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M. le président. - M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État au Budget, adjoint au premier ministre, et secrétaire d'État à la Politique des familles, adjoint à la ministre de l'Emploi, et en ce qui concerne les aspects du droit des personnes et de la famille, adjoint au ministre de la Justice, répondra.
M. Philippe Monfils (MR). - À la suite d'affaires criminelles dramatiques, de nombreux débats ont eu lieu au sujet de l'internement. Des psychiatres ont d'ailleurs émis des positions divergentes, notamment à propos de la possibilité de vérifier si une personne était en état de démence ou dans un état grave de déséquilibre mental ou de débilité mentale, la rendant incapable du contrôle de ses actions. On l'a vu notamment dans l'affaire Lhermitte.
L'opinion publique peut à juste titre avoir l'impression que l'internement, au lieu d'être motivé par des faits concrets, est parfois une manière d'échapper à la sanction judiciaire. Cette impression peut aussi être renforcée par la discrétion - c'est un euphémisme - qui entoure l'internement pour crimes et délits. J'ai moi-même essayé d'en savoir plus mais je n'ai trouvé que des statistiques d'un simplisme éhonté.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais avoir des informations précises sur cette problématique.
Je souhaite vous interroger sur le nombre d'inculpés ou de condamnés pour crimes et délits qui sont actuellement internés. Quelle est la durée de leur internement ?
Y a-t-il eu depuis ces internements des libérations à l'essai ? Après quelle période d'internement ?
Des libérations définitives ont-elles eu lieu et après quelle période d'internement ?
Certes, l'internement n'est pas une peine puisqu'il est motivé par des raisons médicales et que l'intéressé peut être guéri mais il est normal que l'on vérifie le sérieux de l'application des lois de défense sociale. Nous devons nous assurer que le traitement et la libération éventuelle prennent en considération tous les paramètres - surtout le risque de dangerosité ou de récidive de l'interné - et que l'application de la loi ne souffre d'aucun laxisme.
M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État au Budget, adjoint au premier ministre, et secrétaire d'État à la Politique des familles, adjoint à la ministre de l'Emploi, et en ce qui concerne les aspects du droit des personnes et de la famille, adjoint au ministre de la Justice. - Je vous lis la réponse du ministre.
L'internement est une mesure de protection de la société, et non une peine, qui a comme objectif le traitement d'une personne qui a commis un fait qualifié d'infraction en état de démence ou de déséquilibre mental. Par nature, cette mesure a une durée indéterminée et peut être prononcée soit par les juridictions d'instruction, soit par les juridictions de fond.
Une fois l'internement prononcé, c'est une juridiction administrative, la commission de défense sociale, qui décidera de l'endroit où l'internement aura lieu, des éventuelles adaptations au traitement, des possibilités de libération à l'essai, voire de libération définitive. Elle appliquera la loi en vigueur pour ce faire.
La nouvelle loi du 21 avril 2007 sur l'internement, qui n'est pas encore entrée en vigueur, prévoit que le tribunal de l'application des peines décidera des modalités d'exécution de l'internement et des conditions y afférentes.
Lorsque la commission de défense sociale se prononce sur une modalité d'exécution de l'internement ou sur une libération à l'essai, elle tient compte d'une éventuelle contre-indication dans le chef de l'interné. Ces contre-indications portent sur l'absence de perspectives de réinsertion sociale, l'amélioration insuffisante du trouble mental dont il est atteint, le risque qu'il commette des infractions graves, le risque qu'il importune les victimes, etc.
Dès lors, la durée de l'internement varie fortement, en tous cas beaucoup plus que les durées de privation de liberté à la suite d'une condamnation.
Sauf cas tout à fait exceptionnel, une personne internée sera toujours d'abord libérée à l'essai ou placée dans une institution de défense sociale, avant d'obtenir une libération définitive.
Au 3 février 2009, on comptait 1 034 internés dans les établissements du SPF Justice, auxquels s'ajoutent 411 internés dans les établissements de défense sociale de Mons et de Tournai. Ce chiffre ne prend pas en compte les internés qui sont actuellement libérés à l'essai et qui peuvent être soumis à un traitement résidentiel - en hôpital psychiatrique - ou ambulatoire.
Il est difficile de fournir des chiffres précis relatifs à la durée moyenne d'internement dans un délai aussi court. De plus, ces durées moyennes varient fortement d'une commission de défense sociale à l'autre, et la manière dont l'internement est exécuté varie également fortement.
Néanmoins, il ressort d'une étude publiée dans la revue Panopticon, nº 1 de l'année 2007, que plus de la moitié des internés étaient soumis à la mesure d'internement depuis sept ans au moins, dont 41 depuis plus de vingt ans.
M. Philippe Monfils (MR). - Dans la première partie de sa réponse, le ministre de la Justice me rappelle le contenu du Code de procédure pénale. Je le connais, je l'ai lu avant de rédiger mon texte. Comme toujours lorsque j'aborde ce sujet, la réponse est à côté de la question ! Le ministre m'explique comment fonctionne la Commission de défense sociale, comment on entre dans un établissement, qu'il ne s'agit pas d'une peine, etc. Je sais tout cela.
Par ailleurs, les statistiques communiquées par le ministre sont d'une nullité absolue : 1 035 internés ! Ce chiffre doit provenir des statistiques de l'INS. Il est tout a fait insuffisant.
J'en retire le sentiment que l'on ne veut pas expliquer à la population ce qui se passe dans les établissements pour internés. C'est très grave car il s'agit de personnes qui ont été inculpées ou condamnées pour des faits criminels. Il est évident que je n'en resterai pas là et que je vais passer à d'autres types d'actions pour essayer d'obtenir enfin des renseignements sur des situations que la population ne saurait accepter.