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Mme Claudia Niessen (Ecolo). - Avant la mise en ligne de la version belge de Google Street View, je vous ai interrogé à propos du cadre légal présidant à la mise en application de ce service sur le territoire belge.
Vu le déferlement de plaintes et les désapprobations émanant de citoyens belges, mais également d'un syndicat de policiers qui s'inquiète des conséquences potentielles de ce service en termes de « facilitation des vols qualifiés dans des habitations, de home jackings ou autres tiger kidnappings », je souhaite revenir sur un élément de votre réponse.
En décembre dernier, vous avez en effet affirmé que toute personne concernée peut, par voie postale ou électronique, s'adresser à Google ou à la Commission de protection de la vie privée, afin de demander de faire « flouter » son habitation. Il devrait en aller logiquement de même pour les sites sensibles tels que des écoles, des infrastructures publiques, des prisons ou des centrales nucléaires.
La porte-parole de Google, dont les propos sont repris dans un hebdomadaire bien connu, affirme que « tout problème peut être signalé très simplement via un lien sur le site web » mais également, que « l'entreprise vérifie ensuite s'il ne s'agit pas d'une action d'un mauvais plaisant, avant d'adapter la photo le plus rapidement possible », sans donner d'autre précision sur le sens de ces derniers termes.
Monsieur le ministre, je m'interroge sur la manière dont Google procède afin de vérifier qu'il ne s'agit pas d'un mauvais plaisant, sachant que, conformément à la loi du 8 décembre 1992 relative à la vie privée, la personne concernée vise tant le locataire ou le sous-locataire que le propriétaire ou le copropriétaire, puisque la législation ne fait aucune distinction de ce genre.
Pouvez-vous dès lors nous préciser quels critères les firmes peuvent utiliser et lesquels sont proscrits, afin de déterminer si des plaintes émanent de bons ou de mauvais plaisants ?
Êtes-vous informé précisément de la manière dont Google procède à cette vérification - concrètement, comment effectue-t-on le lien entre une habitation, une personne morale ou physique et une plainte émise au départ d'une adresse IP ou d'un courrier postal - et, dans le cas contraire, entendez-vous demander à vos services de se renseigner ?
Par ailleurs, l'accès aux informations précitées, voire leur détention, ainsi que leur exploitation par une firme privée, sont-elles légales ?
M. Stefaan De Clerck, ministre de la Justice. - J'ai déjà eu à plusieurs reprises l'occasion de répondre, à la Chambre comme au Sénat, à des questions sur Google Street View.
Je répète que la loi sur la protection de la vie privée s'applique intégralement. Des discussions ont eu lieu entre Google et la Commission de la vie privée ; cette commission a formulé des recommandations à Google afin de faire respecter les principes contenus dans la loi et qui s'appliquent en l'espèce.
Tout citoyen peut réagir dans le système de Google Street View pour faire flouter les images ; il peut aussi s'adresser à la Commission de la protection de la vie privée et, le cas échéant, déposer plainte devant les tribunaux.
Cela dit, cette commission est un organe du Parlement, lequel peut s'informer auprès d'elle, notamment pour savoir combien de plaintes ont été déposées et quel a été leur sort. En votre qualité de parlementaire, vous pourriez demander à la commission, constituée de spécialistes, dans quelle mesure les recommandations sont suivies, les accords conclus sont respectés et la loi est correctement appliquée.
Vous demandez aussi si des sociétés abusent du système. Je dirai que les mêmes principes sont valables, à savoir que la loi relative à la protection de la vie privé interdit d'utiliser ces informations. La finalité doit être définie, et des règles doivent être respectées. Les sociétés privées ne peuvent donc pas utiliser les informations. Des sanctions sont prévues en cas d'abus.
Comme je l'ai déjà indiqué à la Chambre, le parlement a tout intérêt à interroger la Commission de la protection de la vie privée sur la pratique de Google Street View, sur le nombre et le genre de plaintes reçues, sur le suivi qu'elle donnera à ces informations et sur l'évaluation à laquelle elle doit procéder.
Pour le reste, la loi est selon moi tout à fait respectée.
Mme Claudia Niessen (Ecolo). - J'en conclus que je dois poser mes questions à la Commission de la protection de la vie privée et non au ministre.
Je déplore toutefois l'absence de réponse concrète, car le sujet concerne de nombreux citoyens. Je constate en tout cas que, comme pour de nombreux autres sujets, l'information arrive quand tout est mis en place. Ce n'est pas la meilleure façon de pratiquer.