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Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 30 JUIN 2011 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Question orale de Mme Fabienne Winckel à la ministre de l'Intérieur et au secrétaire d'État au Budget, à la Politique de migration et d'asile, à la Politique des familles et aux Institutions culturelles fédérales sur «la carte d'identité spéciale accordée au personnel d'une ambassade» (nº 5-228)

Mme Fabienne Winckel (PS). - Pour travailler dans une ambassade, un travailleur étranger doit obtenir une carte d'identité spéciale. Lorsque l'État belge octroie une de ces cartes à un travailleur qu'une ambassade fait venir de son pays d'origine, celle-ci est rattachée à la qualité et à la personne de son employeur. Dès lors, si l'employeur veut se séparer du travailleur, ce dernier perd également son titre de séjour et se retrouve en situation irrégulière en Belgique.

De multiples plaintes déposées par des membres du personnel de diverses ambassades ont montré que beaucoup de ces travailleurs se sont retrouvés dans cette situation. Il semblerait que de plus en plus souvent, ces personnes introduisent un dossier de régularisation sur une base humanitaire considérant qu'elles sont des victimes de la traite des êtres humains.

En première analyse, on peut déjà se demander si un travailleur licencié en possession de ce type de carte dispose d'un délai avant de devoir quitter le territoire et si ladite carte lui permet de travailler pour l'ambassade et aussi et éventuellement pour un autre employeur.

Par ailleurs, disposez-vous d'informations précises quant aux éléments concrets déterminant si une régularisation sur une base humanitaire est valable en cas de plainte de ces travailleurs contre leur ambassade ?

M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État au Budget, à la Politique de migration et d'asile, à la Politique des familles et aux Institutions culturelles fédérales. - Les personnes employées pour le compte d'une ambassade ou d'une organisation internationale en Belgique sont dispensées de l'obligation d'être en possession d'un permis de travail ainsi que des formalités relatives à l'enregistrement des étrangers. Leur séjour est admis sous ces conditions pour la durée de leur emploi. Si elles désirent rester en Belgique, elles doivent obtenir une autorisation de séjour, que ce soit pour exercer un nouvel emploi couvert par une autorisation de travail, pour poursuivre des études, en vue d'un regroupement familial ou pour des motifs humanitaires éventuels.

Il existe en Belgique une procédure spécifique pour les victimes de la traite des êtres humains qui travaillent au service du personnel diplomatique. La circulaire du 26 juin 2008 relative à la mise en oeuvre d'une coopération multidisciplinaire concernant les victimes de la traite des êtres humains et/ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains prévoit en effet une procédure différenciée pour les victimes de la traite d'êtres humains qui travaillent au service du personnel diplomatique. Il y a, bien sûr, des conditions à respecter, prévues par ladite circulaire, dont un avis favorable du magistrat du ministère public sur la réalité de la situation d'exploitation.

Ces cas ont été prévus par la circulaire en raison de l'immunité diplomatique dont jouissent les employeurs de ces victimes et par conséquent en raison de l'impossibilité de les poursuivre en justice sur le territoire belge, élément constitutif pour l'octroi de documents de séjour aux victimes potentielles.

Par ailleurs, une série de mesures préventives, évitant que ces personnes ne deviennent des victimes, sont également applicables via le protocole du SPF Affaires étrangères. Ces mesures sont également décrites dans la circulaire susmentionnée.

Logiquement, ces personnes ne devraient donc pas être orientées vers la procédure de régularisation. Une demande de régularisation humanitaire ne peut être valable que de deux manières : soit sur le plan de la recevabilité (répondre aux conditions légales et réglementaires de recevabilité), soit sur le fond (répondre aux critères de fond). En soi, l'existence d'une plainte contre une ambassade ne suffit pas à rendre la demande de régularisation valable ni sur le fond ni sur la recevabilité.

Mme Fabienne Winckel (PS). - Vous venez de parler de cas proches, il est vrai, de ceux des victimes de la traite d'êtres humains et d'expliquer que toute une procédure légale et théorique est mise en place. J'aurais toutefois voulu disposer de statistiques à ce sujet. Certaines procédures aboutissent-elles ?

C'est entre autres un rapport présenté en 2005 par la Fondation Roi Baudouin qui m'a alertée. Selon ce rapport, « dans les faits, les recours donnent rarement lieu à des poursuites judiciaires et les abus ne sont généralement pas sanctionnés par la justice en raison de l'immunité attachée aux ambassades et à leur personnel ». Pouvez-vous me communiquer des chiffres sur le nombre de personnes victimes de violations de leur droit au travail ?

M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État au Budget, à la Politique de migration et d'asile, à la Politique des familles et aux Institutions culturelles fédérales. - Je ne dispose pas de chiffres et je vous invite donc à poser une question écrite à ce sujet. Si des statistiques existent, je ne manquerai pas de vous les fournir.