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Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 22 MARS 2012 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Questions orales

Question orale de Mme Cécile Thibaut au ministre des Entreprises publiques, de la Politique scientifique et de la Coopération au développement sur «la difficile situation du secteur de la coopération universitaire suite aux mesures d'économie» (no 5-475)

Mme Cécile Thibaut (Ecolo). - Parmi les mesures d'économie décidées le 11 mars dernier par le gouvernement fédéral belge figurent la fin du financement de la coopération universitaire au développement et le transfert de cette compétence vers les communautés au titre de compétence « usurpée ».

Cette décision est lourde de conséquences car il est très probable que la Fédération Wallonie-Bruxelles n'aura pas les moyens financiers d'assumer cette charge. Il ne fait pourtant aucun doute que les activités de coopération universitaire au développement constituent une contribution majeure au développement des pays du Sud.

Vous le savez, l'investissement historique et sur le long terme de l'ensemble des universités belges permet de soutenir les efforts des universités du Sud en vue de répondre aux défis globaux de l'économie mondialisée, de la sécurité alimentaire, des changements climatiques et environnementaux, des progrès de la démocratie... Dans cette optique, des milliers d'hommes et de femmes unissent leurs efforts, au Nord comme au Sud, depuis plusieurs dizaines d'années.

Un arrêt brutal du financement mettrait à mal l'impact et la durabilité des importants partenariats réalisés jusqu'à ce jour, avec des retombées en termes humains qu'il ne faut pas sous-estimer. De multiples projets de recherche et de formation qui contribuaient au partage du savoir des chercheurs du Nord et du Sud devraient être immédiatement arrêtés.

Une pétition a été lancée au nom des acteurs de cette coopération universitaire pour défendre celle-ci. Quatre mille signatures ont déjà été récoltées. Il me revient aussi que nos partenaires universitaires du Sud agissent également, alors qu'ils évitent généralement de s'immiscer dans les « affaires belgo-belges ».

J'en arrive à mes questions, monsieur le ministre.

Face à ce qui est considéré comme « un manque d'égard et de considération » du pouvoir fédéral envers la Coopération au développement, quel message adressez-vous aujourd'hui au secteur, aux étudiants étrangers et au personnel qui, dans la seule partie francophone du pays, représente cinquante emplois ?

Une réunion du Comité interministériel des finances et du budget est prévue la semaine prochaine. Comment l'envisagez-vous ?

M. Paul Magnette, ministre des Entreprises publiques, de la Politique scientifique et de la Coopération au développement, chargé des Grandes Villes. - Comme vous, je suis convaincu que la coopération entre universités du Nord et du Sud est fondamentale en termes de renforcement des capacités des pays partenaires.

La complémentarité entre les différents acteurs de la Coopération au développement est au coeur de l'efficacité de l'aide et constitue donc un axe essentiel de la politique de coopération que je mène depuis ma prise de fonction.

Depuis janvier 2012, différentes institutions bénéficiaires ont clairement manifesté leur désaccord concernant ce projet de transfert de compétences vers les Communautés et les Régions et ont fourni de nombreux arguments, notamment juridiques, à l'appui de leur analyse. Il en ressort que même si les universités et hautes écoles relèvent de la tutelle des Communautés, elles agissent ici en tant qu'acteurs de développement, en mettant en oeuvre une politique qui, elle, est fédérale. La politique et les programmes sont fédéraux. C'est le point de vue que j'ai défendu au kern, en plaidant pour le maintien de la coopération universitaire à l'échelon fédéral.

À ce stade, je constate que la Conférence interministérielle du vendredi 16 mars 2012 n'a pas abouti à un accord entre le gouvernement fédéral, les Communautés et les Régions. Une nouvelle réunion a été fixée au 27 mars prochain.

Entre-temps, les organisations actives en matière de coopération universitaire depuis 2012 ont veillé à assurer la continuité des activités et, quand c'était nécessaire, à les préfinancer.

La coupole des universités - le VLIR du côté néerlandophone et le CIUF du côté francophone - a assuré, entre autres, le payement des bourses aux ressortissants étrangers qui étudient en Belgique ainsi que la coopération institutionnelle avec les universités du sud.

L'APEFE et le VVOB ont assuré le préfinancement des activités en cours, reprises dans le programme de trois ans et couvertes par une convention qui ne prendra fin qu'en 2020.

Les dix-sept foyers et clubs qui apportent une aide sociale et culturelle à des étudiants boursiers et stagiaires provenant de pays en développement ont assuré la poursuite de leurs activités.

De même, les associations faîtières des villes et communes et la Province de Hainaut ont assuré la poursuite des activités qui avaient démarré en 2009, dans le cadre du programme 2008-2012. Ces activités sont couvertes par un arrêté royal qui est toujours en cours.

En ce qui concerne le soutien aux activités pédagogiques, il s'agit du payement d'une partie du salaire des enseignants que les cinq écoles à programme belge d'Afrique centrale préfinancent depuis janvier 2012. Vous constaterez donc que la continuité est assurée jusqu'ici, tant pour les activités que pour l'aspect financier.

Si le budget qui résulte du conclave indique en effet que 250 millions doivent être épargnés au titre des compétences dites usurpées, ce même budget ne précise rien quant aux compétences qui sont expressément visées au titre des compétences usurpées. Les compétences évoquées par le gouvernement fédéral doivent faire l'objet d'une négociation avec les Communautés et Régions.

Selon moi, tant qu'un accord n'est pas intervenu au sein de la conférence interministérielle entre le gouvernement fédéral, les Communautés et les Régions, nous nous devons de garantir la continuité des activités poursuivies par ces organisations partenaires de la coopération, dans le cadre de conventions ou de programmes en cours qui n'ont jamais été dénoncés.

J'ai donc très clairement demandé à mon administration de continuer à proposer les dossiers de subvention à ma signature. J'en ai signé ce matin encore. Je tiens à rassurer les acteurs de la coopération universitaire. De deux choses l'une : soit un accord interviendra avec les Communautés et Régions et il y aura un glissement de pouvoir, ce qui permettra d'assurer la continuité de l'activité, soit il n'y aura pas d'accord et le gouvernement fédéral continuera à financer tous les programmes en cours.

Mme Cécile Thibaut (Ecolo). - Je constate que M. le ministre souffle à la fois le chaud et le froid Le budget issu du conclave permettra de poursuivre l'activité avec des rustines, après un long régime d'affaires courantes qui fut déjà très difficile pour les milieux universitaires.

J'entends votre détermination à assurer le financement, en cas d'absence d'accord avec les Régions, mais j'aurais préféré que vous vous battiez pour que cette compétence reste fédérale. Vous avez pourtant souligné que les universités étaient des acteurs importants du développement, dans le cadre des partenariats avec le Sud.