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Mme Zakia Khattabi (Ecolo). - Monsieur le ministre, le budget 2011 mentionne une provision de 180 millions d'euros prévue au budget du SPF Budget et Contrôle de la Gestion pour de nouvelles initiatives. Tout en reconnaissant que cette provision n'avait pas été explicitement attribuée au SPF Justice, vous avez annoncé que cette provision devrait notamment servir à financer la location de cent cinquante places supplémentaires à la prison de Tilburg, à recruter du personnel pour les nouvelles prisons, à permettre la mise en oeuvre de la jurisprudence « Salduz » et l'entrée en vigueur du projet de loi. Les crédits seraient libérés par dossier à la suite d'un arrêté royal délibéré en conseil des ministres.
Monsieur le ministre, concernant la mise en oeuvre de la jurisprudence « Salduz », vous savez que la plupart des barreaux n'ont pas attendu le vote d'un texte législatif pour organiser les permanences afin d'éviter que la Belgique soit, elle aussi, condamnée.
Les permanences sont tenues par des avocats bénévoles puisque, faute de budget, aucune rémunération ou indemnité ne leur est versée. Or, devant l'absence de poste spécifique pour le financement de ces permanences dans le budget 2011 et guère rassurés par vos explications, ces avocats perdent patience et laissent progressivement tomber les permanences « Salduz ». Il est urgent de réagir.
Monsieur le ministre, lors des travaux parlementaires, vous sembliez conscient, à l'instar des avocats qui ont décidé d'organiser les permanences avant même que nous ne légiférerions, de l'urgence pour la Belgique de se conformer à la jurisprudence. Dès lors, pourquoi ne pas avoir prévu un article budgétaire spécifique qui permettrait à tout le moins de donner quelques moyens aux permanences existantes ?
Hier, en commission, vous confirmiez que vous ne débloqueriez pas d'argent avant l'entrée en vigueur de la loi. Comment allez-vous gérer les conséquences de l'arrêt des permanences, annoncé pour le 1er juillet ?
M. Stefaan De Clerck, ministre de la Justice. - J'ai expliqué à plusieurs reprises, en commission, les solutions envisagées en ce qui concerne le budget nécessaire à l'application de la loi qui, espérons-le, sera votée dès que possible au Sénat. Ce sera un moment important, puisque cette loi correspond aux choix que nous avons posés.
Il est exact que l'impact budgétaire de la loi Salduz n'a pas été prévu dans un poste séparé du budget 2011. Néanmoins, une provision interdépartementale de 180 millions d'euros a été inscrite dans les crédits du SPF Budget et Contrôle de la gestion. Aucune nouvelle initiative n'était autorisée durant l'élaboration du budget 2011, raison pour laquelle une provision a été inscrite en tant que réserve disponible pour d'éventuelles nouvelles initiatives.
Le ministre du Budget et le secrétaire d'État au Budget sont à présent chargés de l'élaboration de l'inventaire des demandes éventuelles d'imputation de cette provision interdépartementale. Ainsi que je l'ai demandé - cela fut confirmé à diverses reprises - le dossier Salduz est bien entendu prioritaire à cet égard. J'ai donc pris mes précautions.
La loi arrivant en fin de parcours, il convient d'élaborer un calcul définitif. Jusqu'à présent, un montant de 31 millions par an me paraissait suffisant, mais les demandes formulées récemment par la police et par les juges d'instruction me préoccupent. La facture sera très lourde, non seulement pour les avocats, mais aussi pour les traducteurs, les infrastructures, etc.
Je prends deux initiatives en vue de finaliser la loi. Tout d'abord, j'invite tous les acteurs concernés - le ministère public, les juges d'instruction, la police et les avocats - à débattre une nouvelle fois de l'organisation future et à me présenter leurs chiffres définitifs, indispensables pour l'élaboration du budget et pour la demande que je dois présenter au gouvernement.
J'ai eu, cette semaine, le plaisir de rencontrer les avocats. Hier soir encore, j'ai participé au bicentenaire des barreaux de Bruxelles. Ce fut l'occasion de nouveaux contacts. Une nouvelle concertation aura lieu le 30 juin concernant, d'une part, les frais qui découleront de la loi et, d'autre part, l'organisation du système pro deo, lequel pose actuellement de nombreux problèmes. Le second volet a trait aux paiements que nous allons devoir effectuer pour le passé.
Les avocats ont, d'emblée, assumé une partie des prestations demandées, essentiellement auprès des juges d'instruction. Certains avocats ont été payés, mais le problème de la preuve se pose et il existe des différences, donc des inégalités, entre les barreaux.
J'ai émis quelques éléments de réponse et des propositions. Je poursuivrai ce débat, le 30 juin, avec les barreaux, l'OBFG et l'OVB. Bien mieux que les manifestations, le dialogue nous permettra, je l'espère, de trouver des remèdes, pour le passé et pour l'avenir.
Mme Zakia Khattabi (Ecolo). - Je suis rassurée puisque vous évoquez cette rencontre du 30 juin sans fermer la porte à une éventuelle rétroactivité, à l'issue d'une négociation. Je me réjouis que vous ne soyez plus aussi catégorique dans votre refus de prendre en charge les prestations effectuées avant l'entrée en vigueur de la loi. Ce serait en effet un mauvais signal donné aux avocats qui, comme nous, ont pris leurs responsabilités, dans un souci d'éviter les condamnations de la Belgique. C'est d'ailleurs pour cette raison que vous aviez demandé au Parlement de progresser dans le dossier Salduz, ce que ne pouvait faire le gouvernement en affaires courantes. Il serait regrettable de sanctionner les avocats qui ont pris leurs responsabilités en la matière.
Je ne manquerai pas de vous interroger à nouveau, après la réunion du 30 juin.