4-875/3

4-875/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2009-2010

12 JANVIER 2010


Proposition de résolution relative à la protection du mineur étranger non accompagné


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE L'INTÉRIEUR ET DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES PAR

MME DÉSIR


SOMMAIRE

  1. INTRODUCTION
  2. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE MME LANJRI, AUTEUR PRINCIPAL DE LA PROPOSITION
  3. AUDITIONS
    1. Mme Kristien Kloeck, représentante de Child Focus
    2. Mme Agnès Delrue, ASBL Gardanto
    3. M. Francis Charlier, Association des tuteurs francophones (ATF)
    4. M. Benoît Van Keirsbilck, directeur du Service des droits des jeunes de Bruxelles et de la Plate-forme « Mineurs en exil »
    5. Mme Renée Raymaekers, Directrice du Bureau Minteh de la direction Accès et Séjour, Office des étrangers
    6. M. Wim Bontinck, cellule Traite des êtres humains de la police fédérale
    7. MM. Bernard Georis et Marc Tysebaert, service des tutelles du SPF Justice
  4. DISCUSSION GÉNÉRALE
  5. DISCUSSION ET VOTE DE LA RESOLUTION
    1. Les Considérants
    2. Le dispositif
  6. VOTES FINAUX
  • ANNEXES

  • I. INTRODUCTION

    La proposition de résolution qui fait l'objet du présent rapport a été déposée au Sénat le 14 juillet 2008 par Mme Lanjri et consorts.

    Elle a été examinée en commission au cours des réunions des 23 et 30 juin, 7 juillet, 20 octobre 2009 et des 5 et 12 janvier 2010.

    Dans le cadre de ces discussions, il a été procédé à l'audition des personnes suivantes:

    — Mme Kristien Kloeck et M. Miguel Torres Garcia, Child Focus;

    — Mmes Agnes Delrue et Magda Verbeelen, VZW Gardanto, Association des tuteurs néerlandophones;

    — M. Benoit Van Keirsbilck et Mmes Anne-Françoise Beguin et Anne Graindorge, Plate-forme Mineurs en exil et Service des droits des jeunes de Bruxelles;

    — M. Francis Charlier, Association des tuteurs francophones;

    — Mme Renée Raymaekers, Office des étrangers;

    — M. Wim Bontinck, Cellule Traite des êtres humains de la police fédérale;

    — MM. Marc Tysebaert et Bernard Georis, cellule Tutelle du SPF Justice.


    II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE MME LANJRI, AUTEUR PRINCIPAL DE LA PROPOSITION

    Les mineurs étrangers et, a fortiori, les mineurs étrangers non accompagnés, se trouvent dans une position juridique délicate. En tant qu'étrangers, ils ne disposent pas nécessairement d'un droit de séjour et, en tant que mineurs, ils n'ont pas davantage droit à une protection.

    L'article 5 du titre XIII du chapitre 6, intitulé « Tutelle des mineurs étrangers non accompagnés » de la loi-programme du 24 décembre 2002 (ci-après « loi sur la tutelle ») donne du « mineur étranger non accompagné » (ci-après « MENA ») la définition suivante. Il s'agit de toute personne:

    — de moins de dix-huit ans;

    — non accompagnée par une personne exerçant l'autorité parentale ou la tutelle;

    — ressortissante d'un pays non membre de l'Espace économique européen;

    — et étant dans une des situations suivantes:

    • soit, avoir demandé la reconnaissance de la qualité de réfugié;

    • soit, ne pas satisfaire aux conditions d'accès au territoire et de séjour déterminées par les lois sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.

    En 2007, on a recensé quelque 2 630 signalements de MENA, ce qui correspond à 1 750 personnes (la même personne pouvant être signalée plusieurs fois). Il convient de relativiser ces chiffres, car il s'agit uniquement des MENA qui ont été trouvés ou qui se sont présentés de leur propre initiative. Ces chiffres ne donnent absolument aucune indication sur le nombre réel de MENA qui pénètrent ou qui séjournent en Belgique.

    Le groupe des MENA se caractérise par une grande diversité.

    La problématique des mineurs étrangers non accompagnés relève en partie de la compétence des Communautés et en partie de celle de l'État fédéral. Si la responsabilité de certains aspects incombe clairement à une autorité clairement identifiée, il est d'autres aspects pour lesquels les choses sont plus confuses.

    C'est l'État fédéral qui réglemente l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, et qui détermine la qualité de réfugié. Tous ces aspects relèvent de la compétence du ministre de la Politique de migration et d'asile. L'Office des étrangers (dénommé ci-après « l'OE ») assiste le ministre dans la mise en œuvre de la politique des étrangers.

    Le droit des personnes et de la famille est également une matière réglée par l'autorité fédérale, y compris pour ce qui est de la filiation, de l'autorité sur les mineurs et de la tutelle. Cette politique relève de la compétence du ministre de la Justice. C'est de ce ministre que relève par exemple le service des Tutelles.

    En ce qui concerne la prise en charge matérielle, il faut faire la distinction entre les mineurs demandeurs d'asile et ceux qui ne sont pas demandeurs d'asile.

    L'autorité fédérale, et plus spécifiquement le ministre de l'Intégration sociale, est compétente pour ce qui concerne la prise en charge matérielle du mineur non accompagné candidat réfugié, de même que pour l'accueil des autres candidats réfugiés. Fedasil est l'Agence fédérale pour l'accueil des demandeurs d'asile.

    Les communautés s'occupent en principe de l'accueil des mineurs non accompagnés non demandeurs d'asile.

    Au cours des dernières années, notre pays a élaboré un système de protection spécifique pour les mineurs non accompagnés. Ces avancées ont notamment été induites par les évolutions suivantes du droit international.

    — La Convention relative aux droits de l'enfant

    Le 20 novembre 1989, les Nations unies ont adopté la Convention internationale relative aux droits de l'enfant. La Convention prévoit que tout enfant privé temporairement ou définitivement de son milieu familial a droit à une protection et une aide spéciale de l'État.

    — La résolution européenne de 1997

    En 1997, le Conseil de l'Union européenne a adopté la résolution 97/C 221/03 relative aux « mineurs non accompagnés ressortissants de pays tiers ». Cette résolution — certes non contraignante — énonce des directives concernant l'accueil, le séjour et le renvoi de mineurs non accompagnés ressortissants de pays tiers.

    — « L'arrêt Tabita »

    L'affaire « Mubilanzila Mayeka et Kaniki Mitunga contre la Belgique » plaidée devant la Cour européenne des droits de l'homme a suscité de vives réactions et a entraîné certaines modifications législatives.

    La situation précaire du MENA impose des mesures de protection particulières.

    a) Tutelle

    Depuis le 1er mai 2004, le service des Tutelles doit organiser la protection juridique du MENA, comme le prévoit la loi sur la tutelle. Toute autorité qui entre en contact avec un mineur non accompagné doit le signaler auprès du service des Tutelles. Le service désigne un tuteur lorsque le mineur répond à la définition du MENA. Le tuteur n'organise toutefois pas lui-même l'accueil du MENA, mais il fait appel aux instances et services compétents. La mission du tuteur consiste entre autres à représenter le mineur dans tous les actes juridiques (par exemple en ce qui concerne son séjour), à veiller à ce qu'il soit scolarisé et à prendre toutes les mesures utiles afin de rechercher les membres de sa famille. D'après les statistiques du SPF Justice, le service des Tutelles a traité 1 852 signalements de MENA en 2006. Au 31 décembre 2007, 1 713 tutelles étaient en cours, parmi lesquelles 958 avaient été accordées en 2007.

    b) Séjour

    Les MENA qui entrent dans notre pays et qui souhaitent y résider légalement peuvent demander l'asile ou entamer une autre procédure de séjour. Dans ce cas, ils peuvent prétendre au « statut de protection spéciale » créé à leur intention et fondé sur la conviction que les mineurs ont besoin d'une protection supplémentaire. Les MENA déboutés peuvent également prétendre au statut de protection spéciale.

    Le statut de protection spéciale de l'Office des étrangers a été créé pour régler le séjour des MENA qui n'introduisent pas de demande d'asile, ou celui des MENA qui ne peuvent pas (plus) se prévaloir de la procédure d'asile ou d'une autre procédure de séjour. Le statut est défini par la circulaire du 15 septembre 2005 relative au séjour des mineurs étrangers non accompagnés (Moniteur belge du 7 octobre 2005).

    Pour ce groupe de MENA, la procédure spéciale de séjour définie par cette circulaire est la seule base réglementaire leur permettant d'obtenir un droit de séjour. Il ne s'agit pas d'un droit et il peut y être dérogé dans des cas individuels.

    Seuls les MENA qui ont été identifiés comme tels par le service des Tutelles et qui ne sont pas (plus) impliqués dans une autre procédure de séjour, peuvent prétendre au statut de protection. La demande doit être faite par le tuteur.

    c) Victimes de la traite des êtres humains

    Tout comme les adultes, les mineurs non accompagnés peuvent introduire en Belgique une procédure de « victime de la traite des êtres humains ». Ils bénéficient d'une protection tant que la procédure est pendante.

    d) Prise en charge

    Dans une première phase, les MENA sont admis dans un centre (fédéral) d'observation et d'orientation (COO). Il existe deux COO: l'un se trouve à Steenokkerzeel et l'autre à Neder-over-Heembeek. Une fois dans ce centre, les MENA se voient attribuer un tuteur. Ils peuvent y séjourner pendant quinze jours, délai pouvant être prolongé une seule fois de cinq jours en raison de circonstances particulières motivées et durant lequel le service Inspection aux frontières de l'Office des étrangers doit exécuter la mesure de refoulement. Il n'est procédé au refoulement que si les garanties nécessaires sont réunies pour la prise en charge du MENA par ses parents ou par une structure d'accueil dans le pays d'origine ou un pays tiers. Toutefois, dans la pratique, le séjour en centre dure plus longtemps, c'est-à-dire entre un et deux mois, et ce, en raison de l'absence d'une structure de deuxième accueil. Si la procédure de refoulement échoue, le mineur est autorisé à pénétrer sur le territoire belge et une décision de reconduite est signifiée au tuteur. En cas de doutes sur l'âge déclaré de l'intéressé, celui-ci est détenu dans un centre situé à la frontière, jusqu'à ce que le service des Tutelles fasse parvenir à l'Office des étrangers une décision relative à son âge. Cette décision doit être rendue dans un délai de 3 jours ouvrables, renouvelable une seule fois. Si la minorité est démontrée, on procède de la manière décrite ci-dessus. S'il s'avère que l'intéressé est majeur, il reste détenu en vue de son refoulement.

    En cas de doutes sur l'âge des jeunes qui sont interpellés non pas à la frontière mais à l'intérieur du pays, c'est le COO qui est chargé de déterminer l'âge. Toutefois, ils doivent attendre en moyenne 33 jours avant d'être examinés, ce qui est beaucoup trop long. Souvent, les « jeunes » en question disparaissent avant que l'on ait pu déterminer leur âge.

    Le COO recherche alors une possibilité de deuxième accueil. Les demandeurs d'asile mineurs sont confiés à une structure fédérale d'accueil qui leur apporte une aide matérielle. Les MENA qui ne demandent pas l'asile peuvent bénéficier de l'assistance spéciale à la jeunesse en cas de « situation d'éducation problématique ». Les victimes de la traite des êtres humains peuvent aussi parfois avoir recours directement à l'assistance spéciale à la jeunesse. Lorsque les services de l'assistance spéciale à la jeunesse ne sont pas en mesure d'accueillir des MENA, ceux-ci peuvent aussi être aiguillés (éventuellement en attendant qu'une place se libère) vers une structure fédérale d'accueil.

    La troisième phase a pour but de faire transiter les mineurs vers une forme d'accueil « durable ». Cet accueil peut être assuré par des amis ou des membres de la famille, mais il peut s'agir également d'un accueil (non catégoriel) dans le cadre de l'assistance spéciale à la jeunesse (maisons de guidance, logement supervisé, etc.) ou éventuellement dans des centres fédéraux. Pour pouvoir accéder aux formules d'accueil dans le cadre de l'assistance spéciale à la jeunesse, les MENA doivent impérativement passer d'abord par les formules d'accueil catégorielles de l'assistance spéciale à la jeunesse (à l'exception du placement familial).

    Beaucoup de MENA disparaissent au cours de leur prise en charge, une très grande majorité pendant la première phase d'accueil. L'immense majorité disparaît durant le séjour dans l'un des deux centres d'observation et d'orientation à Neder-over-Heembeek et à Steenokkerzeel, qui ont signalé 619 disparitions de MENA à la police en 2007, ce qui équivaut au total à 46,7 % des 1 325 jeunes pris en charge en 2007. La plupart ont disparu dans les 48 heures de leur arrivée. Pourtant, Child Focus n'a été contacté que pour 36 nouveaux dossiers de MENA.

    e) Soins de santé

    Un problème de taille a déjà été (pratiquement) résolu au niveau réglementaire, grâce à une modification de la « loi santé ». Il ne manque plus qu'une circulaire.

    Pour ce qui est de l'assurance des personnes à charge du MENA, en vertu de la réglementation précitée, le MENA a droit au remboursement en ce qui le concerne, mais ce droit au remboursement est exclu pour les personnes à sa charge. Cela signifie que le MENA qui a un enfant ne peut pas bénéficier de l'assurance pour cet enfant. En effet, les enfants d'un MENA ne sont pas eux-mêmes des MENA. On peut toutefois pas affirmer que ces enfants soient moins vulnérables. Cette lacune dans la législation appelle une solution.


    III. AUDITIONS


    1. Mme Kristien Kloeck, représentante de Child Focus

    L'intervenante repose la mission de Child Focus. Child Focus, la Fondation pour enfants disparus et sexuellement exploités, fondée dans le sillage de l'affaire Dutroux (reconnue par arrêté royal du 10 juillet 1997), traite chaque année via son numéro d'appel d'urgence 116 000, quelque 3 300 affaires de disparition ou d'abus sexuel de mineurs (les cas de pédopornographie sur Internet, signalés via le site web stopchildporno.be, ne sont pas inclus dans ce total). Le terme « disparition » est un terme générique qui couvre différents cas de figure: fugue, enlèvement par un tiers, rapt parental (international), disparition indéfinie. L'expression « exploitation sexuelle » englobe également différents phénomènes: abus sexuel extrafamilial, prostitution infantile et juvénile, pédopornographie sur Internet, traite d'enfants à des fins sexuelles. Pour des données chiffrées sur les cas traités par Child Focus, les rapports annuels de la fondation peuvent être consultés sur le site www.childfocus.be.

    Dans le cadre de sa mission, Child Focus consacre depuis des années une attention particulière aux mineurs étrangers non accompagnés qui « partent » ou « disparaissent » (cas de figure le plus fréquent) du centre d'accueil spécialisé de première ligne où ils ont été placés après leur inscription ou leur interception par les autorités. Depuis le 1er mai 2004, il existe 2 centres chargés d'assurer l'accueil de première ligne, tant pour les demandeurs d'asile que pour les non-demandeurs d'asile. Ces centres sont gérés par Fedasil (Agence fédérale pour l'accueil des demandeurs d'asile/SPF Intégration sociale). Après leur interception, tous les MENA y sont pris en charge pendant une courte période de deux semaines. De là, ils sont ensuite orientés vers une institution communautaire ou une institution fédérale, en fonction de la procédure qu'ils suivent.

    Si les mineurs étrangers non accompagnés font l'objet d'une attention particulière de la part de Child Focus, c'est parce qu'ils sont particulièrement vulnérables: ils ont souvent derrière eux un passé traumatisant, vivent dans une situation de séjour précaire, sont privés d'encadrement familial, souffrent souvent de problèmes médicaux ou nécessitent — pour diverses raisons — un soutien émotionnel et psychologique, et enfin, ils risquent plus que les autres jeunes d'être victimes d'exploitation (organisée).

    Depuis 2000, Child Focus est contacté par des centres d'accueil, des instances d'asile, des services de police et des tuteurs en cas de disparition d'un mineur étranger non accompagné. Selon les chiffres avancés par l'intervenante à ce sujet, Child Focus a ouvert jusqu'ici plus de 2 000 nouveaux dossiers de disparition pour cette catégorie de jeunes. C'est un nombre non négligeable.

    Seule une infime minorité des mineurs étrangers non accompagnés portés disparus est retrouvée ou localisée. Ce n'est pas étonnant. Les autorités judiciaires sont souvent impuissantes, confrontées à de nombreux problèmes qui compliquent l'enquête sur la disparition. En effet, les techniques de recherche classiques, telles que la perquisition, l'enquête auprès des parents, l'enquête de voisinage, etc., ne mènent pas bien loin dans ce type de dossiers.

    Pour traiter au mieux un dossier de disparition d'un MENA, il est extrêmement important de disposer de suffisamment de données d'identité à son sujet et c'est souvent là que le bât blesse.

    — Avant 2006, la police locale signalait à Child Focus toutes les disparitions de mineurs non accompagnés, sans opérer de distinction selon le degré d'inquiétude. Comme la disparition du jeune intervenait tôt (souvent dans les 48 h suivant son arrivée dans l'institution d'accueil), Child Focus devait se contenter de maigres informations, souvent limitées à un nom et une nationalité, sans autres données d'identité ni informations générales. En outre, la fiabilité des quelques rares renseignements connus était fortement sujette à caution, pour toutes sortes de raisons (enregistrement de nuit, déclarations du jeune, langue étrangère, etc.). En raison du manque d'informations à sa disposition, Child Focus pouvait difficilement stimuler l'enquête judiciaire menée pour retrouver le disparu ou l'appuyer à l'aide d'un appel à témoins, il ne pouvait donc pas offrir de plus-value.

    — C'est la raison pour laquelle Child Focus a modifié, en 2006, sa manière de fonctionner, en concertation avec tous les acteurs concernés. En effet, Child Focus ne veut pas servir de parapluie ou d'alibi pour les affaires de disparition dont finalement personne ne se soucie: elle tient avant tout à retrouver le jeune et à s'assurer qu'il est en sécurité. La nouvelle méthode de travail prévoit désormais qu'un dossier MENA n'est ouvert chez Child Focus que si un minimum d'informations sont connues concernant le jeune et les circonstances de sa disparition. En effet, ce n'est que dans ces conditions que Child Focus peut apporter une plus-value à l'enquête. On pense principalement aux disparitions inquiétantes, auxquelles s'applique une série de critères clairs.

    Tableau 1. Disparitions signalées à la police par les centres de première ligne et signalées à Child Focus (CF)(a)

    Jaar —  Année Gemelde verdw NOH — Dispar. signalées NOH Gemelde verdw STKZ — Dispar. signalées STKZ Totaal(b) — Total(b) CF nieuwe dossiers — Nouveaux dossiers CF %(c)
    2004 n.b. — n.c. n.b. — n.c. n.b. — n.c. 266
    2005 n.b. — n.c. n.b. — n.c. n.b. — n.c. 611
    2006 728 233 961 66 6,9 %
    2007 631 271 902 36 4,0 %
    2008 750 299 1 049 44 4,2 %
    2009 (jan-juni) n.b. — n.c. 31 n.b. — n.c. 6(d)

    Tableau 2. Partis sans laisser d'adresse des COO de Neder-over-Heembeek (NOH) et Steenokkerzeel (STKZ), de 2004 à 2009(e)

    Jaar —  Année Gemelde verdw NOH — Dispar. signalées NOH Gemelde verdw STKZ — Dispar. signalées STKZ Totaal — Total CF nieuwe dossiers — Nouveaux dossiers CF %
    2004 n.b. — n.c. n.b. — n.c. 266
    2005 662 200 862 611 71 %
    2006 451 378 829 66 6,9 %
    2007 351 273 624 36 4 %
    2008 338 224 562 44 7,83 %
    2009 (jan-juni) 44 33 77 6 7,8 %
    Totaal (2004-2009) 1 846 1 108 2 954 1 029 35 %

    Tableau 3. Disparitions inquiétantes des COO de Neder-over-Heembeek et Steenokkerzeel, de 2004 à 2009(f)

    Jaar —  Année Gemelde verdw NOH — Dispar. signalées NOH Gemelde verdw STKZ — Dispar. signalées STKZ Totaal — Total CF nieuwe dossiers — Nouveaux dossiers CF
    2004 n.b. — n.c. n.b. — n.c. 266
    2005 1 3 4 611
    2006 0 9 9 66
    2007 3 2 5 36
    2008 13 1 14 44
    2009 (jan-juni) 6 3 9 6(i)
    Totaal (2004-2009) 23 18 41 1 029

    (a) Sources des chiffres repris dans ce tableau: d'une part, les chiffres de la police locale de Neder-over-Heembeek et de Steenokkerzeel. C'est le nombre de disparitions communiquées à la police locale par les COO. D'autre part, les chiffres des nouveaux dossiers ouverts chez Child Focus.

    (b) Les centres signalent les disparitions ou « départs volontaires » à la police locale, qui est censée informer Child Focus. Malheureusement, on manque souvent d'informations sur le contexte et sur l'identité du MENA pour pouvoir évaluer correctement le degré d'inquiétude suscité par ce « départ ».

    (c) Cette colonne reprend le pourcentage de nouveaux dossiers ouverts chez Child Focus par rapport aux disparitions signalées à la police locale. Nous devons également mettre ce chiffre en relation avec le nombre total d'admissions dans les centres d'observation et d'orientation (COO). Dans son rapport annuel, Fedasil fait mention de 1 334 arrivées en 2008. Ainsi, près de 70 % de l'ensemble des jeunes hébergés disparaissent ou « partent » des centres d'accueil (voir les tableaux suivants). Les chiffres varient selon la source. La police locale nous a signalé 631 disparitions; Fedasil parle de 348 disparitions.

    (d) En 2009, nous observons une forte diminution du nombre de signalements par rapport à 2008, et ce tant auprès de la police locale que dans les COO. Pour expliquer cette évolution, les partenaires de Child Focus évoquent le cas des mineurs indiens (Singh): les nouvelles dispositions en vigueur à leur sujet seraient la raison principale.

    (e) Source: information émanant directement de Fedasil: notez les écarts par rapport aux chiffres de la police locale.

    (f) Source: informations émanant directement de Fedasil: notez les écarts par rapport aux chiffres de la police locale.

    Il ressort clairement des tableaux présentés que le nombre de nouveaux signalements, auprès de Child Focus, de disparitions de mineurs étrangers non accompagnés a littéralement chuté après l'instauration du nouveau mode de fonctionnement: à peine 5 %, en moyenne, des jeunes étrangers non accompagnés portés disparus font encore effectivement l'objet d'un signalement à Child Focus.

    Est-ce à dire que seuls 5 % des cas de disparition de MENA sont susceptibles d'être des disparitions inquiétantes ?

    Les 5 % de cas signalés à Child Focus sont-ils les seuls dossiers qui contiennent suffisamment d'informations sur le contexte et sur l'identité des mineurs, permettant de savoir avec certitude qu'il s'agit de dossiers inquiétants ?

    Comment peut-on distinguer un départ volontaire d'une disparition ? Les chiffres précités et la problématique y afférente ne sont pas sans susciter de temps à autre de vives polémiques.

    — Les données statistiques relatives aux départs/disparitions divergent parfois encore selon la source dont elles émanent: Fedasil, le service des Tutelles, les services de police locale, Child Focus, etc.

    — Les faits font l'objet d'interprétations divergentes: selon diverses organisations, les jeunes en question partent de leur plein gré de l'institution d'accueil ouverte, et ils en ont le droit. Les centres évoquent à cet égard le profil suivant: enfants de tziganes Rom partis rejoindre leur famille, mineurs étrangers non accompagnés qui veulent poursuivre leur périple au Royaume-Uni, jeunes qui séjournent depuis longtemps (illégalement) en Belgique et qui ont déjà tissé des liens dans notre pays. Pour Child Focus, tant que les jeunes n'ont pas été localisés et que leur sécurité n'est pas garantie, il s'agit de « disparitions » qui requièrent une attention particulière en raison de la vulnérabilité particulière des personnes concernées. La position de Child Focus à ce sujet s'appuie sur la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, adoptée par les Nations unies le 20 novembre 1989 et ratifiée par la Belgique deux ans plus tard. La Convention prévoit que « tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciales de l'État ».

    Gardant la Convention des droits de l'enfant à l'esprit mais ne disposant souvent que d'informations basiques minimales sur les MENA disparus, les institutions d'accueil et les acteurs chargés du bien-être de ces MENA doivent se livrer à un exercice de funambule pour trouver le juste équilibre entre, d'une part, le droit des MENA à la protection et, d'autre part, leur droit à l'autodétermination. Ces deux droits sont aussi importants l'un que l'autre, mais un champ de tension les relie inévitablement, ce qui se ressent dans toute relation éducationnelle.

    Les enfants — et les MENA sont des enfants avant d'être des réfugiés — sont des êtres humains et jouissent, à ce titre, d'un droit à l'autodétermination, à la participation et au respect de la vie privée.

    Mais,un enfant est aussi une personne en devenir: pour que le processus de croissance puisse être mené à bien dans l'intérêt de l'enfant, ses droits en matière de protection et de prestations (protection, logement, enseignement et formation, santé, sécurité et soins, etc.) doivent être garantis en premier lieu. Cette protection et ces soins constituent précisément des conditions critiques pour permettre à tout enfant de pouvoir évoluer vers l'autodétermination.

    À la lumière de ce qui précède, le fait de parler de « départs volontaires » plutôt que de « disparitions » n'implique-t-il pas une banalisation regrettable du phénomène ? Une disparition de mineur peut-elle jamais être qualifiée de « normale » ? Quelle disparition ne serait pas inquiétante ? Celle d'un jeune à la veille de son 18e anniversaire ou celle d'un jeune de 16 ans qui est apparemment « capable de se défendre » et qui n'a pas « l'air » vulnérable ? Qui assume vraiment la responsabilité de dire que de telles disparitions ne sont pas inquiétantes et ne méritent pas une attention particulière ?

    Pour Child Focus, conformément à la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, le droit à une protection et une aide spéciales implique une obligation de soins dans le chef des pouvoirs publics et de la société en général. Child Focus estime aussi qu'il est de la plus haute importante qu'au moins une personne se préoccupe du sort des jeunes en question qui disparaissent sans laisser de traces. Pour la fondation, il ne s'agit pas d'opérer un choix entre le droit à la protection et le droit à l'autodétermination. Dans l'intérêt de l'enfant et dans celui de la société tout entière, nous ne devons ni ne pouvons laisser les jeunes concernés livrés à la loi de la rue ou au bon vouloir de personnes que rien ne lie et dont nous ne pouvons pas avoir la certitude absolue qu'elles sont animées de bonnes intentions. Au contraire, il est de notre devoir d'investir dans l'avenir des jeunes en question qui, pour des raisons indépendantes de leur volonté, doivent vivre un pays étranger et souvent faire face à des situations risquées et incontrôlables.

    Une autre question qui se pose est de savoir comment éviter les disparitions.

    Child Focus voit au moins deux leviers importants à cet égard.

    1. Un bon accueil et un bon accompagnement du MENA

    Si le jeune bénéficie d'un accueil et d'un accompagnement sur mesure, s'il peut exprimer ses craintes et ses doutes, s'il peut partager ses problèmes complexes et s'il entrevoit à nouveau progressivement la lumière au bout du tunnel, il sera moins enclin à quitter l'établissement ou à disparaître.

    Au cours de la première phase d'accueil, Child Focus plaide pour que l'on mette en place, si nécessaire, un environnement sécurisé apportant des garanties physiques et pédagogiques, compte tenu des situations à risques potentielles. Au terme d'une évaluation du risque approfondie et personnalisée pour le jeune, il faut prévoir des mesures de protection supplémentaires dans le cadre de l'accueil en structure ouverte et ce, dans l'intérêt de la sécurité du mineur.

    Ce point de vue est souvent rejeté en invoquant le fait que la détention dans un centre fermé est totalement inacceptable. Il n'est effectivement pas évident de s'imaginer un accueil sécurisé qui évite les aspects néfastes liés à un accueil en centre fermé. Child Focus plaide toutefois pour que l'on trouve des alternatives réalistes, en ayant à l'esprit, d'une part, le constat que près de 1 000 mineurs disparaissent chaque année des structures d'accueil ouvertes et ne peuvent être localisés et, d'autre part, la probabilité qu'un nombre probablement sous-estimé de jeunes errent dans des conditions dangereuses ou menaçantes ou encore tombent entre les mains de personnes malhonnêtes.

    Un accueil sécurisé de ce type doit à nos yeux s'inspirer de la structure d'accueil des centres communautaires catégoriels pour mineurs étrangers non accompagnés et pour victimes de la traite des êtres humains, tels que Juna, Minor N'dako et Esperanto. Le filtrage des visiteurs, l'accompagnement du jeune lorsqu'il quitte le centre, la vidéosurveillance autour du bâtiment et l'enregistrement de toutes les adresses de contact du mineur sont autant de mesures de prévention permettant d'éviter une disparition ou une fugue.Nous pensons que les adaptations précitées sont souhaitables pour tous les centres chargés du premier accueil des mineurs étrangers non accompagnés, et en particulier pour le COO fédéral. Il convient de dégager les ressources financières et humaines nécessaires à cet effet.

    Après l'accueil de première ligne, le jeune est orienté vers un centre de deuxième ligne où il sera accueilli et accompagné pour une période plus longue. Idéalement, l'orientation est basée sur le profil et les besoins du MENA, mais c'est loin d'être le cas. Bien que d'importants progrès aient déjà été accomplis, on manque toujours aujourd'hui de places d'accueil spécifiques pour les jeunes particulièrement vulnérables qui sont loin d'être une minorité au sein de ce groupe cible. Les victimes de la traite des êtres humains, les très jeunes enfants, les mineurs présentant des problèmes d'ordre psychiatrique, les jeunes filles enceintes ainsi que les jeunes ayant des besoins supplémentaires ne reçoivent pas souvent l'accueil et l'accompagnement dont ils ont besoin.

    Parmi eux, les « chançards » sont admis dans un établissement communautaire catégoriel et bénéficient d'un encadrement satisfaisant, mais sans aucune garantie de transit ou d'orientation vers d'autres formes d'assistance (famille d'accueil, logement supervisé, ...). Les autres atterrissent dans un centre d'accueil fédéral, où des efforts sont certes fournis, mais où il manque un encadrement spécialisé nécessaire (orthopédagogues, pédopsychologues, éducateurs chargés de l'accompagnement de groupe, ...) pour pouvoir offrir une aide de qualité personnalisée. Le personnel qui assume cette mission enrichissante mais particulièrement éprouvante et riche en confrontations est de bonne volonté, mais il lui manque souvent la formation complémentaire requise, la formation permanente, l'accompagnement au travail et la supervision. Un taux élevé de renouvellement du personnel est dès lors inévitable !

    Dans un article d'opinion publié par Child Focus il y a plusieurs mois (De Standaard du 15 octobre 2008), l'intervenante déplorait la disparition de la meilleure forme d'aide (en Flandre). Cet article avait été rédigé à la suite de la fermeture de deux centres de deuxième ligne (De Bilck et De Lier, tous deux situés en Flandre occidentale) qui ont jeté l'éponge, fatigués de devoir se battre pour récolter les moyens financiers indispensables en vue d'assurer un accueil spécialisé nécessaire. À l'heure actuelle, au moins une structure d'accueil similaire est également menacée de fermeture (LOI Assesse). Or c'est précisément dans ces centres que l'on dénombre peu voire pas de disparition de jeunes demandeurs d'asile. C'est précisément dans ces centres que des jeunes réfugiés désespérés deviennent des adultes équilibrés grâce à un accompagnement qui ne ménage pas ses efforts. Dans ces centres, la norme était d'un éducateur pour trois jeunes. Aujourd'hui, ces jeunes arrivent dans des établissements plus grands où la norme passe à un seul agent pour 15 jeunes. À titre de comparaison, dans le cadre de l'aide spéciale à la jeunesse, la norme est d'un éducateur pour un jeune, ...

    La répartition des compétences propre à la Belgique maintient une distinction non pertinente en matière d'aide entre les demandeurs d'asile et ceux qui ne demandent pas l'asile, continue de donner lieu à des parties de ping-pong et hypothèque la volonté d'étendre la capacité d'accueil et de développer une aide de qualité ... par crainte d'un effet d'aspiration. L'intérêt du mineur est loin d'être privilégié.

    2. Le rôle du tuteur

    Le rôle du tuteur est également important dans le cadre des efforts de prévention.

    Aujourd'hui, des efforts importants sont déployés afin d'affecter au jeune, aussi vite que possible après l'interception ou l'inscription, un tuteur censé tisser un lien de confiance avec son pupille. Toutefois, bien souvent, lorsque cette obligation légale n'est pas réalisée dans la pratique parce que le MENA disparaît trop rapidement, il ne peut être question de protection.

    En théorie, il est également possible de désigner un tuteur après une disparition: cette modalité est prévue dans le protocole de collaboration. La question est de savoir si elle est appliquée dans la pratique. Child Focus estime que la désignation ultime d'un tuteur peut encore être particulièrement bénéfique, au cours de l'enquête sur la disparition. En effet, bien que ce dernier ne dispose souvent que de peu d'informations sur l'identité, les habitudes et les amis du MENA, il peut néanmoins entreprendre des démarches immédiatement après la disparition afin de localiser le jeune aussi vite que possible. Le tuteur fait donc office de premier maillon au cours de l'information et d'élément tampon pour stimuler les avis de disparition de Child Focus si nécessaire.

    La qualité et le dévouement des tuteurs (volontaires et professionnels) sont d'ailleurs très variables: des directives relatives aux attentes légitimes liées à cette fonction d'accompagnateur et de personne de confiance ainsi qu'une évaluation régulière sont souhaitables.

    Une bonne collaboration et une bonne harmonie entre le tuteur et l'accompagnateur dans le centre d'accueil sont nécessaires parce que, lorsque l'un des deux met des bâtons dans les roues de l'autre, c'est le jeune étranger qui paie les pots cassés.

    Un autre problème est que les MENA provenant des nouveaux États membres de l'UE (Roumanie, Bulgarie, Pologne, ...) restent tout de même particulièrement vulnérables, puisque l'adhésion de leur pays à l'Espace économique européen les prive de la tutelle.

    Comment élucider le plus efficacement possible les disparitions ?

    L'enquête sur la disparition d'un mineur étranger non accompagné ne peut commencer que si l'on connaît au moins son identité. Aussi l'enregistrement initial au moment de l'interception doit-il être réalisé de façon précise et systématique par le service public compétent. Si ces données d'identité se révèlent ultérieurement inexactes ou incomplètes, le Service des tutelles doit en être informé dans les plus brefs délais.

    Les premières heures qui suivent une disparition sont capitales dans la recherche d'un disparu. Une action rapide et vigilante, bénéficiant d'une bonne collaboration avec les acteurs concernés basée sur un maximum d'informations, est dès lors un facteur de succès déterminant en vue de résoudre une disparition de la manière la plus efficace qui soit.

    Une bonne harmonisation et une bonne collaboration entre tous les acteurs concernés ne vont pas de soi. C'est pourquoi Child Focus a pris l'initiative de réunir tous les acteurs autour de la table et d'élaborer un protocole de collaboration pour le traitement des disparitions des centres d'observation et d'orientation de première ligne.

    Ce protocole a été signé par tous les partenaires le 12 novembre 2008 (les signataires sont: la cour d'appel de Bruxelles, le tribunal de première instance de Bruxelles, l'Office des étrangers, le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides, Fedasil, la zone de police locale Bruxelles-Capitale-Ixelles, la zone de police locale Kampenhout-Steenokkerzeel-Zemst, le Service des tutelles, Child Focus) et il sera évalué après une année d'application. La véritable valeur ajoutée de ce protocole découle du fait que cet exercice émane de la base, ce qui devrait être le gage d'une implication réelle des acteurs: une obligation de moyens constitue au moins une condition déterminante de succès afin de pouvoir enregistrer un résultat.

    Le résultat escompté est une localisation plus rapide du MENA après la disparition, grâce à l'optimalisation de l'enregistrement de l'identité, et une meilleure protection contre les risques d'abus ou d'exploitation, grâce à une amélioration de la collaboration et de l'harmonisation entre tous les acteurs concernés.

    En outre, l'objectif est aussi d'adapter si nécessaire sur mesure au groupe-cible des MENA les critères de disparitions inquiétantes en se basant sur les cas de disparitions traités.

    Or, le point faible du protocole de collaboration était clair dès le début.

    Les disparitions se produisent principalement à Bruxelles. Par contre, l'interception initiale a lieu aux frontières extérieures ! Un enregistrement initial précis et systématique ainsi qu'une transmission de l'information aux acteurs compétents requièrent dès lors l'implication de tous les services de police et pas uniquement de ceux de la police locale des zones de Bruxelles et de KASTZE.

    Child Focus espère, par conséquent, qu'après évaluation le projet-pilote de Bruxelles pourra servir d'exemple pour une extension au territoire belge. Seul un protocole de collaboration doté d'une portée nationale est en mesure d'aboutir à une élucidation efficace et de qualité axée sur le résultat des cas de disparition de MENA, pour peu que toutes les conditions préalables soient remplies.

    Conclusion

    1. Child Focus espère que le protocole de collaboration permettra d'aboutir à une meilleure harmonisation et à une optimisation de la transmission de l'information et de la collaboration en cas de disparition de MENA. Child Focus espère également une extension de son champ d'application à l'ensemble du pays.

    2. Child Focus reste préoccupé par le nombre important de disparitions de MENA. Il n'y a pas de chiffres fiables prouvant qu'ils sont en danger, mais nous ne savons pas non plus s'ils sont en sécurité. Compte tenu de la CIDE, et dans l'intérêt de ces jeunes vulnérables, nous devons tous fournir les efforts nécessaires pour que les choses changent.

    3. Child Focus veut également placer l'intérêt de l'enfant au centre de cette matière. Compte tenu du nombre élevé d'acteurs qui sont à la fois impliqués et compétents en matière de MENA, il arrive que la collaboration soit difficile. Child Focus continuera à plaider pour que l'intérêt de l'enfant soit toujours au centre des préoccupations et prime les conflits de compétence ou d'autre nature qui, à l'heure actuelle, hypothèquent sérieusement une élucidation des cas de disparition axée sur la personne et le résultat.

    4. Child Focus soutient le parquet qui est en faveur du prélèvement des empreintes digitales lors de l'interception d'un MENA: il n'y aura plus de doubles dans les avis de disparition, et cette mesure permettra de voir plus clair dans les disparitions multiples. Il s'agit dès lors d'un progrès sur le plan politique ainsi qu'au niveau de l'accompagnement et de l'assistance à ces jeunes ... Mais les avis, sur le terrain, divergent à ce sujet.

    5. Il est recommandé de réactiver un groupe de travail mis en place précédemment et qui avait pour but une meilleure harmonisation entre les compétences fédérales et communautaires afin de donner forme à un politique plus cohérente dans l'intérêt de ce groupe-cible.


    2. Mme Agnès Delrue, ASBL Gardanto

    La problématique examinée interpelle singulièrement la Vereniging voor Nederlandstalige Voogden voor Niet Begeleide Buitenlandse Minderjarigen (l'association des tuteurs néerlandophones de mineurs étrangers non accompagnés) Gardanto (« tuteur » en espéranto), qui avance volontiers quelques propositions.

    Pour Gardanto, il est particulièrement décevant de constater que dans le cadre de la discussion politique actuelle sur la régularisation en matière d'asile et de migration, les mineurs non accompagnés ne sont pas reconnus en tant que groupe à part entière et ne sont même pas repris dans les discussions en vue du prochain conclave.

    La ministre compétente estime que les mineurs non accompagnés ne constituent pas un groupe à part entière « ... étant donné que ces jeunes se déplacent toujours avec des parents ou personnes plus âgées ... ».. La réalité quotidienne de la tutelle nous montre le contraire.

    Ces jeunes ne peuvent-ils dès lors pas faire valoir un droit à une régularisation éventuelle ? Osons quand même espérer que si ...

    Chaque année, un nombre important de jeunes non accompagnés par leurs parents ou par un représentant légal arrivent dans notre pays. Les chiffres pertinents en la matière ayant déjà été communiqués à la commission, l'intervenante se limitera à une réflexion sur le contenu, en partant des droits et besoins individuels des enfants et des jeunes, et en se fondant sur l'élaboration, dans une perspective d'avenir, d'une solution durable.

    Cette réflexion de fond est axée sur quatre angles:

    — l'enfant/le jeune;

    — le tuteur;

    — l'association des tuteurs;

    — l'approche de la majorité (plus de 18 ans).

    a) L'enfant

    Le groupe des MENA (mineurs étrangers non accompagnés) présente la même diversité que celui des jeunes de nationalité belge: âge, origine, réseau familial, contexte culturel et religieux, langue, etc.

    Toutefois, le MENA (mineur étranger non accompagné) a emporté un poids supplémentaire dans son sac à dos:

    — il/elle n'a pas fait le choix personnel de quitter son environnement familier;

    — il a fait un voyage épuisant (parfois dangereux) et long;

    — il est arrivé dans un pays dont il ne connaît pas la langue et dont il ne comprend pas les moeurs;

    — un lieu de résidence lui a été « assigné »;

    — il va vivre une longue période d'incertitude dans l'attente de « papiers » qu'il obtiendra peut-être;

    — « l'intégration », un voyage dans l'inconnu, au prix considérable.

    Comme tous les jeunes, ils rêvent d'un « avenir ». On les qualifie de MENA parce qu'ils sont « seuls » et qu'un représentant légal leur a été assigné:le tuteur.

    L'ASBL Gardanto aimerait formuler plusieurs propositions pour aider ces jeunes.

    1) Lorsque le jeune arrive sur le territoire belge et se présente à l'Office des étrangers, il faudrait que l'on rédige à son intention une fiche d'identité dynamique, facile à utiliser pour tous les responsables. Cette solution pourrait même être étendue à tous les pays Schengen. Il est très important de noter sur cette fiche toute modification au niveau de l'identification du MENA, par exemple par rapport à son âge, sa disparition, etc. Cela permettrait au jeune d'éviter de se retrouver dans un vide d'identification et il pourrait alors faire valoir ses droits légaux.Ainsi, dans le cas d'Haman, qui a déclaré être âgé de 17 ans et dont l'examen des os donne un âge réel de 15 ans, cet âge pourra être clairement indiqué.

    2) Serait-il possible d'accorder au jeune, au moment de son inscription, un « droit de séjour provisoire » d'une certaine durée ? Cela permettrait au tuteur de faire avec le jeune un choix responsable au niveau des procédures de séjour. Après leur identification, les jeunes se voient attribuer un tuteur. Ce dernier met un certain temps avant de gagner la confiance du jeune. Sur la base des informations que le MENA lui confie progressivement, le tuteur peut lui expliquer les différentes possibilités de séjour et choisir avec lui la procédure la plus adaptée.

    À l'heure actuelle, il faut parfois prendre une décision qui s'avère inappropriée par la suite, lorsque de plus amples informations ont été obtenues. Le droit de séjour provisoire permettrait au tuteur de réfléchir à l'avenir du jeune avec davantage de pertinence et aussi d'efficacité, et d'élaborer la « solution durable » qui lui convient.

    Les jeunes sont signalés par leurs « passeurs » à l'Office des étrangers et surtout forcés à demander « l'asile ». Gardanto constate qu'un grand nombre de jeunes ignorent ce que signifie l'asile et qu'il n'est pas non plus indiqué qu'ils suivent cette procédure.

    Le tuteur peut aider le jeune à retrouver ses parents, à rétablir le contact et éventuellement à obtenir ses documents d'identité.

    3) La procédure de résidence: asile, circulaire du 25 septembre 2005, victime de la traite des êtres humains ? À partir du moment où une procédure est entamée, peut-on considérer que cette date constitue également la date de début d'un séjour légal éventuel ? Actuellement, le MENA peut soit demander l'asile, soit suivre la circulaire, soit suivre la procédure « victime de la traite des êtres humains ». À chacune des trois procédures, le MENA doit tout recommencer depuis le début pour pouvoir faire valoir ses droits.

    4) Le jeune pour lequel l'asile est demandé ne vit pas sa fuite de la même manière que ses parents ou sa famille. Le MENA n'a pas posé un choix personnel. D'autres ont décidé pour lui. Il dispose d'informations plus limitées que les adultes, son discours s'inspirera de son propre milieu de vie.

    En tant que tutrice, l'intervenante constate que lors des interviews menées au CGRA (Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides), la situation spécifique du MENA fait l'objet d'une « certaine » attention. Pourtant, ce MENA doit suivre la même procédure que les adultes.

    D'après l'intervenante, il faudrait élaborer une procédure d'asile spécialement adaptée aux enfants/jeunes.

    Pour les enfants/jeunes, la longueur du délai d'attente avant d'avoir une décision est une source d'épuisement. Elle ne leur permet pas d'envisager l'avenir. La décision ne pourrait-elle pas être formulée et communiquée plus rapidement, surtout compte tenu des conditions de vie du moment du MENA ? Les jeunes doivent parfois déménager rapidement, ce qui provoque un changement d'école et une rupture de l'ancrage de base.

    5) La circulaire actuelle du 25 septembre 2004 relative à la procédure pour les mineurs établit des critères précis, à savoir la recherche de la famille, l'obtention de documents d'identité et l'inscription à l'école. Le tuteur doit rédiger un rapport tous les trois mois. Cet intervalle augmente quelque peu lorsque le jeune a obtenu le CIRÉ. Une nouvelle circulaire est annoncée depuis longtemps. Quand sera-t-elle finalisée et quels critères définira-t-elle pour nos MENA ? Le mineur sera-t-il entendu et dans quelles conditions ?

    6) L'ASBL Gardanto a constitué un groupe d'études qui a présenté le 1er juin 2009 ses premières conclusions à propos de la « solution durable ». Gardanto a donc proposé un découpage de la procédure en plusieurs phases et l'installation d'un groupe de travail multidisciplinaire indépendant qui pourra élaborer une proposition de solution durable pour les MENA et avec eux.

    Gardanto plaide pour que cette proposition soit retenue et demande que des facilités lui soient accordées pour permettre à ce groupe de travail de poursuivre son travail d'étude et de recherche.

    7) La procédure relative à la traite des êtres humains a été élaborée spécifiquement pour les adultes. L'intervenante constate que le MENA qui a éventuellement été victime de la traite des êtres humains pourrait bénéficier de cette procédure. Pourtant, aucune aide ne peut être apportée au MENA sur ce plan, pour une multitude de raisons (individuelles et/ou culturelles, etc.). L'intervenante plaide pour que cette procédure soit adaptée spécifiquement au MENA.

    8) L'accueil de notre MENA est extrêmement complexe et souvent très difficile. Le problème épineux de l'accueil insuffisamment différencié du MENA constitue un fait et une réalité quotidienne. L'intervenante estime que l'accueil ne peut pas dépendre de la procédure à suivre ni l'inverse. Il est abusif de décider éventuellement de demander l'asile pour avoir la certitude d'obtenir un accueil pour le jeune. Les MENA qui arrivent donc seuls en Belgique et qui se trouvent pour ainsi dire dans une situation problématique en matière d'éducation et ont besoin d'un accueil et de soins adaptés, ne pourraient-ils pas bénéficier systématiquement de l'assistance spéciale à la jeunesse ?

    Gardanto déplore la fermeture récente de centres de qualité pour jeunes réfugiés, quelles qu'en fussent les motivations. C'est pourquoi elle demande que les jeunes ne soient pas hébergés dans des centres avec des adultes, mais dans des entités plus petites réparties sur l'ensemble du territoire. Elle demande que l'on prenne spécialement en compte la diversité des jeunes et que l'on accorde une attention spécifique surtout aux jeunes enfants, aux jeunes filles enceintes et aux mères avec enfant, aux jeunes traumatisés, aux jeunes qui ont des comportements déviants, etc.

    9) L'intervenante demande une approche particulière pour les jeunes qui présentent des besoins spécifiques, notamment au niveau de la gestion des traumatismes et du stress post-traumatique. Les demandeurs d'asile ne pourraient-ils pas également accéder aux Centres qui disposent d'une équipe spécialisée de thérapeutes et qui sont disséminés sur l'ensemble du territoire belge ?

    10) Pour le MENA, l'enseignement sur mesure est fondamental; c'est aussi un droit inscrit dans notre Constitution.

    Un tel enseignement est indispensable pour apprendre notre langue, pour apprendre à lire et à écrire (pour certains), pour se familiariser avec le contexte social et avec nos structures et pour bénéficier d'une formation qui donnera au MENÀ la possibilité de se faire une place dans notre société, de poursuivre son épanouissement et ses études et qui lui offrira la perspective de trouver un emploi décent.

    Gardanto demande que les milieux de l'enseignement mettent tout en œuvre:

    — pour faire avancer la reconnaissance des apprentissages antérieurs ou de la formation dans le pays d'origine à l'aide de tests d'évaluation des CAA (compétences acquises ailleurs).

    — pour que le MENA ait droit à un encadrement intensif après la classe d'accueil pour primo-arrivants allophones.

    — pour développer des parcours d'apprentissage adaptés qui tiennent notamment compte du rythme d'apprentissage du MENA, de son encadrement émotionnel, etc., et qui mettent en avant les perspectives d'avenir des études accomplies.

    11) Actuellement, les MENA ont droit à une couverture soins de santé en s'affiliant à une mutualité. Gardanto milite pour que les MENA puissent également souscrire une assurance maladie dans les centres fédéraux.

    L'intervenante souhaite qu'à l'avenir, les MENA puissent adhérer, comme nos jeunes, à des clubs sportifs, qu'ils puissent participer à des activités socioculturelles et qu'ils puissent s'investir dans le volontariat, qu'ils puissent effectuer un job d'étudiant, obtenir une bourse d'études, etc., sans qu'on exige de leur part la présentation de documents de séjour légaux, laquelle dépend effectivement du suivi régulier d'une formation, sous quelque forme que ce soit.

    Cela leur permettra d'utiliser leur temps judicieusement, tout en favorisant leur intégration sociale et en les aidant à développer un réseau de soutien.

    Cigden, par exemple, ne peut pas pour l'instant suivre le cours de moniteur et effectuer son stage dans une plaine de jeux, elle dispose d'une annexe 38 mais suit une formation en « soins pédiatriques ». Elle devra donc passer les prochaines vacances à s'ennuyer et à ne rien faire.

    13) Les jeunes qui séjournent dans notre pays sans leurs parents doivent avoir le droit de les rechercher, de rétablir le contact avec eux et de l'entretenir. Il est essentiel que nous recevions pour cela les moyens et l'encadrement nécessaires.

    Gardanto prône que les MENA et leurs parents puissent faire le choix d'un retour volontaire dans leur pays d'origine (ou dans des pays tiers) sans s'exposer à des sanctions ou à un nouveau refoulement. Un tel retour devra être mis en œuvre dans le cadre d'une approche graduelle, en toute sérénité et en se concertant de manière confidentielle avec le MENA, indépendamment des procédures de séjour éventuelles.

    b) La tutelle

    Depuis le 1er mai 2009, la tutelle est opérationnelle pour cinq ans. À sa création, la tutelle a fonctionné d'abord de manière hésitante, puis elle a ensuite accompli de nombreux progrès et prouvé son utilité.

    Les tuteurs peuvent accomplir leur mission sous les statuts suivants: salarié (sous contrat de travail), bénévole ou indépendant.

    Chacun de ces statuts a prouvé sa valeur. Certains tuteurs privilégient le fort ancrage social, d'autres se réjouissent de pouvoir s'adosser à une solide structure d'encadrement.

    L'élément fondamental est la position indépendante du tuteur qui lui permet d'élaborer en toute sérénité, pour et avec le MENA, la meilleure « solution durable » en collaboration avec toutes les parties concernées et dans tous les domaines de vie du jeune.

    Gardanto plaide pour que l'on favorise l'expertise et le professionnalisme du tuteur. La sélection et la formation sont organisées par le service des Tutelles du SPF Justice. Gardanto organise des formations et tente de canaliser les flux d'informations.

    Gardanto plaide par conséquent:

    — pour une protection sociale du titre de « tuteur »;

    — pour une description précise de la fonction du tuteur;

    — pour la définition de critères d'évaluation, de procédures et de moyens pour réaliser cet objectif.

    c) l'ASBL Gardanto — L'association de tuteurs (néerlandophones)

    Depuis septembre 2007, les tuteurs néerlandophones se sont regroupés au sein d'antennes régionales et souhaitent favoriser ce mode de fonctionnement.

    En tant qu'association des tuteurs néerlandophones, l'ASBL Gardanto répond aux conditions formulées par le ministère de la Justice.

    Le 9 juin 2009, un dossier « Demande de reconnaissance » a été présenté aux services du ministre De Clercq, SPF Justice.

    L'ASBL Gardanto organise des concertations régulières avec ATF Mena (l'association des tuteurs francophones). Plusieurs dossiers ont débouché sur une collaboration intense avec ATF Mena.

    Pour pouvoir poursuivre correctement la mission qui lui a été assignée conformément à la loi sur la tutelle (par le SPF Justice) et pour pouvoir réaliser les objectifs de l'ASBL Gardanto, l'intervenante espère que la ministre reconnaîtra et subventionnera son fonctionnement.

    Plusieurs points importants permettraient de garantir un fonctionnement optimal de Gardanto:

    1. Il est impératif que nous puissions disposer à Bruxelles d'un local administratif et d'un espace de rencontre (partagé avec ATF Mena) pour pouvoir fournir un travail sérieux et structuré d'encadrement des tuteurs. Une subvention a été demandée au SPF Justice.

    2. Des possibilités de formation continue systématique pour les tuteurs, avec un système d'accréditation pour conserver la désignation.

    3. L'ajout du projet de vie aux rapports nouvelle mouture.

    Ce sera une plus-value manifeste pour la mise au point d'une « solution durable ».

    L'élaboration de tels rapports impose aux tuteurs une formation supplémentaire et un surcroît de travail important.

    Serait-il possible de revoir et d'adapter la rémunération actuelle du tuteur ?

    d) Et aux 18 ans du MENA ? Réfugié reconnu, bénéficiant d'une protection subsidiaire, régularisé, ... en séjour légal

    Dès que le MENA a 18 ans, la tutelle prend fin du jour au lendemain.

    Tout au long du parcours de tutelle, le tuteur et le MENA ont développé une relation de confiance.

    Cette relation de confiance se répercute sur les différents domaines de la tutelle: le parcours de séjour du MENA, les différentes phases de son séjour et les domaines de vie.

    Il est essentiel de bien préparer le jeune à la grande autonomie dont il jouira à son 18e anniversaire.Normalement, il ne pourra plus s'appuyer sur les personnes qui l'ont accompagné tout au long de son parcours.

    Ne pourrait-on pas développer un système d'encadrement fondé sur l'aide volontaire dans le cadre de l'assistance spéciale à la jeunesse ?Le jeune adulte pourrait alors faire appel à son ancien tuteur dans des domaines et à des périodes clairement définis. Le tuteur pourrait le faire bénéficier de ses conseils avisés et de son soutien.

    Pour les jeunes reconnus comme réfugiés ou pouvant bénéficier d'une protection subsidiaire, l'on pourrait mettre en place un parcours spécial d'encadrement et d'intégration en collaboration avec le CPAS.


    3. M. Francis Charlier, Association des tuteurs francophones (ATF)

    L'intervenant est membre de l'ATF (Association des tuteurs francophones) et tuteur. Il a assuré au cours des 4 dernières années la gestion d'une septantaine de tutelles, ce qui lui a permis de mieux cerner les difficultés rencontrées au jour le jour par les tuteurs.

    Le fil conducteur de son exposé sera le principe de base qui fonde toute l'action d'un tuteur dès lors qu'il prend en charge un MENA, c'est « l'intérêt supérieur de l'enfant ».

    Peut-on affirmer que tout au long du parcours d'un MENA, de son arrivée sur le territoire jusqu'à sa majorité, cette notion fondamentale de l'intérêt supérieur de l'enfant est constamment respectée et privilégiée par tous les intervenants qui s'occuperont de lui ?

    Globalement, la réponse est plutôt positive. Mais la pratique de la mission de tuteur et la réalité des faits amènent à être plus nuancés.

    La mission du tuteur est double:

    — c'est d'abord de mettre et de garder le mineur dans les conditions les plus favorables à son épanouissement intellectuel, social, affectif et de santé; soit dans un milieu familial plus ou moins proche ou à défaut dans un centre d'accueil.

    — c'est en même temps, l'aider à développer un projet de vie qui s'inscrira dans la recherche d'une solution durable à proposer à l'Office des étrangers. C'est lui expliquer, le conseiller, l'assister et l'accompagner tout au long d'une procédure de demande d'asile ou de titre de séjour.

    Cette double mission peut parfois s'apparenter à un véritable parcours du combattant ...

    Cela commence par l'identification du mineur: sa nationalité, son nom, son âge.

    Les premières indications du jeune lors de son interpellation sont directement « comme gravées dans le marbre » du registre des étrangers; s'il a donné des indications erronées de nom, de nationalité, d'âge, ces erreurs vont le poursuivre tout au long de la procédure (titre de séjour, inscription scolaire, ...) sauf s'il peut produire des pièces justificatives à l'appui de sa réelle identité; généralement un passeport, qui reste inaccessible dans la majorité des cas.

    Une gestion dynamique de la fiche d'identification serait souhaitée. Cette question vient d'être abordée avec beaucoup de justesse par la représentante de Child Focus.

    Vient ensuite l'hébergement des mineurs dans les Centres d'Accueil. L'insuffisance chronique de places disponibles dans les centres et le manque flagrant de moyens matériels et humains pour permettre à un jeune de « survivre » au traumatisme qu'il a vécu, sont autant de facteurs qui perturbent gravement l'équilibre des jeunes les plus fragiles. Avec pour conséquences, des fugues, des comportements délinquants, la consommation de drogues, l'absentéisme scolaire. Les centres d'accueil ne sont pas le terreau de la délinquance grâce surtout à la qualité de l'encadrement.

    Comment un tuteur peut-il accepter la décision unilatérale de certains centres d'expulser un jeune qui aurait contrevenu au règlement, sans concertation avec le tuteur pour atténuer les dégâts scolaires et sociaux d'une telle décision ?

    Mais comment ne pas s'élever contre ce défi au bon sens qu'est le CADE, cette aile du Centre Fédasil du Petit Château réservée aux mineurs: la promiscuité presque permanente avec les adultes, un environnement extérieur propice à toutes les illégalités et à la clandestinité (travail au noir, trafic, drogues, ...), une situation en centre-ville ? Tout y concourt à susciter des vocations à la délinquance.

    Quant à l'hébergement dans un milieu familial, il requiert toute la vigilance du tuteur pour prévenir une éventuelle dégradation des relations au sein de la famille (rejet affectif, privations, exploitation, maltraitance physique et psychologique ...). Il convient ici de reconnaitre l'efficacité de nombreuses associations qui viennent en aide, en accompagnement dans les cas les plus difficiles.

    La procédure de régularisation sur la base de la circulaire du 15 septembre 2005 est-elle compatible avec l'intérêt supérieur de l'enfant ?

    Cette procédure est ouverte à tout MENA qui n'a entamé aucune autre procédure de régularisation (demande d'asile, article 9, § 3, de la loi du 15 décembre 1980, protection subsidiaire, ...).

    Elle repose sur un rapport du tuteur décrivant la situation familiale du MENA, les éventuels papiers d'identité dont il dispose, et une proposition de solution durable que l'Office des étrangers a défini comme suit:

    1. en priorité le regroupement familial;

    2. en second le retour au pays s'il existe des garanties de prise en charge du MENA dans son pays de retour,

    3. en dernier lieu l'autorisation de séjour illimité en Belgique. S'il s'agit d'une demande de séjour illimité, elle doit être assortie de renseignements confirmant la volonté d'intégration du jeune (scolarité assidue, comportement social, apprentissage d'une langue nationale, ...). Dans le meilleur des cas, le jeune pourra se voir délivrer une déclaration d'arrivée valable 3 mois, renouvelable une ou 2 fois, puis éventuellement convertie en titre de séjour temporaire (6 mois voire un an).

    Dans les autres cas, il se voit délivrer une annexe 38 ou ordre donné au tuteur de reconduire le jeune « au lieu d'où il vient ». Un ordre de reconduire qui, par ailleurs n'est pas exécutable aussi longtemps que le jeune est mineur, mais tombe comme une condamnation pour le jeune. Un « refus de séjour temporaire » serait une appellation plus conforme à la réalité et plus humaine.

    Il s'agit en outre d'une procédure relativement simple mais peu réaliste.

    Dans les solutions durables suggérées, le regroupement familial ou le retour au pays ne sont pas réalistes.

    En effet, le jeune est arrivé en Belgique bon gré, mal gré; et le plus souvent à l'initiative de ses parents qui l'ont envoyé pour lui permettre de faire des études et d'acquérir une formation.

    Le retour du jeune en famille serait un échec pour les parents, et/ou une rupture de contrat moral du jeune. Les uns et les autres ont toutes les raisons de s'opposer à ce regroupement familial; et à défaut de leur accord, il ne peut y avoir de retour forcé.

    En revanche, lorsque le jeune a définitivement compromis ses chances d'obtenir un titre de séjour par un comportement délinquant permanent (faits délinquants graves et répétés, refus de scolarisation, ...) le regroupement familial est plus réaliste; un retour volontaire au pays avec l'accord de ses parents lui donne une seconde chance de se reconstruire un avenir.

    L'autre proposition de solution durable est le titre de séjour à durée illimitée. C'est évidemment la proposition la plus souvent faite par les tuteurs. Mais les réponses apportées par l'Office des étrangers sont « au cas par cas »: en principe, une « déclaration d'arrivée » renouvelable après 3 mois, suivie éventuellement d'un titre de séjour temporaire.

    En réalité, ce sont souvent 5, 6 voire 10 déclarations d'arrivée chaque fois reportées pour diverses raisons:

    a. absence de passeport ... alors qu'il est connu que le pays d'origine du jeune ne délivre aucun passeport en Belgique (Congo, Rwanda, Cameroun, ...);

    b. résultats scolaires insuffisants, même lorsque la scolarité est assidue;

    c. comportement social un peu déviant.

    Comment, dans ces conditions de séjour aussi temporaires (3 mois) donner l'espoir au jeune de se construire un avenir en Belgique ? Les multiples renouvellements de sa déclaration d'arrivée deviennent le renouvellement de l'incertitude sur son avenir; face à cette situation, certains jeunes craquent et choisissent la clandestinité et parfois la délinquance.

    En conclusion, cette circulaire du 15 septembre 2005 ne répond pas — ou si peu — a son objectif d'offrir une solution durable à des centaines de jeunes qui recherchent en Belgique le droit à l'éducation, à la formation. Pire, par la pression inutile qu'elle exerce sur les jeunes, elle peut en pousser certains à la clandestinité.

    Une autre solution durable ?

    Constatant qu'actuellement, tout MENA identifié sur le territoire ne peut être expulsé vers son pays de retour sans son accord et l'accord de ses parents et qu'il est donc amené à rester en Belgique jusqu'à sa majorité; constatant que la plupart de ces mineurs viennent en Belgique avec l'accord de leurs parents, pour y faire des études, acquérir une formation; rappelant le Principe 2 de la Déclaration des droits de l'enfant « L'enfant doit bénéficier d'une protection spéciale et se voir accorder des possibilités et des facilités par l'effet de la loi afin d'être en mesure de se développer d'une façon saine et normale sur le plan physique, intellectuel, moral, spirituel et social », serait-ce utopique de remplacer la circulaire du 15 septembre par un « Contrat sur l'Avenir » avec ces jeunes ?

    Tout jeune aurait l'assurance de rester sur le territoire jusqu'à sa majorité (ce qui est déjà le cas actuellement). En contrepartie, il s'engagerait dans un projet de vie qu'il aurait le temps de préparer avec son tuteur et l'encadrement social de son centre d'accueil; il pourrait commencer à le mettre en œuvre par sa scolarité. Il recevrait un titre de séjour valable jusqu'à sa majorité. Ce délai lui permettant de faire la preuve de son identité, de sa volonté d'intégration sociale, (apprentissage d'une langue nationale, scolarité suivie, ...) et du bien-fondé de son projet de vie.

    Un éventuel premier écart de conduite ne serait plus un couperet définitif (comme c'est le plus souvent le cas actuellement avec l'annexe 38) mais une mise en garde d'une rupture de contrat, accompagnée des mesures correctives nécessaires. En revanche, lorsque le jeune s'est ancré délibérément dans une délinquance grave et permanente, toutes les mesures devraient être prises pour privilégier un regroupement familial ou un retour assisté dans le pays d'origine.

    L'âge de sa majorité serait alors le grand rendez-vous avec son pays d'accueil; qui déciderait alors de poursuivre ou non le contrat d'avenir.

    Un contrat d'avenir en lieu et place d'une circulaire ? Oui, pour que l'intérêt supérieur de l'enfant soit replacé au centre de la politique d'accueil et de protection des MENA.

    Il est bien d'autres sujets qui mériteraient l'attention du législateur, comme les lacunes et les manquements dans la procédure d'accueil des MENA. L'ATF souscrit totalement aux suggestions et propositions faites par Gardanto.


    4. M. Benoît Van Keirsbilck, directeur du Service des droits des jeunes de Bruxelles et de la Plate-forme « Mineurs en exil »

    La Plate-forme « Mineurs en exil », « Kinderen op de Vlucht » vient de fêter ses dix ans d'existence et regroupe une vingtaine d'organisations et d'associations qui se préoccupent de la situation des MENA en Belgique. Elle dispose donc d'une certaine expertise en la matière et a constaté que par le passé, nombre de recommandations qu'elle a formulées ont finalement été prises en compte dans un but d'améliorer la prise en charge et la protection des MENA en Belgique dans une optique d'un meilleur respect de la CIDE. L'intervenant ne peut que s'en réjouir.

    Si la situation des MENA s'est nettement amélioré ces dix dernières années, il reste encore un certain nombre de sujets de préoccupation et la plate-forme « Mineurs en exil » se réjouit qu'un projet de résolution soit discuté afin d'améliorer encore la protection de ces jeunes, qui à défaut resteraient particulièrement vulnérables.

    La plate-forme a récemment eu l'occasion de formuler encore diverses recommandations, à l'occasion des élections de 2007 ou bien de manière spécifique: proposition de modification de la loi du 15 décembre 1980 sur les étrangers pour y insérer un droit au séjour des MENA, recommandations concernant la tutelle des MENA, recommandations concernant l'accueil, ...

    Tout récemment, un courrier était adressé à la ministre de la Politique de la Migration et de l'asile dans lequel la plate-forme lui faisait part de diverses difficultés que constatées récemment, notamment concernant l'audition des MENA par le service MENA-TEH de l'Office des étrangers, leur situation de séjour, ...

    La plate-forme avait également réalisé, à la demande de l'UNICEF Belgique, une étude portant sur « La protection des mineurs non accompagnés victimes de la traite des êtres humains » qui débouche aussi sur diverses recommandations.

    Enfin, elle a systématiquement combattu toute forme d'enfermement des enfants et des familles pour motif de migration. Là aussi, l'intervenant se réjouit des progrès engrangés ces derniers mois mais constate qu'il y a encore une politique à deux vitesses: les enfants qui peuvent bénéficier des alternatives mises en place et ceux qui ne peuvent pas en bénéficier parce qu'ils arrivent à la frontière sans être porteurs des documents requis. Pour la Plate-forme, cela constitue une discrimination intolérable et injustifiable à laquelle il convient de mettre un terme dans les plus brefs délais.

    À cet égard, l'intervenant salue les rapports réalisés par les Médiateurs fédéraux, notamment concernant les questions qui précèdent (séjour, enfermement, prise en charge, accueil, ...). Il insiste pourqu'il soit pris en considération de la manière la plus urgente possible et qu'il débouche à très bref délai sur des changements significatifs.

    Pour ce qui est de la proposition de résolution, la plate-forme « Mineurs en exil » souhaite partager un certain nombre de réflexions qui pourraient être prises en considération dans le cadre de la discussion autour de cette proposition.

    La plate-forme constate également le manque de données chiffrées ou le peu de fiabilité des données chiffrées à disposition. Les chiffres avancés par le Service des tutelles sont différents de ceux produits par l'Office des étrangers et par le CGRA dans les matières qui les concernent. Ces chiffres sont en outre difficilement exploitables. Or, pour pouvoir mener une politique à bon escient, il est essentiel depouvoirdisposer de chiffres fiables. À cet égard, l'intervenant estime qu'il est primordial de créer une banque de données centralisée et respectueuse de la vie privée concernant les MENA. De même, le Service des tutelles devrait produire un rapport d'activités annuel et public.

    Pour ce qui concerne la prise d'empreintes digitales, la Plate-forme émet des réserves, à moins que des garanties très importantes soient prises pour s'assurer qu'il n'y aura pas de risque en matière de respect de la vie privée (qui aura accès à ces données, à quelles conditions, pour quoi faire, ... ?).

    1. Concernant la suite à donner aux recommandations de l'étude réalisée par Child focus, la plate-forme tient à exprimer de sérieuses réserves. Le point de vue adopté par Child focus considère que tous les MENA sont par définition en risque de disparition inquiétante et préconise des mesures de nature sécuritaire pour y remédier. Ce rapport fait insuffisamment la différence entre les MENA qui disparaissent de manière inquiétante et ceux qui quittent le centre d'accueil volontairement sans nécessairement se mettre dans une situation de danger. À l'égard des premiers, il convient de mettre en œuvre des mesures de recherche importantes et de veiller tout particulièrement à leur protection.

    2. La plate-forme préconise que tout soit mis en œuvre pour améliorer la qualité de la prise en charge, l'accueil et l'accompagnement de ces MENA. C'est d'abord et avant tout parce qu'ils se sentiront respectés, entourés, soutenus dans un environnement accueillant, qu'ils feront confiance à l'aide qui leur est offerte. La plate-forme considère que les mesures sécuritaires qui peuvent être prises produisent généralement l'effet inverse à celui escomptés, puisque la première réaction face à des portes fermées, des barreaux, des mesures de contrôle tatillonnes, des caméras de surveillance, des alarmes, ... c'est d'essayer d'y échapper.

    3. Les centres de Neder-Over-Heembeek et de Steenokkerzeel partagent ce point de vue et ne veulent pas devenir des centres sécuritaires où le contrôle prime sur la prise en charge. Il existe par ailleurs quelques centres qui accueillent des MENA victimes de la traite des êtres humains qui proposent un accompagnement très proche, misant sur la relation humaine, mais pas un enfermement.

    4. À l'égard des MENA victimes de la traite des êtres humains, la plate-forme a donc réalisé une étude qui débouche sur de nombreuses recommandations (qualité du séjour, procédure, ...).

    5. Concernant le regroupement familial dans un pays européen, la plate-forme estime qu'il faut, dans toute la mesure du possible et après une évaluation individuelle qui prenne en compte l'avis du MENA, favoriser un regroupement familial dans un pays tiers sûr. Il convient de souligner que pour être parfaitement conforme à la Convention des droits de l'enfant, un tel regroupement familial doit pouvoir s'envisager dans les deux sens: soit l'enfant va rejoindre son parent, soit, ce dernier est admis au séjour en Belgique pour pouvoir reprendre ses enfants en charge.

    6. Concernant le dispatching multidisciplinaire, l'intervenant y est favorable à condition que ça ne soit pas une procédure purement administrative et qu'on donne aux COO (Centres d'observation et d'orientation) une place prioritaire pour formuler des suggestions d'orientation (ce qui rentre bien dans leur mission). Un accord de coopération entre l'État fédéral et les Communautés est bien entendu indispensable.

    7. Concernant la bonne collaboration entre les instances concernées par les disparitions, la plate-forme y est favorable à condition que l'on respecte le rôle et la fonction des uns et des autres, la vie privée du MENA et le secret professionnel des intervenants, dont les tuteurs.

    8. Concernant le cadre global des tuteurs, la Plate-forme est favorable à une évaluation qualitative de l'ensemble du dispositif de tutelle: fonctionnement du Service des tutelles, des tuteurs et de l'ensemble de l'application de la « Loi Tabitha ». Il semble en effet qu'après 5 années de fonctionnement, ce dispositif mérite d'être évalué et de faire l'objet d'ajustements, là où c'est nécessaire.

    9. La plate-forme est favorable à l'élargissement de la définition du MENA pour y inclure les MENA européens; elle s'est souvent exprimée en ce sens, tant il est vrai qu'aujourd'hui, ces derniers sont moins bien traités que les extra-européens.

    10. La plate-forme est également en faveur d'ancrer légalement le droit au séjour des MENA. Elle a d'ailleurs rédigé un projet de nouvel article 9quater, à insérer dans la loi du 15 décembre 1980 sur les étrangers, qui instaure un droit au séjour temporaire pour les MENA dés leur arrivée sur le territoire, et qui met en place une procédure de détermination de la solution durable la plus conforme à l'intérêt de l'enfant.

    11. La plate-forme plaide également pour un assouplissement de l'obligation de produire un passeport pour bénéficier de n'importe quel titre de séjour, nombre de MENA étant dans l'impossibilité de produire un tel document.

    12. La recommandation relative à l'assurance soins de santé des MENA est rencontrée et n'est donc plus nécessaire.

    Outre les recommandations qui précèdent, la plate-forme souhaite revenir sur la question de l'identification des MENA. Il s'agit d'une compétence du Service des tutelles qui devrait s'appuyer pour ce faire sur l'ensemble des éléments à disposition concernant le jeune, en ce compris les documents en sa possession qui ne doivent pas être considérés, ipso facto de faux. Le test médical ne fournit qu'une indication, pas de preuve; il doit être mis en balance avec les autres éléments à disposition. Bien plus, il convient de rappeler qu'en cas de doute, le jeune doit être considéré comme mineur, ce qui n'apparaît pas être le cas systématiquement.

    Enfin, sur cette question, l'arrêté royal portant exécution de la loi tutelle prévoit également la possibilité d'utiliser des tests psycho affectifs pour compléter le test médical; si ceux-ci ne sont a priori pas plus fiables que le test médical, la plate-forme estime que l'avis des éducateurs et autres intervenants qui côtoient le jeune et le connaissent le mieux peut constituer une indication importante à prendre en considération.


    5. Mme Renée Raymaekers, Directrice du Bureau Minteh de la direction Accès et Séjour, Office des étrangers

    L'intervenante, en guise d'introduction, signale que le bureau Minteh de l'Office des étrangers a une double casquette, celle des mineurs étrangers non accompagnés et celle des victimes de la traite des être humains, majeurs ou non.

    Concernant le sujet de la résolution, l'intervenante insiste sur 2 aspects de la problématique des MENA. Premièrement, le phénomène MENA a une dimension internationale: tous les pays européens sont confrontés au même défi, avec des solutions à géométrie variable. Cela ne concerne donc pas que la Belgique.

    L'Espagne a très récemment adressé une communication à la Commission européenne, l'invitant à se pencher activement sur le dossier des MENA. L'Espagne fait état de ses pratiques et de son approche globale, fondée sur 3 piliers: primo, la prévention dans les pays d'origine (collaboration avec ces pays d'origine pour mettre en place des formations, une meilleure scolarité etc); secundo, la protection tant dans le pays hôte que dans le pays tiers d'origine; tertio, le retour assisté (via des collaborations avec l'IOM, l'organisation internationale des migrations, en vue de permettre un retour dans les meilleures conditions.)

    La Belgique et l'Office des étrangers participe aux discussions internationales et européennes.

    Ensuite, la problématique des MENA tombe sous la compétence de l'Office des étrangers en matière de migration. L'OE est l'instance qui applique la loi du 15 décembre sur l'accès, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. L'OE est donc un partenaire avec des compétences spécialisées en matière de migration, les MENA s'inscrivant dans un phénomène migratoire et des trafics d'enfants.

    Ces trafics méritent une attention particulière, contre lequel il faut lutter par des mesures préventives telles que l'inscription des enfants par un passeport personnel. Ce passeport personnel des enfants a été décidé tout récemment en Europe. Une task force travaille sur la création de telles mesures préventives.

    Concernant l'historique de la problématique des MENA au sein de l'Office des étrangers, l'intervenante la résume comme suit:

    Dans les années 90, il y a eu une prise de conscience du phénomène MENA. L'Office des étrangers était confronté à des cas de mineurs qu'il réglait au cas par cas, sur base du principe de la protection de l'enfant.

    En 1999, une première note de service à usage interne donnait des règles à suivre en la matière.

    En 2000, l'Office des étrangers crée le service MENA.

    En 2002, suite à l'affaire Tabitha, qui a défrayé les chroniques, la loi sur la tutelle voit le jour.

    En 2003, l'on assiste à la fusion du service MENA et TEH (traite des êtres humains) sous la direction Accès et Séjour. Le fait que le service Minteh soit sous cette direction donne clairement le signal que l'on privilégie le séjour et non plus le contrôle.

    En 2004, le service des tutelles est mis sur pied.

    En 2005, la circulaire MENA est élaborée. Il va sans dire qu'entretemps, cette circulaire est devenue obsolète et qu'il faut la remodeller. L'Office des étrangers est conscient des lacunes et difficultés de cette circulaire et y travaille à l'heure actuelle.

    Le Bureau Minteh, sous la direction Accès et Séjour, est donc un bureau spécialisé en matière de mineurs et de victimes (majeurs et mineurs) de la traîte des êtres humains. Il ne s'occupe pas d'autres matières. Composé de 13 personnes, il comporte un personnel spécialisé et motivé. Depuis plusieurs mois, des formations pointues sont mises sur pied. Quant à l'infrastructure, le bureau Minteh dispose de 2 locaux d'audition spécialement aménagés pour les enfants.

    Concernant les compétences du Bureau Minteh, elles se fonent sur les bases légales suivantes:

    a) application de la circulaire relative à la fiche « mineur étranger non accompagné » du 23 avril 2004 (Moniteur belge du 30 avril 2004), modifiée le 25 juillet 2007 (Moniteur belge du 13 août 2007). Cette ciruclaire instaure la fiche de signalement pour le MENA. Il s'agit d'une première chance, et parfois l'unique, de recueillir un maxiumum d'informations sur le mineur. En général, ce sont soit les services de police, soit l'Office des étrangers qui procèdent à l'établissement de cette fiche.

    L'Office des étrangers a enregistré cette année 2 200 signalements de mineurs, qu'ils émanent directement de ses services ou bien des services de police. Le Bureau Minteh en remplit en moyenne 700.

    Pour répondre aux demandes du protocole évoqué par Mme Kloeck, cette fiche est remplie la plus complètement possible (adresse des parents, nº de téléphone). Il est vrai qu'à ce moment, le tuteur n'est pas encore présent.

    b) application de la circulaire du 15 septembre 2005 relative au séjour des mineurs étrangers non accompagnés, visant la recherche d'une solution durable, en collaboration avec les tuteurs essentiellement.

    c) application des dispositions légales et réglementaires en matière de traite des êtres humains.

    d) circulaire multidisciplinaire en matière de traite des êtres humains du 25 septembre 2008. Cette circulaire est récente et a consacré la collaboration de tous les acteurs concernés. Elle reprend 2 profils vulnérables en particulier, à savoir le personnel diplomatique et les MENA. Elle leur accorde donc une attention particulière et sera évaluée en 2010. À ce moment là, il sera envisageable d'assouplir l'entrée des mineurs dans la procédure de victime de la traite des êtres humains, qui, à ce jour, leur est rarement ouverte. Les chiffres parlent d'eux-même: d'année en année, les mineurs qui entrent dans le statut victime de la traite des êtres humains diminue (de 30 en 2000 à 6 en 2008). Il faut donc s'interroger sur la pertinence du statut actuel face aux MENA.

    Le Bureau Minteh collabore et coopère avec d'autres instances concernées, tels le Service des tutelles, les tuteurs, la police (en cas de disparitions avec application du protocole intitié par Child Focus), les parquets, les Affaires étrangères, FEDASIL, Child Focus, etc.

    Pour décrire une situation type de MENA, l'intervenante explique que tout commence par l'établissement d'une fiche de signalement, soit par les services de police, soit par l'Office des étrangers, soit par d'autres instances tels le service droits des jeunes. Cette fiche initie la suite de la procédure et rend visible l'enfant. L'identification de l'enfant est véritable défi: bon nombre de documents ne sont pas légalisés ou sont faux, obtenus dans le cadre de trafics.

    Le MENA est alors envoyé au service des tutelles où il est pris en charge. Un tuteur sera alors désigné et engagera une procédure à l'Office des Étrangers pour obtenir un séjour sur base de la circulaire du 15 septembre 2005 relative au séjour des mineurs étrangers non accompagnés.

    L'examen par l'Office des étrangers d'une demande de séjour dans le cadre de la circulaire du 15 septembre 2005 se déroule comme suit:

    — depuis juin 2009, l'OE procède à une audition du jeune en présence de son tuteur. C'est pour généraliser cette nouvelle méthode que des formations ont été suivies et une infrastructure mise en place.

    — recherche de la solution durable, avec l'appui du tuteur. L'intervenante signale à cet égard que le regroupement familial n'est pas vu comme la première solution, il fait partie d'un ensemble. Il est vrai qu'en général, l'OE commence par là pour éventuellement exclure la possibilité d'un regroupement familial (décès des parents ou inaptitude des parents à accueillir leur enfant) pour chercher d'autres pistes.

    — recherche de la famille: il s'agit d'un élement important. À cet égard, l'OE est sur le point de signer un protocole de bonnes pratiques avec le ministère des affaires étrangères afin que les postes diplomatiques aident l'OE à rechercher la famille. L'Espagne en a également fait un point crucial.

    — la question du passeport est essentielle: le passeport est une condition de forme et non de fond quant à l'inscription à un registre des étrangers. En effet, tout notre système administratif belge est fondé sur l'identité et sur le domicile. Ceci vaut tant pour les belges que pour les étrangers. L'on demande donc un passeport pour pouvoir fixer l'identité de l'enfant au registre national. Son absence entraine de grandes difficultés lorsque l'enfant change d'identité, d'âge à plusieurs reprises, etc.

    L'OE est conscient des difficultés pour obtenir un passeport dans certains cas.

    Mais, il est essentiel d'insister sur le fait que sans passeport, un enfant ne pourra pas voyager, établir des actes d'état civil dans le futur (mariage, naissances d'enfants, naturalisation). A long terme, l'exigence d'un passeport se fait donc dans l'intérêt de l'enfant.

    — les documents de séjour: l'OE réflechit à des améliorations à cet égard. Il est vrai que des ordres de reconduire sont délivrés par le service de l'intervenante, soit environ 7 % des décisions. Or, ces ordres de reconduire ne sont pas exécutés. Cela représente une grande difficulté ressentie dans les autres pays européens.

    — les retours: il n'y a pas de retour contraint des MENA. Il n'y a pas de MENA, identifiés comme tels, dans les centres fermés. La difficulté principale vient de la non exécution des décisions de reconduire, ce qui explique des prolongations de leur séjour en Belgique. La question est de savoir s'il ne faudrait pas davantage travailler sur un retour effectif avec des garanties d'accueil. Certaines organisations, tels l'Organisation internationale des migrations, proposent des retours accompagnés avec une réintégration dans le pays d'origine, même si les parents ne sont pas retrouvés. Un suivi de l'enfant dans le pays d'origine est alors assuré. Ceci constituera le grand défi pour l'Europe.

    L'OE assure également diverses collaborations avec l'extérieur. Ainsi, des groupes de travail ont vu le jour, dont la Task Force « mineurs voyageant seuls », mise en place par la ministre Turtelboom. Ce groupe de travail se penche non seulement sur le cas des MENA mais également sur les enfants belges et européens voyageant seuls. De même, il existe le Protocole de collaboration « Disparition ».


    6. M. Wim Bontinck, cellule Traite des êtres humains de la police fédérale

    M. Bontinck explique que sa contribution à la présente audition s'appuie sur l'expérience qu'il a acquise à la police dans le cadre des dossiers de mineurs étrangers non accompagnés, à savoir les MENA. Il ajoute qu'il présentera la situation en Belgique, mais qu'il se basera aussi sur les informations policières issues des 27 États membres de l'UE rassemblées par Europol. Il précise que les éléments qu'il va exposer ne peuvent pas être généralisés à l'ensemble des MENA et qu'ils font abstraction des cas individuels, tout en esquissant le fil rouge qui relie les dossiers policiers. Tel est d'ailleurs aussi le cadre de la mission qui incombe au service central de la traite des êtres humains de la police judiciaire fédérale qui existe maintenant depuis quinze ans.

    Un aspect important de la problématique est le risque que le MENA ne soit victime de la traite ou du trafic d'êtres humains. L'expression « traite des êtres humains » désigne le fait de recruter, de transférer ou de transporter, d'accueillir ou d'héberger une personne, de passer ou de transférer le contrôle exercé sur elle à des fins d'exploitation. Par trafic des êtres humains, on entend le fait de contribuer, de quelque manière que ce soit, à permettre l'entrée, le transit ou le séjour d'une personne non ressortissante d'un État membre de l'Union européenne sur ou par le territoire d'un tel État en vue d'obtenir un avantage patrimonial.

    Il n'existe aucune étude nationale ou internationale, reproductible ou contrôlable, attestant que les mineurs étrangers non accompagnés présentent davantage de risques d'être victimes de la traite des êtres humains que d'autres mineurs. Nombreuses sont les études qui renvoient à d'autres études sans aucune note critique. En Belgique, la grande majorité des victimes mineures d'une forme d'exploitation quelconque sont d'ailleurs de nationalité belge. Pour les années 2006, 2007 et 2008, on comptait respectivement 155 Belges sur 199 mineurs, 120 Belges sur 159 mineurs et 92 Belges sur 114 mineurs. Conformément à la directive relative à la politique de recherches et de poursuites en matière de traite des êtres humains, la justice et la police donnent la priorité absolue aux victimes mineures. De ce fait, les risques potentiels de victimisation d'un mineur non accompagné font donc aussi indirectement l'objet d'une attention toute particulière. Les signes permettant de détecter les victimes possibles de la traite ou du trafic des êtres humains valent aussi pour les mineurs.

    Comme l'a indiqué précédemment Mme Raymaeckers, lorsque les victimes sont des mineurs étrangers non accompagnés, ils peuvent obtenir le statut de victime de la traite ou du trafic aggravé d'êtres humains.

    Qu'en est-il des mineurs étrangers non accompagnés et du trafic d'êtres humains ? Pour parvenir en Belgique ou dans d'autres États membres de l'UE, le mineur étranger non accompagné, quel que soit son régime de séjour (demande d'asile, séjour irrégulier, etc.), a recours à des tiers aussi fréquemment que les adultes en séjour illégal et il le fait le plus souvent par l'entremise des parents.Des études belges mais aussi des rapports internationaux constatent qu'environ huit mineurs sur dix font appel à des tiers à l'un ou l'autre endroit du trajet qui doit les mener vers un pays de l'UE. Lorsqu'ils se font payer pour fournir cette aide ou cette assistance, ces tiers tombent sous la qualification de trafiquants d'êtres humains. Cette assistance peut aller de l'application abusive des conditions d'entrée jusqu'au trafic d'êtres humains proprement dit.

    L'expérience montre que les mineurs étrangers non accompagnés sont victimes avec la même fréquence de ces deux types de pratiques. S'ils bénéficient d'une aide à l'immigration illégale, les mineurs étrangers non accompagnés ne sont pas victimes de trafic d'êtres humains. Précisons à titre d'illustration que près de 50 % des MENA possèdent l'une des nationalités figurant dans le top 5 des nationalités victimes du trafic d'êtres humains.

    Généralement, les mineurs étrangers non accompagnés ne voyagent pas seuls, mais en groupes de plus ou moins grande dimension, avec des compatriotes et sans qu'aucune des personnes qui les accompagnent ne soit un parent ou un tuteur légal.

    Les motivations qui poussent un mineur étranger non accompagné à immigrer de manière irrégulière vers la Belgique ou d'autres pays sont connues. M. Charlier les a déjà évoquées précédemment. Le mineur émigre soit à la demande du parent qui séjourne de manière légale ou irrégulière quelque part dans un pays de l'UE, soit parce qu'un membre de la famille se trouvant dans un pays de l'UE a promis à un frère, une soeur, une tante, un neveu, etc. de s'occuper de son enfant et de lui offrir de meilleures perspectives d'avenir. Dans ces cas de figure, tant le mineur étranger non accompagné que les adultes savent depuis le début de leur aventure vers quel pays ils vont voyager. Dès le départ, ils savent avec précision quelles personnes vont les aider et les modalités suivant lesquelles ils doivent prendre contact avec elles une fois qu'ils ont atteint leur destination (intermédiaire). Il est rare qu'ils divulguent une information sur ces contacts lors d'interpellations ou d'entretiens ultérieurs.

    Pour la détection de toute victime potentielle de la traite des êtres humains et de plusieurs formes aggravées de trafic d'êtres humains, un guide a été mis au point à l'intention de la police afin de lui permettre de repérer les signes laissant présager la présence d'une traite et d'un trafic d'enfants. Ce guide, qui a également été confronté aux connaissances académiques disponibles en la matière, contient aussi des conseils pratiques pour les premiers contacts et l'enquête ultérieure.

    Quels sont les problèmes que rencontre la police dans le contexte des mineurs étrangers non accompagnés ? Au cours des différentes interpellations policières de mineurs étrangers non accompagnés (contrôles en matière de trafic, interventions ou enquête concernant un fait dont l'auteur est un MENA), il y a toujours des problèmes qui mettent les policiers à rude épreuve. Si l'on apporte une solution structurelle à cette situation, on garantira que l'agent de police restera à l'avenir aussi attentif à la problématique des mineurs étrangers non accompagnés et exécutera scrupuleusement ses missions dans ce cadre.

    En sachant que la police a interpellé, en 2007 et 2008, respectivement 2 263 et 2 193 personnes (soit 3 % du nombre total d'interpellations) qui se déclaraient elles-mêmes mineurs étrangers non accompagnés, on se rend compte que cette demande de solution est tout à fait justifiée. À ce propos, l'intervenant signale qu'il arrive que des agents de police interpellent plusieurs fois des mineurs étrangers non accompagnés dans la même région. Par ailleurs, les adultes en séjour illégal peuvent être interpellés jusqu'à 12 fois dans la même région.

    Tout d'abord, il n'est pas toujours évident de savoir si l'on a affaire ou non à un mineur étranger non accompagné. Cela devient très complexe quand la police interpelle un adulte et un mineur qui affirment être un parent et son enfant, sans qu'ils puissent toutefois prouver leur identité. La question est de savoir qui décide alors de séparer le parent et l'enfant pour poursuivre l'enquête. En outre, un autre problème réside dans le fait que le mineur peut disposer après que le service des tutelles a été contacté. Le mineur a peut-être passé la nuit dans un poste de police où il ne pouvait pas être mis en détention, pendant que l'agent de police dressait différents rapports administratifs en plus de son procès-verbal et a dû partir chercher des repas. En effet, le service des tutelles n'est pas facilement joignable en dehors des heures de travail.

    Si le service des tutelles décide d'héberger le mineur étranger non accompagné dans un centre, la question du transport se pose. Le service des tutelles disposant de moyens limités, en personnel et en véhicules, pour un transfert, c'est souvent la police qui doit se charger de transporter le mineur concerné vers un centre. Cela ne plaît pas aux autorités policières locales qui se montrent réticentes. On peut se demander si cela influence le travail qui doit être réalisé lors de l'interrogatoire d'un mineur non accompagné.

    Un autre problème concerne le recours à un moyen de contrainte pour exécuter la décision du service des tutelles. Pour l'agent de police, il est incompréhensible que la personne dont il s'est occupé pendant un certain temps puisse, dans le cadre du volet administratif, choisir librement si elle se rend dans un centre.

    La minorité est également une astuce à laquelle certains recourent. Lors des premiers contacts avec la police, la personne interrogée déclare parfois être mineure. En cas d'indices de traite ou de trafic d'êtres humains, le magistrat contacté peut faire déterminer l'âge avant que le service des tutelles se charge de l'accompagnement du mineur étranger non accompagné. En effet, la minorité est une circonstance aggravante en cas de traite ou de trafic d'êtres humains. Dans d'autres cas, le service des tutelles décide de procéder à la détermination de l'âge. Le MENA avoue alors être majeur soit dès que le service des tutelles vient le chercher, soit à l'arrivée au centre. Il n'y a alors plus rien d'autre à faire que de le relâcher. Grâce à cette subtilité, la personne interrogée échappe non seulement à une éventuelle détention dans un centre fermé en vue d'un rapatriement, mais aussi à un ordre de quitter le territoire. C'est une astuce que les personnes en séjour illégal s'échangent rapidement.

    Quelles sont les possibilités pour étendre la collaboration concernant la problématique des mineurs étrangers non accompagnés dans le contexte de la traite ou du trafic d'êtres humains ? Avant toute chose, l'intervenant souligne que la problématique des MENA reste une priorité policière aussi bien dans le cadre du dépistage de la traite et du trafic d'êtres humains que dans les interventions quotidiennes. Néanmoins, la circulaire du ministre de la Justice concernant le dépistage et la poursuite de la traite des êtres humains (Col 1/2007) ne prévoit pas de directives spécifiques et contraignantes pour la justice et la police en ce qui concerne une éventuelle traite des enfants et les MENA.

    Le ministre rédige actuellement une circulaire relative au dépistage et à la poursuite du trafic d'êtres humains, qui concernera davantage de partenaires dans la chaîne. Bien entendu, il est également nécessaire d'établir des directives spécifiques et contraignantes en vue de régler les problèmes décrits en ce qui concerne une éventuelle traite des enfants et les MENA. Définir un parcours qualitatif pour le MENA à partir de la première interpellation policière est la meilleure garantie pour que les agents de police sur le terrain restent attentifs à la problématique des MENA.

    Enfin, il semble évident qu'un partenaire dans la chaîne (l'Office des étrangers, un centre d'accueil spécialisé pour les victimes de la traite des êtres humains, un tuteur désigné, ...) doit immédiatement avertir le parquet local s'il est le premier à être confronté à un mineur étranger non accompagné et s'il remarque des signes indiquant la possibilité de traite ou de trafic d'êtres humains. C'est d'ailleurs ce que demande la circulaire du 26 septembre 2008 relative à la mise en œuvre d'une coopération multidisciplinaire concernant les victimes de la traite des êtres humains et/ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains.

    Le magistrat contacté chargera un service de police de poursuivre l'enquête. Toute perte de temps fait disparaître des éléments de dépistage utiles. Dès que le mineur étranger non accompagné est identifié comme une victime potentielle de traite des êtres humains ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains, la Justice, le tuteur désigné, le centre d'accueil spécialisé pour les victimes — mineures — de la traite des êtres humains ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains, ainsi que l'Office des étrangers collaborent et interagissent de la manière prévue par la circulaire du 26 septembre 2008. Le plan d'action de lutte contre la traite des êtres humains, établi par la cellule de coordination interdépartementale en matière de lutte contre la traite et le trafic des êtres humains, prévoit d'instaurer à court terme une autre forme d'octroi du statut de victime à un mineur victime de traite des êtres humains ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains.


    7. MM. Bernard Georis et Marc Tysebaert, service des tutelles du SPF Justice

    M. Georis souhaite expliciter la structure et le fonctionnement de base du service des tutelles.

    Ce service a été créé en mai 2004, au sein du SPF Justice, à la direction générale « Libertés et droits fondamentaux » et plus précisément à la direction des Droits de l'homme, actuellement. Il est composé d'une équipe pluridisciplinaire de 24 agents: des juristes, des licenciés en sciences sociales, des assistants sociaux, des experts et des assistants administratifs, et des chauffeurs accompagnateurs.

    Les missions du service se décomposent en trois axes principaux. Il est de permanence 24/24 h, sept jours sur sept, pour recevoir les signalements des mineurs étrangers non accompagnés et les prendre en charge, ce qui implique aussi de les identifier, puis de leur désigner un tuteur.

    Un troisième axe consiste en diverses concertations, générale et bilatérales, organisées de façon trimestrielle.

    Un tableau détaillé (voir annexe 1) donne un aperçu des statistiques du service de l'année 2005 jusqu'au 30 septembre 2009. Le tableau indique le nombre de personnes signalées au service, année après année.

    L'analyse succincte des différentes nationalités montre pour l'Afghanistan, à partir de 2008 et pour l'Algérie, en 2009, une explosion de signalements. La Roumanie qui fait partie de l'espace économique européen depuis 2006 est en onzième position. On constate une forte baisse du nombre de signalements: de 213 en 2006, il retombe à 66 en 2007. Ces jeunes ne sont plus systématiquement signalés au service des Tutelles. Cela ne signifie donc pas qu'il y en ait moins; c'est juste un changement de statut.

    Un autre point remarquable concerne les Indiens qui constituent la cinquième nationalité du tableau. Ils étaient au nombre de 263 en 2008 et de 69 seulement en 2009, à la suite d'une opération policière menée dans le courant de 2008. Apparemment, le réseau a été atteint.

    Pour ce qui est de la prise en charge, le service des Tutelles recoit les signalements pour toute personne qui paraît ou qui déclare avoir moins de 18 ans et se dit non accompagnée par un adulte qui exerce l'autorité parentale ou de tutelle. Cette personne doit être originaire d'un pays situé en dehors de l'espace économique européen et être demandeuse d'asile ou ce que l'on appelle « illégale », c'est-à-dire dans un état non conforme aux dispositions de la loi de 1980 sur l'accès et le séjour.

    La première opération qu'effectue le services des Tutelles consiste à encoder les données. Jusqu'au 30 septembre 2009, il a reçu 2 880 signalements qui représentent 1 773 nouveaux arrivés, c'est-à-dire des personnes inconnues du service des tutelles avant leur signalement. Sur ces 2 880 signalements, 270 personnes étaient déjà connues de nos services en 2008, avant leur signalement.

    Le nombre de 2 880 signalements peut aussi être comparé aux 2 826 signalements reçus pour l'année 2008, soit 1 884 nouveaux cas pour cette même année.

    Après avoir enregistré les différentes données d'identité et celles relatives à la situation actuelle du mineur, le service des Tutelles organise l'hébergement et se trouve, comme l'a dit M. Bontinck, confronté à la problématique du transport vers les centres d'accueil.

    Pour cette année, jusqu'au 30 septembre, 688 personnes ont été orientées vers les centres d'accueil de l'agence pour l'accueil des demandeurs d'asile — d'abord vers les centres d'orientation et d'observation de Neder-over-Hembeek et de Steenokkerzeel —, 627 ont communiqué une adresse chez des proches ou en d'autres lieux, par exemple un centre de communauté ou même auprès de Fedasil. Ceux qui habitent auprès de proches et que le service des tutelles ne connait pas sont convoqués à un entretien d'identification pour éventuellement émettre un doute et leur expliquer le système de la tutelle.

    Les personnes sans hébergement étaient au nombre de 707. Ceci signifie que ces personnes étaient ou sont encore, pour une partie, non hébergées ou sans hébergement connu par le service des tutelles. Cela signifie aussi qu'elles sont sur le territoire et qu'elles ne communiquent pas leur lieu d'hébergement. En effet, elles n'en ont pas l'obligation.

    Une partie d'entre eux est effectivement dans la rue, dont certains mineurs étrangers non accompagnés. Un exemple concret illustre cela: dernièrement, plusieurs mineurs ont été signalés par le poste de Jabbeke. Ces onze Afghans, dont on sait qu'ils sont tous mineurs, se trouvent sur une autoroute, le long de la côte. Voulant les héberger, le services des tutelles a trouvé des places dans les centres d'orientation et d'observation. Mais ces personnes sont susceptibles de disparaître immédiatement après le transport ou de refuser de monter dans les voitures de service. Elles s'opposent à l'hébergement et restent à la rue. Parmi les jeunes qui reçoivent l'invitation d'aller au service des tutelles, rares sont ceux qui y répondent. Les jeunes dont question ci-avant sont repartis vers Calais. Il arrive que des jeunes soient signalés plusieurs fois.

    C'est un cas qui illustre l'actualité récente, avec la fermeture de « la jungle » à Calais. Il est difficile d'absorber de tels événements dans la phase du signalement et de la prise en charge, malgré le souhait du service des tutelles de trouver un hébergement au mineur et de lui apporter de la stabilité.

    La deuxième opération de la phase de prise en charge consiste à identifier les personnes. Les personnes sont invitées à un entretien d'identification au service des tutelles, lorsqu'un doute a été émis quant à leurs déclarations relatives à leur âge. Le doute peut émaner de l'Office des étrangers ou du service des tutelles lui-même. Cette année, le services des Tutelles a réalisé 363 tests et autant d'entretiens d'identification. Pour 72 % des cas, la majorité du jeune a été établie et pour 28 % la minorité.

    Le service des Tutelles mène également des identifications lorsque l'accompagnement est assuré par une personne qui exerce l'autorité parentale. Une centaine d'entretiens en 2008 ont abouti à 48 cessations de prise en charge ou de tutelle, suivant le moment où la décision a été prise.

    Après l'identification, le service des Tutelles désigne un tuteur.

    Concernant la constitution et de l'organisation matérielle du travail des tuteurs, le service des tutelles a, jusqu'à présent, agréé 416 candidats tuteurs. La personne qui se porte candidate dépose un dossier au service des tutelles. Ce dossier comporte un curriculum vitae, un certificat de bonne vie et mœurs, modèle 2 et tout élément qui peut démontrer sa motivation, sa connaissance de la problématique. Ensuite, la personne est invitée à un entretien au service des tutelles où l'on examine différents types de compétences et de connaissances et où l'on décide de l'opportunité de lui accorder l'agrément. Parmi les personnes agréées, on retrouve différentes professions: une majorité d'assistants sociaux, des psychologues, des avocats, des enseignants, des éducateurs, des ingénieurs et des fonctionnaires. D'autres professions figurent dans cette liste.

    Une fois le candidat agréé et avant sa première désignation, une formation de base lui est donnée qui consiste à recevoir toute une série d'informations cruciales pour l'exercice de la tutelle. Cela permet d'éveiller l'attention des nouveaux tuteurs sur les points importants: certains aspects du droit des étrangers, du droit de la jeunesse et d'autres éléments relatifs à l'accompagnement psychosocial des mineurs.

    Le service des tutelles prévoit aussi une formation continuée. En 2008, cinq jours de formation ont été organisés pour des petits groupes de tuteurs. Cette formation externalisée et confiée à l'association Solentra, consistait à travailler l'approche du mineur, à repérer certains signes en matière de différences culturelles et de traumatismes et à traiter du travail en réseau.

    En 2009, la méthode a changé puisque le service des Tutelles a décidé de prendre en charge financièrement des formations organisées par l'Association pour le Droits des étrangers qui permettent aux tuteurs de parfaire ou d'approfondir leurs connaissances en matière de droits des étrangers. Les tuteurs peuvent aussi participer à certaines journées de type « portes ouvertes » organisées par le CGRA ou l'Office des étrangers.

    Un support d'information, une sorte de vade-mecum a aussi été mis à leur disposition. Il reprend les différents aspects et acteurs de la problématique. Le service des tutelles est également accessible en permanence, via le numéro général, pour répondre à leurs questions.

    L'organisation matérielle du travail des tuteurs consiste en l'agrément, la formation et le support mais aussi le traitement des déclarations de créances et des subsides aux associations qui emploient des tuteurs. Cela représente une part importante du travail du service des Tutelles car environ 6 000 pièces sont traitées chaque année.

    Sur le tableau en annexe 2 figure la liste des tuteurs et leur répartition en fonction du nombre de tutelles exercées. Du côté francophone, 45 tuteurs exercent de une à cinq tutelles, pour 87 tutelles. Onze tuteurs francophones exercent entre six et dix tutelles, pour 96 tutelles. Au total, on compte actuellement 84 tuteurs francophones qui exercent une tutelle pour 741 tutelles et 87 tuteurs néerlandophones pour 759 tutelles. Au total, 171 tuteurs suivent un ou plusieurs mineurs étrangers. Parmi ces tuteurs, une vingtaine sont employés pour environ 500 tutelles. Cette dernière catégorie concerne des tuteurs qui sont employés par des associations avec lesquelles un protocole d'accord a été conclu. Ces personnes exercent cette activité à temps plein.

    En ce qui concerne l'indemnité, les tuteurs qui sont employés sont forcément des salariés. D'autres ont un statut d'indépendant et reçoivent une indemnité par tutelle et par an, avec une compensation en frais administratifs et la possibilité de déclarer des frais de parcours. L'indemnité atteint environ 580 euros, par tutelle et par an, auxquels s'ajoutent 85 euros de frais administratifs et les frais de parcours.

    Pour ce qui est de l'exercice d'une trentaine de tutelles ou de la gestion, par le service des Tutelles, d'un soutien ou d'un contrôle des tuteurs, l'intervenant signale d'abord que le service des Tutelles organise le contrôle par le suivi des rapports que les tuteurs, par obligation légale, transmettent au juge de paix et au service des Tutelles. Il veille à ce que les rapports suivent, selon les échéances prévues par la loi. Ces rapports sont lus et certains points font l'objet d'un encodage, ce qui permet d'avoir une vue globale sur l'activité d'un tuteur. Le services de tutelles ne suit pas les dossiers des mineurs de façon individuelle, sauf dans certains cas, à la suite de la demande d'un tuteur, d'un centre ou du mineur lui-même. Il juge de l'opportunité d'intervenir dans un dossier individuel, mais l'objectif est de contrôler, de suivre les tuteurs et d'apprécier la manière dont ils exercent leur mission.

    La force de travail du service des Tutelles est principalement absorbée par les interventions quotidiennes, les demandes qu'il recoit de la part du tuteur ou d'un autre acteur dans une problématique individuelle.

    Quant à savoir si le tuteur peut avoir, à un moment donné, un rôle coercitif, il est clair qu'il exerce une quasi autorité parentale, mais on ne peut pas parler de rôle coercitif au sens « policier » du terme. La loi décrit les missions du tuteur qui est avant tout un représentant légal. Elle est proche de la notion de tuteur qui figure dans le code civil. Le tuteur est chargé de suivre le mineur dans toutes les procédures, d'assister à chaque audition, que ce soit vis-à-vis de l'Office des étrangers ou en matière judiciaire, etc.

    À côté de cette représentation légale, il exerce la gestion des biens. Il a aussi ce que l'on pourrait appeler le devoir de veiller au bien-être général du mineur, à ce qu'il soit scolarisé, à lui apporter, si nécessaire, les ressources en matière de soutien psychologique, soins médicaux, etc. Il doit également faire en sorte qu'il ait accès à l'aide sociale. En termes d'accompagnement psychosocial, il n'y a pas de dispositions de type coercitif dans ses missions. Ce représentant légal a pour mission de soutenir un mineur et donc de veiller à ce que ses droits soient respectés, tels qu'entendus par la Convention internationale des droits de l'enfant.

    La loi prévoit que le juge de paix soit saisi des conflits entre le mineur et le tuteur. Toute personne qui a un intérêt à la situation peut saisir le juge de paix. En 2009, le service des tutelles a connu sept cas qui ont donné lieu automatiquement à la désignation d'un tuteur ad hoc. En vertu des délibérations du juge de paix, le tuteur est soit confirmé dans sa fonction soit destitué, auquel cas le tuteur ad hoc poursuit la mission, dans la plupart des cas.

    Quant à savoir qui saisit le juge de paix, cela peut être toute personne qui a un intérêt à la situation, éventuellement le service des Tutelles. À quelques reprises, le service a informé le juge de paix, mais sans le saisir techniquement.


    IV. DISCUSSION GÉNÉRALE

    M. Moureaux souhaite savoir si le service des Tutelles a parfois eu connaissance d'éléments qui porteraient à croire que certains tuteurs n'ont pas que des intentions positives à l'égard des mineurs.

    M. Georis déclare n'avoir jamais constaté de manquements de ce type. Le service des Tutelles a parfois refusé l'agrément car il avait perçu des positions particulièrement difficiles.

    M. Tysebaert ajoute que l'agrément et le retrait sont décidés par des arrêtés ministériels. L'agrément fait l'objet d'une enquête préalable du service des Tutelles. Il demande tous les éléments et veille à l'absence de toute condamnation qui pourrait nuire aux intérêts du mineur et à un suivi de qualité.

    M. Daras voudrait connaître le statut de ces mineurs. Certains sont demandeurs d'asile et le centre Fedasil leur est, en principe, dédié. Certains jouissent du statut de protection spéciale. Certains sont des victimes de la traite des êtres humains. Tout cela mène à des traitements et des droits différents, à moins que ces distinctions soient seulement théoriques. Les représentants du Service des Tutelles n'ont pas évoqué la question des statuts différents que ces mineurs peuvent avoir.

    M. Georis confirme que son intervention portait principalement sur le signalement et la prise en charge. Lors du signalement, le services des Tutelles sait si le mineur est demandeur d'asile ou pas. Un tiers des mineurs déclarent être demandeurs d'asile. L'on se base toujours sur les déclarations des personnes.

    M. Daras trouve cet aspect essentiel:les tuteurs sont censés les accompagner lors de cette procédure. Il est donc important de savoir quel est leur statut.

    M. Georis déclare que le tuteur désigné a un rôle primordial dans l'orientation que choisira le mineur. Soit il continue une demande d'asile, soit il introduit une demande de déclaration d'arrivée à l'Office des étrangers selon les dispositions prévues par la circulaire de septembre 2005.

    M. Moureaux se demande ce qu'il en est des deux tiers qui ne sont pas demandeurs.

    M. Georis estime que dans les deux tiers qui ne sont pas demandeurs, pour faire la distinction, il faudrait demander à l'Office des étrangers sur base du nombre de personnes qui se sont adressées à leurs services pour une déclaration d'arrivée.

    C'est le tuteur qui prend des dispositions pour introduire une procédure. Il y a actuellement 1 500 mineurs sous tutelle. Un tiers de ces mineurs, approximativement, sont demandeurs d'asile ou ont introduit une procédure de demande d'asile. Les deux autres tiers ont introduit une demande au bureau « mineurs » de l'Office des demandeurs d'asile.

    Mme Raymaekers rappelle que la loi prévoit trois statuts différents, plus les demandes de régularisations actuelles, pour lesquelles elle ne dispose pas de chiffres. Il y a effectivement un tiers de demandeurs d'asile. Dans son service, on applique la circulaire du 15 septembre 2005. Depuis le début, avec tous ceux qui sont en cours de procédure, il existe un stock d'à peu près 750 à 800 mineurs non accompagnés qui sont suivis. Le nombre de victimes de la traite des êtres humains est très faible. En base annuelle, le nombre d'enfants qui peuvent vraiment obtenir le statut de victime est inférieur à dix.

    M. Moureaux souhaite savoir quel est l'âge moyen des mineurs sous tutelle.

    D'après M. Georis, l'âge moyen des mineurs sous tutelle se situe entre seize et dix-huit ans. Il y a peu de très jeunes enfants. Environ 80 % de ces mineurs ont plus de quinze ans.

    Mme Désir constate que certains tuteurs ont trente mineurs placés sous leur protection. Comment peuvent-ils créer une relation de confiance et veiller au bien-être de chacun de ces mineurs ? La loi fixe-t-elle une limite ? Y a-t-il suffisamment de candidats ou constate- t-on un manque de candidats tuteurs ?

    M. Georis signale que la loi prévoit un maximum de quarante tutelles par tuteur. Son service tient compte des capacités de chaque tuteur. Les tuteurs les plus actifs sont aussi ceux qui ont davantage de relations avec le service des Tutelles en matière de soutien. La question de Mme Désir est néanmoins pertinente. En fait, le tuteur travaille énormément au début de sa mission. Par la suite, la charge de travail diminue.

    Il y a des limites naturelles à la relation de confiance: différences culturelles, motivations ... Les mineurs attendent des résultats de leur tuteur en termes de titre de séjour. La confiance est aussi liée aux résultats.

    Son service est parfois interpellé par un centre au sujet d'un mineur qui n'a jamais vu son tuteur. Le mineur a besoin d'une présence, d'un soutien. Il a besoin de comprendre ce qui lui arrive. Pour instaurer une relation de confiance, il faut développer une activité qui réponde aux besoins. Outre le titre de séjour, il y a l'école, la recherche de la famille, etc.

    Pour certains mineurs, la charge de travail est plus importante. Il n'y a pas vraiment de règle. Cela dépend de la situation. Les tuteurs qui ne sont pas assez présents ne sont pas nécessairement ceux qui sont chargés du plus grand nombre de cas. Certains tuteurs ne sont tout simplement pas conscients de l'impact qu'ils peuvent avoir sur le mineur. D'autres restent en retrait et s'en remettent aux centres d'hébergement de la Communauté française, qui fournissent une aide spécialisée et suivent le mineur au quotidien. Mais il se peut que le mineur ait des demandes d'ordre affectif. À son avis, il ne faut pas aller au-delà de vingt-cinq, trente tutelles.

    Quant au nombre de candidats-tuteurs, son service recoit encore deux, trois candidatures par mois, néerlandophones et francophones confondus. On observe effectivement un ralentissement. Il y a actuellement un afflux d'Afghans et d'Algériens et il faudrait peut être à nouveau sensibiliser pour susciter davantage de candidatures. Mais il n'est pas question d'un manque de tuteurs. Il y a eu 416 agréments; 230 personnes sont disponibles, parmi lesquelles 170 ont des tutelles en cours. Il y a donc une certaine marge.

    M. Moureaux constate qu'il y a une vingtaine de personnes dont c'est devenu la profession. Leur disponibilité est beaucoup plus grande puisqu'ils sont normalement à pied d'œuvre cinq jours par semaine. Il imagine que ce sont précisement ces personnes qui exercent une trentaine de tutelles.

    M. Georis réplique qu'il y a également des retraités, sous statut d'indépendant, qui sont disponibles à temps plein.

    M. Moureaux s'interroge sur les barrières de langues. Comment le service des Tutelles gère-t-il cela ?

    M. Georis signale que les dispositions légales prévoient la prise en charge des interprètespar le service. Cela fait partie du soutien administratif et du soutien aux tuteurs. Il existe une liste à jour d'interprètes prêts à intervenir. Même pour les langues parlées en Afghanistan, son service dispose actuellement de suffisamment d'interprètes, malgré des débuts difficiles.

    M. Collas rappelle que selon M. Bontinck, il serait parfois difficile de joindre le service des Tutelles, ce qui est en contradiction avec les dires du représentant du service des tutelles qui signalait être disponible vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Qu'en est-il ?

    Par ailleurs, on a parlé de tuteurs francophones et néerlandophones. N'y a-t-il pas de mineurs non accompagnés en Communauté germanophone ?

    M. Georis répond que cela ne veut pas dire qu'on n'a pas de tuteurs parlant l'allemand. Il est un fait qu'il est plus facile d'atteindre le service des Tutelles pendant les heures de bureau. À partir de dix-huit heures, l'agent du service des Tutelles exerce une garde à domicile. Il possède un portable qui le relie à la base de données et un GSM. Il est joignable, avec une certaine marge de réaction. Il faut savoir qu'aucun centre d'accueil n'accepte d'accueillir des mineurs après 21 heures. De son point de vue, il est donc inutile d'organiser le transport au-delà de 22 heures. Il y a une série de centres d'hébergement, principalement les centres d'orientation et d'observation de l'Agence pour l'accueil des demandeurs d'asile, situés à Neder-over-Hembeek et à Steenokkerzeel. Il y a aussi les associations d'aide en milieu ouvert de la Communauté française — SOS Jeunes ou Synergie 14, par exemple — qui permettent de répondre à l'urgence.

    Mais, après une certaine heure, toutes les portes sont fermées. Par conséquent, au-delà de 22 heures, le service des Tutelles postpose sa réaction à six heures du matin. Il reprend alors une garde active pour le suivi des dossiers, y compris l'organisation des transports vers les centres d'hébergement.

    Il arrive que des policiers téléphonent au milieu de la nuit, non pas pour faire un signalement mais pour simplement s'informer du fonctionnement du service. Pour les urgences, le service des Tutelles assure une garde à domicile jusqu'à 22 heures. Au-delà, il n'y a pas de solution pratique pour l'exercice de ses compétences.

    Mme Jansegers souhaite savoir combien de personnes travaillent exactement au service des Tutelles.

    Elle ne comprend toujours pas si la tutelle est exercée sur une base volontaire ou non.

    Enfin, elle voudrait savoir comment les tuteurs sont indemnisés. Le sont-ils au début de la tutelle ? Par tranches ? En fin d'année ? L'indemnité doit-elle être remboursée en cas de retrait de l'agrément ?

    M. Georis déclare que le service des Tutelles est composé de vingt-quatre personnes. Il y a quatre juristes, deux licenciés en sciences sociales et huit assistants sociaux. Six personnes travaillent au cadre administratif. Il y a aussi quatre chauffeurs. Le personnel est grosso modo paritaire sur le plan linguistique.

    Le service possède une cellule de prise en charge composée des quatre chauffeurs, deux assistants experts administratifs et deux experts sociaux, un francophone et un néerlandophone.. Six experts assurent le suivi des tuteurs. L'adhésion d'un mineur à la tutelle demande un travail spécifique. C'est la raison pour laquelle, en 2008, le service des Tutelles a organisé une formation destinée à sensibiliser, éclairer et informer les tuteurs sur la manière d'approcher les mineurs en tenant compte de différences culturelles et de motivations parfois négatives.

    Il faut prendre toute une série d'éléments en considération pour établir une relation de confiance avec un mineur. Il a été demandé à l'association Solentra, attachée à l'ULB et spécialisée dans ce type d'approche, de dispenser aux tuteurs une formation de cinq jours à l'approche des mineurs.

    Tous les mineurs n'adhèrent pas à la tutelle, loin de là. La phase de prise en charge et la recherche d'un hébergement illustrent les difficultés.

    M. Bontinck a expliqué qu'un mineur membre d'un réseau ou ayant un objectif particulier ne dit pas d'emblée ce qu'il veut, où il va et quels sont les enjeux de sa migration. Il sera très difficile de le stabiliser entre le signalement et l'hébergement. Le service des tutelles a acquis une certaine expérience mais il n'est pas toujours facile de stabiliser un mineur.

    Parmi les 170 tuteurs actuellement actifs, une vingtaine est employée par l'association et perçoit un salaire. Les autres, qui sont indépendants, sont indemnisés à raison d'environ 580 euros par tutelle, auxquels s'ajoutent 85 euros pour frais administratifs et, éventuellement, des frais de déplacement.

    Mme Lijnen demande ce qu'il advient des jeunes après 22 h, lorsque l'on ne peut plus leur proposer d'accueil.

    M. Georgis affirme que s'il est interpellé après 21 heures, il devra passer la nuit au poste de police, sauf s'il s'agit d'un enfant en bas âge.

    M. Moureaux se dit inquièt face à ce grave problème. Les policiers ne savent pas toujours que faire d'un mineur interpellé dans la rue. À Molenbeek, l'on a même affaire à des enfants que personne ne vient chercher à la sortie des classes. Quand on ne parvient pas à joindre un membre de la famille, la police est le dernier recours. Le chef de corps de sa zone a souvent dit qu'il faudrait disposer d'une alternative pour accueillir des mineurs, quelle que soit leur origine.

    Les chiffres relatifs aux Afghans montrent que nous sommes face à un problème spécifique. Et, en lisant les journaux, on ne peut se défaire de l'impression que cela va durer encore un certain temps car la situation en Afghanistan ne s'améliore pas. Une partie de ces personnes ont le mirage de l'Angleterre et ne sont qu'en transit. Mais que faire des autres ? L'Afghanistan étant toujours en guerre, nous ne pouvons pas les renvoyer chez eux. Quand il s'agit de certaines personnes, l'Office des étrangers délivre des ordres de quitter le territoire non exécutables, ce qui suscite l'émoi des services de police ... Comment va évoluer le dossier afghan ?

    Mme Renée Raymaekers constate que l'Europe toute entière assiste effectivement à un afflux d'Afghans, qu'il s'agisse d'adultes ou de mineurs non accompagnés. Ces personnes peuvent demander l'asile ou la protection subsidiaire et bon nombre utilisent cette faculté.

    M. Moureaux demande si ces personnes sont encore animées par une farouche volonté de gagner l'Angleterre ou si elles sont à présent prêtes à s'installer dans d'autres pays européens.

    Mme Raymaekers déclare que beaucoup de mineurs non accompagnés afghans restent en Belgique. Leur première idée est peut être d'aller en Angleterre mais à partir du moment où l'Office des Étrangers leur proposons une tutelle et d'autres « avantages », ils comprennent vite qu'ils est préférable pour eux de rester en Belgique.

    M. Moureaux estime que ce dossier est très délicat. Il y a quelques années, une église était en réfection au cœur de la commune de Molenbeek. Un groupe d'Afghans logeait dans la rue et grimpait sur les échafaudages pendant la nuit. La commune a consulté le ministre de l'Intérieur, l'Office, etc. Finalement, elle a quand même obtenu une intervention. Ces personnes étaient visiblement en transit, leur but étant de se rendre en Angleterre. L'affaire de Calais montre que le mirage de l'Angleterre est encore vivace mais au vu de l'explosion, l'on peut demander si le phénomène n'est pas en train de devenir tout à fait européen.

    Mme Anne-Françoise Beguin, représentante de la plate-forme Mineurs en exil, signale que dans l'intérêt des jeunes, la plate-forme plaide en faveur de la désignation d'un tuteur provisoire pendant la phase d'identification. Il est souhaitable que les jeunes soient considérés comme mineurs et non comme majeurs jusqu'à la clôture de l'identification. D'autres éléments que le test osseux — l'intime conviction ou, éventuellement, des tests psychoaffectifs — devraient être pris en compte pour déterminer l'âge du jeune.

    L'intervenante insiste pour que la détermination de l'âge et la pratique du test osseux restent une compétence exclusive du service des Tutelles. Actuellement, au niveau de Fedasil entre autres, certains tests osseux sont confiés à d'autres instances.

    Mme Anne Graindorge, représentante de la plate-forme Mineurs en exil, constate qu'à cet égard, il existe deux problèmes. Depuis un certain temps, des tests se font régulièrement par le parquet. Des jeunes arrêtés par la police sont renvoyés devant le parquet alors qu'ils sont déjà identifiés par le service des Tutelles. Le simple test d'âge du parquet peut contredire le triple test du service des Tutelles. Des jeunes reconnus comme étant des mineurs étrangers non accompagnés sont emprisonnés à la suite d'un test d'âge fait par le parquet les reconnaissant comme étant majeurs.

    Depuis la crise de l'accueil et le manque de places, l'on a constaté la création de sections de transit pour des mineurs étrangers non accompagnés au sein de centres destinés aux majeurs et la réalisation par Fedasil de tests simples d'âge pour des jeunes se déclarant mineurs mais proches de la majorité et qui, en fonction de ce premier test, sont renvoyés ou non en premier accueil. La plate-forme est assez inquiète par rapport à l'élargissement de ces pratiques problématiques. Les triples tests sont déjà très critiquables. La nécessité d'un système d'identification pour déterminer qui est mineur est parfaitement compréhensible mais même la méthode du triple test est scientifiquement contestée. Dans les deux sens, on obtient des contradictions avérées: un jeune déclaré mineur est en réalité majeur ou le contraire. L'on atteint les limites de la science. Les indices utilisés sont tous affectés par des marges d'erreur. Par conséquent, l'intervenante insiste pour que les garanties légales soient respectées.

    M. Moureaux estime qu'il est délicat de se prononcer sur la qualité scientifique des tests. Pour cela, il faudrait entendre des médecins ou des spécialistes. Mais, force est de constater qu'il est impossible d'empêcher le parquet de faire sa propre vérification. En cette matière, ses pouvoirs sont très larges. S'il y a des contradictions, c'est tout à fait regrettable mais la justice ne peut être bridée. Elle doit faire son travail. La justice pourrait se référer aux tests pratiqués par le service des Tutelles. Si elle estime opportun d'en faire un autre ... C'est une expertise décidée par une autorité judiciaire, comme bien d'autres expertises.

    Mme Graindorge réplique que sur le terrain, il est interpellant de constater que deux services qui dépendent du ministre de la Justice ont des pratiques différentes en termes d'identification. Cela a des conséquences très importantes pour le jeune. Une autorité le déclare mineur, l'autre majeur. Le tuteur ne peut pas représenter correctement un jeune qui est en prison et déclaré majeur tout en étant reconnu par d'autres comme étant mineur.

    M. Marc Thysebaert du service des Tutelles du SPF Justice, déclare être conscient du fait que deux méthodes différentes sont utilisées actuellement pour identifier des mineurs. Dans le cadre de la coordination concernant la problématique des mineurs étrangers non accompagnés, le service des Tutelles a régulièrement des contacts avec les différents services publics et avec la magistrature dans le but de tendre vers une certaine cohérence. Il attend les résultats de cette concertation.

    Lorsqu'il y a un doute sur l'âge du mineur étranger non accompagné, le service des Tutelles procède d'abord à un examen médical portant sur trois paramètres: le poignet, la dentition et la clavicule. En fonction du rapport établi par le médecin spécialiste, le service des Tutelles procède à une estimation de l'âge présumé. Cette estimation constitue une indication pour le service, mais certainement pas le seul élément ou l'élément décisif dans la prise de décision. Si un mineur déclare lui-même être mineur et qu'il est signalé comme tel, mais que l'examen médical révèle qu'il est majeur, le service des Tutelles suit le résultat de l'examen médical, sauf si d'autres éléments du dossier contredisent ce résultat. Dans le cas contraire, le service prend en compte tous les éléments du dossier. Il peut s'agir de la déclaration de l'intéressé, des constatations des collaborateurs du service, des constatations éventuelles des personnes ayant accompagné le jeune dans un centre ouvert ou en tant que tuteur, ou tout autre document que le MENA peut avoir sur lui. Le service des Tutelles essaie d'avoir une vision cohérente sur la base de tous ces éléments.

    Le service ne disposant pas de spécialistes ad hoc, il transmet ces documents à la police fédérale pour vérifier si ceux-ci n'ont pas été falsifiés. Si nécessaire, il les transmet également au SPF Affaires étrangères en vue de contrôler la conformité avec les usages locaux dans le cadre du Code de droit international privé. Cela demande un peu de temps, car les documents doivent être envoyés aux postes diplomatiques, lesquels sont parfois amenés à désigner des experts sur place qui doivent alors ouvrir une enquête. Il se passe parfois des mois avant que le service des Tutelles obtienne une réponse.

    Lorsque l'identification n'est pas terminée, on désigne parfois un tuteur provisoire. Le fonctionnement de ce système de tutelle provisoire est loin de satisfaire tout le monde actuellement et fait donc l'objet de discussions. Le service des Tutelles est en train d'évaluer la loi en question qui est en vigueur depuis près de cinq ans. Le but de cette évaluation est d'examiner si le système doit être adapté ou éventuellement supprimé.

    Dès que le service des Tutelles dispose de tous les éléments d'un dossier, il prend une décision sur l'âge de l'étranger concerné. Cette décision peut s'écarter du résultat de l'examen médical, mais dans certaines limites. Par exemple, si l'examen médical révèle que le MENA a certainement plus de 21 ou de 22 ans mais que ses documents indiquent qu'il a 14 ou 15 ans, le service des Tutelles n'acceptera pas une telle différence. À l'heure actuelle, on applique une marge d'appréciation de deux ans de moins dans l'intérêt du mineur. L'intervenant estime que cela répond aux inquiétudes de certaines personnes.

    Enfin, l'intervenant décrit brièvement les projets du service des Tutelles dans le cadre de l'évaluation de la loi. Il est question d'étendre le champ d'application de la loi aux mineurs vulnérables, aux mineurs provenant d'autres pays de l'Espace économique européen et aux mineurs clandestins sur des navires. Le service des Tutelles souhaite également un statut plus clair pour les tuteurs, principalement en matière de formation, de secret professionnel et de déontologie. À ce propos, on songe à une commission chargée d'examiner les problèmes déontologiques et de trancher les litiges à cet égard, ainsi qu'à une sorte de commission consultative comprenant des représentants des tuteurs organisés professionnellement et des tuteurs travaillant de manière individuelle. Cette commission serait chargée d'aider les autorités.

    Ensuite, il convient de clarifier la procédure d'identification appliquée actuellement ainsi que le statut du tuteur provisoire. Le service des Tutelles espère qu'un texte sera prêt d'ici la fin de l'année, après quoi une large consultation sera menée avec l'ensemble des acteurs de terrain.


    V. DISCUSSION ET VOTE DE LA RESOLUTION


    A. Les Considérants

    Point I

    Amendement nº 1

    Mme Lanjri dépose un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) visant à compléter le point I proposé des considérants par la phrase: « Même lorsque le mineur étranger non accompagné est en possession d'un passeport national, un certificat d'inscription au registre des étrangers n'est pas toujours délivré, notamment lorsqu'un des deux parents est connu. ».

    Mme Lanjri observe que depuis que la proposition de résolution 4-875 relative à la protection du mineur étranger non accompagné a été déposée le 14 juillet 2008, certains changements sont apparus dans la pratique quotidienne.

    Ainsi, l'Office des étrangers refuse de plus en plus souvent de délivrer un certificat d'inscription au registre des étrangers (CIRÉ) lorsque l'un des deux parents est connu. Il est important de mentionner cette pratique de l'Office des étrangers dans la résolution parce qu'elle est le reflet d'un usage devenu courant. Il est néanmoins à craindre que cette pratique remette en cause le principe de la circulaire du 15 septembre 2005 réglant la protection du MENA.

    L'amendement nº 1 est adopté par 10 voix contre 2.

    Point J

    Amendement nº 2

    Mme Lanjri dépose un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) visant à supprimer le point J proposé des considérants.

    L'auteur de l'amendement fait valoir qu'en raison des changements intervenus depuis le dépôt de la proposition de résolution 4-875, tous les mineurs étrangers non accompagnés peuvent désormais souscrire gratuitement une assurance maladie, à condition qu'ils aient été scolarisés pendant trois mois en Belgique. Ce régime s'applique également aux personnes à charge du mineur étranger non accompagné. En outre, la circulaire du Service du contrôle administratif de l'INAMI concernant les attestations que le mineur étranger non accompagné doit présenter à la mutualité en vue de son inscription a entre-temps également été publiée. Le considérant J de la proposition de résolution est donc devenu superflu.

    L'amendement nº 2 est adopté à l'unanimité des 12 membres présents.


    B. Le dispositif

    Point 1

    Amendement nº 3

    Mme Lanjri et consorts déposent un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) visant à ajouter la phrase suivante au point 1 proposé, après la deuxième phrase: « Il conviendra de créer un cadre juridique à cette fin. ».

    Mme Lanjri estime que depuis que la proposition de résolution 4-875 relative à la protection du mineur étranger non accompagné a été déposée le 14 juillet 2008, certains changements sont apparus dans la pratique quotidienne. Ainsi, l'Office des étrangers prend désormais les empreintes digitales de tous les MENA, qu'ils soient ou non demandeurs d'asile. Mais, il faudrait que ces empreintes digitales soient enregistrées dans la banque de données centralisée demandée. Il conviendra d'asseoir ce principe sur une base juridique.

    L'amendement nº 3 est adopté par 9 voix et 3 abstentions.

    Point 2

    Amendement nº 11

    Mme Matz dépose un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) qui tend, dans le point 2 proposé, à remplacer les mots « de donner suite aux recommandations ... » par les mots « de s'inspirer des recommandations ». D'autre part, cet amendement vise à compléter la dernière phrase du point 2 proposé, par les mots suivants: « en évitant tout enfermement de ceux-ci ».

    L'amendement nº 11 est adopté par 10 voix et 2 abstentions.

    Point 5bis (nouveau)

    Amendement nº 6

    Mmes Somers et Lijnen déposent un amendement visant à insérer un point 5bis, nouveau, mettant l'accent sur la nécessité de procéder à une évaluation approfondie de la loi actuelle sur la tutelle.

    Les auteurs observent qu'il est apparu, lors des auditions, que plusieurs acteurs plaidaient en faveur d'une évaluation de la loi sur la tutelle.

    L'amendement nº 6 est adopté à l'unanimité des 12 membres présents.

    Point 7

    Amendement nº 7

    Mmes Somers et Lijnen déposent un amendement visant à compléter le point 7 proposé, in fine, par la phrase suivante: « De chercher en même temps, par la voie bilatérale, une solution structurelle à la problématique des mineurs étrangers européens non accompagnés. »

    Mme Somers observe que la loi sur la tutelle n'est pas l'instrument juridique adéquat pour apporter une solution au problème des mineurs étrangers non accompagnés originaires d'États membres de l'Union européenne. Cette loi vise en premier lieu à offrir une protection aux mineurs étrangers non accompagnés originaires de pays non membres de l'Union européenne. Il importe de maintenir cette distinction.

    L'amendement nº 7 est adopté à l'unanimité des 12 membres présents.

    Point 8

    Amendement nº 10

    M. Moureaux dépose un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) qui tend à remplacer la 3e phrase du point 8 proposé par ce qui suit: « Il serait hautement souhaitable que l'Office des Étrangers soit à chaque fois contraint de motiver de façon circonstanciée la raison pour laquelle une annexe 38 a été délivrée. ». Cet amendement vise en outre à supprimer la dernière phrase du point 8 proposé.

    Amendement nº 8

    Mmes Somers et Lijnen et consorts déposent un amendement n 8 (doc. Sénat, n 4-875/2) visant à supprimer les deux dernières phrases du point 8 proposé.

    L'amendement nº 10 est adopté par 10 voix et 2 abstentions.

    À la suite de l'adoption de l'amendement nº 10, l'amendement nº 8 devient sans objet.

    Point 9

    Amendement nº 4

    Mme Lanjri dépose un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) visant à compléter le point 9 proposé par ce qui suit: « et de veiller à ce que le mineur étranger non accompagné bénéficie en permanence d'une entière protection conformément à la circulaire du 15 septembre 2005 relative au séjour des mineurs étrangers non accompagnés ».

    Mme Lanjri signale que l'Office des étrangers refuse de plus en plus souvent de délivrer un certificat d'inscription au registre des étrangers (CIRÉ) lorsque l'un des deux parents est connu. Il importe de ne pas remettre en cause la protection du MENA définie par la circulaire du 15 septembre 2005.

    L'amendement nº 4 est adopté par 10 voix et 2 abstentions.

    Amendement nº 9

    Mmes Somers et Lijnen déposent un amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 4-875/2) visant à compléter le point 9 proposé par ce qui suit: « , en veillant, le cas échéant, à ne pas ouvrir la porte aux abus. ».

    Les auteurs font remarquer qu'un assouplissement de la formalité administrative exigeant la présentation d'un passeport national pour obtenir un permis de séjour n'est pas sans risque et pourrait entraîner des abus comme celui d'indiquer un âge erroné. Ce n'est pas toujours dans l'intérêt de l'intéressé: des problèmes peuvent survenir ultérieurement s'il s'avère que celui-ci a menti.

    L'amendement nº 4 est adopté par 11 voix et 1 abstention.

    Point 10

    Amendement nº 5

    Mme Lanjri dépose un amendement (doc. Sénat, nº 4-875/2) visant à supprimer le point 10 proposé.

    L'auteur de l'amendement fait valoir qu'en raison des changements intervenus depuis le dépôt de la proposition de résolution 4-875, tous les mineurs étrangers non accompagnés peuvent désormais souscrire gratuitement une assurance maladie, à condition qu'ils aient été scolarisés pendant trois mois en Belgique. Ce régime s'applique également aux personnes à charge du mineur étranger non accompagné. En outre, la circulaire du Service du contrôle administratif de l'INAMI concernant les attestations que le mineur étranger non accompagné doit présenter à la mutualité en vue de son inscription a entre-temps également été publiée. Le point 10 de la proposition de résolution est donc devenu superflu.

    Cet amendement est adopté à l'unanimité des 12 membres présents.


    VI. VOTES FINAUX

    L'ensemble de la proposition de résolution ainsi amendée a été adopté par 10 voix et 2 abstentions.


    Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 10 membres présents.

    La rapporteuse, Le président,
    Caroline DÉSIR. Philippe MOUREAUX.

    ANNEXES


    Annexe 1

    Aperçu statistique

    Nationaliteiten — Nationalités 2005 2006 2007 2008 2009
    1 Afghanistan 87 93 152 356 392
    2 Algerije. — Algérie 88 97 71 111 198
    3 Marokko. — Maroc 109 101 125 124 129
    4 Guinee. — Guinée 93 61 68 134 104
    5 India. — Inde 106 71 123 263 69
    6 Congo 106 109 96 70 66
    7 Irak 113 64 77 119 58
    8 Servië. — Serbie 23 49 46 51 52
    9 Palestina. — Palestine 38 33 37 45 41
    10 Joegoslavië. — Yougoslavie 146 156 103 51 39
    11 Roemenië. — Roumanie 202 213 66 34 31
    12 Kroatië. — Croatie 23 29 30 22 27
    13 Angola 47 43 33 27 19
    14 Bosnië-Herzegovina. — Bosnie-Herzégovine 11 7 22 28 18
    15 Kosovo 1 2 2 14 17
    16 Somalië. — Somalie 55 20 7 22 14
    17 Brazilië. — Brésil 11 12 18 4 13
    18 Rusland. — Russie 20 23 31 32 13
    19 Rwanda 92 42 33 16 13
    20 Kameroen. — Cameroun 50 36 26 37 12

    Annexe 2

    Suivi des tuteurs: liste

    Kinderen onder voogdij per voogd —  Tutelles exercées FR Kinderen onder voogdij —  Tutelles NL Kinderen onder voogdij —  Tutelles
    1 tot/à 5 45 87 56 103
    6 tot/à 10 11 96 10 69
    11 tot/à 15 12 149 4 44
    16 tot/à 20 4 71 2 36
    21 tot/à 25 5 115 5 113
    26 tot/à 30 4 111 1 29
    > 30 3 112 9 365
    Totaal voogden/kinderen onder voogdij. — Total tuteurs/tutelles 84 741 87 759
    Totaal voogden. — Total tuteurs 171
    Totaal werknemers. — Total employés 20 werknemers — 20 employés/500 kinderen onder voogdij — 500 tutelles
    Totaal actieve voogden. — Total tuteurs actifs 125+103=228
    Totaal erkenden. — Total agréés 416

    Source: SPF Justice — Service des Tutelles.