4-1659/3

4-1659/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2009-2010

10 MARS 2010


Projet de loi visant à renforcer le gouvernement d'entreprise dans les sociétés cotées et les entreprises publiques autonomes et visant à modifier le régime des interdictions professionnelles dans le secteur bancaire et financier


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES PAR

MM. DUCHATELET ET VANDENBERGHE


I. INTRODUCTION

Le présent projet de loi, qui relève de la procédure bicamérale optionnelle, a été déposé le 22 décembre 2009 par le gouvernement à la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 52-2336/1).

Il a été adopté le 11 février 2010 en séance plénière de la Chambre par 83 voix contre 9 et 35 abstentions.

Il a été transmis le 12 février 2010 au Sénat, qui l'a évoqué le 23 février 2010.

La commission a examiné le projet de loi au cours de sa réunion du 10 mars 2010.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DU MINISTRE DE LA JUSTICE

Ce projet de loi vise à développer et à renforcer le gouvernement d'entreprise, d'une part, dans les sociétés cotées en bourse et, d'autre part, dans les entreprises publiques. Dans le cadre de la rédaction du projet de loi, l'avis du Conseil d'État a été sollicité à deux reprises et il a été tenu compte des observations formulées tant par les employeurs que par les travailleurs, afin de pouvoir présenter un texte équilibré. Avant d'entrer en détails sur les grandes lignes des différentes dispositions, le ministre souligne que l'Europe joue également un rôle important dans cette matière. Le projet à l'examen ne transpose non seulement une directive européenne, le texte tient également compte des différentes recommandations de la Commission européenne, dont la plus récente a encore été décrétée le 30 avril 2009. Les dispositions du projet de loi s'inscrivent, d'une part, dans un cadre européen — la Belgique n'est pas une île dans ce domaine — mais, d'autre part, démontrent que notre pays prend rapidement les recommandations européennes à cœur.

Les grandes lignes du projet sont les suivantes:

A. Déclaration de gouvernement d'entreprise

En exécution de la directive européenne 2006/46/CE, le projet de loi oblige les sociétés cotées en bourse d'inclure dans leur rapport annuel une déclaration dans laquelle elles doivent fournir des explications sur les pratiques de gouvernement d'entreprise qu'elles appliquent. Dans cette déclaration, les entreprises doivent indiquer quel code de gouvernement d'entreprise elles suivent et préciser à quelles dispositions de ce code elle déroge, en motivant cette dérogation. Un arrêté royal peut imposer un code comme étant celui à utiliser.

B. Rapport de rémunération

Désormais, le rapport annuel des sociétés cotées en bourse devra aussi comprendre un rapport de rémunération destiné à assurer la transparence de la politique de rémunération de l'entreprise. Ce rapport devra fournir des explications sur la procédure suivie dans le cadre de la politique de rémunération au sein de l'entreprise et devra aussi contenir une série de dispositions très spécifiques concernant la rémunération des administrateurs, des membres du comité de direction et des administrateurs chargés de la gestion journalière. Le projet de loi impose par ailleurs la publication de l'enveloppe salariale du CEO, parce que cette personne est le responsable final de la gestion et la carte de visite de l'entreprise. Pour les autres membres du comité de direction et les administrateurs chargés de la gestion journalière, une publication commune suffit. Cette dernière disposition doit permettre aux actionnaires de se faire une idée du coût de l'administration et de la gestion de l'entreprise.

Le fait que ce rapport de rémunération doit être soumis distinctement à l'approbation de l'assemblée générale des actionnaires constitue un autre élément important. De cette manière, les actionnaires peuvent en effet approuver ou désapprouver la politique de rémunération de la société.

C. Comité de rémunération

Le rapport de rémunération doit être préparé par un comité de rémunération qui doit dorénavant être obligatoirement installé au sein du conseil d'administration des sociétés cotées en bourse. La majorité des membres du comité de rémunération doivent être indépendants. C'est en effet au niveau de la rémunération que des conflits d'intérêts sont possibles et c'est précisément ce que cette disposition doit permettre d'éviter. Récemment, le gouvernement et le parlement ont renforcé la notion d'« administrateur indépendant » par le biais la loi du 17 décembre 2008 instituant notamment un Comité d'audit dans les sociétés cotées et dans les entreprises financières (Moniteur belge du 29 décembre 2008).

D. Rémunération variable

La rémunération variable des administrateurs dans les sociétés cotées en bourse est réglementée de manière à ce qu'elle soit plus axée sur le long terme. C'est ainsi que désormais, seule la moitié de la partie variable de la rémunération peut porter sur les prestations de l'année en question. Au moins un quart doit porter sur les performances d'au moins trois années. Cet étalement dans le temps s'applique uniquement si la partie variable de la rémunération représente plus d'un quart de la rémunération annuelle totale.

L'orientation sur le long terme est également accrue en ce qui concerne la rémunération liée aux actions. Les actions et options sur actions ne peuvent être acquises définitivement ou être exercées qu'au moins trois ans après leur attribution.

E. Indemnités de départ (parachutes dorés)

Le rapport de rémunération doit également offrir plus de clarté sur les indemnités de départ des membres du cadre supérieur. Un élément important du projet de loi met des limites à ces indemnités afin d'éviter des excès. Le projet énonce que, dans les sociétés cotées et dans les entreprises publiques, les indemnités de départ des administrateurs exécutifs, des membres du comité de direction et des directeurs sont en principe limitées à 12 ou 18 mois de rémunération (fixe et variable) sur la base d'un avis motivé du comité de rémunération. Le projet fait sienne la philosophie du Code de corporate governance qui recommande également de limiter les indemnités de départ à 12 mois (ou 18 mois dans des cas exceptionnels). Si le conseil d'administration souhaite toutefois attribuer une indemnité de départ plus élevée à ces cadres supérieurs de direction, l'approbation préalable de l'assemblée générale des actionnaires doit être obtenue. En outre, les conseils d'entreprise doivent être consultés et peuvent émettre un avis aux actionnaires si une telle dérogation à cette norme est demandée. Ainsi, les actionnaires peuvent prendre des décisions en ayant connaissance des différents points de vue.

Il s'agit toujours de montants maximum. L'entreprise est évidemment libre de convenir de dispositions comprenant une rémunération inférieure avec la personne concernée, ce qui est d'ailleurs déjà souvent le cas. L'indemnité de départ comprend différents éléments (non seulement l'indemnité de licenciement, mais également une éventuelle clause de non-concurrence, etc.). Le règlement vaut également indépendamment du statut dans lequel la personne concernée exerce son mandat (employé, indépendant, société de gestion, etc.). Il s'agit de contrats, donc aussi bien de contrats de gestion que de contrats de travail.

Ce régime est identique à celui qui a été inscrit dans le Code belge de corporate governance en 2009 mais il est aujourd'hui consacré dans la loi. Une différence est faite entre les administrateurs qui quittent la société parce qu'ils ne répondent pas aux attentes et les autres. Ainsi, l'article 13 du projet énonce que si l'administrateur n'atteint pas les critères, il n'aura pas droit à la partie variable de l'indemnité de départ. Ceci vaut d'ailleurs également pour les entreprises publiques et pour les conventions existantes. Le projet est ainsi en phase avec la recommandation européenne visant à ne pas récompenser l'échec.

Dans son deuxième avis sur le texte du projet de loi, le Conseil d'État a d'ailleurs également renvoyé, de façon explicite, à la recommandation européenne du 30 avril 2009 qui prévoit que les entreprises cotées en Bourse doivent limiter les indemnités de départ et que l'échec ne peut pas être récompensé.

En prenant cette initiative législative, le gouvernement poursuit la politique qu'il mène pour soutenir les institutions financières belges. Dans ce dossier également, les indemnités de départ sont limitées à douze mois.

F. Entreprises publiques

Dès lors que le raisonnement applicable aux entreprises cotées en Bourse s'applique, en principe, aux entreprises publiques du secteur industriel, le gouvernement a décidé de leur imposer les mêmes règles en matière de rémunération. Ces dispositions concernent Belgacom, La Poste, la SNCB, la SNCB-Holding, Infrabel et Belgocontrol. Ces entreprises publiques autonomes visées par la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises économiques doivent également, comme les entreprises cotées en Bourse, (i) assurer la transparence en matière de rémunération, (ii) étaler leurs rémunérations variables dans le temps et (iii) limiter leurs indemnités de départ.

G. Interdictions professionnelles dans le secteur bancaire et financier

Enfin, un autre chapitre modifie les interdictions professionnelles applicables aux institutions bancaires et financières. Les règles sont adaptées pour distinguer les faillites dues aux circonstances économiques de celles dans lesquelles les administrateurs se sont rendus coupables d'infractions. Le projet de loi à l'examen prévoit à cet égard des règles plus strictes pour les administrateurs en faillite qui se sont rendus coupables d'infractions telles que l'escroquerie, l'abus de confiance ou le blanchiment d'argent, mais assouplit, en revanche, les règles applicables aux administrateurs impliqués, pour ainsi dire, « de bonne foi », dans une faillite.

H. Conclusion

La crise que nous venons de traverser a prouvé à suffisance que l'autorégulation ne suffit plus. Ces nouvelles mesures sont importantes pour renforcer davantage la confiance dans nos grandes entreprises et s'inscrivent dans le cadre de la politique européenne de développement de la gouvernance d'entreprise dans les entreprises cotées en Bourse et dans les entreprises publiques. Le droit des sociétés est adapté de façon maximale à cette fin.

III. DISCUSSION GÉNÉRALE

Mme Crombé-Berton s'interroge sur la sanction que pourrait infliger l'assemblée générale qui constate qu'une des catégories visées gagne une rémunération trop importante, alors même que les dispositions légales ont été respectées, par exemple en termes de procédure. De plus, peut-elle dans ce cas accorder la décharge aux administrateurs ?

Le ministre répond qu'il appartient à l'assemblée générale de refuser le rapport du comité de rémunération, mais que ce n'est pas une raison pour bloquer l'approbation des comptes et du budget. Si le conseil d'administration agit en contradiction avec la décision de l'assemblée générale, il engage sa responsabilité, ainsi que celle des administrateurs. L'assemblée générale peut néanmoins accorder la décharge aux administrateurs.

M. Vandenberghe relève que, dans l'exposé des motifs, il est clairement précisé que:

« le rejet éventuel du rapport de rémunération ne porte pas préjudice aux dispositions contractuelles existantes, mais requiert du conseil d'administration l'adaptation de sa politique de rémunération. Il s'agit également d'un signal adressé au conseil d'administration pour qu'il adapte en concertation les accords contractuels existants ». L'exposé des motifs souligne que « le refus d'approbation du rapport de rémunération n'a pas d'impact sur l'approbation des comptes annuels ou la validité de la décharge » (voir doc. Chambre, nº 52-2336/1).

Mais les principes généraux de responsabilité (contractuelle et quasi-délictuelle) restent d'application et il est toujours possible d'intenter des actions devant les tribunaux.

Pour le ministre, tel pourrait être le cas si le conseil d'administration décidait de ne pas tenir compte de la décision de l'assemblée générale et d'allouer une rémunération rejetée par celle-ci. Le ministre confirme l'opinion exprimée par plusieurs membres selon lesquels le rejet du rapport du comité de rémunération n'entraîne pas automatiquement le refus d'accorder la décharge aux administrateurs. Il s'agit d'une décision distincte. L'existence d'une faute éventuelle servira de critère au fait de ne pas donner la décharge.

Pour M. Duchâtelet, le rapport du comité de rémunération revêt surtout un caractère informatif, par exemple pour des investisseurs potentiels. Par ailleurs, malgré un vote défavorable sur le rapport du comité de rémunération, le fait de donner la quittance peut se justifier pour diverses raisons. Il peut, par exemple, arriver que le rapport de rémunération ne soit pas à ce point mauvais qu'il justifierait que la décharge ne soit pas accordée aux administrateurs.

Mme Crombé-Berton souligne qu'il faudrait, en toute logique, d'abord approuver le rapport du comité de rémunération avant de discuter de la décharge aux administrateurs.

Pour le ministre, le rejet du rapport de rémunération n'implique pas encore de faute, lorsqu'il s'agira de discuter de la décharge: l'intention n'est pas punissable. Ce n'est que par la suite, l'année suivante, qu'on pourra vérifier si la décision de l'assemblée générale a été effectivement respectée par le conseil d'administration.

Pour M. Vandenberghe, la décharge signifie qu'on discute également du point relatif au rapport du comité de rémunération. L'assemblée générale qui se prononce sur la décharge doit pouvoir agir en ayant connaissance de tous les éléments. La décharge de l'assemblée générale met fin à l'actio mandati qui avait été confiée aux administrateurs, sous réserve de situations spécifiques (dol, etc.). La décharge peut également être conditionnelle, assortie de déclarations ... Le droit des sociétés permet une certaine souplesse à cet égard.

Mme Vienne souligne que le rapport de rémunération n'est qu'un outil de transparence pour les actionnaires et seulement par ricochet un outil qui permet d'affirmer que l'un ou l'autre gagne trop. Mais ce ne peut être un outil de contestation tant qu'on reste dans le cadre légal.

Le ministre précise que si des exceptions sont sollicitées, le rapport doit être très clair à cet égard et l'accord de l'assemblée générale devra être obtenu selon la procédure prévue.

M. Crombez souligne que le projet de loi peut donner lieu à une série de discussions juridiques. Il regrette qu'une large place soit laissée à l'auto-régulation, par exemple pour la fixation de l'indemnité de départ, comme cela a été relevé par le Conseil d'État. Dans son avis, le Conseil d'État a ainsi affirmé:

« En d'autres termes, la fixation du mode de calcul — et des limites éventuelles fixées à son montant — de l'indemnité de départ devra figurer dans le rapport de rémunération en tant qu'il s'agit de règles que la société cotée s'impose à elle-même dans la négociation des contrats de travail et de gestion qu'elle aura à conclure avec un administrateur exécutif, un membre du comité de gestion ou un délégué à la gestion journalière » (doc. Chambre, nº 52-2336/001, p. 105).

Il s'interroge sur les raisons pour lesquelles le gouvernement s'est écarté de son projet initial, qui prévoyait des règles contraignantes, pour en revenir à l'auto-régulation, qui a pourtant montré ses limites. Il dépose et justifie une série d'amendements visant notamment à mieux encadrer les rémunérations.

M. Duchâtelet ne partage pas cet avis et expose que des adaptations ont déjà eu lieu pour les sociétés cotées. Par ailleurs, l'autorégulation ne doit pas être sous-estimée et a bien fonctionné pour l'immense majorité des sociétés. Avec ce projet existe la possibilité de sanctionner le non-respect de règles selon le Code des sociétés, lorsque l'auto-régulation ne fonctionne pas.

Mme Vienne ne voit pas comment un rapport du comité de rémunération pourrait être mauvais à partir du moment où il reflète fidèlement ce qui a été versé aux administrateurs.

Pour M. Duchâtelet, il appartient au comité d'audit et aux administrateurs indépendants siégeant dans le comité de rémunération de pointer le fait que, par exemple, une rémunération supérieure à ce qui avait autorisé a été versée à l'un ou l'autre administrateur. Pareilles anomalies pourraient être dénoncées dans le rapport du comité de rémunération et ce dernier pourrait remettre un rapport négatif sur la base du rapport du comité d'audit. Il appartient alors aux actionnaires de donner ou non la décharge aux administrateurs.

Le ministre répond que la pratique permettra d'apporter un certain nombre de réponses aux questions qui se posent. Il explique que le projet initial prévoyait des règles strictes et linéaires (douze mois), ce qui a entraîné un avis très négatif du Conseil d'État, qui relevait que cela pouvait se heurter aux règles du droit du travail et à traiter sur le même pied des situations réglées de manière parfois très différentes selon les contrats. La seconde phase a consisté à adapter la situation par le droit des sociétés, sans toucher aux règles du droit social ou du droit fiscal. Le Code de gouvernement d'entreprise est désormais intégré dans le droit des société et dans la vie des sociétés. Et si l'on veut y déroger, une procédure spéciale devra être suivie, avec convocation d'une assemblée générale. Cette procédure spéciale devra également être suivie pour permettre le paiement d'une rémunération variable aux administrateurs indépendants. Les arguments de M. Crombez sont connus et sont, en fait, ceux qui ont été largement discutés à la Chambre (voir doc. Chambre nº 52-2336/5). Un autre débat pourra s'engager concernant la présence d'administrateurs de l'autre sexe dans les conseils d'administration. Il en va de même des amendements de M. Daras, qui sont connus également.

M. Daras regrette que le ministre ne réponde pas aux questions sous prétexte qu''il y a déjà été répondu à la Chambre. Il fait remarquer que les discussions font référence à des travaux à différents niveaux, mais que le gouvernement ne fait pas référence aux recommandations de la commission spéciale du Parlement relatives à la crise financière (voir doc. Sénat, nº 4-1100/1). Cette commission mixte Chambre-Sénat demandait d'interdire l'octroi aux dirigeants de bonus liés à des performances à court terme, par exemple le cours de l'action de référence. Dans le projet, le bonus peut prendre en compte jusqu'à un maximum de 50 % des performances de l'année et minimum 25 % pour la deuxième année et 25 % pour la troisième année, alors qu'il faudrait fixer cette période de référence à cinq ans pour apprécier la qualité de la gestion. Il regrette que les prestations à court terme sont donc toujours prises en compte de manière significative pour le calcul de la rémunération variable et qu'il n'y ait pas de critère pour l'octroi de celle-ci. Cela permettrait de la fixer, par exemple, par référence au cours de l'action de référence, sans tenir compte de l'emploi dans l'entreprise, des clients, des efforts pris en matière d'environnement, etc. Il y a donc un problème de critère et de longueur de la période de référence. Par ailleurs, pour les bonus, on n'évite pas la prime à la contre-performance, ce qui ne répond pas aux préoccupations de la commission spéciale. Il relève également que rien n'est fait pour contrôler la rémunération des traders, ce qui justifierait un projet distinct.

Sur le plan de la fiscalité, M. Daras souhaiterait taxer fortement (70 %) les rémunérations au-delà d'un certain montant.

Enfin, M. Daras relève que l'indépendance des administrateurs indépendants est souvent très relative. Il convient de fixer des critères et de limiter le nombre de mandats afin d'éviter que certains ne trustent ceux-ci, comme c'est trop souvent le cas pour les grandes sociétés.

D'une manière générale, il craint que l'attention et les exigences ne se relâchent parce que les choses semblent s'améliorer au niveau de la croissance, voire de l'emploi. Or, le pays n'est pas tiré d'affaire et certaines entreprises ne semblent pas vouloir adapter leur comportement.

En réponse, le ministre précise que, pour déterminer la période de référence pour l'octroi des bonus, le projet s'aligne sur ce qui est proposé au niveau européen. De plus, les entreprises peuvent fixer leurs critères et cela doit faire partie d'un débat en assemblée générale. C'est une responsabilité propre aux entreprises. Pour les parachutes dorés, un débat sur la fiscalité ne fait pas partie de la discussion actuelle, qui est basée sur le droit des sociétés. Enfin, la qualification d'administrateur indépendant a fait l'objet d'un débat en 2008 et il n'est pas question d'y revenir. Le ministre réitère la volonté du gouvernement belge d'aboutir au plus vite avec ce projet.

En réplique, M. Daras souligne qu'un bon gouvernement d'entreprise va au-delà de l'intérêt des actionnaires et qu'il n'est pas judicieux de laisser à la seule assemblée générale des actionnaires le soin de se prononcer sur les responsabilités multiples de l'entreprise vis-à-vis du personnel, de ses clients, etc. De plus, en 2008, le pays n'était pas encore plongé dans la crise.

M. Vandenberghe compare la situation des administrateurs indépendants à celle des parlementaires: ils représentent tous la Nation, malgré le fait qu'ils ont des sensibilités différentes. Il souligne ensuite que toutes les conséquences de la crise n'ont pas encore été tirées, que d'autres projets suivront et que le débat pourra se poursuivre pendant encore des années. Sur le plan technique, il relève l'inconvénient de couler les règles de bonne gouvernance dans les statuts, alors que la matière est en pleine évolution. Il s'interroge également sur le point de savoir à quelle date le gouvernement fixera l'entrée en vigueur des règles du code de bonne gouvernance, par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.

Le ministre précise que le Conseil des ministres a déjà donné son accord sur le texte et lui laisse le soin de fixer l'entrée en vigueur de l'arrêté royal.

IV. DISCUSSION DES ARTICLES

Messieurs Daras et Crombez déposent, chacun pour ce qui le concerne, une série d'amendements au projet de loi. Pour de plus amples explications, l'on se référera à la justification de ces amendements (voir doc. Sénat, nº 4-1659/2).

Article 3

M. Daras dépose un amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à remplacer le mot « globalement » par le mot « individuellement » à l'article 96, § 3, alinéa 2, 7º que le gouvernement propose d'insérer dans le Code des sociétés.

M. Crombez dépose un amendement nº 17 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) complétant par un nouvel alinéa l'article 96, § 3, 8º en projet, et visant à définir les caractéristiques principales (« voornaamste kenmerken ») des options sur actions.

M. Crombez dépose un amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) complétant l'article 3, § 3 par un 12º à insérer à l'article 96 en projet, rédigé comme suit:

« 12º les critères fixés par le conseil d'administration en vue de reconnaître les groupements d'intérêts visés à l'article 537 ».

Article 3/1 (nouveau)

M. Crombez dépose un amendement nº 19 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) introduisant un article 3/1 nouveau, rédigé comme suit:

« À l'article 537 du même code, est ajouté un 3º rédigé comme suit: « 3º les représentants de tout groupement d'intérêts reconnu par le conseil d'administration comme étant actif dans le secteur de la société concernée. Le conseil d'administration fixe les critères de reconnaissance des groupements visés à l'alinéa 1er, 3º. Les statuts règlent le droit de parole des personnes visées à l'alinéa 1er de manière qu'il ne soit pas plus limité que le droit de parole d'un actionnaire ». ».

Article 7

M. Crombez dépose un amendement nº 20 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) complétant l'article 526quater, § 6, du Code des sociétés, inséré par l'article 7, par un alinéa nouveau rédigé comme suit:

« En cas de négociations sociales entre la direction de l'entreprise et des représentants du personnel ou en cas de convocation du conseil d'entreprise, lorsque l'un de ces événements peut donner lieu, dans l'entreprise ou dans ses filiales, à une réduction du nombre de travailleurs, un rapport de rémunération actualisé jusqu'à la veille des négociations ou de la convocation est distribué à tous les négociateurs ».

Article 13

M. Daras dépose un amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à remplacer l'article 520bis que le gouvernement propose d'insérer dans le Code des sociétés, afin que les administrateurs indépendants soient au minimum au nombre de trois dans les sociétés cotées en bourse et ne puissent pas exercer plus de trois fonctions ou mandats exécutifs.

Pour de plus amples explications, l'on se référera à la justification de cet amendement.

Article 14

M. Daras dépose un amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à remplacer l'article 520ter proposé et à inscrire dans le Code des sociétés des critères de calcul de la rémunération variable des administrateurs.

Article 14/1 (nouveau)

M. Crombez dépose un amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à introduire un article 14/1 rédigé comme suit:

« Art. 14/1. Dans le même Code, il est inséré un article 520quater rédigé comme suit: « Art. 520quater. Pour les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, les dirigeants qui siègent en qualité d'administrateur indépendant au sens des articles 524, § 2, alinéa 1er, et 526quater, § 2, alinéa 2, du Code des sociétés, ne peuvent recevoir ni exercer des actions, des options sur actions ou tout autre droit visant à acquérir des actions. » ».

Article 15/1 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 5 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à insérer l'article 524quater dans le Code des sociétés déterminant les critères de calcul de la rémunération variable des membres du comité de direction.

Article 16

M. Daras dépose un amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à remplacer l'article 16 par ce qui suit:

« L'article 525 du Code des sociétés est complété par un alinéa rédigé comme suit: « Les dispositions de l'article 520ter s'appliquent mutatis mutandis à la personne à laquelle la gestion journalière a été confiée, seule ou conjointement, et aux autres dirigeants ». »

Article 16/1 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 3 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à insérer un article 16/1 remplaçant l'article 526ter du Code des sociétés déterminant les critères de l'administrateur indépendant.

M. Crombez dépose un amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à introduire un article 16/1 rédigé comme suit:

« Art. 16/1. Dans le même Code, l'article 518 est complété par un § 4 rédigé comme suit: « § 4. Un tiers au moins des membres du conseil d'administration des sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l'article 4 doit appartenir à l'autre sexe. » ».

Article 17

M. Daras dépose un amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à modifier l'article 898 du Code des sociétés, en remplaçant les mots « Dans les sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché visé à l'article 4, les articles 520bis et » par les mots « Les dispositions de l'article ».

Article 18

M. Daras dépose un amendement nº 8 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à remplacer, dans l'article 900, § 1er, proposé, les mots « Dans les sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché visé à l'article 4, les articles 520bis et » par les mots « Les dispositions de l'article ».

Article 19

M. Daras dépose un amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à remplacer, dans l'article 906bis proposé, les mots « Dans les sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché visé à l'article 4, les articles 520bis et » par les mots « Les dispositions de l'article ».

Article 20

M. Crombez dépose un amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à introduire dans l'article 20, un alinéa nouveau rédigé comme suit:

« L'article 16 entre en vigueur le premier jour de la troisième année qui suit celle de sa publication au Moniteur belge ».

Article 22

M. Crombez dépose un amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à introduire à l'article 21, § 1er, un alinéa nouveau rédigé comme suit:

« Les membres du conseil d'administration des entreprises publiques économiques mentionnées dans la loi du 21 mars 1991 ne peuvent pas recevoir des actions, des options sur actions ou tous autres droits d'acquérir des actions ».

Article 22/1 (nouveau)

M. Crombez dépose un amendement nº 25 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à introduire un article 22/1, rédigé comme suit:

« Art. 22/1. Un tiers au moins des membres du conseil d'administration des entreprises publiques économiques, réformées par la loi du 21 mars 1991, sont de sexe différent de celui des autres membres ».

Article 23

M. Crombez dépose un amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à compléter cet article par un nouvel alinéa, rédigé comme suit:

« La disposition de l'article 23 (nouveau) entre en vigueur le premier jour de la troisième année qui suit celle de sa publication au Moniteur belge ».

Article 23/1 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 10 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à insérer un article 23/1 nouveau rédigé comme suit:

« Art. 23/1. Les dispositions de l'article 17, § 4, et de l'article 21, § 1er, de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques s'appliquent mutatis mutandis à la Loterie Nationale société anonyme de droit public selon les modalités prévues à l'article 23 ».

Article 23/2 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 11 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à insérer un article 23/2 nouveau rédigé comme suit:

« Les dispositions de l'article 17, § 4, et de l'article 21, § 1er, de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques s'appliquent mutatis mutandis à la société anonyme de droit public « Société Fédérale de Participations et d'Investissement », à « l'Office National du Ducroire » ainsi qu'à la société anonyme de droit public « Ducroire », selon les modalités prévies à l'article 23. »

Article 25/1 (nouveau)

M. Crombez dépose un amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à insérer un article 25/1 nouveau, visant à modifier plusieurs dispositions de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques en vue notamment d'augmenter le nombre d'administrateurs indépendants, de limiter le nombre de mandats qu'ils exercent dans d'autres sociétés, de renforcer les critères de désignation de ceux-ci et d'ouvrir les conseils d'administration à des administrateurs de l'autre sexe.

Titre 4

M. Daras dépose un amendement nº 12 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à compléter le projet de loi d'un titre 4 « Régime dérogatoire de taxation de certaines rémunérations ».

Article 35 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 13 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à compléter le projet de loi par un article 35 qui soumet l'indemnité de départ à un impôt spécial de 70 % au-delà d'un certain montant.

Article 36 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 14 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à compléter le projet de loi par un article 36 qui impose comme revenu professionnel toute rémunération attribuée par une société à une autre personne morale pour l'exercice d'une fonction d'administrateur, de membre du comité de direction, etc.

Article 37 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 15 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à compléter le projet de loi par un article 37 qui soumet à un impôt spécial de 70 % le montant de l'avantage de toute nature visé par la section VII de la loi du 26 mars 1999 relative au plan d'action belge pour l'emploi 1998 et portant des dispositions diverses.

Article 38 (nouveau)

M. Daras dépose un amendement nº 16 (doc. Sénat, nº 4-1659/2) visant à compléter le projet de loi par un article 38 remplaçant le mot « 15 % » par « 100 % » à l'article 43, § 5 de la loi du 26 mars 1999 relative au plan d'action belge pour l'emploi 1998 et portant des dispositions diverses.

V. VOTES

Les amendements nos 1 à 27 sont rejetés par 10 voix contre 1.

L'ensemble du projet a été adopté par 10 membres présents et 1 abstention.

Confiance a été faite aux deux rapporteurs pour la rédaction du présent rapport.

La commission décide d'admettre quelques corrections de texte.

Les rapporteurs, Le président,
Hugo VANDENBERGHE.Roland DUCHATELET. Wouter BEKE.

Texte corrigé par la commission (voir le doc. Sénat, nº 4-1659/4)