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4 MAI 2010
I. INTRODUCTION
La présente proposition de loi a été déposée le 22 novembre 2007 par Mme Defraigne et envoyée à la commission le 29 novembre.
Elle a été examinée par la commission les 5 et 19 janvier, 2 février et 20 avril 2010.
Au cours de sa réunion du 2 février 2002, la commission a demandé l'avis de la Commission permanente de contrôle linguistique à propos de la proposition à l'examen. La commission a également demandé au ministre de l'Intérieur d'évaluer son impact budgétaire. La Commission permanente de contrôle linguistique a remis son avis au ministre le 23 mars 2010 (voir annexe 1).
La commission a examiné ledit avis au cours de sa réunion du 20 avril.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF PAR MME DEFRAIGNE, AUTEUR DE LA PROPOSITION DE LOI
La proposition de loi prévoit la mise en place d'un système de réponse multilingue en matière d'aide médicale urgente. Chacun se souviendra du drame survenu le 17 novembre 2009 au cours duquel un automobiliste francophone a prévenu le 101 et s'est vu confronté à une opératrice néerlandophone qui ne parlait pas le français. De précieuses secondes ont été perdues et la victime de 19 ans est décédée des suites de l'accident. Le but de la proposition de loi est de remédier à ce problème et de faire en sorte que les appels d'urgence puissent être reçus et traités dans chacune des langues nationales et en anglais. L'objectif est de sauver des vies dans un cadre contraignant.
L'aide médicale urgente, en Belgique, est organisée par la loi du 8 juillet 1964. La Belgique crée alors le premier système d'appel unifié au monde. Un numéro d'appel unique des secours médicaux urgents est valable pour tout le territoire. Ce numéro, à l'origine le 900, devient, en 1987, le 100.
Parallèlement, une décision du Conseil européen (91/396/EEC) du 29 juillet 1991 a instauré un numéro d'appel d'urgence unique européen et gratuit rendu accessible au travers des différents pays européens. Cela afin d'éviter que toute personne qui se rend dans un autre pays de l'Union européenne ne doive à chaque fois mémoriser les numéros d'appel d'urgence propres à ce pays. C'est ainsi qu'est né au niveau européen le numéro 112.
En Belgique, le 112 est entré en vigueur depuis le début de l'année 1993 sur décision du ministre de l'Intérieur de l'époque et fonctionne donc en parallèle aux numéros 100 et 101; le 112 devant surtout permettre au visiteur étranger ou au Belge à l'étranger d'utiliser un numéro unique dans toute l'Union européenne.
En 2002, la décision européenne de 1991 a été codifiée dans le cadre de la directive 2002/22/CE, dite « directive service universel ». Cette directive doit être transposée dans les différentes législations nationales pour le 25 juillet 2006. En Belgique, c'est déjà chose faite avec la loi du 13 juin 2005 relative aux communications électroniques et qui se réfère, dans son article 107, à un arrêté royal qui doit fixer la liste des services publics ou des services d'intérêt général à considérer comme des services d'urgence pour l'application de cette loi. Il existe un arrêté royal du 9 octobre 2002 qui met déjà en œuvre la directive européenne, car il prévoit que les services 100 et 101 doivent répondre aux appels dirigés vers le numéro 112. Comme cet arrêté royal répond aux conditions énumérées dans la loi du 13 juin 2005, celle-ci reste d'application pour le moment.
Une réponse à chaque appel doit pouvoir être apportée dans une des trois langues nationales (à savoir, le français, le néerlandais ou l'allemand), et l'anglais au minimum, puisque notre pays se situe au carrefour de l'Europe. L'exemple de la France, pourtant pays unilingue, devrait nous inspirer puisque, dans 30 départements, il est répondu dans 28 langues grâce à un service de traducteurs d'urgence à distance. Dans les quelques secondes qui suivent, la personne qui appelle est en contact avec une tierce personne à qui elle peut faire part de son problème dans sa langue.
Force est de constater que sous le choc, il est parfois difficile de s'exprimer dans sa propre langue en cas d'urgence. Que dire alors si la réponse que l'on reçoit est formulée dans une autre langue que la sienne ! Il est donc primordial que toute personne qui se trouve dans une situation d'urgence puisse s'exprimer dans sa propre langue lorsqu'elle contacte un service de secours. Enfin, les centres d'appel doivent régulièrement faire face à de « faux appels » qui ne nécessitent pas une intervention urgente où des vies sont en danger. Ces appels sont autant d'entraves à une réaction urgente, efficace et appropriée des services de secours. D'où l'importance de bien comprendre son interlocuteur et déceler au plus vite les canulars.
Enfin, cette proposition de loi, qui avait déjà été déposée par M. Luc Paque sous la précédente législature (doc. Sénat nº 3-2089/1), répond en outre, à une préoccupation soulevée dans la note de l'informateur Didier Reynders. Elle énonce que « l'accès au 112 devrait pouvoir se faire partout dans les trois langues nationales et dans plusieurs langues étrangères ».
III. DISCUSSION GÉNÉRALE
M. Moureaux craint que la proposition de loi, bien qu'intéressante, ne soit difficile à mettre en œuvre si l'on passe uniquement par une loi. Ne serait-il pas indiqué d'ajouter un article qui indique que la loi sera mise en œuvre par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres ? De la sorte, le gouvernement aurait une certaine latitude pour la mise en œuvre du projet.
Mme Jansegers se demande si la Constitution autorise que l'on impose à des fonctionnaires de parler anglais. Elle suggère de soumettre la proposition de loi au Conseil d'État.
Mme Lijnen souhaite connaître l'avis du ministre de l'Intérieur sur la faisabilité de la proposition à l'examen.
M. Collas soutient l'objectif poursuivi par la proposition de loi. Dans le cas de la Belgique, il est opportun d'imposer les trois langues nationales et l'anglais. En cas de détresse, on s'exprime en effet plus facilement dans sa langue maternelle.
Pour faire un comparatif avec l'étranger, il semblerait qu'à Londres, les centres d'appel répondent dans 170 langues aux appels d'urgence.
IV. OBSERVATIONS DU MINISTRE DE L'INTÉRIEUR, MME ANNEMIE TURTELBOOM
Toute proposition visant à améliorer la qualité de l'aide aux citoyens doit être soutenue. L'usage du GSM pour alerter les secours a pour effet que de plus en plus d'appelants sont en contact avec des centres 100 ou 101 situés dans une autre région linguistique. En outre, la vocation européenne du numéro 112 implique de pouvoir traiter des appels dans d'autres langues. Une réflexion en ce sens est en cours au département de l'Intérieur.
Compte tenu de cette réflexion, les observations suivantes peuvent être faites:
a) la compatibilité de celle-ci avec la législation sur l'emploi des langues doit être examinée;
b) il ne faut pas sous-estimer le coût budgétaire d'avoir en permanence dans chaque centre d'appel des agents unilingues de plusieurs rôles linguistiques;
c) il faut développer les solutions favorisant le multilinguisme des agents;
d) la proposition concerne la loi du 8 juillet 1964, c'est-à-dire uniquement les centres 100. Elle manque donc une partie de son objectif car elle ne vise pas les appels au numéro 101;
e) l'organisation des appels de secours urgents est en cours de modification, suite à la décision européenne de disposer d'un numéro d'appel d'urgence unique le 112: il n'est donc pas opportun de modifier cette loi alors que le système va très prochainement être entièrement revu (cf. décision du Conseil des ministres du 17 juillet 2009 d'approuver en première lecture un avant-projet de loi et un projet d'arrêté royal sur l'agence 112 et les centres 112 et un projet d'arrêté royal sur le dispatching des services de la sécurité civile).
L'obligation d'être bilingues pour les préposés 100 existe à Bruxelles. Elle a pour conséquence un manque de personnel.
Plutôt qu'une obligation, il conviendrait de développer les stimulants au plurilinguisme. Ainsi, à la police, des primes existent pour les dispatchers et les calltakers qui démontrent la connaissance de l'autre langue nationale.
Un dossier pour pouvoir octroyer des primes pour les calltakers qui peuvent démontrer la connaissance d'une autre langue que la langue nationale est en projet.
V. SUITE DE LA DISCUSSION GÉNÉRALE
M. Moureaux constate que l'ensemble du projet n'est pas faisable du jour au lendemain. C'est pourquoi il doit être prévu que le gouvernement serait chargé de sa mise en œuvre afin de disposer du temps nécessaire. Le dossier réforme des services d'incendie aura également évolué et permettra d'apprécier les moyens qui peuvent être mis à disposition.
Quant à l'application des lois sur l'emploi des langues, l'argument lui semble de faible portée. Nous sommes dans une matière où le facteur principal est l'urgence. Le but est d'éviter des drames et sauver des vies. La proposition de loi vise à répondre à un problème réel. Il estime que sur un sujet aussi grave, où il s'agit de sauver la vie des gens, il serait lamentable d'être bloqué pour des raisons administratives.
Sur le plan juridique, il s'agirait, à son sens, de simples traductions des appels. Un système de traduction centralisé peut répondre à ce problème.
Mme Defraigne se dit surprise par les remarques de la ministre. La question sur la compatibilité avec la loi sur l'emploi des langues lui semble superfétatoire. Il n'y a pas matière non plus à se poser la question du bilinguisme du fonctionnaire. Le cœur du problème est ailleurs: il s'agit de répondre à des appels de détresse de façon multilingue. Comme l'a très justement soulevé M. Moureaux, il s'agirait d'une traduction qui pourrait être faite en quelques minutes.
La préoccupation est, en outre, européenne. À Londres, les services d'urgences répondent en 170 langues et en France, dans environ 30 langues.
La proposition de loi ne vise, quant à elle, que quatre langues et vise l'ensemble des appels d'urgence. Ce concept recouvre l'ensemble des appels unifiés concernés. Moyennant une bonne organisation informatique et d'un dispatching efficace, on peut réduire les coûts.
La proposition de loi n'est en outre que la traduction d'une demande émanant d'associations de victimes et de la protection civile qui la voient comme une réelle nécessité. Il s'agit d'une œuvre utile pour l'ensemble des citoyens de notre pays.
En octroyant un délai pour organiser le dispatching, la formule parait raisonnable à l'intervenante.
Plusieurs membres demandent une évaluation budgétaire de cette proposition.
M. Daras estime que, comme il s'agit d'un problème de sécurité, il ne changera pas son vote par rapport au texte à l'examen et ce, quelque soit le résultat de cette évaluation du coût budgétaire.
Mme Stevens soutient la proposition de loi de Mme Defraigne ainsi que ses amendements nos 3 à 5 qui visent à rendre les services de secours accessibles aux personnes souffrant de problèmes d'audition. En tant que malentendante, l'intervenante a déjà souvent eu des difficultés à joindre les services de secours. Elle partage l'opinion de M. Daras, selon lequel le coût ne doit pas avoir une influence déterminante sur la décision que prendra la commission. À cet égard, elle renvoie à la législation anti-discrimination votée par le parlement en 2003 et à la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées qui a été ratifiée par la Belgique. Permettre aux sourds et malentendants de joindre les services de secours constituerait une application concrète des ces textes.
Elle souligne qu'il existe deux fédérations des sourds et malentendants en Belgique. Dans la justification des amendements, il est pourtant fait mention uniquement de la fédération francophone. Cela fait très longtemps que la fédération flamande demande, elle aussi, de trouver une solution à cette problématique.
Dans la justification de l'amendement nº 6 de Mmes Khattabi et Piryns, on peut lire que la majorité des personnes sourdes sont illettrées. Elle veut rectifier cette affirmation. La plupart des sourds sont « analphabètes fonctionnels », ce qui signifie qu'ils peuvent lire et écrire, mais qu'ils ne comprennent pas toujours bien le sens des mots qu'ils lisent.
Enfin, pour ce qui est des SMS, Mme Stevens indique que l'on ne peut pas garantir qu'ils parviennent immédiatement au destinataire. Tant qu'on n'est pas certain que cela soit possible techniquement, on préfère reporter l'introduction de l'appel d'urgence par SMS. Dans la situation chaotique qui fait suite à un accident, beaucoup de personnes enverront en même temps un SMS d'urgence. Le système actuel ne permet toutefois pas de faire la différence entre des SMS ordinaires et des SMS d'urgence. Elle demande si cet aspect a été pris en compte.
M. Monfils fait remarquer qu'il n'appartient pas au parlement de déterminer les éléments techniques permettant aux personnes sourdes ou malentendantes de communiquer avec les services de secours. La technique change tout le temps. La Fédération francophone des sourds de Belgique mentionne dans un rapport « téléphones fixes, mobiles, internet, SMS, webcam,.. ».
Il appartient au ministre compétent de prendre les dispositions techniques pour permettre aux personnes sourdes ou malentendantes de contacter les services de secours.
Mme Matz fait observer que la suggestion de M. Moureaux de confier au Roi la mise en œuvre de la proposition prend tout son sens par rapport à ces remarques.
À la demande de plusieurs membres, la commission décide de demander à la ministre de l'Intérieur de recueillir l'avis de la Commission permanente de contrôle linguistique et de charger ses services d'examiner l'impact budgétaire de la proposition de loi.
La proposition de Mme Pehlivan prévoyant de consulter aussi le Conseil d'État n'est pas suivie par la commission.
VI. AVIS DE LA COMMISSION PERMANENTE DE CONTRÔLE LINGUISTIQUE ET IMPACT BUDGÉTAIRE
La ministre de l'Intérieur, Mme Turtelboom, rappelle qu'elle peut souscrire à l'objectif de la proposition, mais qu'il reste encore plusieurs points à améliorer ou à préciser.
Tout d'abord, il y a le fait que la proposition initiale concernait uniquement les appels 100 (l'aide médicale urgente) et pas les appels 101, ce qui constitue évidemment une différence de taille.
Ensuite, il y a la question de la compatibilité de cette proposition de loi avec les lois linguistiques. Il n'y a en effet pas de certitude absolue sur ce point. Pour éviter les problèmes, il faut donc que toute la clarté soit faite sur ce point.
Enfin, il y a aussi l'aspect budgétaire. La proposition a un coût budgétaire élevé. La bonne gouvernance impose de calculer le coût d'une mesure avant de l'instaurer.
Sur la base de ce qui précède et d'autres remarques, des amendements ont été déposés à la proposition de loi. Les amendements nos 7 et 9 ont donné suite à un certain nombre d'observations formulées par la ministre et ont aussi apporté une solution au problème des appels d'urgence pour les personnes sourdes et malentendantes, ce dont elle ne peut que se réjouir.
Sur la base de la proposition et des amendements, la commission du Sénat a demandé à la ministre, en ce qui concerne l'impact budgétaire et la compatibilité avec les lois linguistiques:
— de recueillir l'avis de la Commission permanente de contrôle linguistique;
— de charger ses services de réaliser une estimation budgétaire.
La ministre a reçu l'avis de la Commission permanente de contrôle linguistique et l'a transmis à la commission (voir l'annexe 1). Elle a aussi reçu des éléments d'information sur le coût budgétaire de la mesure.
L'avis de la CPCL est le suivant:
— dans l'état actuel de la législation, l'appel doit être traité dans la langue de la région dans laquelle le centre 100 est situé;
— la loi sur l'emploi des langues permet toutefois de prévoir une réglementation en matière de langues spécifique pour certains services.
En conséquence, la présente proposition peut prévoir pour les appels d'urgence un règlement spécifique quant à l'emploi des langues.
Pour ce qui concerne l'estimation budgétaire liée à l'exécution de cette proposition, celle-ci reste approximative et ce, tant que la solution permettant de répondre aux appels d'urgence dans l'une des trois langues nationales ou en anglais n'aura pas été déterminée.
En tout état de cause, la mise en œuvre de la proposition doit être progressive car il est impossible exiger de tous les calltakers qu'ils soient multilingues dès que le texte aura été voté.
Une première phase sera l'externalisation de la traduction et des mesures favorisant le multilinguisme des calltakers.
L'impact budgétaire de
— l'appel à un bureau externe de traduction,
— l'augmentation des primes pour les calltakers,
— la formation et la certification spécifique de ceux-ci,
a été estimé à un peu plus de 2,5 millions d'euros.
Il s'agit d'une dépense récurrente et nouvelle, pour laquelle son département ne dispose pas, actuellement, des crédits nécessaires à sa mise en œuvre. Des crédits supplémentaires devront être octroyés dans le budget du département et ce, même dans une approche phasée de la mise en œuvre.
Pour ces raisons, et pour éviter de faux espoirs, il eût été plus souhaitable de disposer du budget nécessaire au moment de l'adoption de la présente proposition. Toutefois, les objectifs poursuivis sont compréhensibles. Il s'agit d'objectifs légitimes pour lesquels l'adoption de cette loi représente un signal positif.
VII. DISCUSSION DES ARTICLES
Article 1er
Cet article ne donne pas lieu à discussion.
Article 2
Amendement nº 1
Cet amendement, de M. Collas et Mme Defraigne (doc. Sénat, nº 4-410/2), vise à corriger le texte de cet article, à la suite d'une remarque du service d'Évaluation de la Législation. La proposition vise à assurer qu'un appel peut être traité au moins dans les trois langues nationales et l'anglais. Le texte de l'article stipule toutefois que l'appel doit être traité « au moins dans une des trois langues nationales », ce qui ne correspond pas à cette idée.
Amendements nos 3 à 5
Comme la proposition ne tient pas compte de l'accessibilité des services de secours aux personnes atteintes de troubles de l'audition, Mme Defraigne dépose les amendements nos 3 à 5 (doc. Sénat, nº 4-410/2) visant la mise en place d'un système d'accès rapide pour les personnes sourdes et malentendantes.
Amendement nº 6
Mmes Khattabi et Piryns déposent l'amendement nº 6 qui sous-amende l'amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 4-410/2) et qui vise également à rendre les centres d'appels accessibles aux personnes sourdes et malentendantes. Ce sous-amendement précise que les appels d'urgence doivent aussi pouvoir être traités par un centre de vidéoconférence.
Amendement nº 7
Mme Defraigne et consorts déposent l'amendement nº 7 visant à remplacer intégralement le texte de l'article 2 (doc. Sénat, nº 4-410/2).
Mme Matz, coauteur de l'amendement, explique que cet amendement permet d'élargir le champ d'application de la proposition de loi initiale. Celle-ci ne concernait en effet que les appels au système d'appel unifié dans le cadre de la loi relative à l'aide médicale urgente mais les auteurs de l'amendement souhaitent élargir le champ d'application aux centres 100 et 101.
Amendement nº 10
Mme Defraigne et consorts déposent l'amendement nº 10 qui sous-amende l'amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 4-410/2) et qui dispose que le Roi devra fixer avec précision le niveau de connaissances linguistiques.
Mme Jansegers demande si ce sous-amendement ne viole pas l'article 30 de la Constitution, qui prévoit que l'emploi des langues usitées en Belgique ne peut être réglé que par la loi. Selon elle, la Constitution interdit de confier l'emploi des langues au Roi.
M. Moureaux estime que l'amendement ne vise nullement l'emploi des langues tel que visé à l'article 30 de la Constitution, mais tend à permettre au ministre de fixer le niveau de connaissances linguistiques afin de faire fonctionner le système.
La ministre répond que cet amendement ne vise qu'à régler des modalités. Il y a d'autres exemples d'arrêtés royaux qui fixent les modalités de connaissance linguistique, tel que l'arrêté royal fixant les modalités de connaissances linguistiques exigées pour les examens du Selor. Il est clair que cela ne peut pas constituer un problème.
Article 2/1 (nouveau)
Amendement nº 8
Mme Defraigne et consorts déposent l'amendement nº 8 visant à insérer un article 2/1 nouveau (doc. Sénat, nº 4-410/2).
Mme Matz, coauteur de l'amendement, explique que l'objectif de celui-ci est de prévoir une réglementation pour les personnes sourdes et malentendantes, ce qui leur permet d'utiliser elles aussi les appels d'urgence.
Mme Stevens souligne que le système d'appels d'urgence par voie électronique proposé par cet amendement pour les personnes sourdes et malentendantes n'autorise que des communications unidirectionnelles. Compte tenu des technologies modernes, elle propose que l'on introduise des possibilités de communications interactives telles que la téléphonie mobile textuelle. À court terme, la vidéophonie sera également accessible par la téléphonie mobile. Elle insiste pour que le texte tienne compte de cette possibilité afin d'éviter de devoir réadapter la loi dans le futur.
M. Moureaux est sensible à la remarque. Il répond qu'il ne faut pas changer la loi au moment où la communication pourrait être interactive. L'adoption de l'amendement nº 8 ouvre toutefois la possibilité d'aller au-delà du simple SMS, tel que nous le connaissons aujourd'hui. Cette adaptation à la nouvelle technologie peut être mis en œuvre par le pouvoir exécutif.
La commission marque son accord sur cette interprétation.
M. Daras fait observer que dans la justification de son amendement, Mme Defraigne a d'ailleurs prévu cette possibilité: « en leur offrant la possibilité de recourir à un message électronique d'urgence spécialement prévu à cet effet (« short message service », chatroom ou autres). » Il est donc clair que l'amendement ne vise pas uniquement les SMS.
Mme Piryns se rallie à ce point de vue.
Article 2/1 (nouveau)
Amendement nº 2
M. Moureaux a remarqué qu'il est plus prudent de confier l'entrée en vigueur de la loi au Roi. La mise en œuvre du système proposé nécessitera de nombreuses mesures d'accompagnement.
Pour cette raison, M. Collas et Mme Defraigne déposent un amendement (doc. Sénat, nº 4-410/2) visant à insérer un nouvel article 2/1. Dans cet article, il est précisé que l'entrée en vigueur de la loi se ferait par un arrêté royal délibéré en Conseil de ministres.
Amendement nº 9
Mme Defraigne et consorts déposent un amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 4-410/2) qui vise également à préciser que l'entrée en vigueur sera déterminé par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.
Amendement nº 11
Mme Defraigne et consorts déposent un amendement nº 11, sous-amendement à l'amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 4-410/2), afin de permettre au Roi d'avancer au fur et à mesure que les arrêtés d'application sont pris.
VIII. VOTES
Les amendements nos 1 à 5 sont retirés par leurs auteurs. Par conséquent, l'amendement nº 6, qui sous-amendait l'amendement nº 2, devient sans objet.
Article 1er
Cet article est adopté à l'unanimité des 11 membres présents.
Article 2
L'amendement nº 10, sous-amendement à l'amendement nº 7, est adopté par 10 voix contre 1. L'amendement nº 7, ainsi sous-amendé, est adopté par 10 voix contre 1.
Article 2/1 (nouveau)
L'amendement nº 8 est adopté à l'unanimité des 11 membres présents.
Article 2/1 (nouveau)
Le sous-amendement nº 11 est adopté par 10 voix et 1 abstention.
L'amendement nº 9, ainsi sous-amendé, est adopté par un vote identique.
L'ensemble de la proposition de loi a été adopté par 10 voix et 1 abstention.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 9 membres présents.
La rapporteuse, | Le président, |
Ann SOMERS. | Philippe MOUREAUX. |
ANNEXE 1
Commission permanente de Contrôle linguistique
À Madame Annemie Turtelboom
Ministre de l'Intérieur
Objet: proposition de loi relative aux appels d'urgence.
Madame le ministre,
En sa séance du 19 mars 2010, la Commission permanente de Contrôle linguistique (CPCL), siégeant sections réunies, a consacré un examen à votre demande d'avis — introduite à la demande du Président de la Commission de l'Intérieur du Sénat —, concernant une proposition de loi relative aux appels d'urgence — introduite par le sénateur C. Defraigne —, ainsi qu'aux amendements apportés à cette proposition.
La portée de la proposition de loi est la suivante.
a) Tout appel
— au système d'appel unifié tel que visé à l'article 2 de la loi du 8 juillet 1964 relative à l'aide médicale urgente ou
— au centre d'information et de communication tel que visé à l'article 1er, 6º, de l'arrêté royal du 26 juin 2002 concernant l'organisation des centres de dispatching centralisés et du point de contact national
doit pouvoir être traité au moins dans les trois langues nationales et en anglais, conformément aux conditions, critères de qualité et modalités fixés par le Roi.
b) Les personnes sourdes ou malentendantes ainsi que celles soufflantes de tout autre handicap de nature à empêcher par un appel vocal le recours à un appel d'urgence, peuvent envoyer un message électronique d'urgence aux centres visés au point a).
Le Roi fixe les modalités d'exécution du présent article pour les personnes concernées sur proposition du ministre de l'Intérieur et du ministre de la Santé publique.
c) L'entrée en vigueur de cette loi est fixée par le Roi par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.
1. La CPCL rappelle que sa mission consiste et se borne à veiller au respect de l'application des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées par arrêté royal du 18 juillet 1966 — LLC (article 60, § ler, des LLC). En exécution de cette mission, elle a déjà émis, en la matière sous examen, les avis 40 065 du 21 novembre 2008 et 38 013 du 20 février 2009 (cf. annexes).
Selon le premier avis, 40 065, le message d'accueil standard relatif aux appels adressés aux centres d'urgences provinciaux, pour être conforme aux LLC, devait être formulé exclusivement en néerlandais dans les centres d'Information et de Communication (CIC) d'Anvers, de la Flandre occidentale, de la Flandre orientale, du Limbourg et du Brabant flamand; exclusivement en français dans les CIC du Brabant wallon, de Namur, du Luxembourg, du Hainaut et de Liège; et en français et en néerlandais dans le CIC de Bruxelles.
Le second avis, 38 013, a confirmé que, conformément aux LLC, le message sur le répondeur du CIC du Brabant flamand, devait être formulé exclusivement en néerlandais.
La CPCL constate que la proposition de loi concernant le traitement des appels d'urgence par l'imposition d'un quadrilinguisme aux CIC, déroge aux LLC et, partant, aux avis de la CPCL, émis en la matière.
2. L'article 1er, § ler, 1º, des LLC, dispose que lesdites lois coordonnées sont applicables aux services publics centralisés et décentralisés de l'État, des provinces et des communes, dans la mesure où ils ne sont pas régis, au point de vue de l'emploi des langues, par une autre loi. Des services qui, en matière linguistique, sont régis par une autre loi, spécifique, échappent dès lors au contrôle de la CPCL.
La CPCL constate que la proposition de loi sous examen vise l'instauration d'un tel règlement spécifique pour les appels d'urgence et les soustrait dès lors à l'application des LLC. Quant à savoir s'il est opportun, ainsi que l'entend la proposition de loi, de déroger aux LLC, la CPCL, eu égard à sa mission qui se limite au contrôle de l'application des LLC, n'est pas à même de se prononcer. Si le législateur estime qu'il est opportun de prévoir, pour les appels d'urgence, un règlement spécifique quant à l'emploi des langues, la CPCL ne peut, d'évidence, qu'en prendre acte.
Veuillez agréer, Madame le ministre, l'assurance de ma haute considération.
Le Président,
A. VAN CAUWELAERT-DE WYELS