4-995/3

4-995/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2008-2009

16 DÉCEMBRE 2008


Projet de loi relative à la continuité des entreprises


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE LA JUSTICE PAR

M. VANDENBERGHE


I. Introduction

Le projet de loi qui fait l'objet du présent rapport relève de la procédure bicamérale facultative et est issu d'une proposition de loi déposée initialement à la Chambre des représentants par MM. Crucke et Bacquelaine.

Il a été amendé et adopté en séance plénière le 6 novembre 2008 par 96 voix contre 10 et 16 abstentions et a été transmis le lendemain au Sénat, qui l'a évoqué le 24 novembre 2008.

Au cours de la discussion, on s'est interrogé sur la qualification du projet. La commission parlementaire de concertation a été saisie du problème.

À la suite de la décision du 10 décembre 2008 de la commission parlementaire de concertation, le texte du projet de loi adopté par la Chambre doit être scindé en un projet réglant une matière visée à l'article 78 de la Constitution, à savoir le projet de loi relatif à la continuité des entreprises (voir doc. Sénat nº 4-995/5), et un projet réglant une matière visée à l'article 77 de la Constitution, à savoir le projet de loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la continuïté des entreprises (voir doc. Sénat nº 4-995/6).

La commission de la Justice a examiné le projet de loi au cours de ses réunions des 2, 3, 9 et 16 décembre 2008, en présence du ministre de la Justice, assisté par M.Verougstraete, président de la Cour de cassation et président du groupe d'experts chargé de réfléchir à la réforme du concordat judiciaire.

II. Exposé introductif du ministre de la Justice

Le sauvetage des entreprises en difficulté revêt une importance capitale pour les pouvoirs publics compte tenu de la nécessité de sauvegarder l'emploi et le tissu industriel qui va de pair. La manière dont ce sauvetage doit être réalisé constitue un défi pour ces pouvoirs publics. Le législateur doit tenir compte, d'une part, de la liberté d'un entrepreneur de régler ses affaires et de diriger son entreprise et, d'autre part, de la nécessité de protéger non seulement les « dépositaires d'enjeux » d'une entreprise, à savoir les créanciers, les clients, les fournisseurs, les actionnaires et les travailleurs, mais aussi l'économie en général.

La loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire avait pour finalité de fournir aux entreprises un cadre approprié afin de les aider à sortir des difficultés auxquelles elles se retrouvaient confrontées. La loi s'inscrivait dans le cadre d'une réforme plus large du droit commercial, tout comme d'ailleurs la loi du 8 août 1997 sur les faillites.

Mais, en dépit de ses objectifs ambitieux, la loi n'a guère porté de fruits. Le nombre de demandes de concordat judiciaire est limité et les procédures en concordat accordées débouchent encore trop souvent sur la faillite ou la liquidation.

Sous l'impulsion de la FEB, un large groupe d'experts a été constitué afin de mener une réflexion approfondie sur une réforme de cette loi que l'ancienne ministre de la Justice a pris l'initiative de retoucher. Le ministre souligne que, lorsqu'il était parlementaire, il a été étroitement associé à l'élaboration de la loi de 1997 et qu'il entend dès lors jouer un rôle de premier plan dans la poursuite et la finalisation de cette réforme.

Les députés Bacquelaine et Crucke ont déposé une proposition de loi inspirée de l'avant-projet de loi examiné par le gouvernement précédent et élaboré par un groupe restreint d'experts. Cette proposition de loi a de nombreux mérites, dont celui d'avoir lancé un débat qui ne pourra qu'aboutir à une amélioration de la réglementation légale actuelle. Les auditions qui ont été organisées par la commission de la Chambre chargée des problèmes de droit commercial et économique ont montré que la teneur générale du texte à l'examen est positive.

Sur la proposition du ministre, le gouvernement a déposé le 23 mai 2008 plusieurs amendements importants. La Chambre a adopté le nouveau texte de loi lors de sa séance plénière du 6 novembre 2008.

La nouvelle loi comportera quelques innovations notables:

Elle assouplit les conditions d'octroi d'une procédure de réorganisation qui peut être ouverte dès que la continuité de l'entreprise est menacée et que son activité peut être préservée en tout ou en partie.

Le texte élargit la palette des instruments mis à la disposition de l'entreprise pour faire face à ses difficultés. Pour l'instant, les entreprises n'ont le choix qu'entre le concordat judiciaire et la faillite. Désormais, elles disposeront d'un éventail d'options sensiblement plus large:

1. Ainsi, une entreprise pourra expressément conclure avec ses créanciers un concordat amiable qui pourra préciser, par exemple, que la dette est partiellement apurée et comporter un plan de remboursements. La proposition de loi innove en ce sens qu'elle précise explicitement que ce concordat ne doit pas être conclu avec tous les créanciers. Dans les faits, les principaux créanciers seront presque toujours associés à ce concordat — sans quoi, il n'aurait guère de sens — mais, pour ne pas porter atteinte aux droits des créanciers, il est prévu que le concordat amiable ne lie pas les tiers. C'est une technique qui existe déjà dans d'autres pays comme la France. Ce concordat amiable peut être conclu aussi bien dans le cadre de la procédure en réorganisation judiciaire qu'en dehors de celle-ci. Le débiteur peut se faire assister par un médiateur d'entreprise.

2. La deuxième option est la procédure en réorganisation au moyen d'un plan approuvé par les créanciers. Cet instrument se situe en parallèle de la procédure de concordat existante, mais elle la simplifie et l'améliore.

3. Enfin, une troisième option consiste dans le transfert d'une entreprise sous autorité de justice. Le but ultime étant la sauvegarde de l'entreprise, il importe de veiller à ce qu'elle soit transférée dans les meilleures conditions. Aussi le projet de loi règle-t-il en détail les modalités du transfert de l'entreprise ou de tout ou partie de ses activités. Ce transfert s'effectue entièrement sous autorité de justice. Il peut être envisagé dès le début de la procédure ou être imposé a posteriori en cas d'échec d'une autre voie choisie par l'entreprise en difficulté.

Cette approche « portail » est une excellente innovation, encore renforcée par le fait que l'entreprise a la possibilité, dès le début, des options différenciées pour ses diverses composantes. En cours de procédure aussi, des passerelles sont prévues, de sorte que l'entreprise puisse passer d'un instrument à l'autre. Le ministre renvoie par exemple à l'article 39 du projet de loi.

Afin de clarifier les choses si besoin en était encore, le projet de loi précise que la nouvelle réglementation fait intervenir non seulement la personne morale mais aussi les activités, ce qui veut dire qu'elle envisage la situation globale de l'entreprise, au-delà de sa situation juridique. C'est l'entité économique qui est prise en considération.

Un médiateur d'entreprise peut être désigné pour aider le débiteur, à sa demande ou avec son consentement.

À cet égard, la pratique a montré que le recours à un commissaire au sursis coûte cher. C'est pourquoi le ministre salue le recours à un mandataire de justice (article 27 du projet de loi) et à un juge délégué (article 18 du projet de loi). Bien que le rôle central revienne au débiteur, le tribunal peut désigner un mandataire pour l'assister dans la réorganisation de son entreprise. Il s'agit non pas d'une obligation mais d'une possibilité, ce qui témoigne une fois encore de la souplesse de la procédure. Ce n'est que dans des cas exceptionnels que le tribunal pourra désigner un mandataire de justice à la demande d'un tiers intéressé.

En outre, le juge délégué assure la surveillance de la procédure.

Le texte à l'examen garantit également la neutralité fiscale de la procédure, comme c'est déjà le cas dans la législation actuelle.

En outre, le projet contient une série de dispositions de nature à inciter les entreprises à entamer en temps voulu la procédure de réorganisation judiciaire.

Le projet de loi simplifie aussi de nombreux points. Un certain nombre de notions issues de la loi de 1997 (comme celle de créancier-propriétaire, ainsi que les modalités de calcul des voix requises pour l'adoption du plan de réorganisation) sont également précisées.

Toutes ces adaptations devront être mises en évidence par l'introduction de nouveaux termes. Il est à espérer que davantage d'entrepreneurs vaincront ainsi leur crainte de demander l'application de la procédure en réorganisation judiciaire. L'intitulé de la proposition de loi met à juste titre l'accent sur la continuité de l'entreprise, et les termes « concordat judiciaire » sont remplacés par les termes « réorganisation judiciaire ». Il appartiendra en tout état de cause aux pouvoirs publics et aux organisations concernées de mieux informer les entreprises sur les nouvelles possibilités offertes par le texte.

L'article 61 du projet de loi apporte une innovation importante en réglant le statut des travailleurs lors du transfert d'une entreprise sous autorité de justice.

Lors du transfert d'une entreprise en difficulté:

1) les travailleurs conservent en principe leurs droits;

2) le repreneur, le cédant et les représentants des travailleurs peuvent convenir, par un accord collectif, de modifier les conditions de travail;

3) le repreneur et le travailleur individuel peuvent décider, par le biais d'un accord individuel, de modifier les conditions de travail individuelles dudit travailleur;

4) le repreneur peut choisir les travailleurs qu'il souhaite reprendre, en se basant sur des critères techniques, économiques et organisationnels, donc sans aucune forme de discrimination (à l'encontre, par exemple, des délégués syndicaux);

5) le tribunal du travail peut homologuer la reprise, offrant ainsi une sécurité juridique à toutes les parties concernées.

Les partenaires sociaux réglementent ces principes de façon plus précise dans le cadre de la concertation sociale au sein du Conseil national du travail, et peuvent déroger à cet accord-cadre.

Autres nouveautés proposées dans les amendements du gouvernement:

— Les conditions à remplir pour ouvrir une procédure de réorganisation judiciaire ont encore été assouplies, de manière à permettre notamment à une entreprise en difficulté de ne déposer certaines données qu'après l'introduction de sa demande. En contrepartie, des garanties supplémentaires sont prévues pour éviter tout abus éventuel. Il est ainsi possible, par exemple, de désigner un administrateur provisoire en cas de faute grave et caractérisée de la direction.

— La conclusion d'accords avec les créanciers est encouragée par des incitants supplémentaires, tels que les règles définies en matière de confidentialité applicables auxdits accords.

— Une possibilité supplémentaire est prévue pour prolonger aussi bien le délai du sursis que le délai d'exécution du plan de réorganisation, dans des conditions bien précises et sous le contrôle du juge. Les débiteurs qui atteignent plus rapidement un accord avec leurs créanciers ont également plus de temps pour exécuter cet accord, le délai légal prolongé courant à partir de l'ouverture de la procédure. De plus, cette modification offre une sécurité juridique aux créanciers sur la durée maximale de la procédure.

— L'équilibre entre les entreprises en difficulté et leurs créanciers est amélioré. Il est ainsi possible, par exemple, de prolonger le délai d'exécution du plan de réorganisation (l'ancien plan de redressement), en étant toutefois soumis à un contrôle strict du juge.

— La rentabilité des entreprises en difficulté fait l'objet d'une attention particulière, afin que les entreprises saines puissent être sauvées à terme, mais aussi afin que la concurrence ne soit pas faussée par des entreprises qui, à terme, ne pourront quand même pas survivre au jeu de la concurrence.

— L'accent est mis sur le maintien des contrats en cours du débiteur, de telle sorte que les cocontractants du débiteur obtiennent aussi une sécurité juridique.

— La situation financière du débiteur est renforcée en faisant en sorte que les créances découlant de prestations fournies pendant la procédure soient privilégiées lors d'une éventuelle procédure ultérieure de faillite ou de liquidation, au cas où la procédure de réorganisation judiciaire viendrait à échouer.

— Il est également prévu de diminuer davantage les charges administratives pour les entreprises, en supprimant une série d'obligations en matière de publication et donc en réduisant encore le prix à payer par les entreprises en difficulté pour bénéficier de la procédure.

— La neutralité fiscale et budgétaire de la procédure est maintenue, et les parties impliquées dans la procédure sont responsabilisées. Ainsi, celui qui demande la désignation d'un médiateur d'entreprise ou d'un mandataire de justice est également tenu de payer les coûts y afférents. Les frais en question sont fixés par le juge.

— L'accent est mis sur les procédures de concertation et d'information existantes durant la procédure.

— Dorénavant, les sociétés civiles relèveront également du tribunal de commerce pour ce qui est de leurs contestations pour raison d'une société. L'amendement précise qu'en plus des sociétés commerciales, toutes les sociétés régies par le Code des sociétés relèveront dorénavant du tribunal de commerce en ce qui concerne les contestations pour raison d'une société. Le tribunal de commerce a plus d'expertise en matière de sociétés que le tribunal de première instance. Cette proposition est soutenue à la fois par le barreau et par le Conseil supérieur de la Justice. Il est également prévu que les sociétés agricoles puissent bénéficier de la nouvelle procédure.

L'amendement apporte également de nombreuses autres précisions et modifications en réponse à la jurisprudence récente, à l'avis du Conseil d'État, aux remarques formulées par des spécialistes et des parlementaires au cours des auditions à la Chambre des représentants, aux propositions émises par des chefs de corps de certains tribunaux, par des juges ou par des greffiers, ainsi qu'aux observations énoncées par l'Union des juges consulaires de Belgique et par les différentes parties prenantes à cette procédure.

III. Discussion générale

M. Mahoux se dit particulièrement intéressé par les dispositions du projet qui concernent le transfert des personnels et la reprise en charge, par le repreneur, des obligations à l'égard des travailleurs. Selon le projet, cela se passera dans un cadre judiciaire, qui donne les garanties les plus importantes, et avant faillite. L'intervenant souhaite obtenir confirmation de ce dernier point.

Des problèmes se posent en ce qui concerne la date présumée d'entrée en vigueur. Il faudrait disposer de toutes les précisions nécessaires quant à ce qui est applicable durant la période où ce qui concerne les transferts des personnels ne sera pas d'application puisque, par respect pour les travaux du Conseil national du travail, l'on entend surseoir à l'application de l'article 61. Ceci est d'autant plus vrai que l'on abroge la loi de 1997, qui réglait le problème.

Il semblerait que ce soit en principe le chapitre II de la convention collective nº 32bis qui serait applicable. Celle-ci prévoit le transfert conventionnel dans le cadre d'un concordat judiciaire, ou des transferts de personnel à la suite d'une faillite.

L'orateur souligne qu'il est impératif de prévoir les dispositions les plus claires et les plus impératives possibles en cette matière.

M. Vandenberghe souligne que la proposition de loi à l'examen n'a rien d'anecdotique, car elle vise à remplacer la loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire. L'intervenant souhaiterait obtenir un résumé des modifications essentielles. Par exemple, pourquoi utilise-t-on en l'occurrence le mot « mandataire de justice », alors que la jurisprudence et la doctrine parlent toujours de « curateur » et de « mandataire judiciaire » ? L'adjonction d'un juge délégué est également une nouveauté. Il est important de connaître le statut juridique de toutes les parties intervenantes, dans l'optique du régime de responsabilité. Le juge commissaire, par exemple, est considéré dans la jurisprudence de la Cour de cassation comme un organe de l'État belge, qui peut donc engager la responsabilité de l'État. Il faut donc savoir exactement, quelles sont, en droit, les missions précises de tous les nouveaux instruments utilisés, quelle est leur exacte responsabilité et dans quelle mesure ils agissent en tant qu'organes publics de l'État belge.

L'intervenant s'interroge également à propos de la désignation de ces intervenants. Les curateurs sont tenus au respect de certaines exigences de qualité. Cette exigence de qualité est-elle également suffisamment présente dans la loi proposée ? Il ne faut pas oublier que l'on attend d'eux un accompagnement véritablement professionnel.

Par ailleurs, l'intervenant a l'impression que le commissaire au sursis est facultatif. Pourquoi a-t-on modifié ce statut, ce qui a pour effet de ralentir la procédure ?

Il est également important de savoir dans quelle mesure l'ordre des créanciers se trouve modifié par la loi proposée. L'intervenant fait référence par exemple à la rédaction de l'article 2, d). Pourquoi fait-on ici une distinction entre le privilège spécial et les sûretés réelles ? Quelle est la portée de cette distinction par rapport aux sûretés générales ? À l'article 2, f), le créancier-propriétaire est défini comme la personne dans le chef de laquelle sont réunies simultanément les qualités de titulaire d'une créance sursitaire et de propriétaire d'un bien meuble corporel qui n'est pas en sa possession et qui fait office de garantie. Le transfert de propriété sursitaire et son éventuelle opposabilité aux tiers posent de très nombreux problèmes sur le plan du warrant, avec la conséquence que le gage du débiteur est moindre que ce qui est visible pour ses créanciers. On instaure ici un régime des droits réels qui peut influencer la liquidation et le partage. L'intervenant s'interroge également sur le champ d'application exact des créances telles qu'elles sont définies à l'article 2, d). Il aimerait avoir des explications sur l'impact exact du système proposé sur l'ordre des créanciers, d'autant que ce système permet beaucoup plus que par le passé de mettre sur la touche certains créanciers minoritaires.

En ce qui concerne l'article 61, l'intervenant se demande quel en est le champ d'application exact. Cet article dispose qu'en cas de transfert, les droits et obligations des travailleurs sont transférés intégralement au cessionnaire. Mais d'autre part, l'article 61 peut entrer en vigueur à un autre moment que la loi elle-même (article 90). Quel sera dans l'intervalle le statut juridique des travailleurs ? La Convention collective de travail nº 32bis est-elle applicable ? Cette convention n'est pas prévue pour la situation envisagée. En outre, elle ne règle pas les rapports avec les tiers créanciers.

Mme Crombé-Berton déclare qu'après relecture de l'article 90 et de l'article 61, il lui semble que modifier le texte va créer un problème.

L'intervenante constate que l'article 61 ne peut entrer en vigueur avant le 1er janvier 2009. Cet article prévoit une période transitoire pendant laquelle on applique la loi, et lorsqu'il y aura un accord au sein du Conseil national du travail, la convention collective rendue obligatoire par arrêté royal s'appliquera. L'intervenante ne voit donc pas pourquoi il faudrait amender le projet. En effet, si on l'amende, on supprimera l'application de l'article 61, c'est-à-dire de la disposition transitoire, qui garantit que, dans l'attente de l'avis du CNT, il n'y ait pas de vide juridique.

M. Vankrunkelsven se rallie à cette dernière observation.

En réponse à la question sur le statut des intervenants, le ministre passe en revue les nouveaux mandataires figurant dans le projet de loi en discussion.

L'article 13 prévoit la possibilité de désigner un médiateur d'entreprise pour faciliter la réorganisation de l'entreprise. Il ne s'agit pas d'une mesure obligatoire.

Les articles 14, 27 et 62 portent sur la désignation d'un mandataire de justice auquel des compétences particulières sont attribuées.

L'article 18 se rapporte à la désignation d'un juge délégué; celui-ci remplace le commissaire au sursis.

Enfin, l'article 28 prévoit la possibilité de désigner un administrateur provisoire.

On peut constater que le projet de loi à l'examen a ajouté plusieurs « figures de style ».

L'article 16 est un élément important du projet de loi car il introduit la notion de « portail judiciaire ». L'article dispose que la réorganisation judiciaire a pour but de préserver la continuité de l'entreprise et permet d'accorder un sursis au débiteur en vue de permettre, soit de conclure un concordat amiable (article 43), soit d'obtenir un accord collectif sur un plan de réorganisation (en lieu et place de l'ancien « plan de redressement »), soit le transfert à un tiers (articles 59 à 70).

L'article 39 prévoit une « passerelle » permettant le passage d'une procédure à l'autre.

L'article 61 est un article important, rédigé à la suite de la concertation avec les partenaires sociaux.

Le paragraphe 1er prévoit que les droits et obligations qui résultent pour le cédant des contrats de travail existant au moment du transfert de l'entreprise sont transférés au cessionnaire. Le principe appliqué est la continuité avec maintien de toutes les conditions de travail.

Le paragraphe 2, alinéa 1er, prévoit la possibilité de modifier les conditions de travail dans le cadre d'une négociation collective. L'alinéa 2 prévoit en revanche la possibilité de modifier le contrat de travail individuel dans le cadre d'un accord individuel.

Le paragraphe 5 concerne l'homologation du transfert par le tribunal du travail.

Le paragraphe 6 donne aux partenaires sociaux la possibilité de régler les modalités des droits des travailleurs concernés par un transfert d'entreprise dans le cadre d'une réorganisation judiciaire, par le biais d'une convention collective de travail conclue au Conseil national du travail. Le texte de celle-ci peut s'écarter de l'accord cadre prévu à l'article 61. L'intervenant renvoie sur ce point aux développements qui donnent des précisions à ce sujet. Actuellement, une concertation a lieu à ce sujet deux fois par mois au sein du Conseil national du travail. Elle débouchera certainement sur l'élaboration d'une nouvelle CCT.

L'article 90 relatif à l'entrée en vigueur y est lié à ce qui précède. Il convient, en effet, de laisser un peu de temps aux partenaires sociaux pour conclure un accord au sein du Conseil national du travail.

Aussi longtemps que l'article 61 n'est pas entré en vigueur, les travailleurs continueront d'être soumis à l'application des règles actuelles, qui découlent de la réglementation européenne, y compris donc la CCT nº 32bis. Il va de soi que le but n'est pas de laisser s'écouler un délai trop long entre l'entrée en vigueur des différents textes.

M. Vankrunkelsven observe que l'entrée en vigueur à des moments différents a suscité pas mal d'observations. Toute cette discussion n'est-elle pas un peu fictive dès lors que l'article 90 prévoit seulement que l'article 61 ne peut pas entrer en vigueur avant le 1er janvier 2009 ?

Le ministre souscrit à ce point de vue. Le texte du CNT ne sera de toute façon pas prêt avant le 1er janvier 2009.

M. Delpérée partage le point de vue exprimé par M. Vankrunkelsven à propos du caractère assez virtuel du débat relatif aux délais. Avant que la loi soit votée et publiée, on sera déjà en 2009. Elle n'entrera pas en vigueur pour autant, puisqu'un délai maximum de six mois peut être fixé pour ce faire.

D'autre part, le texte prévoit que l'article 61 ne peut entrer en vigueur avant le 1er janvier 2009. Tout cela devrait donc s'agencer assez bien dans la pratique.

Le ministre déclare que le Conseil national du travail a confirmé, par lettre du 9 juillet 2008, que l'article 61 constituait une bonne base pour l'élaboration d'une convention collective de travail. L'adoption de ce texte à la Chambre et son inscription rapide à l'agenda du Sénat prouvent d'ailleurs que les partenaires sociaux soutiennent l'article 61.

M. Vandenberghe prend note du fait que le CNT considère l'article 61 comme une bonne base. Un problème risque toutefois de se poser si cet article ne peut être exécuté qu'au moment où une convention collective de travail aura été conclue. En effet, les autres dispositions du projet de loi en discussion pourront, elles, être appliquées. N'y a-t-il pas là une source potentielle de problèmes ?

M. Delpérée revient à la question des dispositions transitoires. Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi prévoit que l'article 90 entrera en vigueur dix jours après la publication de la loi au Moniteur belge. Les autres dispositions de la loi en projet entreront en vigueur à une date fixée par le Roi et au plus tard six mois après la publication du texte au Moniteur belge.

Par conséquent, si la nouvelle loi est publiée prochainement au Moniteur belge, seul l'article 90 sera d'application début 2009. Pour les autres dispositions du projet de loi, si l'on part de l'idée que la nouvelle loi sera publiée au cours du premier trimestre 2009, cela signifie qu'elles entreront en vigueur au plus tard au cours du troisième trimestre 2009.

L'article 90 prévoit en outre un régime particulier pour l'entrée en vigueur de l'article 61. Cette disposition ne peut pas entrer en vigueur avant le 1er janvier 2009. Ce libellé semble irréaliste. Les auteurs du texte imaginaient en effet que l'article 61 aurait une application postposée par rapport au reste du projet. Or, en mentionnant comme date pivot le 1er janvier 2009, cela pourrait avoir pour effet que cet article entre en vigueur dès le 2 janvier 2009, soit avant les autres dispositions de la loi. Cela ne correspond pas aux intentions des auteurs.

Si l'article 61 devait entrer en vigueur dès le 2 janvier, cela signifierait que la loi pourrait recevoir une application rétroactive dans la mesure où elle sera problablement publiée après cette date.

Enfin, le texte soulève des difficultés pratiques liées à la concertation au sein du Conseil national du travail.

M. Delpérée en déduit que le libellé de l'article 90 doit être modifié. Il préparera un amendement sur ce point.

Il constate ensuite que l'article 61 du projet prévoit une particularité. Cet article organise le statut des travailleurs occupés dans l'entreprise au moment de son transfert. M. Delpérée pense que le fait de reporter au 1er juillet 2009 l'entrée ne vigueur de cet article ne provoquerait pas de vide juridique si les autorités exécutives sont conscientes qu'elles doivent mettre en œuvre de manière concomittante les différentes dispositions.

Enfin, l'article 61 prévoit, en son paragraphe 6, une disposition extinctive. Le régime prévu à l'article 61 cesse d'être d'application si une convention collective de travail est conclue dans l'intervalle et est ratifiée par arrêté royal.

M. Delpérée pense que dans un scénario idéal, les dispositions de la nouvelle loi et de la convention collective pourraient entrer en vigueur en même temps.

M. Vandenberghe renvoie à l'article 61 du projet de loi qui lui semble particulièrement curieux dans la mesure où le législateur y prévoit une délégation en ce sens ce que les droits des travailleurs concernés par un transfert d'entreprise dans le cadre d'une réorganisation judiciaire sont réglés par une convention collective de travail conclue au Conseil national du travail et ratifiée par le Roi.

L'intervenant est d'avis que cet article porte atteinte aux principes généraux du droit.

M. Vandenberghe souhaiterait également savoir avec précision quelles sont les conséquences juridiques d'une décision de réorganisation judiciaire ordonnant la poursuite des activités de l'entreprise, en particulier pour les créanciers et pour les travailleurs.

Alors que le principe qui prévaut en cas de faillite est que tous les contrats prennent fin, le principe appliqué en cas de réorganisation judiciaire serait apparemment plutôt que tous les contrats continuent à courir.

Or, l'article 30 et suivants prévoient qu'aucune voie d'exécution des créances sursitaires ne peut être exercée et qu'aucune saisie ne peut avoir lieu. Cela s'applique-t-il à l'ensemble des créanciers et aux travailleurs ?

L'intervenant souhaiterait savoir avec précision quels sont les contrats exécutoires et opposables et ceux qui ne le sont pas. Si des contrats subsistent mais ne sont ni exécutoires ni opposables, leur « survie » n'est alors que théorique.

Par ailleurs, l'intervenant s'interroge aussi sur la notion de « créances connexes ». En effet, l'article 34 prévoit que la compensation n'est permise au cours du sursis entre créances sursitaires et créances nées au cours du sursis que si ces créances sont connexes. Qu'entend-on au juste par là ?

En ce qui concerne la définition du champ d'application et, en particulier, la définition figurant à l'article 2 c) du projet de loi, l'intervenant suppose que les « créances sursitaires » sont en fait comparables aux créances de la masse dans le cadre d'une faillite (par opposition aux « dettes de la masse »).

S'agissant de la définition des créances sursitaires extraordinaires qui figure au 2 d), l'intervenant se demande pourquoi le privilège spécial est mentionné ici en tant que tel. Le privilège spécial ne constitue-t-il pas une sûreté réelle ? Ou cette mention distincte serait-elle un moyen d'exclure le privilège général ?

Quant à l'expression « créancier-propriétaire », elle n'est pas non plus appropriée. Sans doute vise-t-on en l'espèce le créancier qui est propriétaire d'un bien immobilier corporel faisant partie du patrimoine de l'entreprise.

L'article 5 du projet de loi à l'examen énonce: « Toutes les décisions du tribunal prévues dans la présente loi sont exécutoires par provision. ». Est-ce le cas pour toutes les décisions ? Cela ne risque-t-il pas d'engendrer une certaine confusion et des complications procédurales parce que telle décision sera exécutée et pas telle autre ? Il ne faut pas oublier non plus que lorsqu'on exécute une décision exécutoire par provision, on le fait à ses risques et périls.

L'intervenant précise aussi qu'il faudra procéder à plusieurs adaptations terminologiques. Il renvoie à cet égard à une note du service d'Évaluation de la législation, annexée au présent rapport.

Les dernières réflexions portent sur l'article 61 du projet de loi.

Il va de soi que le passif social ou les contrats de travail sont des critères importants qui entrent toujours en ligne de compte lorsqu'il s'agit de déterminer s'il y a lieu de préserver ou non la continuité de l'entreprise. Dans ce cas, il est important de connaître la portée exacte des obligations en matière de droit du travail.

L'intervenant évoque le cas où un curateur décide de maintenir une entreprise faillie en activité (par exemple le Val Saint-Lambert). Quelle est alors la portée des relations relevant du droit du travail ?

L'intervenant renvoie à cet égard à l'arrêt de la Cour de cassation du 24 juin 2004 concernant le respect des conventions collectives de travail par le curateur et à la publication de M. Zenner sur la responsabilité des entrepreneurs et des administrateurs (jeune barreau de Bruxelles, p. 214) qui précise ce qui suit: « ... on rappellera en revanche que la Cour de cassation a décidé que dès lors qu'il ne poursuit pas les contrats de travail, le curateur n'est pas tenu de se conformer aux procédures et mesures d'information et de concertation sociale prévues aux conventions collectives de travail pour la protection de l'emploi ... ».

L'arrêt de la Cour du travail de Liège du 5 octobre 2005 abonde dans le même sens: « ... un jugement déclaratif de la faillite exclut en règle que le curateur soit tenu, à l'égard des travailleurs, de prendre des mesures spécifiques convenues par une convention collective de travail en vue de la préservation de l'emploi et d'appliquer dans ce contexte une procédure d'information et de concertation qui impose des restrictions complémentaires à la façon dont la loi détermine que le curateur doit remplir sa mission ... ».

En cas de faillite, il est en principe mis fin à toutes les relations juridiques entre l'entreprise faillie et les travailleurs. Le curateur qui souhaite assurer la continuité de l'entreprise peut contracter de nouveaux engagements à de nouvelles conditions et n'est pas tenu à cet égard de respecter la convention collective de travail.

En cas de réorganisation, toutes les obligations relevant du droit du travail restent en vigueur sans modification d'aucune espèce. La réorganisation a évidemment pour but d'adapter la masse des créances ou de trouver un nouveau règlement de paiement. On s'efforcera dès lors d'influencer le passif social. L'intervenant demande si la convention collective de travail nº 32bis relative au transfert d'actifs en cas de faillite s'appliquera ou non au débiteur qui assure la continuité de l'entreprise dans le cadre de la procédure à l'examen, que ce soit avec l'assistance ou non d'un mandataire de justice.

L'intervenant renvoie une nouvelle fois à l'arrêt précité de la Cour de cassation de 2004 et à celui de la Cour du travail de Liège de 2005.

En outre, en vertu de l'article 61, § 5, le tribunal du travail est compétent pour homologuer le transfert projeté dans la mesure où la convention de transfert concerne les droits établis dans cet article. D'autres arrangements, en revanche, sont soumis au contrôle du tribunal de commerce. Il y a donc deux tribunaux différents qui seront compétents pour une même procédure. Comment cela va-t-il fonctionner ?

Une dernière remarque concerne le paragraphe 6 de l'article précité. L'intervenant se demande s'il est juridiquement correct de considérer que les dispositions de cet article, qui sont approuvées par la loi adoptée par le législateur dans le cadre d'une procédure bicamérale, s'appliquent jusqu'à la ratification par le Roi d'une convention collective de travail. Cela implique qu'une convention collective de travail pourrait modifier l'article 61 du tout au tout. De plus, pareille modification ne serait pas neutre et pourrait avoir un impact sur la position juridique d'autres créanciers. Qu'en serait-il alors des intérêts de tiers ?

L'intervenant conclut que ses remarques visent essentiellement à permettre l'élaboration d'une procédure aussi cohérente que possible. Il ne conteste évidemment pas la nécessité de concevoir une procédure plus moderne pour aider les entreprises en difficulté ou pour régler leur transfert. Bien que sa finalité soit des plus louables, ce texte doit être suffisamment cohérent pour pouvoir atteindre réellement les objectifs visés et pour pouvoir être utilisé de manière effective par les entreprises en difficulté.

Réponse de M. Verougstraete

En ce qui concerne l'article 2, c), relatif aux créances sursitaires, l'intervenant note que l'on ne peut pas parler d'une dette dans la masse ou d'une dette de la masse dans le cas de la continuité de l'entreprise. Il n'existe, en effet, pas de masse dans le concept de la continuité.

La notion de créancier-propriétaire n'est pas non plus une formulation optimale selon M. Verougstraete. Elle a été utilisée faute de terme plus opportun. L'on désigne clairement non seulement le bailleur de leasing ou le vendeur avec réserve de propriété, mais plus généralement le propriétaire fiduciaire. Il s'agit d'une notion extensible au sujet de laquelle la Cour constitutionnelle s'interroge également. Par souci de prudence, l'on a opté, en l'espèce, pour un terme neutre, mais l'intervenant apprécierait que l'on propose un terme plus opportun.

La mention explicite des privilèges spéciaux dans l'article 2, d), découle d'une tendance dans la littérature d'établir une distinction entre les séparatistes et les autres détenteurs de privilèges spéciaux. Malgré cette formulation quelque peu ambiguë, le sens laisse clairement apparaître que l'on entend par là toutes les sûretés réelles, y compris les privilèges spéciaux.

M. Vandenberghe estime qu'il y a lieu de procéder avec prudence dans le domaine des sûretés. Il fait référence, à cet égard, à l'adage « pas de privilège sans texte ». Un système infini de sûretés réelles a été créé et cela suscite une certaine inquiétude. L'intervenant renvoie aux problèmes actuels dans le monde financier où l'on a créé toute une série de produits trop éloignés des réalités et qui étaient considérés comme des sûretés alors que ce n'était pas le cas.

En ce qui concerne l'exécutabilité par provision des décisions du tribunal, visée dans l'article 5, M. Verougstrate estime que cela n'entraînera pas de distorsions. La non-exécutabilité n'est prévue que dans un nombre de cas très limité. Le texte rejoint le droit commun dans ce domaine. En effet, l'exécution a lieu au risque de la personne qui veut faire exécuter et cela peut engendrer de lourdes conséquences.

En ce qui concerne l'article 61, M. Verougstraete souligne que la situation en cas de faillite est très différente de celle qui se présente en cas de transfert dans le cadre d'une réorganisation judiciaire. La position du curateur est toute autre dans le cas d'une faillite, vu que l'exécution de tous les engagements prendront justement fin dans ce cas, alors que le but de la réorganisation judiciaire est précisément la continuité de l'entreprise. La réorganisation n'est pas prévue explicitement dans la convention collective de travail nº 32bis. La question se pose dès lors de savoir si le chapitre II relatif à la cession volontaire ou le chapitre III concernant l'exécution forcée en cas de faillite est applicable. Les travailleurs sont naturellement favorables à l'application des règles relatives à la cession volontaire, vu qu'il s'agit d'une cession, alors que les employeurs ont tendance à vouloir appliquer le chapitre III, vu que le transfert a lieu « sous surveillance ». L'on a clairement affaire à un transfert sui generis. Une solution intermédiaire ne semblait toutefois pas possible lors des négociations en vue de l'élaboration du texte à l'examen. Espérons qu'un statut sui generis pouvant rallier les suffrages des partenaires sociaux et du monde financier soit effectivement possible dans un avenir proche. C'est la raison pour laquelle le paragraphe 6 a été libellé de la manière proposée. La disposition prévoit une délégation au Roi qui doit de toute manière ratifier la convention collective de travail. Il est important d'aboutir à un texte permettant au repreneur de savoir exactement ce qu'il achète. Le transfert se fait au prix de la valeur réelle. Il faut dès lors connaître exactement les droits des travailleurs. Le but est donc de procurer une sûreté au cessionnaire. À cet égard, il convient de respecter un certain équilibre et il est important que le tribunal du travail, qui a la confiance du travailleur, règle un certain nombre d'affaires.

L'intervenant estime qu'il est difficilement imaginable que le tribunal du travail et le tribunal du commerce se contredisent. D'abord, le tribunal du travail règlera les relations en droit du travail, visées dans l'article 61. Le tribunal du commerce procédera ensuite à l'homologation. Il est exclu que le tribunal du commerce procède à l'homologation avant que le tribunal du travail se soit prononcé sur le transfert du volet social des droits et des obligations. Une contradiction éventuelle semble donc exclue.

Le ministre renvoie également à la justification de l'amendement du gouvernement, où celui-ci opte nettement pour une convention collective de travail dans cette matière. L'article 61 est une solution intermédiaire qui a toutefois conduit à une percée dans ce dossier. La disposition transitoire présente l'avantage de mettre les partenaires sociaux sous pression. Ces derniers se rencontrent tous les 15 jours depuis l'adoption par la Chambre du projet à l'examen. Les discussions progressent bien.

En ce qui concerne la continuité des contrats de travail, l'article 61, § 1er, établit clairement que ces derniers sont transférés au cessionnaire au moment du transfert de l'entreprise. La possibilité donnée dans l'article 35, § 2, de ne plus exécuter un contrat en cours pendant la durée du sursis ne s'applique pas aux contrats de travail.

L'homologation par le tribunal du travail visée dans l'article 61 est inscrite à la demande des partenaires sociaux; le choix du tribunal du travail se justifie par la composition de celui-ci dans lequel les partenaires sociaux sont représentés.

L'article 61, § 6, confère en effet une habilitation au Roi mais ne vaut que dans la mesure où les travailleurs sont concernés.

M. Vandenberghe insiste sur le fait que l'article 35 prévoit en effet clairement que la réorganisation judiciaire ne met pas fin aux contrats en cours. Le paragraphe 2 présente la possibilité d'une exception en la matière, mais il n'est pas applicable aux contrats de travail. En revanche, on peut se demander si des contrats de travail sont susceptibles d'entraîner des mesures d'exécution coercitives au cours de la continuité.

M. Verougstraete répond que le dépôt d'une requête en réorganisation a un impact limité; elle empêche notamment l'exécution, la déclaration de faillite et la liquidation. Pour le reste, tous les contrats continuent à courir. L'article 35, § 2, constitue une exception à cet égard. Le débiteur peut, même en l'absence de disposition contractuelle en ce sens, décider de ne plus exécuter un contrat en cours pendant la durée du sursis. La possibilité prévue par cet article ne s'applique pas aux contrats de travail. Ces contrats continuent donc à courir, des mesures coercitives éventuelles étant possibles, à l'exception des mesures visées dans les articles 30 et 31. Le principe est dès lors la continuité avec toutes les conséquences que cela implique.

M. Vandenberghe souhaite encore une précision concernant la délégation qui est donnée dans l'article 61, § 6. La dernière phrase de ce paragraphe énonce que les dispositions de la convention collective de travail en question pourront déroger aux dispositions du présent article. La convention collective de travail pourrait-elle par exemple désigner un autre tribunal compétent ou prévoir qu'un recours en cassation n'est pas possible ? L'intervenant peut comprendre qu'une délégation soit accordée dans le domaine des conditions sociales, par exemple, mais la formulation utilisée est très générale. La première phrase fait référence à une réglementation plus précise des droits des travailleurs concernés par un transfert d'entreprise dans le cadre d'une réorganisation judiciaire, la dernière phrase donne une délégation générale.

M. Vankrunkelsven fait remarquer que la convention collective de travail doit de toute manière être ratifiée par le Roi. Si la convention collective de travail est contraire à l'intention visée dans l'article 61, cette ratification n'aura pas lieu.

M. Verougstraete estime qu'il faut faire preuve de prudence. La dernière phrase de l'article 61, § 6, peut éventuellement être complétée par les mots « sauf en ce qui concerne la réorganisation judiciaire », ce qui permettrait de limiter la délégation générale.

M. Delpérée souligne que la délégation donnée au Roi est clairement circonscrite. L'article 61, § 6, prévoit que les règles inscrites dans la convention collective de travail conclue au sein du Conseil national du travail doivent réglementer de façon plus précise les droits des travailleurs concernés par un transfert d'entreprise et que les dispositions de la convention collective pourront déroger aux dispositions du présent article.

L'intervenant rappelle que le Conseil d'État, la Cour de cassation et la Cour constitutionnelle donnent des interprétations très strictes à la notion de dérogation. Déroger ne permet pas de modifier l'ensemble de l'ordre juridique ni d'effacer le principe auquel on apporte des dérogations.

L'intervenant ne voit pas pour quelles raisons il faudrait prévoir une exception pour ce qui concerne l'organisation judiciaire.

M. Vankrunkelsven conclut que la compétence du CNT sera précisée et limitée.

M. Verougstraete suggère de formuler la délégation à la fois de manière négative, en précisant ce que l'exécutif ne peut pas faire, mais également de manière positive, en précisant dans quel contexte on peut déroger.

M. Delpérée fait remarquer que le contexte est délimité. La dérogation n'est prévue que pour les dispositions de l'article 61.

M. Vandenberghe considère qu'une certaine méfiance est requise en la matière. Le passé nous enseigne que l'on ne peut pas accorder une confiance aveugle au pouvoir exécutif.

Mme Crombé-Berton rappelle qu'il est habituel qu'une convention collective de travail conclue au sein du Conseil national du travail soit rendue obligatoire par arrêté royal. La procédure prévue n'est donc pas exceptionnelle.

Elle se demande pourquoi les auteurs ont prévu que les dispositions de la convention collective de travail pourront déroger aux dispositions du présent article puisque le régime de l'article 61 est transitoire.

M. Verougstraete rappelle que l'intention de départ était que la convention collective de travail puisse être conclue dans la foulée de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. L'idée était que les partenaires sociaux étaient les mieux placés pour régler les conséquences du transfert de l'entreprise sur les droits des travailleurs. Cependant, il n'a pas semblé souhaitable d'obliger les partenaires sociaux à conclure un accord en travaillant sous la pression de la nouvelle loi. Pour éviter cela, on a prévu un régime transitoire auquel la convention collective de travail pourra déroger.

Mme Crombé-Berton ne comprend pas pourquoi il faut prévoir, in fine de l'article 61, § 6, la possibilité de déroger aux dispositions de l'article puisque, par hypothèse, le régime transitoire de l'article 61 va disparaître le jour où un arrêté royal rendra obligatoire la convention collective conclue en la matière au sein du Conseil national du travail. La dernière phrase du § 6 semble superfétatoire.

M. Delpérée comprend l'interrogation de la préopinante car la formulation de l'article 61, § 6, est équivoque. C'est aux dispositions de l'article 61 que la convention collective de travail pourra déroger mais pas à l'article. Le texte néerlandais est plus précis puisqu'il précise « afwijken van wat in dit artikel wordt bepaald ». On peut déroger à la matière, pas à l'article.

IV. Discussion des articles

Article 1er

La commission parlementaire de concertation a décidé que les articles 74 à 77 réglaient une matière visée à l'article 77 de la Constitution. Ces articles doivent dès lors être disjoints et faire l'objet d'un projet de loi distinct.

Article 2

Amendement nº 38

M. Vandenberghe renvoie à la définition énoncée au d), selon laquelle les créances sursitaires extraordinaires visent les créances sursitaires garanties par une sûreté réelle ou un privilège spécial et les créances des créanciers-propriétaires. L'intervenant se réfère également aux développements qui ne sont pas tout à fait clairs sur ce point. Il réitère l'observation qu'il avait déjà formulée au cours de la discussion générale, à savoir qu'un privilège spécial est une sûreté réelle. Si le but de cette disposition est d'exclure les privilèges généraux du fisc et de la sécurité sociale, il y a lieu de le mentionner explicitement. La portée de la définition précitée n'est pas claire. Elle est pourtant d'une importance capitale, compte tenu de la volonté de classer les créances dans un certain ordre pour la continuité de l'entreprise.

L'intervenant profite de l'occasion pour évoquer l'arrêt nº 167/2008 de la Cour constitutionnelle du 27 novembre 2008 qui répond à une question préjudicielle posée par le juge des saisies de Neufchâteau sur le fonctionnement des sûretés financières visées aux articles 14 et 15 de la loi du 15 décembre 2004 relative aux sûretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sûreté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers. La Cour constitutionnelle a été invitée à se prononcer sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, des articles 14 et 15, § 1er, de la loi précitée, lus en combinaison avec les articles du Code judiciaire portant sur le règlement collectif de dettes, en ce qu'ils permettent que les conventions de netting soient opposées aux créanciers et aux tiers moyennant le respect des conditions prévues par lesdits articles, notamment en cas de situation de concours. Dans quelle mesure le règlement entre parties est-il opposable aux tiers ? La Cour constitutionnelle considère que les dispositions en question violent les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que ces conventions constitutives de sûreté sont opposables à des personnes physiques qui n'ont pas la qualité de commerçant au sens de l'article 1er du Code de commerce. Il y aura deux « masses », la première pour les commerçants et la seconde pour les personnes qui n'ont pas la qualité de commerçant, ces conventions constitutives de sûreté ne sont pas opposables.

Reste donc à savoir quelle est l'influence de cet arrêt de la Cour constitutionnelle sur le régime proposé de règlement de créances qui sont éventuellement susceptibles d'entraîner des conséquences similaires. Les conventions de garantie financière font-elles partie des sûretés réelles visées à l'article 2 ? Si c'est le cas, comment résout-on le problème de l'opposabilité aux personnes qui n'ont pas la qualité de commerçant ?

M. Verougstraete répond que le privilège du fisc et celui de l'ONSS ne constituent pas des créances extraordinaires, mais des créances sursitaires ordinaires. En langage normal, cela veut dire que le privilège général (détenu par le fisc par exemple) n'est pas non plus considéré comme une sûreté réelle. Mais si cela prête à confusion, l'intervenant ne voit pas d'inconvénient à supprimer éventuellement la notion de « sûreté réelle » dans l'article 2, d). L'on vise en effet tous les éléments qui sont garantis par un privilège spécial.

En ce qui concerne l'arrêt mentionné de la Cour constitutionnelle, l'intervenant pense que la doctrine ne le suivra pas sans problème. En effet, l'article 34 du projet de loi en discussion prévoit que, sans préjudice de l'application de la loi du 15 décembre 2004 relative aux sûretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sûreté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers, la compensation n'est permise au cours du sursis entre créances sursitaires et créances nées au cours du sursis que si ces créances sont connexes. Le but du projet à l'examen n'est donc pas de modifier la loi relative aux sûretés financières. La Cour constitutionnelle a pourtant partiellement remis cette loi en cause et rendu le netting impossible dans certains cas, ce qui va toutefois à l'encontre de la philosophie de plusieurs autres lois. L'arrêt de la Cour constitutionnelle porte sur une hypothèse déterminée, à savoir celle de personnes physiques qui ne sont pas des commerçants, de sorte que les sociétés sont également exclues; l'arrêt n'a donc aucun impact sur le projet de loi à l'examen. La Cour constitutionnelle devra vraisemblablement préciser sa position ou l'élargir à d'autres hypothèses.

M. Vandenberghe est d'avis que l'arrêt de la Cour constitutionnelle a bien une influence, fût-ce indirectement, sur le règlement de l'actif, compte tenu de la présence de deux « masses ». Ensuite, l'intervenant renvoie à la subdivision classique de la loi de 1851, où l'on a, d'une part, les sûretés réelles, les privilèges et les hypothèques et, d'autre part, les sûretés personnelles. L'intervenant estime que l'on devrait supprimer ici les « sûretés réelles ».

M. Verougstraete objecte qu'un problème risque alors de se poser pour les hypothèques. L'hypothèque fait partie des créances extraordinaires. Mais les privilèges généraux sont exclus des créances extraordinaires.

M. Vandenberghe se demande pourquoi les privilèges généraux seraient exclus si les clauses conventionnelles de réserve de propriété sont rendues purement et simplement opposables aux tiers. Le législateur a précisément institué les privilèges généraux pour conférer une certaine importance à certaines créances. Dans la doctrine, deux points de vue coexistent. Selon le premier, les sûretés peuvent être constituées par convention et, dans le respect de ces conditions conventionnelles, être rendues opposables aux tiers. Le second point de vue est qu'un système de sûretés doit répondre à des critères objectifs de transparence et d'opposabilité, faute de quoi les sûretés n'existeront que sur papier. Depuis la crise bancaire, cette discussion théorique est devenue une discussion politique d'importance.

Quoi qu'il en soit, la formulation de l'article 2 d) n'est pas correcte. Il vaudrait mieux parler de privilèges spéciaux et d'hypothèques, du moins si l'on entend exclure les privilèges généraux.

M. Verougstraete confirme que le ministre a voulu exclure délibérément les privilèges généraux, car, sans cela, la procédure proposée n'aurait aucune chance d'aboutir. Le seul privilège général maintenu est celui des travailleurs. Les privilèges généraux du fisc et de l'ONSS ont été délibérément relégués à un échelon inférieur. Le littera d) vise essentiellement les privilèges spéciaux et les hypothèques.

MM. Vandenberghe et Vandendriessche déposent l'amendement nº 38 (doc. Sénat, nº 4-995/2), qui vise à préciser plus clairement que les créances garanties par un privilège général sont exclues de la définition des créances sursitaires extraordinaires. Les hypothèques sont explicitement visées.

En ce qui concerne l'article 34, l'intervenant renvoie à l'arrêt susmentionné de la Cour constitutionnelle. Le cas échéant, des initiatives législatives devront être prises pour modifier la loi du 15 décembre 2004.

Article 5

M. Vandenberghe évoque les observations formulées par le service d'Évaluation de la législation (voir la note en annexe).

M. Verougstraete répond que le but était d'ouvrir autant que possible la procédure « portail » au débiteur. Pour les autres parties, le droit commun reste d'application. Il ne s'agit pas d'une discrimination, car il y a une bonne raison à cela. D'ailleurs, cette différenciation existait déjà dans l'ancienne loi sur le concordat judiciaire.

Article 6

Cet article prévoit que lorsque la loi proposée prescrit une publication au Moniteur belge, celle-ci vaut notification.

M. Vandenberghe rappelle que le Moniteur belge n'est plus consultable en tant que tel, mais seulement sur support électronique. Il s'agit donc en fait d'une publication « fictive ». Est-il justifié de considérer que pareille publication vaut notification ?

M. Delpérée fait remarquer que la Cour constitutionnelle a tranché la question. Elle a estimé que la publication du Moniteur belge sur internet ne posait aucun problème.

M. Verougstraete répond que l'alinéa 2 de l'article 6 est une disposition résiduaire. En principe, on opte le plus possible pour une notification individuelle (voir l'article 26). Ce n'est qu'en cas de problème au niveau de la notification individuelle que la publication vaut notification. Le principe est donc qu'une notification individuelle est, dans la mesure du possible, dans tous les cas imposée.

Article 9

Amendement nº 5

M. Vandenberghe renvoie aux observations formulées par le service d'Évaluation de la législation (voir la note jointe en annexe).

M. Verougstraete trouve cette observation justifiée. On ferait bien de préciser que la liste est transmise au président du tribunal du domicile du débiteur ou, s'il s'agit d'un commerçant, de l'établissement principal du débiteur, ou, s'il s'agit d'une personne morale, du siège social du débiteur d'une lettre de change ou d'un billet à ordre.

M. Vandenberghe et consorts déposent à cet effet l'amendement nº 5 (doc. Sénat, nº 4-995/2).

Article 10

Amendement nº 6

M. Vandenberghe renvoie aux observations formulées par le service d'Évaluation de la législation (voir la note jointe en annexe).

M. Verougstraete répond que cet article est difficile à appliquer. Il s'agit en effet de jugements prononcés par un tribunal autre que celui du ressort dans lequel la procédure est diligentée. Les problèmes sont donc légion au niveau de la collecte des données, si bien que l'on ne doit pas mettre la barre trop haut.

En ce qui concerne la deuxième observation, l'intervenant fait remarquer qu'il n'est pas faisable de charger les greffiers d'autres juridictions d'établir s'il s'agit ou non d'une dette à caractère commercial.

Seule la notion de commerçant permet de déterminer simplement les décisions à prendre en compte.

Il va de soi que sont seuls visés les jugements qui ont trait à l'activité commerciale et qui sont pertinents dans le cadre de l'application de la loi.

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 4-995/2) visant à remplacer dans le texte néerlandais le mot « handelsfonds » par le mot « handelszaak », qui est le seul terme néerlandais correct.

Article 14

Amendement nº 7

Le gouvernement propose de remplacer les mots « mandataire(s) de justice » par les mots « administrateur(s) provisoire(s) ». Le ministre renvoie à l'article 28 du projet à l'examen, qui utilise également la notion d'administrateur provisoire.

Il importe de préserver la connotation positive du terme « mandataire de justice », intervenant dont la désignation s'inscrit en outre clairement dans le cadre d'une procédure de réorganisation judiciaire.

M. Vandenberghe souhaite savoir quel est exactement le statut juridique des administrateurs provisoires. Sont-ils considérés comme des mandataires de justice sur le plan de la responsabilité ?

M. Verougstraete répond qu'en vertu de l'article 14, le président du tribunal doit déterminer de manière précise l'étendue de la mission de l'administrateur provisoire. En ce sens, l'administrateur provisoire doit rendre des comptes au président du tribunal, ce qui le rend comparable au mandataire de justice. Mais en même temps, l'administrateur provisoire est aussi un organe de la société. Le terme « administrateur provisoire » implique que l'on accorde moins d'importance à la justification vis-à-vis du tribunal. Le mandataire de justice ou l'administrateur provisoire a en l'espèce une double qualité.

M. Mahoux rappelle qu'un administrateur provisoire est un mandataire de justice. Tous les mandataires de justice ne sont cependant pas des administrateurs provisoires. Le terme le plus général recouvre la plus grande partie des situations telles qu'elles sont posées. Il semble dès lors préférable d'opter pour un terme général.

M. Vandenberghe souligne que les compétences du mandataire de justice visé à l'article 14 sont fixées par le président du tribunal. Même s'il est l'organe de la société, ce n'est pas la société qui fixe sa mission. L'intervenant est d'avis qu'en l'espèce, il y a désignation d'un mandataire judiciaire en qualité d'administrateur provisoire.

À la suite de la discussion, M. Verougstraete pense que le terme générique est le plus approprié car il couvre les deux facettes. Il plaide dès lors pour le maintien du texte.

M. Delpérée souligne que l'alinéa 2 de l'article apporte un début de réponse. C'est dans son ordonnance que le président du tribunal détermine de manière précise l'étendue et la durée de la mission du mandataire de justice. Il propose dès lors de ne pas retenir l'amendement.

M. Vandenberghe et consorts déposent un amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui vise à remplacer les mots « mandataire(s) de justice » par les mots « administrateur(s) provisoire(s) ».

Article 17

Amendement nº 39

Mme Crombé-Berton constate que le § 2, 6º, prévoit qu'il faut joindre à la requête une prévision d'encaissements pour la durée demandée ou octroyée du sursis. Comment le requérant peut-il, à ce stade de la procédure, connaître la durée octroyée du sursis ?

M Verougstraete reconnaît qu'au moment du dépôt de la requête, le débiteur ne connaît pas la durée du sursis. Il faudrait supprimer les mots « ou octroyée ».

Mme Crombé-Berton dépose à cet effet l'amendement nº 39 (doc. Sénat, nº 4-995/2).

Article 22

Mme Crombé-Berton constate que tant que le tribunal n'a pas statué sur la requête en réorganisation judiciaire, aucune réalisation de biens meubles ou immeubles du débiteur ne peut intervenir suite à l'exercice d'une voie d'exécution.

Quelles sont les mesures de publicité qui sont prévues pour que le notaire instrumentant sache que l'exécution forcée est bloquée en raison de la demande de réorganisation judiciaire ? Comment le notaire sera-t-il informé de l'impossibilité de procéder à une exécution forcée sur les biens du débiteur ?

M. Verougstraete fait remarquer que cette disposition existe déjà dans la procédure actuelle de concordat et n'a pas donné lieu à des problèmes dans la pratique. Les huissiers de justice qui sont appelés à exécuter sont informés par le débiteur du fait qu'il a déposé une requête. On a voulu éviter des formalités de publicité excessives qui auraient ébranlé le crédit du débiteur. Dans une procédure d'exécution, c'est au débiteur qu'il appartiendra de signaler à l'officier ministériel que l'exécution forcée n'est pas possible car il bénéficie d'une protection à la suite du dépôt de sa requête en réorganisation.

Mme Crombé-Berton demande quelles sont les conséquences en terme de responsabilité de l'officier ministériel, si le débiteur ne signale pas le dépôt de sa requête.

M. Verougstraete répond que c'est le débiteur qui est en défaut et que l'officier ministériel n'encourt pas de responsabilité s'il n'a pas été informé.

Article 34

En ce qui concerne l'article 34, l'intervenant renvoie à la discussion relative à l'article 2 et à l'arrêt mentionné de la Cour constitutionnelle. Au besoin, des initiatives législatives devront être prises afin de modifier la loi du 15 décembre 2004.

Article 38

Amendements nos 8 et 9

M. Vandenberghe renvoie aux observations formulées par le service d'Évaluation de la législation (voir la note jointe en annexe).

Le gouvernement estime que ces observations sont fondées.

M. Vandenberghe et consorts déposent dès lors les amendements nos 9 et 35 (à l'article 60) afin de donner suite à ces observations.

L'article 38, § 1er, alinéa 2, est remplacé par la disposition suivante: « La durée maximale du sursis ainsi prorogé ne peut excéder douze mois à compter du jugement accordant le sursis. »

L'amendement nº 8 des mêmes auteurs est une simple correction linguistique au texte français.

Article 40

Amendement nº 10

M. Vandenberghe renvoie aux observations formulées par le service d'Évaluation de la législation (voir la note jointe en annexe).

Le gouvernement estime que ces observations sont fondées.

M. Vandenberghe et consorts déposent donc un amendement nº 10 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui vise à remplacer l'alinéa 2 de l'article précité par la disposition suivante: « Le tribunal, sur requête du débiteur et le juge délégué entendu en son rapport, met fin à la procédure en tout ou en partie par un jugement qui la clôture. »

M. Delpérée pense que la remarque du Service d'évaluation de la législation est extrêmement pointilliste. Le juge dispose d'un pouvoir d'appréciation des moyens invoqués devant lui. Il n'est pas nécessaire de prévoir que le tribunal met fin, en tout ou en partie, à la procédure. C'est la liberté de l'intervention du juge et il n'est pas nécessaire de le mentionner expressis verbis dans le texte.

Mme Crombé-Berton ne partage pas cette analyse. Elle pense que l'ajout des mots « en tout ou en partie » a sa justification. La procédure ne s'arrête pas nécessairement dans son ensemble.

M. Verougstraete précise qu'il avait été suggéré de prévoir que le tribunal pouvait mettre fin à la procédure. Un tel libellé avait fait craindre l'arbitraire du juge. Les auteurs ont opté pour un texte qui laisse la maîtrise au débiteur. Si celui-ci demande d'arrêter la procédure, le juge doit y mettre fin. Il est cependant préférable de préciser qu'il y met fin en tout ou en partie car le débiteur peut renoncer partiellement à la procédure.

M. Delpérée précise qu'il n'a aucun problème sur le fond. La question est de savoir s'il est nécessaire de préciser dans le texte que le juge peut décider de mettre fin en tout ou en partie. Il faudrait dans ce cas le préciser pour toutes les décisions de justice.

M. Vandenberghe pense que l'ajout des mots « en tout ou en partie » clarifie le texte et permettra d'éviter des contestations ultérieures.

Article 41

Amendement nº 11

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

L'amendement nº 11 de M. Vandenberghe et consorts vise à remplacer, dans les paragraphes 1er et 2, les mots « du sursis » par les mots « de la procédure de réorganisation judiciaire » et à remplacer le paragraphe 3 par une disposition précisant que le jugement est notifié par pli judiciaire au débiteur.

L'intervenant souhaiterait encore formuler une remarque en ce qui concerne la faillite d'office. À cet égard, la Cour de cassation a lancé plusieurs mises en garde contre la violation des droits de la défense. En a-t-on tenu compte ?

M. Verougstraete répond que, dans le cas visé au § 2, il n'y a pas de possibilité d'aller vers une faillite. Dans la situation visée au § 1er, l'affaire est déjà pendante et la faillite est la conséquence logique de l'échec de la procédure visée. Le paragraphe 2, en revanche, vise une action disciplinaire. Si le débiteur ne dépose pas les pièces, cela n'augure rien de bon, mais il ne peut être question d'une faillite car cela reviendrait à ignorer les droits de la défense. Il s'agit ici d'une procédure autonome.

Article 43

Amendement nº 13

M. Vandenberghe renvoie à l'observation formulée par le service d'Évaluation de la législation et dépose l'amendement nº 13 (doc. Sénat, nº 4-995/2) afin d'y donner suite. Il s'agit d'une correction d'ordre purement textuel.

Article 46

Amendement nº 14

L'amendement nº 14 (doc. Sénat, nº 4-995/2) de M. Vandenberghe et consorts vise à remplacer dans le texte néerlandais du paragraphe 6 le mot « verbeterende » par le mot « verbeterde ».

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

S'agissant de la première remarque, M. Verougstraete répond que l'objectif du législateur est bel et bien de ne pas fixer de règles de procédure. Il est renvoyé au droit commun de la procédure, tel que visé dans le Code judiciaire. On évite la demande du rapport purement pro forma au juge délégué afin de ne pas alourdir inutilement la procédure.

En ce qui concerne la deuxième remarque, l'intervenant répond qu'il s'agit en l'espèce de deux phases totalement distinctes de la procédure. Il n'y a donc aucune contradiction.

Article 47

Amendements nos 15 et 16

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

M. Vandenberghe et consorts déposent les amendements nos 15 et 16 (doc. Sénat, nº 4-995/2) visant à apporter les corrections de texte proposées.

M. Verougstraete peut marquer son accord sur ces propositions de texte.

Article 53

Amendement nº 17

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 17 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter les corrections de texte proposées.

Article 54

M. Vandenberghe renvoie à l'observation du service d'Évaluation de la législation.

M. Verougstraete répond que les représentants des organisations syndicales ne souhaitent pas être mentionnés formellement parmi les personnes à entendre. Ils ne veulent pas avoir d'obligation à cet égard. Ils pourront évidemment toujours être entendus. Les employeurs étant du même avis, il n'y aura pas d'alourdissement de la procédure. Sur ce point, il existe donc un consensus entre les partenaires sociaux.

Article 56

Amendement nº 18

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 4-995/2) visant à apporter les corrections de texte proposées au 2).

En ce qui concerne la première remarque, M. Verougstraete répond qu'il est superflu de rappeler constamment quelles sont les personnes qui peuvent faire appel.

Article 58

M. Vandenberghe renvoie à l'observation du service d'Évaluation de la législation.

M. Verougstraete répond qu'il s'agit de deux situations totalement différentes et qui requièrent donc aussi des approches différentes. En cas de refus d'octroi du sursis, on veut avoir la certitude que le juge ne prononcera pas la faillite de manière inconsidérée. Pareille décision est irréparable. La révocation est une toute autre hypothèse.

L'intervenant renvoie également à la discussion générale concernant le système général de l'exécution par provision.

Article 59

Amendements nos 19 et 20

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

M. Vandenberghe et consorts déposent les amendements nos 19 et 20 (doc. Sénat, 4-995/2) en vue de donner suite à ces observations.

Article 61

Amendement nº 21

M. Vandenberghe renvoie aux observations du service d'Évaluation de la législation.

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 21 (doc. Sénat, 4-995/2) en vue de donner suite à cette observation.

Amendement nº 34

Mme Crombé-Berton dépose l'amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 4-995/2) visant à remplacer le § 6. L'intervenante renvoie aux remarques formulées au cours de la discussion générale. La compétence des cours et tribunaux ne peut pas être fixée par une convention collective de travail. Par ailleurs, le § 6 s'analyse comme une disposition transitoire qui disparaîtra totalement lorsque la convention collective de travail aura été rendue obligatoire par arrêté royal.

L'amendement propose de remplacer le § 6 par ce qui suit: « Les dispositions du présent article s'appliquent sous réserve des dispositions d'une convention collective de travail, ratifiée par le Roi, réglementant de façon plus précise les droits des travailleurs concernés par un transfert dans le cadre d'une réorganisation judiciaire. ».

M. Delpérée constate que l'objectif de l'amendement est de clarifier la portée de l'article 61. Cependant, sous couvert de clarification, l'amendement modifie fondamentalement les données du problème. En effet, les dispositions de l'article 61 continueront à s'appliquer, au moins partiellement, puisque l'amendement précise que c'est « sous réserve des dispositions d'une convention collective de travail ».

C'est un changement complet de la philosophie du système.

Mme Crombé-Berton rappelle qu'elle pensait, à la première lecture de l'article 61, que cette disposition allait disparaître complètement dès la ratification de la convention collective de travail. Ce n'est en fait pas totalement le cas. L'article 61 n'est pas une disposition transitoire pure. Une partie de l'article va continuer à s'appliquer alors que l'autre partie, concernant les droits des travailleurs, disparaîtra lorsque la convention collective sera adoptée au sein du Conseil national du travail.

M. Verougstraete confirme que l'article 61 ne disparaîtra pas intégralement car il transpose en partie une directive européenne. Le paragraphe 1er de l'article pose le principe capital de la continuité des droits des travailleurs. Ce point a fait l'objet de discussions très âpres lors des négociations entre les représentants des travailleurs et des employeurs.

Le principe de la continuité des droits des travailleurs est conforme à la jurisprudence de la Cour de Luxembourg qui considère que la cession s'inscrit dans une logique suffisamment volontaire pour que l'on puisse maintenir la continuité des contrats de travail.

Les paragraphes 2 à 5 visent des exceptions ou des restrictions à la continuité. Pour ces restrictions, l'idée est qu'elles puissent être remplacées globalement par une autre structure résultant de la négociation entre les partenaires sociaux. On peut dès lors imaginer que les négociations aboutiront à un système totalement différent du régime proposé, y compris sur la question de la compétence du tribunal du travail pour homologuer le transfert projeté.

Sur le plan conceptuel, on envisage un remplacement du régime proposé aux paragraphes 2 à 5 par une solution négociée par les partenaires sociaux. Cette méthode de travail n'est pas farfelue dans notre système juridique.

Le gouvernement donne en effet la préférence à la conclusion d'un accord, que les partenaires sociaux peuvent approuver.

M. Vankrunkelsven considère que la dernière phrase du paragraphe 6 est superflue. Il est évident que les dispositions de la convention collective de travail, qui remplace l'article 61, peuvent déroger à cet article. L'intervenant dépose à cet effet l'amendement nº 40 (doc. Sénat, nº 4-995/2).

M. Verougstraete marque son accord. La dernière phrase peut être supprimée. Par contre, il faut que l'on sache clairement qu'un nouveau concept peut être créé pour les paragraphes 2 à 5.

M. Delpérée peut souscrire à l'idée de supprimer la dernière phrase du paragraphe 6, à condition que lors de la conception de la convention collective ainsi que lors de la ratification par le Roi un mécanisme de délégation permettant de modifier le texte en projet soit prévu.

M. Mahoux trouve curieux de préciser dans la loi que le législateur délègue à une convention collective de travail la possibilité de remplacer la loi adoptée par le Parlement. Même si le pouvoir exécutif intervient à travers le mécanisme de la ratification, cela pose un problème de hiérarchie des normes.

L'intervenant plaide pour une solution plus claire.

Le projet à l'examen pose, au paragraphe 1er, la règle générale du transfert des droits et devoirs du personnel en cas de transfert de l'entreprise. Les paragraphes 3 à 5 prévoient une série d'exceptions et il est en outre prévu qu'une convention collective, qui pourra modifier le régime proposé, devra être négociée.

Ne serait-il pas plus simple de prévoir que la loi sera modifiée quand la convention collective sera signée ? Il appartiendra à ce moment-là au législateur de modifier la loi.

Mme Crombé-Berton déduit de l'explication de M. Verougstraete que les paragraphes 2 à 5 de l'article sont des dispositions transitoires. Le paragraphe 1er n'est pas une disposition transitoire, sous peine de le faire disparaître lorsque la convention collective de travail sera adoptée. Ne serait-il pas plus clair dans ce cas de faire commencer le paragraphe 6 par les mots « à l'exception du paragraphe 1er, les dispositions du présent article ... » ?

M. Delpérée rappelle qu'il n'a jamais été contesté que la loi pouvait déléguer au Roi des compétences clairement délimitées et que le Roi pouvait les exercer selon les méthodes qui sont les siennes. Il n'y a sur le plan juridique aucune objection au mécanisme de la délégation de compétence prévue au paragraphe 6. Il doit évidemment y avoir une ratification par le Roi de la convention collective sous peine de faire perdre au mécanisme toute sa validité.

Sur le plan politique, le mécanisme de la convention collective venant se substituer à des dispositions législatives est un élément central du projet.

M. Vandenberghe constate que la compétence législative n'est pas accordée au Roi, en l'occurrence, mais aux partenaires sociaux. En réalité, les partenaires sociaux font les règles législatives, qui doivent simplement être ratifiées par le Roi. En fait, les partenaires sociaux se voient accorder la compétence de modifier la loi. Quand cela s'est-il déjà produit dans le passé ? D'un point de vue juridique, il ne semble pas aller de soi de déléguer la compétence législative à un organe qui ne figure même pas dans la Constitution. L'intervenant estime que ce règlement est inconstitutionnel.

En outre, lorsque la compétence législative est déléguée au Roi, il est généralement prévu que le législateur doit ratifier l'arrêté royal dans les 12 mois, lorsque la loi est modifiée.

M. Mahoux rappelle que la règle générale est contenue au paragraphe 1er: c'est le transfert des droits et devoirs des travailleurs. C'est le principe qui donne le plus de garanties aux parties concernées. Les paragraphes 2 à 5 rendent possibles des négociations entre les représentants des travailleurs et le cessionnaire, sous autorité de justice, pour aboutir à certaines dérogations.

Ne serait-il pas plus clair de prévoir que l'article 61, paragraphes 2 à 5, prennent fin dès qu'une convention collective de travail aura été conclue et ratifiée par le Roi ? Les exceptions prennent fin à ce moment sans qu'il soit nécessaire de prévoir de délégation. Si le législateur le souhaite, il pourra, à ce moment-là, inscrire dans la loi les exceptions prévues dans la convention collective de travail.

M. Verougstraete affirme que le texte de l'article 61 est le fruit d'un délicat équilibre entre les partenaires sociaux.

Il souligne que le § 1er doit être lu en corrélation avec le reste de la disposition; l'article 61 constitue donc un dispositif global. Il n'est dès lors pas judicieux d'isoler le § 1er des autres paragraphes.

Si l'on analyse les différents éléments de fait, force est de constater que ce seront les partenaires sociaux qui vont décider. Ils le feront selon les termes qui sont prévus dans la loi en projet. Ils apporteront certes des nuances mais le régime proposé aux paragraphes 1er à 5 sera globalement maintenu. Le Roi, lorsqu'il ratifiera la convention collective, jouera un rôle de garant de conformité de l'accord à la directive.

Il n'est pas possible d'isoler le paragraphe 1er des paragraphes 2 à 5. La directive permet certaines nuances, y compris pour le paragraphe 1er. Elle n'impose pas la reprise complète et automatique de tous les contrats d'emploi.

Les négociations ayant été ardues, l'intervenant préférerait qu'on ne modifie pas trop le texte.

Il ne voit cependant pas d'objection à la suppression de la dernière phrase du § 6.

Il ne faut pas oublier qu'on se situe ici dans une matière où les partenaires sociaux mènent traditionnellement le jeu. Bien que cela puisse paraître singulier, la tradition veut que, dans cette matière, les partenaires sociaux aient la main sur le plan législatif.

M. Vandenberghe n'a nullement l'intention de remettre en cause l'équilibre qui a été trouvé. Cependant, il ne faut pas perdre de vue qu'une CCT peut se rapporter uniquement aux droits des parties concernées, et non à des statuts juridiques de tiers. La délégation générale prévue à l'article 61 a pour effet une délégation des attributions du législatif aux partenaires sociaux, lesquels pourraient ainsi modifier l'organisation judiciaire.

Mme Crombé-Berton souligne que la délégation au Roi prévue à l'article 61 n'est pas habituelle. Les conventions collectives de travail rendues obligatoires par arrêté royal relèvent d'une procédure sui generis propre au droit social.

Elle estime qu'en l'espèce, le texte donne une délégation aux partenaires sociaux qui pourront dans une certaine mesure déroger à la loi avec, comme balise, la ratification ultérieure par le Roi. Ce qui pose problème, c'est la manière dont le paragraphe 6 est rédigé: les dispositions (...) s'appliquent jusqu'à la ratification par le Roi. Elle en déduit que l'ensemble de l'article disparaît dès que la convention collective est rendue obligatoire par arrêté royal.

A tout le moins, la compétence des cours et tribunaux ne peut être déléguée aux partenaires sociaux.

C'est pour ces raisons qu'elle a déposé l'amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui prévoit que la convention collective ne remplace la loi que pour les matières qui peuvent être réglées par une convention collective de travail.

À la suite de la discussion et tenant compte du fait que l'article contient une disposition transitoire pour permettre aux partenaires sociaux de trouver une solution dans le cadre du transfert du personnel, sans que cela remette en cause le principe constitutionnel selon lequel l'organisation des cours et tribunaux reste une matière réservée au pouvoir législatif, Mme Crombé-Berton décide de retirer son amendement nº 34.

Amendement nº 36

M. Swennen dépose l'amendement nº 36 (doc. Sénat, nº 4-995/2) visant à remplacer l'article 61 par ce qui suit: « Les droits des travailleurs en cas de changement d'employeur du fait d'un transfert d'entreprise en application de la présente loi sont réglés dans une convention collective de travail, confirmée par le Roi, conclue au sein du Conseil national du travail. ».

M. Mahoux trouve curieux que l'on confie le soin au Conseil national du travail de faire le travail législatif à la place du législateur. La règle générale fixée au paragraphe 1er est fondamentale. On peut imaginer que les exceptions prévues aux paragraphes suivants prendront fin à partir du moment où une convention collective de travail est ratifiée. Le législateur reste libre de traduire dans la loi les exceptions négociées par les partenaires sociaux.

M. Delpérée rappelle que notre pays a développé depuis un siècle la technique des conventions collectives de travail. On ne peut nier la concertation sociale.

Par ailleurs, lorsque les partenaires sociaux négocient une convention collective de travail et lorsque le Roi ratifie un tel accord, cela se fait évidemment dans le respect du droit européen, du droit constitutionnel et des autres règles juridiques impératives.

M. Vandenberghe demande s'il est possible d'opérer un transfert « en bloc » des contrats de travail. Qu'en est-il des contrats « intuitu personae » ?

M. Verougstraete répond que l'on part du principe que le transfert se fait de manière globale, c'est-à-dire « en bloc ». Il n'y a sur ce plan aucune modification par rapport à la réglementation actuelle. Des dérogations individuelles sont toutefois possibles, mais dans des limites et délais précis.

Article 64

M. Vandenberghe et consorts déposent un amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à mettre la terminologie en concordance avec celle qui est employée dans le reste du projet de loi.

Le ministre peut souscrire à l'amendement.

Article 67

Amendements nos 23 et 24

M. Vandenberghe et consorts déposent les amendements nos 23 et 24 (subsidiaire à l'amendement nº 23) (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tendent à apporter des corrections purement textuelles.

Article 69

Amendement nº 24

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 25 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction textuelle.

Article 71

Amendement nº 26

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 72

Amendement nº 27

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction de nature purement textuelle.

Articles 74 à 77 (articles 2 à 6 du texte adopté nº 4-995/6 — article 77 de la Constitution)

Étant donné que ces articles règlent une matière visée à l'article 77 de la Constitution, ils sont disjoints pour faire l'objet d'un projet de loi distinct modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la continuité des entreprises (doc. Sénat, nº 4-995/6).

L'article 74 (article 2 du texte adopté nº 4-995/6) n'appelle pas d'autres observations.

Article 75 (article 3 du texte adopté nº 4-995/6)

Amendement nº 1

Le gouvernement dépose l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 4-995/2) tendant à inscrire dans le chapitre idoine du Code judiciaire, plus précisément à l'article 578 dudit Code, la compétence matérielle qui a été attribuée au tribunal du travail par l'article 61et ce, afin d'améliorer la visibilité de cette dernière.

L'article 76 (article 4 du texte adopté nº 4-995/6) n'appelle pas d'autres observations.

Article 76/1 (nouveau) (article 5 du texte adopté nº 4-995/6)

Amendement nº 2

Le gouvernement dépose l'amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 4-995/2) tendant à inscrire dans le chapitre idoine du Code judiciaire, plus précisément à l'article 626/1 dudit Code, la compétence territoriale qui a été attribuée au tribunal du travail par l'article 61 et ce, afin d'améliorer la visibilité de cette dernière.

Article 77 (article 6 du texte adopté nº 4-995/6)

Amendement nº 28

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 28 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 80

Amendement nº 29

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 29 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 81

Amendement nº 30

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 30 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 82

Amendement nº 31

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 30 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 86

Amendement nº 32

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 30 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 88

Amendement nº 33

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 33 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à apporter une correction purement textuelle.

Article 90

Amendement nº 3

L'amendement nº 3 de M. Delpérée (doc. Sénat, nº 4-995/2) est retiré.

Amendement nº 4

M. Vankrunkelsven et Mme Taelman déposent l'amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui tend à faire entrer la loi en vigueur à une date à déterminer par le Roi et au plus tard six mois après sa publication au Moniteur belge.

Amendement nº 37

M. Swennen dépose l'amendement nº 37 (doc. Sénat, nº 4-995/2) qui prévoit que la loi entrera en vigueur à une date fixée par le Roi, mais au plus tôt à la date à laquelle les lois et les CCT qui prévoient ces adaptations seront entrées en vigueur. L'auteur fait référence à un avis rendu en urgence par le CNT, qui indique qu'il ne sera pas possible d'exécuter, ni d'appliquer la loi relative à la continuité des entreprises si l'on n'adapte pas simultanément une série d'autres dispositions légales et conventionnelles.

Le ministre soutient l'amendement nº 4. La dernière phrase du texte initial devient dès lors sans objet car superflue et de nature à semer la confusion. Enfin, l'intervenant souligne l'urgence du projet en discussion et insiste pour qu'il soit mis en œuvre avec toute la célérité requise.

La commission décide de retenir une même date d'entrée en vigueur pour le projet de loi nº 4-995/6 (article 77 de la Constitution — article 7)

M. Mahoux peut soutenir l'amendement nº 4 de M. Vankrunkelsven et Mme Taelman. Encore faut-il veiller à ce que l'entrée en vigueur des différents articles ne se fasse pas de manière fractionnée dans le temps. Il est fondamental que l'ensemble des dispositions entrent en vigueur en même temps.

M. Verougstraete le confirme.

V. Votes

Projet de loi relative à la continuité des entreprises (article 78 de la Constitution — texte adopté nº 4-995/5)

Les amendements nos 1, 2, 5 et 6 sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

Les amendements nos 3 et 7 sont retirés.

L'amendement nº 4 est adopté par 8 voix contre 1 et 1 abstention.

Les amendements nos 8 à 20 sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 21 est adopté par 8 voix contre 1 et 1 abstention.

Les amendements nos 22 à 33 et l'amendement nº 35 sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 34 est retiré.

L'amendement nº 36 est rejeté par 8 voix contre 1 et 1 abstention.

L'amendement nº 37 est rejeté par 7 voix contre 1 et 2 abstentions.

Les amendements nos 38 et 39 sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 40 est retiré.

L'ensemble du projet de loi amendé est adopté par 8 voix et 2 abstentions.

Confiance a été faite au rapporteur pour la rédaction du présent rapport.

Projet de loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la continuité des entreprises (article 77 de la Constitution — texte adopté nº 4-995/6)

Les amendements nos 1, 2 et 28 sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

Les articles 1er et 74 à 77 (articles 1er à 6 du texte adopté) sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

L'article 7 du texte adopté relatif à l'entrée en vigueur est adopté par 9 voix et 1 abstention.

L'ensemble du projet de loi amendé est adopté par 8 voix et 2 abstentions.

Confiance a été faite au rapporteur pour la rédaction du présent rapport.

Le rapporteur, Le président,
Hugo VANDENBERGHE. Patrik VANKRUNKELSVEN.

ANNEXE

Projet de loi relative à la continuité des entreprises (doc. Sénat, nº 4-995/1)

Avis du service de l'Évaluation législative

Observation générale

Les articles 74 à 77 règlent une matière visée à l'article 77 de la Constitution, et non une matière visée à l'article 78 de la Constitution (1) . Ils doivent donc figurer dans un texte distinct.

Observations relatives aux articles

Article 5

Par dérogation aux articles 1025, 1026, 1027 et 1029 du Code judiciaire, les requêtes visées dans la loi en projet peuvent être signées par le débiteur seul ou par son avocat (article 5, dernier alinéa).

Cette dérogation ne vaut donc pas pour les autres personnes qui déposent une requête, comme un tiers intéressé (art. 27, § 2; art. 28, § 1er), un créancier (art. 46, § 4) ou un cessionnaire (art. 61, § 5).

Est-ce là l'intention du législateur et, dans l'affirmative, celle-ci est-elle conforme aux principes constitutionnels d'égalité et de non-discrimination ?

Article 9

Toutes les données auxquelles se rapportent les articles 8 à 10 doivent être transmises au tribunal de l'établissement principal ou du siège social.

Seules les données visées à l'article 9 (les protêts des lettres de change acceptées et des billets à ordre dont le paiement n'a pas encore été constaté) sont transmises au tribunal du domicile, de l'établissement principal ou du siège social.

Cela n'accroît-il pas le risque d'éparpillement des données relatives aux commerçants entre le tribunal du domicile et le tribunal de l'établissement principal ?

L'article 6 actuel de la loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire prévoit que ces protêts sont envoyés au président du tribunal de commerce du domicile du débiteur ou, s'il s'agit d'un commerçant, de l'établissement principal du débiteur ou, s'il s'agit d'une personne morale, du siège social du débiteur d'un effet de commerce.

Article 10

1) Aux termes de l'alinéa 1er, les jugements de condamnation par défaut et les jugements contradictoires prononcés contre des commerçants doivent être transmis au greffe du tribunal.

Il s'agit de la seule disposition du projet de loi où il est question de « commerçants » et non de « débiteurs ». C'est par conséquent la seule disposition du projet qui s'applique bien aux commerçants, mais pas aux sociétés agricoles ou aux sociétés civiles à forme commerciale.

Sans doute faut-il, dans cette disposition, remplacer le mot « commerçants » par le mot « débiteurs », afin d'éviter un risque de contradiction avec l'article 8, entre autres, qui dispose que les greffes tiennent à jour les renseignements et données utiles concernant « les débiteurs », y compris dès lors les sociétés agricoles et les sociétés civiles à forme commerciale.

2) Par « jugements de condamnation (...) et (...) jugements contradictoires prononcés contre des commerçants qui n'ont pas contesté le principal réclamé », il faut raisonnablement entendre uniquement les jugements concernant des dettes commerciales, et non ceux concernant par exemple le paiement d'une pension alimentaire.

Il ne serait pas inutile de le préciser, tout au moins dans les travaux préparatoires.

Article 38

Selon cet article, la durée du sursis prorogé « ne peut excéder douze mois » (2) à compter du jugement accordant le sursis, sans préjudice de l'article 60, alinéa 2.

L'article 60, alinéa 2, prévoit que le tribunal peut ordonner un sursis supplémentaire de six mois, « nonobstant l'article 38 ».

La combinaison de ces deux articles, avec leur réserve réciproque (sans préjudice, nonobstant), crée une certaine confusion.

L'application de l'article 38, sans préjudice de l'article 60, implique que la durée maximale de douze mois peut être prolongée de six mois.

L'application de l'article 60, nonobstant l'article 38, implique par contre que le tribunal peut proroger le sursis de six mois, sans toutefois excéder la durée maximale de douze mois.

Quelle est l'interprétation correcte ? Selon l'option qui est prise, il faut supprimer la réserve dans un des deux articles en question.

Article 40

1) L'alinéa 2 dispose que le tribunal met fin à la procédure sur requête du débiteur et le juge délégué entendu en son rapport. Dans sa formulation actuelle, cette disposition donne à penser que le tribunal doit toujours faire droit à la requête de fin de procédure et qu'il ne peut donc pas la rejeter. D'autre part, l'alinéa premier dispose que le débiteur ne peut renoncer à la procédure qu'à certaines conditions, ce qui implique que le tribunal doit pouvoir examiner la requête.

Mieux vaudrait sans doute rédiger l'alinéa 2 comme suit:

« Le tribunal peut, sur requête du débiteur et le juge délégué entendu en son rapport, mettre fin à la procédure par un jugement qui la clôture. »

2) Le débiteur peut renoncer en tout ou en partie à sa demande en réorganisation judiciaire (article 40, alinéa 1er).

Or, l'article 40, alinéa 2, dispose que le tribunal met fin à la procédure par un jugement qui la clôture. Cela semble signifier que le tribunal ne peut mettre fin à la procédure que dans son ensemble, et non en partie, par exemple à l'égard de certains créanciers seulement. Ne faudrait-il pas préciser que le tribunal peut mettre fin en tout ou en partie à la procédure ?

Article 41

1) L'article 41, § 1er, décrit une hypothèse dans laquelle le tribunal ordonne la fin anticipée de la procédure de réorganisation judiciaire par un jugement qui la clôture. Ne faut-il pas, ici aussi, indiquer que le tribunal peut mettre fin en tout ou en partie à la procédure ? En effet, la fin anticipée peut aussi être ordonnée lorsque le débiteur n'est plus en mesure d'assurer la continuité d'une partie de son entreprise ou de ses activités.

2) Aux termes du § 1er, alinéa 1er, le tribunal peut ordonner la fin anticipée de la procédure de réorganisation judiciaire par un jugement qui la clôture.

En vertu du § 1er, alinéa 3, le tribunal qui ordonne la fin anticipée du sursis peut prononcer par le même jugement la faillite du débiteur.

L'alinéa 3 s'applique-t-il au tribunal qui a ordonné la fin anticipée de la procédure de réorganisation judiciaire ? Dans l'affirmative, ne vaudrait-il pas mieux employer une terminologie plus uniforme ?

3) Le tribunal qui prononce la fin anticipée du sursis sur la base de l'article 41, § 2, doit avoir préalablement entendu le débiteur en ses moyens.

Cette condition n'est pas prévue pour le tribunal qui prononce la fin anticipée du sursis sur la base de l'article 41, § 1er, sur citation du ministère public ou de tout intéressé.

Comment cette différence de traitement se justifie-t-elle ?

4) En vertu du § 1er, le tribunal peut mettre fin de manière anticipée à la procédure de réorganisation judiciaire par un jugement qui la clôture.

Sur la base du § 2, il peut ordonner la suspension anticipée du sursis.

Quelle est la différence entre ces deux cas ? Dans l'hypothèse du § 2, la procédure proprement dite n'est-elle pas encore terminée ?

5) Selon le commentaire, le tribunal peut, dans l'hypothèse décrite au § 2, prononcer d'office l'ouverture de la faillite (doc. Chambre, 2008-2009, 52-160/2, p. 64). Or, cette possibilité n'est pas prévue dans le texte du § 2 proprement dit.

Par contre, la possibilité de prononcer d'office l'ouverture de la faillite figure bien au § 1er, dernier alinéa. Si le but est d'étendre le champ d'application de cette disposition au § 2, il est indiqué de faire du dernier alinéa du § 1er un paragraphe distinct.

6) Le § 3 prévoit que le jugement est notifié conformément à l'article 26, § 3, ce qui signifie que le jugement qui rejette la demande est notifié au requérant.

La référence à l'article 26, § 3, semble erronée. Le jugement doit sans doute être notifié conformément à l'article 26, § 2, selon lequel le débiteur avise les créanciers du jugement dans les quatorze jours.

La notification conformément à l'article 26, § 3, n'aurait de toute façon aucun sens pour un jugement prononcé sur la base de l'article 41, § 2. Dans ce cas, en effet, le tribunal se prononce d'office et il n'y a pas de requérant.

Article 42

On ne perçoit pas clairement pourquoi l'alinéa 1er parle du « sursis fixé par application des articles 24, § 2, et 38 », alors qu'il est question, dans l'alinéa 2, du sursis « prorogé par application des articles 38 ou 57 ».

En application de l'article 38, en effet, le sursis ne peut être que prorogé, fût-ce à plusieurs reprises.

Il suffit par conséquent d'écrire à l'alinéa 1er: « le sursis fixé par application de l'article 24, § 2 ».

Article 43

« la loi sur les faillites » > « la loi du 8 août 1997 sur les faillites. »

« La présente disposition » > « Le présent article. »

Article 46

1) Contrairement au § 2, le § 1er ne prévoit aucune règle de procédure pour le tribunal.

Est-ce bien là l'intention du législateur ? Ne serait-il pas judicieux de prévoir également pour la procédure décrite au § 1er que le tribunal statue sur rapport du juge délégué, après avoir entendu le créancier concerné ou le prétendu créancier et le débiteur ?

2) Le § 2 dispose que toute créance sursitaire portée sur la liste visée à l'article 17, § 2, 7º, telle que modifiée le cas échéant par application du § 3, peut être contestée par tout intéressé.

Cette disposition n'est-elle pas contraire au § 5, selon lequel le jugement qui détermine le montant et la qualité de la créance provisoirement admis n'est pas susceptible de recours ?

3) La procédure visée au § 4 n'est pas ouverte à un tiers intéressé. Comment cette différence de traitement par rapport au débiteur et au créancier se justifie-t-elle ?

4) § 6, dans le texte néerlandais: « de verbeterende gegevens. »

Article 47

1) § 1er: « le dossier de la procédure de réorganisation judiciaire » > « le dossier de la réorganisation judiciaire »

2) Selon le § 3, la partie prescriptive du plan contient les mesures à prendre pour désintéresser les créanciers visés à l'article 45.

Ne vaudrait-il pas mieux écrire « les créanciers sursitaires portés sur la liste visée aux articles 17, § 2, 7º, et 46 », comme dans l'article 53, alinéa 1er ?

En effet, les créanciers visés à l'article 45 n'incluent pas les créanciers qui sont inscrits sur la liste par le tribunal, conformément à l'article 46. Pourtant, ces créanciers pourront eux aussi voter sur le plan (art. 54).

Article 53

« Le débiteur informe les représentants des travailleurs du contenu du plan, selon les modalités prévues à l'article 49. » (art. 53, dernier alinéa).

Cette disposition doit être rédigée comme suit: « Le débiteur informe les représentants des travailleurs visés à l'article 49, dernier alinéa, du contenu du plan. »

En effet, l'information en question n'est pas possible en vertu de l'article 49. Ce que cet article prévoit, en revanche, en son dernier alinéa, ce sont les règles suivant lesquelles le personnel est entendu et surtout les règles qui président à la désignation des personnes qui peuvent représenter le personnel. Ce dernier point est important pour l'article 53.

Article 54

Le tribunal entend le juge délégué, le débiteur et les créanciers.

Les représentants du personnel ne sont donc pas énumérés parmi les personnes à entendre, même s'il est précisé dans le commentaire qu'ils pourront être entendus par le tribunal lors de la séance de vote, s'ils le souhaitent (doc. Chambre, 2008-2009, 52-160/2, p. 69).

Article 56

1) On ne précise pas qui peut interjeter appel. Le débiteur, les créanciers, les tiers intéressés, le personnel, le procureur du Roi, ... ?

2) Selon le texte néerlandais, la requête est notifiée « aan de geïntimeerden, in voorkomend geval, aan hun advocaat ».

Le texte français dit que la requête est notifiée « aux parties intimées et, le cas échéant, à leur avocat ».

La signification est différente. D'après le texte néerlandais, les parties intimées ne reçoivent pas la requête si elles ont un avocat alors que, selon le texte français, elles la reçoivent.

Article 58

Le projet de loi étant muet sur ce point, le jugement portant révocation du plan est susceptible de recours.

L'appel est-il suspensif ? Non, car, aux termes de l'article 5, alinéa 1er, « toutes les décisions du tribunal prévues dans la présente loi sont exécutoires par provision. »

Est-il logique néanmoins que l'appel formé contre un jugement refusant l'homologation du plan soit suspensif (art. 56) et que l'appel formé contre un jugement portant révocation du plan ne le soit pas (art. 58) ?

Article 59

Conformément au § 2, alinéa 1er, 2º, le transfert peut être ordonné sous autorité de justice dans les cas suivants:

— le tribunal a rejeté la demande d'ouverture de la procédure par application de l'article 23;

— le tribunal a ordonné la fin anticipée de la procédure par application de l'article 41;

— le tribunal a révoqué le plan de réorganisation par application de l'article 58.

Par conséquent, le transfert ne peut pas être ordonné dans d'autres situations, parfois très semblables:

— les créanciers n'ont pas approuvé le plan de réorganisation en application de l'article 54;

— le tribunal a refusé l'homologation du plan de réorganisation en application de l'article 55.

Comment expliquer cette différence de traitement ? Dans ces deux cas de figure, le transfert ne peut pas non plus être demandé en vertu du § 2, alinéa 1er, 1º: cette disposition autorise certes la demande de transfert lorsque le débiteur est en état de faillite, mais sans qu'il ait demandé l'ouverture d'une procédure de réorganisation judiciaire. Or, c'est ce qu'il a fait dans les deux cas précités.

Article 60

Voir l'observation relative à l'article 38.

Article 61

§ 5, alinéa 1er, deuxième phrase:

Texte néerlandais: « Met de voorgenomen overdracht worden in dit artikel onder meer de overdracht zelf, de lijst van de overgenomen of over te nemen werknemers, het lot van de arbeidsovereenkomsten, de vastgestelde arbeidsvoorwaarden en de schulden bedoeld. »

Texte français: « Par le transfert projeté, on entend dans le présent article, outre le transfert même, la liste des travailleurs à reprendre ou repris, le sort des contrats de travail, les conditions de travail fixées et les dettes. »

Les mots « onder meer » n'ont pas d'équivalent dans le texte français et doivent être supprimés.

Article 64

Le tribunal entend en leurs observations « les représentants du personnel qui se présentent ».

Comment détermine-t-on si une personne est un représentant du personnel ? Chaque tribunal fixe-t-il des critères de manière autonome ?

Article 71

1) Aux termes du § 2, le Roi arrête les règles et barèmes applicables aux mandataires de justice désignés par application des articles 27 et 60.

Pourquoi cette disposition ne mentionne-t-elle pas les mandataires de justice désignés en application de l'article 14 ? En effet, d'après le commentaire, l'article 71 a une portée générale et vise tous les cas où, dans la loi, un mandataire de justice est désigné (doc. Chambre, 2007-2008, 160/2, p. 79).

2) Paragraphe 3, alinéa 2, première phrase: « Le mandataire de justice forme sa demande par requête. »

Cette phrase n'ajoute rien au § 3, alinéa 1er, et peut être supprimée.

3) Le mandataire de justice et le débiteur sont entendus en chambre du conseil. Pourquoi pas le tiers intéressé, s'il a fait la demande ?

Article 72

Aux termes du texte néerlandais de l'alinéa 1er, 3º, « is de schuldenaar strafbaar indien hij wetens en willens een of meer schuldeisers heeft weggelaten uit de lijst van schuldeisers. »

Selon le texte français, le débiteur est punissable « s'il a fait sciemment une ou plusieurs omissions dans la liste des créanciers ».

La signification est différente.

Selon le texte français, le débiteur est également punissable s'il a omis de faire figurer d'autres données sur la liste, comme la mention spécifique de la qualité de créancier sursitaire extraordinaire, alors que, selon le texte néerlandais, le débiteur n'est punissable que s'il a omis de mentionner un créancier dans la liste.

Article 77

Au 2º, il est question de « la date de l'introduction de la requête ».

Or, les requêtes ne sont pas introduites mais déposées. Ce sont les procédures qui sont introduites.

Article 80

1) Cette modification de la loi sur les faillites confère une compétence au « président du tribunal ».

De quel tribunal ?

En l'espèce, il convient de préciser qu'il s'agit du président du tribunal de commerce. En effet, l'utilisation du mot « tribunal » pour désigner le « tribunal de commerce » vaut uniquement pour la loi relative à la continuité des entreprises et non pour la loi sur les faillites.

2) Cet article remplace les mots « le commerçant » mentionnés à l'article 8, alinéa 1er, de la loi sur les faillites par les mots « le commerçant ou la société de commerce ».

Or, le mot « commerçant » figure aussi à l'alinéa 3 de l'article 8. Ne faut-il pas y opérer le même remplacement ?

Article 81

Tout commerçant est tenu, dans le mois de la cessation de ses paiements, d'en faire l'aveu au greffe du tribunal compétent.

Cette obligation est désormais suspendue à compter du dépôt d'une requête en réorganisation judiciaire, aussi longtemps que dure le sursis accordé en vertu des articles 24, 38 et 60.

Ne faut-il pas mentionner ici aussi la suspension accordée en vertu de l'article 57 (comme cela est prévu aussi à l'article 42, par exemple) ?

Article 82

1) Le greffier est désormais tenu de communiquer à la Banque-Carrefour des Entreprises les jugements clôturant une procédure de réorganisation judiciaire ou révoquant un plan de réorganisation.

Pourquoi cela ne vaut-il pas aussi pour les jugements refusant l'homologation du plan de réorganisation ?

2) Un jugement ordonnant la fin du sursis (art. 41, § 2) peut-il être assimilé à un jugement clôturant la procédure de réorganisation judiciaire ? Un jugement ordonnant la fin du sursis doit-il aussi être communiqué à la Banque-Carrefour des Entreprises ?

Article 86

« waardeverminderingen en provisies » > « waardeverminderingen en voorzieningen »

« Voorzieningen » est le terme utilisé dans le Code des impôts sur les revenus et aussi, par exemple, dans les références à l'article 48 (voir les articles 184 et 211 du CIR). Si on remplace le mot « voorzieningen » par le mot « provisies », on devra le faire aussi dans ces articles.

Article 88

Cet article habilite le Roi à mettre les lois en concordance avec « la terminologie et les références de la présente loi ».

1) Cette disposition doit être rédigée comme suit (voir toutefois aussi le texte proposé au point 2):

« Le Roi peut mettre la terminologie et les références des lois en vigueur en concordance avec la présente loi. »

On voit mal, en effet, comment le Roi pourrait mettre les lois en concordance avec les références de la loi en projet.

2) Il conviendrait d'obliger le Roi à accomplir cette tâche plutôt que de L'y habiliter. En effet, de nombreuses dispositions légales deviendraient inapplicables si elles n'étaient pas adaptées au moment de l'entrée en vigueur de la loi en projet.

À titre d'exemples:

Les articles 48 et 48/11 de la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances

L'article 78, § 2, de la loi du 12 juin 1991 relative au crédit à la consommation

Les articles 109/6 et 109/7 de la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit

Texte proposé:

« Le Roi met la terminologie et les références des lois en vigueur en concordance avec la présente loi. »

Article 89

La loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire est abrogée, sous réserve de son application aux procédures en concordat judiciaire en cours « au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi ».

Or, certaines dispositions de la loi en projet entreront en vigueur à des moments différents:

1. L'article 90 entrera en vigueur dix jours après la publication de la loi au Moniteur belge.

2. Les autres articles entreront en vigueur à la date fixée par le Roi (étant entendu que l'article 61 ne pourra pas entrer en vigueur avant le 1er janvier 2009).

Quand la loi du 17 juillet 1997 sera-t-elle abrogée ? Dix jours après la publication de la loi en projet ou le jour de l'entrée en vigueur des autres articles ?

Article 90

« Artikel 61 van deze wet kan ... » > « Artikel 61 kan ... »


(1) Voir l'avis du Conseil d'État, Doc. parl., Chambre, 2007-2008, 160/2, 83.

(2) Dans le texte néerlandais, mieux vaudrait écrire: « ...bedraagt de maximale duur van de verlengde opschorting twaalf maanden vanaf ... ».