5-861/1

5-861/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2010-2011

17 MARS 2011


Proposition de loi étendant les catégories de personnes et de postes de dommages susceptibles de faire l'objet d'une indemnisation par la Commission pour l'aide financière aux victimes d'actes intentionnels de violence

(Déposée par Mme Anke Van dermeersch et M. Bart Laeremans)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition de loi reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 22 juin 2009 (doc. Sénat, nº 4-1386/1 - 2008/2009).

Les victimes d'actes de violence dont les auteurs étaient inconnus ou s'avéraient insolvables ont longtemps été abandonnées à leur sort: elles n'étaient pas ou pas suffisamment indemnisées. Leurs parents directs devaient aussi souvent supporter le coût de toutes sortes d'interventions chirurgicales très onéreuses. Sans parler des ravages pour la santé des membres de leur famille et du préjudice moral subi par l'entourage direct de la victime.

Une réglementation qui a vu le jour dans un passé récent permet à la Commission pour l'aide financière aux victimes d'actes intentionnels de violence, en tant qu'organisme public, d'octroyer une aide financière à certaines conditions et d'atténuer la douleur la plus vive dans un certain nombre de cas navrants — fût-ce parfois de manière temporaire et seulement partielle. En versant cette aide financière, l'État était subrogé de plein droit aux droits de la victime ou des membres de la famille. L'État pouvait de ce fait réclamer le remboursement des dommages-intérêts payés si les auteurs pouvaient encore être découverts ou pris ou s'avéraient malgré tout insolvables par la suite.

La finalité de la loi du 26 mars 2003 était donc claire:

— verser une aide financière aux victimes d'actes de violence, aux proches ou aux père et mère ou aux parents jusqu'au deuxième degré;

— octroyer éventuellement une avance si aucune décision judiciaire définitive n'est encore intervenue;

— octroyer une aide d'urgence lorsque tout retard dans l'octroi de l'aide pourrait causer au requérant un préjudice important;

— et même octroyer un complément d'aide lorsqu'après l'octroi de l'aide, le dommage s'est manifestement aggravé.

Les victimes oubliées

À première vue, il semble que la réglementation prévue est assez complète et tente de répondre à presque toutes les questions financières possibles. Cependant, force est de constater que, dans tous les cas, la législation sur l'aide financière aux victimes d'actes intentionnels de violence ne s'applique pas à une certaine catégorie de victimes. Il s'agit ici de tiers, concernés fortuitement ou non. Des voisins ou des amis qui, au moment des faits, se trouvaient éventuellement sur les lieux du délit et ont subi des dommages matériels ou physiques. Imaginons, par exemple, que la victime de l'acte de violence se trouvait dans la voiture d'un ami. La victime est enfermée dans la voiture de son ami par l'auteur qui boute ensuite le feu au véhicule. La victime pourra naturellement demander l'intervention de la Commission susmentionnée, ce qui, aux termes actuels de la réglementation, n'est pas le cas de son ami, propriétaire du véhicule. Ce dernier ne peut prétendre à une intervention, conformément à la réglementation telle qu'elle a été rédigée en 2003. S'il n'a pas souscrit d'assurance complémentaire pour son véhicule, il ne recevra pas d'indemnité (à minorer d'une franchise). Il peut uniquement se constituer partie civile contre l'auteur, mais si ce dernier est insolvable ou introuvable, il ne recevra rien. Il fait donc partie des victimes oubliées.

Autre exemple: à la suite des actes de violence commis à l'encontre de la victime, le logement d'un voisin est endommagé. Ce voisin n'entre, lui non plus, dans aucune catégorie donnant droit à une réparation, telle que visée à l'article 31 de la loi du 1er août 1985 et c'est donc en vain qu'il fera appel à la commission susmentionnée. Dans le meilleur des cas, il pourra avoir recours à son assurance incendie, ce qui lui permettra de toucher une indemnité, mais toujours sous déduction d'une franchise et peut-être aussi d'autres minorations ou amortissements. Ce voisin, pourtant victime lui aussi de ces actes intentionnels de violence, fait donc également partie des victimes oubliées.

Et la liste est encore longue. Il ressort d'articles de presse que de plus en plus de victimes doivent solliciter une intervention des pouvoirs publics. En outre, de plus en plus d'auteurs d'actes intentionnels de violence sont insolvables ou ne peuvent être identifiés. Autrement dit, dans un nombre croissant de cas, les victimes « directes » sont laissées-pour-compte. Dans cet ordre d'idées, on ne peut que constater que de plus en plus de victimes « indirectes », donc des victimes qui n'ont subi « que » des dommages matériels, sont également laissées-pour-compte. C'est pourquoi il nous semble plus que souhaitable d'étendre la loi à cette catégorie de victimes.

Anke VAN DERMEERSCH.
Bart LAEREMANS.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

L'article 31, alinéa 1er, de la loi du 1er août 1985 portant des mesures fiscales et autres, modifié en dernier lieu par la loi du 30 décembre 2009, est complété par un 6º rédigé comme suit:

« 6º toutes les autres personnes, qui ne présentent pas de lien familial avec les personnes visées au 1º, mais qui ont subi un dommage matériel résultant des actes de violence dont ont été victimes les personnes visées au 1º. »

Art. 3

Dans l'article 32 de la même loi, remplacé par la loi du 26 mars 2003 et modifié par la loi du 27 décembre 2004, les modifications suivantes sont apportées:

1º le paragraphe 2 est complété par un 7º rédigé comme suit:

« 7º d'autres dommages matériels, valablement prouvés et en rapport immédiat et direct avec l'acte intentionnel de violence. »;

2º dans la phrase introductive du paragraphe 3, les mots « visées à l'article 31, 3º et 4º » sont remplacés par les mots « visées à l'article 31, 3º, 4º et 6º »;

3º le paragraphe 3 est complété par un 4º rédigé come suit:

« 4º d'autres dommages matériels, valablement prouvés et en rapport immédiat et direct avec l'acte intentionnel de violence. »

Art. 4

Dans l'article 33, paragraphe 2, de la même loi, remplacé par la loi du 26 mars 2003, et modifié en dernier lieu par la loi du 30 décembre 2009, les mots « 62 000 euros » sont remplacés par les mots « 100 000 euros ».

Art. 5

Dans l'article 36, alinéa 2, de la même loi, remplacé par la loi du 26 mars 2003 et modifié par la loi du 27 décembre 2004, les mots « 15 000 euros » sont remplacés par les mots « 25 000 euros ».

9 mars 2011.

Anke VAN DERMEERSCH.
Bart LAEREMANS.