5-55

5-55

Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 29 MAART 2012 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van mevrouw Cécile Thibaut aan de vice-eersteminister en minister van Binnenlandse Zaken en Gelijke Kansen over «het doorgeven van Europese passagiersgegevens aan de Amerikaanse autoriteiten» (nr. 5-488)

Mme Cécile Thibaut (Ecolo). - Un nouvel accord sur le transfert de données des passagers aériens européens aux autorités américaines - plus communément appelé accord PNR Union européenne-États-Unis - a été approuvé, grâce à une courte majorité, par la commission des Libertés civiles du Parlement européen ce mardi 28 mars.

Les conservateurs et les eurosceptiques ont voté pour, tandis que les libéraux, les verts et les communistes ont voté contre, considérant que les garanties de protection des données prévues dans l'accord ne satisfont pas les normes européennes. Les socialistes, quant à eux, se sont montrés divisés au moment du vote.

Après le vote, le rapporteur européen, Sophia in 't Veld, a fait le commentaire suivant : « Les résultats du vote montrent visiblement les fortes réserves à l'égard de l'accord. Toutefois, les États-Unis ont clairement indiqué qu'ils répondraient à un `non' par la suspension des exemptions de visa pour voyager aux États-Unis. De nombreux collègues - naturellement - n'ont pas voulu faire ce sacrifice. Mais il est très regrettable que les droits fondamentaux des citoyens européens aient été marchandés sous la pression des États-Unis ».

Le même jour, à la suite de l'initiative de la sénatrice Écolo, Claudia Niessen, la commission de l'Intérieur et des Affaires administratives du Sénat adoptait également, à une majorité encore plus courte (sept voix pour, six voix contre et deux abstentions), un avis mitigé concernant cet accord.

Si l'on aligne ces votes et les abstentions de l'Allemagne et de l'Autriche, force est de constater que les craintes de non-respect des normes, tant belges qu'européennes, en matière de protection de la vie privée sont plus que partagées.

Madame la ministre, confirmez-vous les propos émis par la rapporteuse, à savoir que les droits fondamentaux des citoyens européens ont été marchandés sous la pression des États-Unis ?

Étant donné les nombreuses réserves - abstention de l'Allemagne et de l'Autriche, remises en question par de nombreuses institutions européennes, dont le contrôleur européen de la protection des données, avis négatif de notre commission de Protection de la vie privée sur la précédente version de l'accord et non-consultation de cette même commission au sujet de la version actuelle - et les limites et les dangers que présente cet accord en termes de proportionnalité, de transfert de données relatives aux convictions religieuses ou à la santé, et de profilage, et considérant que ce texte pourrait être refusé lors du vote en séance plénière du Parlement européen, la Belgique ne devrait-elle pas réexaminer sa position dans ce dossier ?

Mme Joëlle Milquet, vice-première ministre et ministre de l'Intérieur et de l'Égalité des Chances. - Cet accord est le fruit d'une renégociation complète, à la demande du Parlement européen, de l'accord conclu en 2007. L'accord de 2007 est actuellement d'application et les données PNR sont transmises aux autorités américaines, ce que l'on a tendance à oublier.

Malgré quelques éléments négatifs, le nouvel accord comporte de nombreuses améliorations. Elles sont reprises dans l'avis adopté ce mardi par la commission de l'Intérieur du Sénat. Il comporte, par exemple, des règles détaillées et contraignantes sur la protection des données. Les lois américaines garantissent d'ailleurs à nos citoyens des recours administratifs et judiciaires devant les autorités et juridictions américaines pour faire valoir les droits garantis par l'accord. Il s'agit d'une nouveauté importante. Le contrôle interne et externe au Department of Homeland Security est expressément prévu pour le respect des règles de protection des données. Cela aussi, c'est nouveau. En outre, le champ d'application est clairement limité à la lutte contre le terrorisme et la criminalité grave transnationale et ces éléments sont beaucoup mieux définis. Voilà quand même des avancées importantes qui renforcent les droits des citoyens européens.

Une évaluation par une équipe européenne et américaine a confirmé le besoin d'un système de collecte et d'analyse des données PNR pour lutter efficacement contre le terrorisme.

J'admets que sur certains aspects ponctuels l'accord ne correspond pas à ce qu'aurait voulu l'Union européenne et encore moins à ce qu'aurait voulu la Belgique, notamment en ce qui concerne les périodes de conservation des données.

L'accord a été approuvé par tous les États membres de l'Union européenne, à l'exception de deux pays, l'Allemagne et l'Autriche, qui se sont abstenus. En décembre, au moment de se prononcer, le gouvernement a analysé l'accord dans sa globalité. Il a conclu que la Commission européenne était allée le plus loin possible en obtenant une amélioration suffisante des garanties pour encadrer l'ensemble du système, même si nous aurions aimé aller plus loin sur certains points.

Outre les règles de protection des données, l'accord prévoit un examen conjoint de sa mise en oeuvre après un an par des équipes d'évaluation des deux parties. Les États membres de l'Union européenne, et la Belgique en particulier, veilleront à ce que cet examen soit approfondi et rigoureux. Dans le cas où des manquements ou des excès seraient constatés, des mesures seraient prises et une dénonciation de l'accord est toujours possible. Une réévaluation globale de l'accord est prévue tous les quatre ans.

Nous attendons la décision du Parlement européen puisque c'est sur cette base que l'accord sera ou ne sera pas confirmé. Vous pouvez en tout cas compter sur notre extrême vigilance dans l'accompagnement et dans le suivi de cet accord.

Mme Cécile Thibaut (Ecolo). - Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse. Je ne nie pas les nombreuses améliorations mais je reste néanmoins sceptique quant à la finesse, à la sécurité que nous aurons demain. Je regrette au bout du compte que nous ne soyons pas plus proactifs, que nous soyons frileux sur ce sujet et que nous n'ayons plus cette capacité d'indignation, cette capacité de dire non, de dire qu'il faut faire autrement. Dans le passé, nous avions montré que nous pouvions être progressistes, à l'image de cet outil qu'est la compétence universelle, et que nous pouvions aller plus loin. Je regrette cette Belgique-là.