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Mme Muriel Targnion (PS). - À l'heure où les finances publiques connaissent des moments difficiles, où le pouvoir fédéral devrait être amené sous peu à présenter un budget dans des circonstances politiquement et financièrement délicates, la tentation serait grande pour le gouvernement en affaires courantes de faire peser une partie de ses charges sur les pouvoirs locaux, en l'occurrence les communes, et ce par l'intermédiaire d'une application de la norme SEC95 en matière de comptabilité communale.
En tant qu'ancienne échevine, je suis farouchement opposée à une telle idée. Si divers mécanismes comme le tiers boni ou l'interdiction d'emprunt pour couvrir un déficit poussent déjà les communes à éviter tout déficit budgétaire, l'adoption du système SEC95 réduirait grandement les possibilités d'investissement des communes. Or dans le contexte de crise actuel, en sachant la part importante que les communes prennent dans les investissements publics, il serait catastrophique que celles-ci soient empêchées d'effectuer les dépenses nécessaires dont elles sont responsables et qui sont indispensables au citoyen.
La requalification des recettes et des dépenses accentuerait le déficit des pouvoirs locaux de notre pays à un niveau qui flirterait avec le 1,4 milliard d'euros pour l'année budgétaire 2011.
Il me revient qu'une possibilité serait que les régions se portent garantes pour les communes concernant l'équilibre de leurs budgets en regard de la norme SEC95. Ceci aurait pour principale conséquence que l'équilibre devrait être garanti au niveau régional et non plus au niveau communal. Je m'étonne également de cette piste de réflexion quand on sait que la dette des communes vient en partie des charges imposées par le pouvoir fédéral.
Dès lors, monsieur le secrétaire d'État, quelle est votre position sur l'éventuelle application de la norme SEC95 ? Le gouvernement pourrait-il imposer cette norme aux pouvoirs locaux ? Si tel devait être le cas, quel niveau de pouvoir s'en porterait garant ?
M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État au Budget, à la Politique de migration et d'asile, à la Politique des familles et aux Institutions culturelles fédérales. - Madame la sénatrice, en votre qualité d'ancienne échevine de « la plus belle commune de Belgique », je voudrais vous dire qu'il existe un véritable malentendu autour de l'application de la norme SEC95 qui continue et malheureusement s'amplifie. Je profite de votre question pour éclaircir la situation.
Il n'a jamais été question de demander aux communes de modifier quoi que ce soit, ni à leur comptabilité ni à l'amortissement de leurs investissements. Le SEC95 est un système macro-économique de comptabilité nationale et régionale.
La seule chose qui est demandée aux communes est de transmettre à l'Institut des comptes nationaux (ICN) un rapport harmonisé basé sur la nouvelle comptabilité communale qui est parfaitement compatible avec le SEC95 sur le principe d'enregistrement des transactions. On ne demande aux communes que de faire ce que font depuis de nombreuses années les institutions publiques de sécurité sociale (IPSS) dont la comptabilité est semblable à celle des communes. Ces institutions communiquent leurs comptes tels qu'ils sont et l'Institut des comptes nationaux y apporte les modifications nécessaires à l'établissement des comptes nationaux selon les règles européennes.
De la même façon, l'ICN adaptera globalement les comptes communaux pour respecter les règles européennes.
Sur le long terme, il n'y a du reste aucune différence pour ce qui concerne le solde moyen entre les comptes des communes et les comptes publics établis par l'ICN. En enregistrant chaque année l'amortissement des différents investissements, on obtient en moyenne le même montant qu'en enregistrant la totalité de l'investissement de l'année où il a lieu. C'est évidemment vrai au niveau macro-économique, ce l'est moins au niveau micro-économique. La grosse différence est qu'on verra apparaître dans les comptes de l'ICN les cycles des investissements communaux. Il faudra simplement en tenir compte dans la fixation de la trajectoire du programme de stabilité européen.
Les investissements sont souvent plus importants en période préélectorale. C'est un constat...
En revanche, il est effectivement demandé aux communes et aux provinces, par le biais de leur pouvoir de tutelle, de conserver ou d'adopter, comme les autres niveaux de pouvoir, une gestion parcimonieuse des deniers publics, de façon à contribuer à l'assainissement des finances publiques belges ou en tout cas à ne pas ralentir celui-ci. Depuis quelques années, le déficit structurel des pouvoirs locaux correspond à 0,2% du PIB, c'est-à-dire à environ 700 millions d'euros ; il leur est évidemment demandé, comme aux autres niveaux de pouvoir, de revenir le plus rapidement possible à l'équilibre.
Mme Muriel Targnion (PS). - Je suis heureuse d'apprendre qu'il s'agit d'une rumeur et non d'un fait établi.
Je suppose par ailleurs que vous êtes rassuré quant au budget de la Ville de Verviers, puisque depuis deux ans celui-ci est à l'équilibre...
Je vous remercie pour votre réponse qui, je l'espère, apaisera de nombreuses communes dont les dirigeants craignent l'application de cette norme.