4-60

4-60

Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 22 JANVIER 2009 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de M. Marc Elsen à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique sur «la réglementation sur l'asthme et la broncho-pneumopathie chronique obstructive» (nº 4-666)

M. le président. - M. Etienne Schouppe, secrétaire d'État à la Mobilité, adjoint au premier ministre, répondra.

M. Marc Elsen (cdH). - Depuis le 1er novembre dernier, l'arrêté ministériel Asthme/BPCO réglemente la prescription des traitements et des médicaments pour lesdites pathologies.

Désormais, seuls obtiendront encore un remboursement les patients qui seront soumis au préalable à des examens répétés prouvant qu'ils sont de vrais asthmatiques ou bronchiteux chroniques. La lutte contre la surconsommation des médicaments et des divers traitements est primordiale et un enjeu majeur en ce début de siècle. Je salue donc le travail qu'accomplit la ministre en ce sens.

Pourtant, l'aérosol et le « puff » sont des médicaments qui apportent un soulagement rapide et permettent au patient de se rétablir plus vite.

Dans la presse, un médecin généraliste nous cite le cas d'un jeune trisomique atteint d'une légère malformation des bronches. Ses examens n'attestent pas une bronchite chronique et, malgré son handicap, il n'entre pas dans la catégorie de patients pouvant bénéficier d'un remboursement des soins par aérosol. Il devra donc prendre l'intégralité des frais à sa charge.

Faute d'examens préalables, comme une spirométrie, il en sera de même pour les patients qui feront leur première crise d'asthme ou les enfants qui souffrent de bronchites répétées sans que les examens n'attestent une chronicité.

En quelques jours, 500 médecins se sont élevés contre cet arrêté ministériel. La ministre a alors décidé de leur écrire une lettre dans laquelle elle défend cet arrêté ministériel : elle veut simplifier les démarches administratives tant pour les médecins que pour les patients et elle rappelle que la nouvelle réglementation se base sur les recommandations de bonne pratique admises par l'ensemble de la communauté scientifique. Ce sont des objectifs très louables, mais cela n'a pas suffi à rassurer les médecins qui doutent de la cohérence de sa démarche.

Parallèlement, l'INAMI a ouvert sur son site une foire aux questions pour les médecins, ce qui montre tout de même qu'il y a une réelle complexification en la matière. Plusieurs organisations de médecins soulignent « l'ineptie de vouloir écrire la médecine au Moniteur belge ; la médecine en perpétuelle évolution n'est pas une science exacte : l'individu et ses aléas de santé ne peuvent se définir dans des textes de loi ». En effet, des recommandations de bonnes pratiques restent des recommandations et ne sont pas des réglementations.

À partir de cette problématique, plusieurs questions me viennent à l'esprit.

Qu'en est-il de la mucoviscidose, qui n'est ni de l'asthme ni une bronchite chronique, mais une maladie pour laquelle l'aérosolthérapie est tout à fait pertinente ?

L'arrêté ministériel découle-t-il d'une négociation avec les syndicats de médecins ?

La ministre compte-t-elle ne plus reprendre ses recommandations dans un arrêté ministériel à l'avenir, comme le veut l'accord entre son ministère et le syndicat des médecins ?

Qu'en est-il des patients déjà sous traitement depuis des mois ?

Qu'en est-il des patients qui reçoivent un traitement hors critères mais médicalement justifié ?

M. Etienne Schouppe, secrétaire d'État à la Mobilité, adjoint au premier ministre. - Je vous lis la réponse de la ministre.

Avant de répondre plus spécifiquement à vos questions, permettez-moi quelques précisions par rapport à vos remarques de départ.

Les critères qui permettent de poser un diagnostic de patient présentant une bronchopneumopathie chronique obstructive - BPCO -, avec les différents stades de sévérité, ont été établis de manière consensuelle au niveau international. Il ne s'agit donc en rien d'une réglementation `purement' belge pour les critères repris dans mon arrêté ministériel.

Ensuite, il convient de distinguer les aérosols, les « puffs », et les nébulisations.

Le cas du jeune patient trisomique souffrant d'une malformation des bronches n'entre absolument pas en compte dans l'arrêté ministériel susmentionné qui ne concerne que le traitement de l'asthme et de la BPCO. Ce patient pourra donc continuer à recevoir le traitement qui lui est nécessaire.

Je me permets de rappeler qu'il ne s'agit que de la prise en charge de situations chroniques : les traitements aigus, même s'ils doivent se répéter à intervalles réguliers, ne sont en rien concernés par mon arrêté ministériel.

Je précise aussi qu'il s'agit d'une simplification par rapport aux critères prévalents, avec des spécialités classées dans différents chapitres. Je rappelle que c'est essentiellement la notion du « tiers payant applicable » qui avait amené de nombreuses réactions du corps médical il y a quelques mois. Avec des critères précis et tous regroupés sous un même chapitre, et la latitude de 20% de dossiers éventuellement non conformes, la situation est donc beaucoup plus simple pour le médecin prescripteur.

Enfin, les recommandations de la Commission de remboursement des médicaments - CRM - ne sont en rien des recommandations de bonne pratique clinique, en effet non contraignantes, mais la transcription `belge' demandée par la réglementation du chapitre II, et qui seront adaptées à chaque fois que des données scientifiques nouvelles le demanderont.

J'en viens à présent à vos questions :

Tout d'abord, la mucoviscidose n'est en rien concernée par cet arrêté ministériel et son traitement reste de la décision du médecin responsable.

Ensuite, les recommandations de l'arrêté ministériel ont été discutées in extenso au sein de la CRM, où les syndicats médicaux sont représentés, et ont fait l'objet d'un vote unanime de la part des membres de la CRM.

Si d'autres recommandations à mettre dans un chapitre II devaient être rédigées, la législation prévoit maintenant qu'elles seront discutées au sein d'un groupe de travail associant la Médicomut et la CRM, qui rendra un avis.

En ce qui concerne les patients déjà sous traitement avant la parution des recommandations de l'arrêté ministériel, j'ose espérer que les traitements prescrits répondaient déjà aux recommandations existantes de bonne pratique clinique, connues en principe de tous, reprises dans les recommandations de l'arrêté ministériel, et qu'il ne devrait donc pas y avoir d'énormes différences pour les patients. De plus, j'ai retardé la mise en application de cet arrêté ministériel de six mois pour laisser à chacun le temps de revoir éventuellement sa prescription.

Enfin, bien que chaque traitement se doit de répondre aux évidences basées sur les preuves, et dont les conclusions ont été reprises dans mon arrêté ministériel, je répète qu'une marge de 20% est autorisée pour pouvoir couvrir certaines situations particulières.

M. Marc Elsen (cdH). - J'entends bien qu'il s'agit d'une réglementation internationale, avec tous les effets contraignants que cela suppose. Je me réjouis que le jeune trisomique, dont la situation a été mise en évidence par la presse, puisse continuer à bénéficier du traitement en cours. Les modalités de remboursement des prestations que vous évoquez ne sont pas nouvelles.

Vous avez précisé que les cas de mucoviscidose n'entrent pas dans le contexte général auquel j'ai fait allusion. Cela peut a priori paraître rassurant. Je prends bonne note que les futures discussions portant sur des situations similaires qui entrent dans le champ de réglementations internationales auront lieu au sein du CRM. Les syndicats des médecins y sont heureusement représentés. C'est important puisque c'est d'eux qu'émanaient certaines craintes qui peuvent, selon moi, être considérées comme légitimes. J'ai quand même la faiblesse de croire qu'en général, les prescriptions des médecins sont les plus appropriées pour des problèmes médicaux quelque peu atypiques. Et je pense qu'il faut donc leur laisser la souplesse nécessaire pour ce qui concerne précisément les prescriptions.

Vous avez décidé de retarder de six mois la mise en application. C'est une bonne mesure. De cette manière, l'analyse pourra être approfondie. Il y a fort à parier que les prescriptions ne seront pas fondamentalement différentes. Il conviendra d'y rester attentif, partant du principe que l'on doit toujours rechercher le traitement le plus adapté, au bénéfice du patient.