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6 JANVIER 2010
Ces derniers mois, la Régie des Bâtiments a été la cible de plaintes et de critiques. Selon plusieurs audits (de la Cour des comptes, entre autres), la quasi-totalité des travaux coordonnés par la Régie des Bâtiments ont accumulé du retard. Mais la Cour des comptes fait également état de dépassements budgétaires systématiques. C'est notamment le cas dans le dossier du dérapage du coût du palais de justice d'Anvers. La Régie des Bâtiments avait évalué ce coût à 75 millions d'euros. À l'achèvement des travaux, la facture dépassait 250 millions d'euros. Rien n'a été fait pour combattre la surfacturation des bureaux d'études, des architectes et des entrepreneurs, si bien qu'au final, la différence de 175 millions d'euros n'a plus pu être récupérée. Le coût exorbitant des chantiers serait dû à un système de corruption profondément enraciné.
L'enquête relative à la fraude et à la corruption au sein de la Régie des Bâtiments débutée en 2006 à Bruxelles s'est, depuis lors, étendue à Louvain. Mais entre-temps, des instructions sont déjà en cours aux parquets de Bruges, de Gand, de Malines et d'Anvers.
Il y a trois ans, une enquête a été ouverte au sujet de la section bruxelloise de la Régie des Bâtiments. Une dizaine de fonctionnaires et une vingtaine d'entrepreneurs étaient impliqués. L'un des projets examinés était la Tour des Finances, où l'opération de sale-and-lease-back a rapporté un confortable pécule à plusieurs fonctionnaires. La rénovation du palais de justice de Bruxelles aurait également été citée dans cette affaire de corruption.
Et en 2008, cinq entrepreneurs et deux fonctionnaires de la Régie des Bâtiments, direction provinciale du Brabant flamand à Louvain, ont reconnu avoir commis des fraudes pendant plusieurs années, leur permettant de prélever systématiquement cinq à dix pour cent des contrats pour leur propre compte. Les fonctionnaires ont été soudoyés par les cinq entrepreneurs qui engrangeaient les marchés publics. Les fonctionnaires ont dès lors été inculpés des chefs de corruption passive, de falsification de factures et d'offres et « d'entrave à la liberté des enchères et des soumissions ».
Au total, une cinquantaine de fonctionnaires ont d'ores et déjà été mis en cause. Le scandale ne concerne pas toujours des ouvrages gigantesques: il s'agit également de travaux de maintenance plus modestes et de dessous-de-table plus modiques. Il est de plus en plus clair que la corruption était plus étendue que ce que l'on croyait initialement. Il ne s'agit pas de quelques cas isolés mais d'un système.
C'est pourquoi il serait utile d'instituer, au Sénat, une commission d'enquête parlementaire. En effet, mener une politique de lutte contre la corruption ne se borne pas à attendre que la justice appréhende et condamne le contrevenant. Il incombe à tous les pouvoirs, y compris au pouvoir législatif, de placer les services publics devant leurs responsabilités. La mission ultime de cette commission d'enquête sera de formuler une série de recommandations visant à tuer dans l'œuf toute forme de corruption au sein de la Régie des Bâtiments et à améliorer le fonctionnement de celle-ci.
| Jurgen CEDER. Yves BUYSSE. Hugo COVELIERS. Nele JANSEGERS. Anke VAN DERMEERSCH. Freddy VAN GAEVER. Joris VAN HAUTHEM. Karim VAN OVERMEIRE. |
Article 1er
Il est institué une commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner le fonctionnement de la Régie des Bâtiments et la corruption qui y régnerait.
La commission d'enquête a plus particulièrement pour mission:
1. d'enquêter sur les nombreux retards dans des travaux coordonnés par la Régie des Bâtiments, ainsi que sur leurs causes;
2. d'examiner les dépassements budgétaires systématiques de la Régie des Bâtiments ainsi que leurs causes;
3. d'examiner les circonstances et les anomalies qui font qu'il est possible de ne pas respecter les procédures légales d'adjudication;
4. d'examiner quels sont les codes et règles déontologiques utilisés par les fonctionnaires de la Régie des Bâtiments et s'il est possible d'améliorer cette déontologie;
5. d'établir la responsabilité politique concernant les dérives au sein de la Régie des Bâtiments.
Art. 2
La commission se compose de neuf membres que le Sénat désigne en son sein, conformément à la règle de la représentation proportionnelle des groupes politiques.
Art. 3
La commission est investie de tous les pouvoirs prévus par la loi du 3 mai 1880 sur les enquêtes parlementaires. Elle peut se faire assister par la Cour des comptes pour accomplir toutes ses missions.
Art. 4
Les réunions de la commission sont publiques. La commission peut toutefois en décider autrement à tout moment.
Art. 5
La commission peut, dans les limites du budget fixé par le bureau du Sénat, prendre toutes les mesures utiles afin de mener son enquête d'une manière experte.
À cet effet, elle peut faire appel à des spécialistes, le cas échéant, dans le cadre d'un contrat de travail ou d'entreprise. La durée de ces contrats ne peut excéder celle des travaux de la commission d'enquête.
Art. 6
La commission fera rapport sur ses travaux au Sénat dans les trois mois qui suivent son installation, à moins que celui-ci n'autorise la prolongation de ses travaux.
16 décembre 2009.
| Jurgen CEDER. Yves BUYSSE. Hugo COVELIERS. Nele JANSEGERS. Anke VAN DERMEERSCH. Freddy VAN GAEVER. Joris VAN HAUTHEM. Karim VAN OVERMEIRE. |