5-542/1 | 5-542/1 |
29 NOVEMBRE 2010
La présente proposition de loi reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 28 janvier 2010 (doc. Sénat, nº 4-1616/1 - 2009/2010).
La présente proposition a pour but d'assurer une meilleure représentativité de la communauté linguistique germanophone au sein du Conseil supérieur de la Justice (CSJ).
Instauré par l'article 151 de la Constitution, lui-même mis en œuvre par la loi du 22 décembre 1998, le Conseil supérieur de la Justice rompt avec un système judiciaire décrié, notamment après l'affaire Dutroux. Le pouvoir exécutif a été contraint de renoncer à toute immixtion directe dans les nominations des magistrats, au profit d'un organe paritaire sur le plan linguistique et indépendant, tant vis-à-vis de l'exécutif lui-même que vis-à-vis du pouvoir judiciaire.
Le CSJ est chargé d'une triple mission qu'il exerce de manière effective depuis le 2 août 2000.
Tout d'abord, le CSJ est chargé du contrôle externe du fonctionnement de l'ordre judiciaire, y compris le traitement des plaintes.
Il doit, également, se charger de soumettre des avis aux responsables politiques, afin d'améliorer le fonctionnement de la magistrature.
Enfin, il s'est vu confier un rôle déterminant dans la politique de nomination et de formation au sein de la magistrature, et ce de manière objective.
Pour accomplir ces différentes missions, le CSJ, composé de quarante-quatre membres, est organisé de la façon suivante: un collège francophone et un collège néerlandophone, comptant chacun vingt-deux membres répartis de façon paritaire entre magistrats et non-magistrats, sont institués en son sein.
Chaque collège linguistique procède à la fois à la composition d'une commission de nomination et de désignation comprenant quatorze membres, dont sept magistrats et sept non-magistrats, et à la composition d'une commission d'avis et d'enquête comprenant huit membres, dans le respect une nouvelle fois de la parité requise entre magistrats et non-magistrats.
Les commissions de nomination francophone et néerlandophone constituent ensemble la commission de nomination réunie. Il en va de même pour les commissions d'avis et d'enquête francophone et néerlandophone qui constituent ensemble la commission d'avis et d'enquête réunie.
À la lecture de la composition du CSJ, on constate que la communauté germanophone n'est pas représentée en tant que telle. Actuellement, le Code judiciaire, en son article 259bis-1, exige seulement qu'un membre du collège francophone satisfasse à la connaissance de l'allemand. Ceci engendre une série de problèmes qui méritent d'être résolus.
Tout d'abord, l'article ne prévoit pas de quelle manière la preuve de la connaissance linguistique doit être apportée ni ne précise le niveau de connaissance exigé.
En outre, le membre qui doit connaitre l'allemand est contraint de siéger à la commission de nomination (article 259bis-8, § 1er). La représentation des germanophones n'est, par conséquent, pas assurée au sein de la commission d'avis et d'enquête.
Cette situation engendre notamment des problèmes lorsque des rapports émanant de l'arrondissement judiciaire d'Eupen sont envoyés au CSJ. En effet, la plupart du temps personne, au sein de la commission d'avis et d'enquête, ne maîtrise suffisamment la langue allemande pour en déchiffrer le contenu. Les observations formulées dans ces rapports restent dès lors sans suite.
Enfin, dans le cas où le membre du collège francophone se révèle être un germanophone de souche, son assimilation au groupe francophone l'oblige « diplomatiquement » à soutenir les thèses défendues par la communauté linguistique « latine » du pays dans les cas où, sur certains dossiers, apparaissent des divergences communautaires.
Pour ces diverses raisons, la présente proposition de loi préconise de prévoir la présence de deux membres germanophones au sein du Conseil supérieur de la Justice.
La proposition définit précisément la qualification de « membre germanophone ». Il s'agit de « toute personne titulaire d'un diplôme d'études secondaires obtenu dans un établissement scolaire de la région de langue allemande, ou de toute personne dont la résidence principale ou le lieu de travail se situe depuis au moins cinq ans dans une commune de la région de langue allemande. ».
Afin de ne pas mettre en péril la parité linguistique francophone et néerlandophone organisée par l'article 151 de la Constitution, il est prévu que les deux membres germanophones ne disposent que d'une voix consultative à l'intérieur des commissions organisées au sein du CSJ. Il en va de même au sein de l'assemblée générale du Conseil et du collège francophone.
Des deux membres germanophones, l'un doit être magistrat et l'autre non-magistrat. Ils siègent soit au sein de la commission de nomination, soit au sein de la commission d'avis et d'enquête en fonction de la décision prise par le collège francophone du CSJ.
Alain COURTOIS. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.
Art. 2
Dans l'article 259bis-1, du Code judiciaire, inséré par la loi du 22 décembre 1998, les modifications suivantes sont apportées:
1º au paragraphe 1er, alinéa 1er, les mots « quarante-quatre membres » sont remplacés par les mots « quarante-six membres »;
2º l'alinéa 2, première phrase, est complété à la fin par le membre de phrase: « , et de deux membres germanophones. »;
3º l'alinéa 2 est complété par les troisième et quatrième phrases, rédigés comme suit:
« Parmi les deux membres germanophones, il doit y avoir un magistrat et un non-magistrat. Au sens du présent article, il faut entendre par membre germanophone: toute personne titulaire d'un diplôme d'études secondaires obtenu dans un établissement scolaire de la région de langue allemande, ou toute personne dont la résidence principale ou le lieu de travail se situe depuis au moins cinq ans dans une commune de la région de langue allemande. »;
4º au paragraphe 3, l'alinéa 2, est supprimé.
Art. 3
Dans l'article 259bis-2, du même Code, inséré par la même loi, les modifications suivantes sont apportées:
1º le paragraphe 1er, alinéa 1er, est complété par la phrase:
« Le magistrat germanophone est élu, dans le respect des mêmes modalités, par un collège électoral francophone. »;
2º le paragraphe 2, alinéa 2, première phrase, est complétée par le membre de phrase: « et de la Communauté germanophone ».
Art. 4
L'article 259bis-4, § 4, alinéa 1er, du même Code, est complété par la phrase suivante:
« Les deux membres germanophones du Conseil supérieur siègent dans une des commissions du collège francophone. »
Art. 5
L'article 259bis-5, § 1er, du même Code, est complété par un alinéa 2, rédigé comme suit:
« Les membres germanophones disposent au sein du Conseil supérieur, du collège francophone et des commissions, d'une voix consultative. ».
Art. 6
Dans l'article 259bis-8, du même Code, inséré par la même loi, les modifications suivantes sont apportées:
1º au paragraphe 1er, alinéa 1er, la deuxième phrase est remplacée par les phrases suivantes:
« Les quatorze membres institués au sein de la commission de nomination par le collège francophone sont assistés par l'un des deux membres germanophones. Celui-ci dispose d'une voix consultative. »;
2º le paragraphe 2, alinéa 1er, est complété par la phrase suivante:
« Le candidat germanophone institué au sein de la commission de nomination francophone assiste la commission de nomination réunie avec voix consultative. »
Art. 7
Dans l'article 259bis-11, du même Code, inséré par la même loi, les modifications suivantes sont apportées:
1º le paragraphe 1er, alinéa 1er, est complété par les phrases suivantes:
« Les huit membres institués au sein de la commission d'avis et d'enquête par le collège francophone sont assistés par l'un des deux membres germanophones. Celui-ci dispose d'une voix consultative. »;
2º le paragraphe 2, alinéa 1er, est complété par la phrase suivante:
« Le candidat germanophone institué au sein de la commission de nomination francophone assiste la commission d'avis et d'enquête avec voix consultative. »
14 octobre 2010.
Alain COURTOIS Gérard DEPREZ. |