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4 MAI 2009
Aux termes de l'article 10, alinéa 2, deuxième membre de phrase, de la Constitution, seuls les Belges sont admissibles aux emplois civils et militaires, sauf les exceptions qui peuvent être établies par une loi pour des cas particuliers. La présente proposition entend favoriser le recrutement de non-Belges dans la fonction publique. En effet, dans plusieurs avis, le Conseil d'État a déjà indiqué que seules les personnes de nationalité belge pouvaient accéder à la fonction publique. Or, si la restriction précitée a été formulée à plusieurs reprises par ledit Conseil, c'est précisément parce que les pouvoirs législatif et exécutif ont, comme le montre la pratique, manifesté l'intention d'ouvrir la fonction publique aux non-Belges (1) , ces initiatives ayant cependant toujours buté sur l'article 10 de la Constitution.
La présente révision de l'article 10 vise à ouvrir la nomination aux emplois civils à quiconque est régulièrement établi en Belgique, certains emplois civils pouvant être réservés aux ressortissants belges par voie légale ou par voie de décret ou d'ordonnance. En l'espèce, nous pensons par exemple aux fonctions relatives à l'exercice de l'autorité publique, aux emplois à la Sûreté de l'État, etc. Les emplois militaires demeurent néanmoins réservés aux personnes de nationalité belge.
L'article 10 de la Constitution n'est plus adapté à la réalité juridique et sociale. Sur le plan juridique, la condition de la nationalité belge pour l'admission aux emplois publics connaît déjà une exception: conformément à l'article 48, alinéa 4, du Traité CE, les États membres peuvent, par le biais de mesures appropriées, réserver à leurs propres ressortissants l'accès à des fonctions qui, dans une carrière, un service ou un groupe déterminé, comportent une participation à l'exercice de la puissance publique ou la responsabilité de la sauvegarde d'intérêts généraux de l'État. La Cour de justice européenne estime que l'on ne peut déduire de l'interprétation de cet article que les ressortissants étrangers sont exclus d'une façon générale des emplois publics, étant donné que la limitation de leurs droits qui en résulterait irait bien au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser les objectifs visés par cette disposition (2) .
Sur le plan social, l'intégration de Belges allochtones, de citoyens possédant la nationalité d'un des autres États membres et de citoyens possédant une nationalité hors Union européenne revêt une valeur importante. L'auteur est convaincue qu'une société de valeur ne peut voir le jour que lorsqu'il est mis un terme au racisme, à l'intolérance et à la discrimination. L'inscription de l'égalité dans la Constitution en est la meilleure garantie.
Les services publics occupent 9 à 11 % des ressortissants belges, alors que l'on ne retrouve que 3 % de l'ensemble des citoyens non européens dans l'enseignement et 1 % dans l'administration publique (3) . Il ressort d'une réponse fournie par la ministre de la Fonction publique à une question orale posée par l'auteur (4) que, parmi les 80 000 fonctionnaires fédéraux, 247 sont de nationalité européenne non belge, soit 0,3 %, alors que ces ressortissants représentent 6,5 % de la population. Il n'y a évidemment pas de fonctionnaire de nationalité non européenne.
Pour toutes ces raisons juridiques et sociales, l'auteur estime que le temps est venu d'adapter l'article de la Constitution, de sorte que des ressortissants de pays extérieurs à l'Union européenne puissent être employés au sein de la fonction publique. L'accès aux non-Belges ressortissant d'un État membre de l'Union européenne est, bien entendu, également garanti.
L'auteur tient enfin à souligner que l'objectif ne peut être de discriminer positivement certaines catégories. La barre est placée au même niveau pour tous. Il est toutefois recommandé d'établir, dans le secteur public — comme dans le secteur privé —, des plans de diversité, en vue de promouvoir l'arrivée de travailleurs issus de groupes sous-représentés. Ces plans de diversité prévoient notamment des objectifs concrets (à ne pas confondre avec des quotas), un calendrier et des actions visant à diversifier la politique du personnel. À titre d'exemples d'actions, citons la publication ciblée de vacances d'emplois, la préparation spécifique à la demande d'emploi par le biais de formations adaptées et de séances d'information personnalisées, l'incitation à la participation à des formations et à des épreuves de sélection de la fonction publique.
Nahima LANJRI. Wouter BEKE. Dirk CLAES. Sabine de BETHUNE. Yves LETERME. |
Article unique
À l'article 10, alinéa 2, de la Constitution, le membre de phrase « ; seuls ils sont admissibles aux emplois civils et militaires, sauf les exceptions qui peuvent être établies par une loi pour des cas particuliers. » est remplacé par les deux phrases suivantes: « . La loi, le décret ou la règle visés à l'article 134 fixent les emplois civils auxquels eux seuls peuvent être admissibles. Seuls les Belges sont admissibles aux emplois militaires. ».
19 juillet 2007.
Nahima LANJRI. Wouter BEKE. Dirk CLAES. Sabine de BETHUNE. Yves LETERME. |
(1) On citera l'exemple de l'accès aux emplois militaires proposé par le ministre de la Défense dans le projet de loi relatif au recrutement des militaires et au statut des musiciens militaires et modifiant diverses lois applicables au personnel de la Défense (Doc. Parl. Chambre DOC 50 2185/001).
(2) Cour de Justice, 17 décembre 1980, Commission/Belgique, Jur. 1980, (3881), p. 3904, considérants 21 et 22.
(3) Herremans, W. Tielens, M., Van Gils, S. Creativiteit en solidariteit meer dan ooit nodig. Uitdadingen voor het toekomstig werkgelegenheidsbeleid, Louvain, Steunpunt WAV, 2003.
(4) Chambre CRIV 51 COM 134, 21 janvier 2004, 4 (question no 1199 Nahima Lanjri).