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25 NOVEMBRE 2011
Ashraf, une implantation dans la province irakienne de Diyala, à un jet de pierre de la frontière iranienne, est le quartier général de l'Organisation des Moudjahidine du peuple iranien (OMPI), également connue sous le nom de Mujahideen-e-Khalq (MEK). L'OMPI, principal mouvement au sein de la coalition des groupes d'opposition iraniens, a été considérée tout un temps comme une organisation terroriste, mais elle a ensuite été rayée de la liste européenne des organisations terroristes. Depuis sa création, elle lutte contre les mollahs et les ayatollahs qui se sont installés au pouvoir à Téhéran lors de la révolution iranienne.
L'OMPI a déménagé son quartier général d'Iran en Irak, en 1986 au cours de la guerre entre ces deux pays et avec le soutien de Saddam Hussein, le dirigeant de l'époque. L'OMPI a toutefois toujours nié avoir soutenu le régime de Saddam Hussein.
Après l'invasion américaine de l'Irak, en mars 2003, l'OMPI s'est rendue aux troupes américaines et trois mille huit cents de ses membres ont été désarmés et regroupés dans le camp d'Ashraf, sous la protection des États-Unis. Entre-temps, quelque trois cent septante membres de l'OMPI sont rentrés volontairement en Iran. En 2004, certaines sanctions ont été levées et le régime dans le camp a été allégé dès l'instant où ses occupants ont été considérés non plus comme des soldats, mais comme des civils.
Les conditions de vie se sont toutefois dégradées pour les habitants du camp parce que les autorités irakiennes empêchent l'approvisionnement en eau, en nourriture, en carburant et en matériel médical. Ils ont également été attaqués à plusieurs reprises par des troupes de sécurité irakiennes. Le 8 avril 2011, il y a encore eu trente-quatre tués et des centaines de blessés. Les habitants de ce camp font également l'objet d'une guerre psychologique. Des insultes et de la propagande sont ainsi diffusées vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept par des haut-parleurs situés juste en dehors du camp. Par ailleurs, les autorités irakiennes refusent l'accès du camp aux observateurs internationaux et aux organisations humanitaires.
Le gouvernement irakien, sous la direction de son premier ministre Nouri al-Maliki, a récemment décidé de démanteler le camp d'ici la fin de cette année et d'éloigner tous les membres de l'OMPI du territoire. Un retour en Iran est exclu pour des raisons de sécurité.
Une solution durable respectant les Conventions de Genève s'impose pour les habitants du camp d'Ashraf. Le 27 septembre 2011, notre compatriote et diplomate Jean De Ruyt a été nommé représentant spécial de la haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères, en vue de participer à la négociation d'une solution.
La responsabilité pour la protection des résidents du camp d'Achraf incombe en premier lieu au gouvernement irakien. Jusqu'en 2008 le camp était protégé par des troupes américaines, mais le commandement a été intégralement transféré au gouvernement irakien depuis le 1er janvier 2009. Les tensions ont augmenté depuis que l'Irak a repris en charge la protection du camp qui était précédemment assurée par les États-Unis. L'Irak est dirigé par un gouvernement à majorité chiite, qui n'est pas défavorable au régime chiite de Téhéran.
Le gouvernement irakien (tout comme les États-Unis auparavant) avait annoncé que les habitants d'Achraf seraient traités conformément au droit international humanitaire et, notamment, au principe de « non-refoulement ». Ce dernier implique que personne ne peut être expulsé ou déporté s'il existe un risque réel de persécution fondée sur la race, la religion, la nationalité ou les opinions politiques.
La présente proposition de résolution vise à ce que le gouvernement fédéral, en concertation avec la haute représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et son représentant spécial, aide à dégager une solution durable pour les habitants du camp d'Achraf.
Elle demande également avec insistance au gouvernement irakien de respecter le droit international humanitaire en ce qui concerne le traitement des habitants du camp.
Karl VANLOUWE. | |
Piet DE BRUYN. | |
Patrick DE GROOTE. |
Le Sénat,
A. renvoyant aux Conventions de Genève et plus spécifiquement à l'article 27 de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre;
B. renvoyant à la Convention de Genève de 1951, plus exactement au statut des réfugiés et au Protocole additionnel de 1967;
C. renvoyant aux résolutions du Parlement européen du 12 juillet 2007 sur la situation humanitaire des réfugiés irakiens et du 4 septembre 2008 sur les exécutions en Iran, cette dernière renvoyant explicitement au fait que les habitants du camp d'Ashraf ont le statut juridique de personnes protégées en vertu de la quatrième Convention de Genève;
D. renvoyant à la résolution du Parlement européen du 24 avril 2009 sur la situation humanitaire des habitants du camp d'Ashraf;
E. renvoyant à la résolution du 31 juillet 2009 de la Chambre des représentants américaine « déplorant les violences continuelles commises par des troupes de sécurité irakiennes à l'égard des habitants du camp d'Ashraf en Irak »;
F. renvoyant à la communication du 9 avril 2011 de la haute représentante de l'Union européenne (UE) pour les Affaires étrangères, Catherine Ashton, sur la situation dans le camp d'Ashraf;
G. renvoyant à la nomination de notre compatriote Jean De Ruyt en tant que représentant spécial pour le camp d'Ashraf auprès de la haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères, le 27 septembre 2011;
H. renvoyant à la déclaration écrite du 6 octobre 2011 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe relative à la protection du camp d'Ashraf;
I. considérant que l'Irak reste sourd aux tentatives du représentant spécial de l'UE, Jean De Ruyt, de visiter le camp d'Ashraf;
J. considérant la déclaration du premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, selon laquelle l'OMPI et la communauté internationale ont jusqu'à la fin décembre 2011 pour évacuer le camp et qu'à partir de cette date l'Irak sera libre de décider des modalités d'éloignement des habitants du camp d'Ashraf du territoire irakien;
K. considérant que le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés reconnaît les habitants du camp d'Ashraf comme étant des réfugiés,
Demande au gouvernement:
1. d'insister auprès du gouvernement irakien pour que les droits humains des habitants du camp d'Ashraf ne soient pas violés, et pour que les autorités irakiennes protègent l'intégrité physique et morale desdits habitants conformément aux Conventions de Genève;
2. de demander au gouvernement irakien de préciser ses intentions concernant les habitants du camp d'Ashraf;
3. d'insister auprès du gouvernement irakien pour mettre fin au blocus du camp et de respecter le statut juridique des habitants du camp d'Ashraf conformément aux Conventions de Genève, de ne pas prendre de mesures qui mettraient en péril la sécurité des habitants, ce qui implique également qu'un accès suffisant soit accordé à l'eau, à la nourriture, aux équipements médicaux et au carburant;
4. d'insister auprès du gouvernement irakien pour donner accès au camp d'Ashraf aux observateurs internationaux, parmi lesquels le représentant spécial de la haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères, aux organisations humanitaires internationales et aux familles des habitants;
5. d'insister auprès du gouvernement irakien pour qu'il renonce à ses projets de fermeture du camp d'Ashraf à la fin 2011 sans solution durable pour les habitants du camp;
6. d'insister auprès de la haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères, du haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés et du Comité international de la Croix-Rouge, pour trouver une solution durable, unanimement acceptée par les parties, au statut juridique des habitants du camp d'Ashraf.
28 octobre 2011.
Karl VANLOUWE. | |
Piet DE BRUYN. | |
Patrick DE GROOTE. |