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16 MARS 2010
I. Introduction
La commission a examiné la proposition de résolution qui fait l'objet du présent rapport au cours de ses réunions des 9 et 16 mars 2010.
II. Exposé introductif de M. Destexhe, auteur principal de la proposition de résolution
Cette proposition de résolution s'inscrit dans un esprit positif à la fois de soutien au gouvernement et à l'ensemble des acteurs politiques du Burundi. Il s'agit en outre simplement d'une manifestation d'appui à la politique du gouvernement belge et au processus électoral en cours au Burundi.
Ce pays a parcouru un très grand chemin tant en termes de cessation de guerre civile qu'en termes de participation au processus politique.
La proposition de résolution reprend soit des points de la politique du gouvernement belge soit des points d'accord entre les Burundais qui n'ont pas été exécutés complètement.
La proposition de résolution manifeste un soutien à l'envoi d'observateurs parlementaires, tant au niveau européen qu'au niveau de la Belgique.
Elle insiste pour que la campagne électorale ne favorise pas les tensions et les discours de haine raciale. En effet, une démocratie basée sur des lignes ethniques peut déboucher sur une violence pire qu'un régime non démocratique. La tentation est grande pour certains acteurs politiques dans la région, que ce soit au Rwanda, au Burundi ou en RDC, de s'appuyer sur un discours mono-ethnique.
Malgré le processus électoral, la situation des droits de l'homme reste fragile au Burundi avec des exécutions, des tortures et des crimes impunis. Il convient que le gouvernement belge y reste attentif.
Le problème de la protection des albinos doit continuer à retenir toute l'attention. Le fait que le parlement burundais a adopté une loi criminalisant l'homosexualité constitue un fait inquiétant bien que cette loi ne soit pas encore mise en application. En Uganda, l'homosexualité est même devenue un crime capital (punissable de la peine de mort).
Dans le cadre de la réconciliation nationale, les acteurs burundais se sont engagés à mettre en place une commission nationale pour la vérité et la réconciliation à l'instar de l'Afrique du Sud, et un tribunal mixte à l'exemple de la Sierra Leone. Il faut rappeler au gouvernement burundais que cet engagement ne s'est jamais réalisé.
Le gouvernement belge est le premier donateur bilatéral du Burundi; il y joue un rôle très important. Une partie importante de l'aide belge est conditionnée par le bon déroulement du processus électoral. Il convient que le Sénat réitère les conditions de cette aide supplémentaire de la Belgique au Burundi.
L'intervenant considère que la corruption pose également problème et pourrait être plus explicité dans le texte de la proposition.
III. Discussion générale
M. Wille prône que la mission belge d'obervation des élections au Burundi soit organisée de manière systématisée et dans un cadre général plus vaste. L'OSCE évalue les élections dans un pays déterminé sur la base, notamment, des critères suivants: respect des droits humains, respect des principes de l'État de droit (« rule of law ») et lutte contre la corruption.
Mais il y a lieu de mettre en place un mécanisme d'observation à long terme permettant aux techniciens de mettre le doigt sur les véritables problèmes. Cela permettra de comprendre par exemple pourquoi certaines minorités politiques éprouvent des difficultés à participer au scrutin. Les deux notions fondamentales qui jouent ici sont résumées dans l'expression anglaise « free and fair election ». Le mot « free » signifie que l'on doit pouvoir participer librement au scrutin, à la fois comme candidat et comme électeur. Le mot « fair » implique que tant la majorité que l'opposition doivent avoir l'opportunité d'exprimer leur point de vue. Il est impossible de réaliser une évaluation approfondie de ce processus en quelques jours. L'observation à court terme par des politiciens pourra se limiter au déroulement des opérations électorales proprement dites.
Le Conseil de l'Europe a créé en son sein la commission de Venise (que M. Luc Van Den Brande a présidée pendant plusieurs années). Cette commission est également active en Afrique où elle a d'ailleurs encadré le processus de révision de la Constitution en Afrique du Sud.
Mme de Bethune explique qu'il est d'ores et déjà établi qu'une mission sénatoriale se rendra au Burundi pour observer tout le cycle électoral. Une concertation est également en cours entre la Chambre et le Sénat pour envoyer une mission complémentaire ainsi que l'AWEPA (ONG parlementaire). Ces missions d'observation devraient être intégrées afin d'éviter tout double emploi. Le SPF Affaires étrangères est chargé de la coordination de ces missions avec l'Union européenne et d'autres instances. Des missions d'observation de l'Union africaine et de pays africains sont également en préparation.
M. Wille estime qu'il y a une grande différence entre les observateurs officiels et les observateurs non gouvernementaux, car ces derniers sont parfois manipulés par les autorités ou vice versa. Un observateur officiel n'a pas le droit de s'immiscer dans le processus électoral, pas même s'il est confronté à des actes de corruption active.
IV. Discussion des amendements
Dispositif
Point I.2
Mme Temmerman dépose l'amendement nº 1, qui vise à faire en sorte que le point I, 2 fasse également référence aux observateurs de la société civile. L'on soutient ainsi ces derniers, tout en soulignant leur rôle.
M. Destexhe propose de reformuler l'amendement et de parler de l'envoi éventuel d'observateurs de la société civile.
Mme Temmerman souscrit à cette suggestion, car cela permet de maintenir le principe du rôle de la société civile.
L'amendement nº 1 ainsi corrigé est adopté à l'unanimité des 11 membres présents.
Point II
Mme Temmerman dépose l'amendement nº 2 tendant à insérer au point II du dispositif un point 3bis (nouveau) faisant explicitement référence à la sauvegarde des libertés de la société civile.
Mme de Bethune relève que l'amendement nº 2 vise uniquement les droits de la société civile. Par sa spécificité, cette référence affaiblit le principe général de la sauvegarde des droits de toutes les catégories de personnes.
M. Wille propose de reformuler l'amendement nº 2 comme suit: « que les libertés de la société civile soient également sauvegardées ». La commission marque son accord sur cette proposition.
L'amendement nº 2 ainsi corrigé est adopté à l'unanimité des 11 membres présents.
Mme Temmerman dépose l'amendement nº 3 tendant à insérer un point II, 4bis (nouveau) demandant que l'on veille à ce que les jeunes démobilisés et sans emploi ne soient pas récupérés par des partis politiques en vue d'intimider l'opposition et les électeurs.
Mme Temmerman explique que les partis de la majorité actuelle emploient cette tactique pour trouver de nouveaux électeurs ou pour effrayer les opposants.
Mme Zrihen émet un doute quant à la justification de cet amendement. On ne peut pas démontrer que la majorité récupère les jeunes démobilisés et sans emploi. Dès lors, la crédibilité du texte est mise en cause.
M. Destexhe estime que l'amendement nº 3 revêt un caractère très important. À l'heure actuelle, des jeunes démobilisés sont recrutés au sein de mouvements de jeunesse à statut douteux.
L'amendement nº 3 est adopté par 10 voix et 1 abstention.
V. Votes
L'ensemble de la proposition de résolution amendée a été adopté par 10 voix et 1 abstention.
M. Mahoux souhaite motiver son abstention. En tant que membre de la commission des Droits de l'Homme de l'Union interparlementaire, il lui a été rapporté à plusieurs reprises dans ce cadre que les parlementaires burundais exclus de leur parti perdaient automatiquement leur mandat. Par son abstention, M. Mahoux entend attirer l'attention sur cette exclusion qu'il juge arbitraire.
Confiance a été faite au rapporteur pour la rédaction du présent rapport.
Le rapporteur, | La présidente, |
Paul WILLE. | Marleen TEMMERMAN. |
Texte adopté par la commission voir le doc. Sénat, nº 4-1675/4 — 2009/2010.