de la rémunération due à un ou plusieurs travailleurs. En l'espèce, il s'agit spécifiquement d'une responsabilité solidaire des entrepreneurs et des donneurs d'ordre situés, au sein d'une chaîne d'entreprise, en amont de l'employeur à l'égard du paiement de la rémunération aux travailleurs dudit employeur. En vertu de la responsabilité solidaire, le travailleur ou l'inspection peut dès lors s'adresser à des personnes supplémentaires (débiteurs solidaires autres que l'employeur lui-même) pour le paiement de la rémunération. L'instauration de ce régime s'opère dès lors en ordre principal au travers d'une modification de la loi concernant la protection de la rémunération, et elle sera donc également examinée au sein de la commission des Affaires sociales.
Le régime de responsabilité solidaire vise à s'opposer aux distorsions de concurrence provoquées par des chaînes de sous-traitance dans lesquelles un sous-traitant, enfreignant des dispositions dont le non-respect est sanctionné pénalement, paie son personnel en deçà du niveau minimum obligatoire. C'est pourquoi un rôle central est dévolu aux services d'inspection sociale. Seuls les services d'inspection pourront activer la responsabilité solidaire, en l'occurrence en procédant à une notification formelle et ce, uniquement pour les dettes salariales à venir (et donc pas pour les arriérés, par exemple) et uniquement en cas d'infraction grave à l'obligation de paiement de la rémunération.
Comme on touche aux compétences des services d'inspection, qui sont réglées dans le Code pénal social, il faut apporter des modifications à ce Code, ce qui fait l'objet des articles 73 à 78 du projet de loi-programme I.
En outre, quelques modifications procédurales s'imposent également afin de prévoir la compétence du tribunal du travail en matière de litiges entre le travailleur et le responsable solidaire, ainsi qu'une possibilité d'appel contre la décision de l'inspection d'activer le régime de la responsabilité solidaire (cf. les articles 2 et 3 de la loi-programme II). Enfin, la ministre indique que lors de la rédaction des textes définitifs, il a été tenu compte des observations de la section de législation du Conseil d'État ainsi que de l'avis du Conseil national du travail.
B. Le procès-verbal électronique (l'e-PV) (articles 85 à 99 de la loi-programme I)
La ministre rappelle que l'e-PV — le procès-verbal électronique constatant des infractions à la législation sociale — est opérationnel depuis le 1er mars 2011.
Les inspecteurs sociaux des 4 grands services d'inspection sociale (le Contrôle des lois sociales auprès du SPF Emploi, l'Inspection sociale auprès du SPF Sécurité sociale et les services d'inspection sociale de l'ONEm et de l'ONSS) établissent depuis lors tous leurs procès-verbaux de façon électronique en utilisant une application commune disponible sur le site portail de la Sécurité sociale. Il s'agit ici d'un modèle uniforme de procès-verbal mettant à la disposition des inspecteurs sociaux de nombreux outils, tels que la possibilité de compléter automatiquement les données émanant du Registre national et de la BCE (Banque-Carrefour des Entreprises), ainsi qu'une liste uniforme et commune des infractions.
En l'état actuel du droit, ces e-PV sont toujours imprimés et signés de façon manuscrite avant d'être envoyés par la poste au contrevenant et à l'auditeur du travail. Mais il va sans dire que l'e-PV est conçu dans le but d'aller bien au-delà d'une simple application commune destinée à rédiger des procès-verbaux sur papier.
C'est la raison pour laquelle la ministre souhaite à présent créer un nouveau cadre légal pour l'e-PV.
Ce cadre légal est inséré dans le Code pénal social par la loi-programme (I), en l'occurrence le titre 7, chapitre 1er, section 8, articles 85 à 99.
Cette section 8 règle certains aspects de l'échange électronique d'informations entre les acteurs de la lutte contre le travail illégal et la fraude sociale. Elle prévoit l'instauration d'un procès-verbal électronique uniforme, que les services d'inspection sociale désignés par le Roi devront obligatoirement utiliser.
Ce procès-verbal électronique (e-PV) ne sera pas uniquement dressé électroniquement, mais il sera également signé électroniquement à l'aide de l'eID. Un tel procès-verbal électronique signé par voie électronique sera assimilé à un procès-verbal sur support papier sur lequel est apposée une signature manuscrite.
Une banque de données e-PV contenant les données qui figurent dans les e-PV et dans leurs annexes sera créée. Cette section règle en outre la gestion de cette banque de données e-PV et son accès, ainsi que le contrôle du traitement des données dans le cadre de la banque de données e-PV.
Elle règle enfin l'accès à la banque de données Ginaa. Il s'agit de la banque de données de la direction des amendes administratives du service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale, qui, conformément à l'article 70 du Code pénal social, est habilitée à infliger des amendes administratives en cas d'infraction à la législation sociale lorsque l'auditeur du travail renonce aux poursuites pénales.
Le ministre précise que les textes en question ont été préparés pendant plus de deux ans. À cet égard, une intense concertation a été organisée avec l'ensemble des instances concernées. Les textes ont ainsi été soumis à deux reprises au Collège des procureurs généraux et adaptés à ses observations. À la demande expresse du Collège des procureurs généraux, il a par exemple été prévu dans le nouvel article 100/10, § 4, du Code pénal social que le ministère public et les juges d'instruction ont accès aux données de la banque de données e-PV, sans que cet accès soit subordonné à l'autorisation du « comité sectoriel de la sécurité sociale et de la santé » au sein de la Commission de la protection de la vie privée. Le fait de subordonner l'accès à cette banque de données pour les membres du pouvoir judiciaire à une autorisation octroyée par un organe du pouvoir législatif n'est pas conforme au principe de la séparation des pouvoirs. C'est la raison pour laquelle cet accès pour les membres du pouvoir judiciaire est réglé directement dans la loi même.
La ministre affirme également que le projet de texte à l'examen a été adapté afin de tenir compte des avis de la Commission de la protection de la vie privée, du Conseil national du travail et du Conseil d'État. Ce nouveau cadre légal de l'e-PV entraînera non seulement une simplification administrative considérable (la disparition des flux de données sous forme papier), un fonctionnement plus efficace des services concernés (les mêmes données ne devront pas être introduites à trois ou quatre reprises dans différentes banques de données), un traitement accéléré des dossiers (du fait de l'automatisation permise à différents niveaux par l'e-PV), mais améliorera aussi la lutte contre la fraude sociale. D'après une estimation réalisée notamment en collaboration avec les services de l'ONEm, de l'INAMI et de l'ONSS, le résultat de la réduction des dépenses et de l'augmentation des recettes grâce à l'e-PV atteindrait 6,9 millions d'euros par an.
La ministre signale aussi que tous ces atouts ont valu au projet e-PV de remporter, en décembre 2011, l'e-gov award pour la rentabilité.
C. Lutte contre la fraude (article 106 de la loi-programme I et articles 4 et 5 de la loi-programme II)
L'accord de gouvernement a fait de la lutte contre la fraude une priorité. Dans ce cadre, il est impératif d'adopter rapidement plusieurs modifications légales permettant de lutter contre la fraude de manière effective et performante. Pour la ministre, il est donc capital d'adapter sans délai ces dispositions légales:
— Collaboration structurée entre la CTIF et l'OCSC dans le cadre de l'exécution des peines
Dans le cadre d'une enquête de solvabilité concernant des personnes condamnées à une confiscation, l'Organe central pour la saisie et la confiscation (OCSC) ne peut pas demander à la CTIF des informations sur la situation patrimoniale du condamné parce que la CTIF est tenue à un secret professionnel renforcé, ce qui constitue une entrave à la communication spontanée ou sur demande de renseignements aux services de police et aux services judiciaires, sauf dans les cas où la loi l'autorise. De ce fait, le patrimoine du condamné peut rester dissimulé. Dans ce cas, la confiscation reste lettre morte et le trésor est privé de recettes.
L'intérêt de l'échange d'informations entre les différents services et autorités chargés de la lutte contre la criminalité axée sur le profit a été suffisamment démontré. Il est donc souhaitable de modifier l'article 15 de la loi du 26 mars 2003 portant création d'un Organe central pour la saisie et la confiscation (OCSC) pour que la CTIF puisse communiquer à l'OCSC, à la demande de ce dernier, la situation patrimoniale du condamné dans le cadre d'une enquête de solvabilité.
— Mesure de gel prise par l'OCSC au stade de l'exécution de la confiscation
Le ministre rappelle que l'OCSC est légalement compétent pour demander à des banques ou à d'autres organismes financiers dans le cadre de l'exécution de la confiscation des informations sur la personne condamnée. Si l'OCSC l'exige, la banque requise peut, après avoir d'abord confirmé l'existence d'avoirs au nom de la personne condamnée, se voir interdire de se défaire des actifs financiers présents pendant un délai maximum de 3 jours ouvrables. Ce gel temporaire des actifs financiers doit permettre au receveur des domaines ou des amendes pénales chargé du recouvrement de la somme confisquée de pratiquer une saisie civile sur ces avoirs.
Dans la pratique, ce délai de trois jours ouvrables est trop court pour permettre au receveur des domaines de préparer correctement une saisie conservatoire ou une saisie-exécution des avoirs que la banque détient. Le règlement proposé étend ce délai à cinq jours ouvrables.
Cette extension du délai permet en effet que les avoirs du client soient gelés pendant une période de cinq jours, mais comme cette mesure s'inscrit dans le cadre de l'exécution d'une condamnation, les avoirs gelés sont ensuite saisis par le receveur.
Le ministre précise que le délai de cinq jours ouvrables est inspiré par le délai dont disposent les agents des douanes pour prendre en dépôt de l'argent en espèces et d'autres liquidités après qu'une infraction a été constatée à l'arrêté royal du 5 octobre 2006 portant certaines mesures relatives au contrôle du transport transfrontalier d'argent liquide, et ce en attendant que le procureur du Roi puisse saisir l'argent judiciairement. Tant la mesure de gel de l'OCSC que la mise en dépôt s'inscrivent dans le cadre de la lutte contre la criminalité axée sur le profit. Pour le ministre, une harmonisation des deux procédures s'impose dès lors afin de favoriser l'égalité juridique.
— Modification du Code d'instruction criminelle: saisie lors d'une instruction
La ministre rappelle également que les magistrats du ministère public ainsi que le juge d'instruction peuvent, durant l'enquête pénale, solliciter des renseignements concernant le suspect auprès des banques et autres institutions financières. Le cas échéant, le magistrat peut, pour une durée maximale de 3 jours ouvrables, imposer à la banque l'interdiction de se dessaisir des biens ou des actifs, dans l'attente d'une saisie judiciaire. Dans la pratique, le délai de 3 jours ouvrables est trop court pour permettre au magistrat de préparer de manière efficace la saisie pénale des actifs financiers détenus par la banque. Les suspects peuvent encore transférer les fonds présents sur leurs comptes bancaires vers d'autres comptes, ce qui rend une saisie judiciaire impossible. Cette situation est aux antipodes de ce que doit être une lutte rapide et efficace contre la fraude. De plus, elle entraîne in fine une impunité plus grande et un préjudice plus important pour le Trésor. La disposition proposée étend le délai à 5 jours ouvrables. Dans la pratique, il est un fait que le titulaire du compte ne peut pas disposer de ses fonds pendant un délai de cinq jours sur simple demande d'un juge d'instruction, mais comme cette saisie temporaire est suivie par une saisie judiciaire, il se trouve de facto privé du contrôle de ses fonds pendant la durée de la saisie judiciaire.
III. DISCUSSION
A. Échange électronique d'information
M. Torfs souligne que dans les dispositions proposées relatives à l'échange électronique d'information, des réglementations sont élaborées dans le cadre de la lutte contre le travail illégal et la fraude sociale. L'intervenant estime que c'est une bonne chose en soi, mais il ne comprend pas bien pourquoi les techniques mentionnées seront de toute évidence réservées uniquement à certains cas bien définis. En effet, il existe de nombreuses infractions, par exemple des infractions environnementales, dont on attend qu'elles fassent l'objet de la même attention. En l'espèce, on procède par induction, ce qui n'est pas vraiment conseillé d'un point de vue légistique. Pourquoi ne peut-on pas élaborer une vision commune sur l'échange électronique d'information ? Un code juridique n'est pas un patchwork.
Mme Faes estime que l'e-PV en soi est un bon instrument. Elle a cependant les mêmes observations à formuler sur la réglementation à l'examen que l'intervenant précédent et elle a, de surcroît, une série de questions à poser. Dans un premier temps, la réglementation élaborée sera utilisée par les quatre grands services d'inspection. Que prévoit-on pour les services d'inspection régionaux et de moindre taille ? Qu'en est-il de la liaison avec la Justice, en particulier avec les auditorats du travail ?
L'intervenante se réfère également au dernier alinéa de l'article 95, qui détermine qui aura accès aux informations et données conservées dans la banque de données e-PV. La formulation utilisée n'a-t-elle pas une portée trop large ? La ministre peut-elle estimer le nombre de personnes qui peuvent consulter et consulteront la banque de données ?
Par ailleurs, l'intervenante aimerait obtenir quelques précisions concernant l'article 90, § 2, alinéa 1er. Qui aura accès à quoi ? Certains inspecteurs pourront-ils, sur la base de cette disposition, avoir accès à l'ensemble des PV enregistrés dans la banque de données ? Par exemple, un contrôleur de l'ONEM pourra-t-il consulter de sa propre initiative des e-PV de l'ONSS ? Qu'en est-il du personnel des services d'inspection qui n'ont pas la qualité d'inspecteur ?
L'alinéa 2 de l'article 90, § 2, prévoit la possibilité de consulter sans limitation les PV de son propre service d'inspection. Un service d'inspection pourra-t-il déterminer lui-même des limitations à cet égard ? Qu'en sera-t-il d'un service d'inspection dans lequel une partie du personnel d'inspection effectue des missions d'inspection médicale ? L'intervenante cite l'exemple de l'INAMI où des inspecteurs non médecins pourront consulter les PV de médecins-inspecteurs.
En ce qui concerne l'article 97, l'intervenante souligne que la banque de données Ginaa contient des données sur tout travailleur ou toute personne qui est concernée ou considérée comme étant concernée par une infraction. Qu'entend-on au juste par là ? Cette disposition vise-t-elle par exemple une personne qui a reçu une sanction administrative alors que cette sanction est contestée et qu'aucun jugement judiciaire définitif n'a encore été rendu ?
Enfin, l'intervenante évoque l'article 98 qui dispose que le Roi désigne les catégories de personnes pouvant accéder à la banque de données Ginaa. Pourquoi des fonctionnaires d'autres services d'inspection, qui ne font donc pas partie du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, y ont-ils également accès ?
En ce qui concerne l'élaboration d'une vision commune sur l'échange électronique d'information, la ministre se réfère aux efforts de généralisation consentis par l'ancien ministre en charge de la simplification administrative. Fedict (le SPF Technologie de l'information et de la communication) y a été associé. Il est également clair que la Justice doit être informatisée. À cet égard, l'initiative a été prise de donner accès aux auditorats du travail et de les autoriser également à effectuer les opérations. Bien qu'il reste encore beaucoup de travail à accomplir sur le plan de l'informatisation de la Justice, une concertation intensive a été menée ces derniers mois à ce sujet. Des progrès sont donc réalisés sur ce plan et l'objectif est d'entamer avant la fin de l'année la mise en relation de la Justice avec la banque de données e-PV. On continuera d'y travailler en 2013 afin que la Justice puisse profiter d'un certain nombre de flux de données entrants et sortants.
À la question relative à l'accès des services d'inspection de moindre importance, la ministre répond que l'objectif du projet est de permettre à un maximum de services d'inspection d'utiliser le modèle électronique uniforme e-PV. Le projet a démarré avec les quatre grands services d'inspection fédéraux que sont le Contrôle des lois sociales, l'inspection de l'ONSS, l'inspection de l'ONEM et l'Inspection sociale. L'objectif est cependant d'associer également à ce projet les services d'inspection régionaux. Les négociations se poursuivent actuellement. Entre-temps, un certain nombre de services ont déjà accès. C'est le cas pour les services d'inspection de la Région de Bruxelles-Capitale et de la Wallonie. Par ailleurs, des discussions sont en cours avec l'inspection Emploi et Économie sociale (IWSE) de la Communauté flamande, mais les budgets nécessaires pour participer au projet doivent d'abord être évalués étant donné que l'IWSE dispose de son propre dossier électronique. L'objectif est cependant que ce service rallie également le projet e-PV. Il va de soi que les bénéfices du projet seront d'autant plus importants que les services d'inspection seront nombreux à y participer.
En ce qui concerne l'accès de la Commission de la protection de la vie privée à la banque de données e-PV, la ministre répond qu'une réglementation spécifique a été élaborée en vue de fixer les modalités de contrôle de cette commission. Ce contrôle vise à vérifier le caractère licite de l'échange de données et de la consultation de données dans la banque de données e-PV. En vertu de la réglementation relative à la protection de la vie privée proprement dite, la Commission tout entière doit être désignée en tant qu'organe de contrôle. Il est donc manifestement impossible qu'une ou plusieurs personnes soient désignées individuellement.
Une réglementation a également été prévue en ce qui concerne l'accès à certaines données figurant dans la banque de données e-PV. Cette réglementation diffère en fonction de la catégorie de données et des personnes qui peuvent y avoir accès.
En ce qui concerne les services d'inspection eux-mêmes, une distinction est faite entre l'accès à certaines données de base des pv électroniques et l'accès au contenu de ces pv. À cet égard, il importe de souligner que la réglementation prévue dans le cadre légal à l'examen se rapproche non seulement des dispositions actuelles du Code pénal social mais aussi de celles de la loi du 16 novembre 1972 concernant l'inspection du travail. Il s'agit donc non pas d'attribuer de nouvelles compétences mais bien d'élaborer un cadre légal pour les flux de données électroniques. À cet égard, il va sans dire que la législation relative à la protection de la vie privée ainsi que le secret de l'instruction seront respectés.
Il ne saurait donc être question que chaque inspecteur ait systématiquement accès à toutes les informations. Ainsi, lorsque le dossier sera de nature pénale par exemple, l'accès aux informations ne sera pas libre mais sera subordonné à l'autorisation préalable du ministère public.
S'agissant de la consultation illimitée ou non des pv d'un service d'inspection par son personnel, la ministre confirme que le personnel d'un service d'inspection aura davantage accès aux informations des pv dressés par le service plutôt qu'à celles des pv d'un autre service. Toutefois, on tiendra compte ici aussi de la qualité de la personne qui fait partie du service d'inspection. Ainsi, un inspecteur social aura un accès plus large aux informations qu'un membre du personnel administratif. L'accès est donc réglementé de manière très stricte et des mécanismes de contrôle ont été prévus en vue de vérifier a posteriori qui a eu accès à des informations à un moment donné et quelles sont ces informations.
En ce qui concerne l'exemple spécifique de l'INAMI, où il existe deux services de contrôle, il ne saurait évidemment être question qu'il y ait infraction aux dispositions relatives au secret professionnel médical. Ces dispositions resteront intégralement d'application en ce qui concerne l'échange de données. Il est exact que l'un des services de contrôle de l'INAMI participera au projet, mais il ne s'agira pas du service de contrôle médical. Chaque fois qu'un nouveau partenaire sera intégré dans le projet, on examinera de manière systématique quelles règles d'accès aux informations pourront être élaborées et ce, afin de s'assurer que l'on continue à travailler dans les limites du cadre légal fixé et dans le respect des règles en matière de protection de la vie privée, du secret de l'instruction et du secret professionnel médical.
En ce qui concerne l'accès aux informations de la banque de données Ginaa, la ministre souligne que cette banque de données est totalement indépendante de la banque de données e-PV. En effet, la banque de données Ginaa est une banque de données interne de la direction des amendes administratives du SPF Emploi, dont celle-ci se sert pour gérer ses dossiers. Il va sans dire que cette banque de données comprendra un certain nombre de données de la banque de données e-PV afin de permettre aux fonctionnaires habilités d'infliger des amendes administratives dans le cadre des procès-verbaux. Si l'on mentionne aussi la banque de données dans le cadre légal relatif aux e-PV, c'est parce qu'on vise les données concernant les résultats de la procédure en matière d'amendes administratives. En effet, dans le Code pénal social, il est prévu que les inspecteurs sociaux ont droit aux informations sur la suite qui a été donnée à leur pv. En outre, il est exact aussi qu'entre la Justice et la direction des amendes administratives, il faut prévoir un échange d'informations sur les amendes administratives infligées et sur les poursuites pénales éventuelles qui ont été entamées dans le cadre d'un pv déterminé. Ces règles seront précisées sur la base de ce cadre légal. Par les mots « toute personne concerné(e) ou considéré(e) comme étant concerné(e) par une infraction », on entend donc, en premier lieu, l'auteur ou toute personne suspectée de l'être. On vise donc, en d'autres termes, toute personne qui a commis une infraction au droit social sur la base de ce procès-verbal. C'est la raison pour laquelle certains fonctionnaires d'autres services auront accès à certaines informations dans la banque de données Ginaa.
B. Lutte contre la fraude
Mme Faes renvoie à l'intervention de son groupe à la Chambre à propos de l'article 4 de la loi-programme II. Qu'en est-il du fonctionnement actuel de l'OCSC ? À la Chambre, la ministre a répondu qu'il y avait tout d'abord un problème informatique et aussi un problème de comptabilité et que ces deux problèmes devraient être réglés dans le courant de l'année 2012. L'intervenante fait remarquer que l'OCSC a été créé il y a quelques années déjà par la loi du 26 mars 2003. Il n'est donc pas normal qu'une institution aussi importante ne dispose toujours pas d'un système informatique et comptable. L'intervenante espère que ce problème sera réglé très rapidement.
Une deuxième remarque concerne la prolongation du délai qui est porté de trois à cinq jours ouvrables. Les arguments invoqués pour justifier cette prolongation sont pour le moins curieux. L'intervenante ne voit pas en quoi il est utile de prolonger ce délai dans une société où il faut réagir rapidement sur les plans financier et économique, pour la simple raison que l'administration n'est pas adaptée. Elle votera donc contre cette disposition.
IV. VOTES
L’ensemble des articles 73 à 78, 85 à 99 et 106 du projet de loi-programme (I) est adopté à l’unanimité des 10 membres présents.
Confiance a été faite au rapporteur pour la rédaction du présent rapport.
Le rapporteur, | Le président, |
Rik TORFS. | Alain COURTOIS. |