4-1036/1

4-1036/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2008-2009

28 NOVEMBRE 2008


Proposition de loi complétant le Code d'instruction criminelle concernant la protection de l'anonymat de certains membres des services de police

(Déposée par M. Marc Elsen et Mme Vanessa Matz)


DÉVELOPPEMENTS


En 1972, après la prise d'otages aux Jeux Olympiques de Munich, fut créé l'escadron spécial d'intervention (ESI), relevant aujourd'hui de la direction des unités spéciales de la police fédérale (CGSU) sous l'appellation de « service d'intervention ».

Les missions des membres de ce service et du service d'arrestation des unités spéciales de la police fédérale portent notamment sur les prises d'otages, le transfert de détenus particulièrement dangereux, la protection de témoins importants, la maîtrise de forcenés, etc.

La spécificité des missions des membres de ces deux services exige la protection de l'identité des intéressés. Or, ce respect de l'anonymat n'est pas prévu lors des procédures en justice engagées contre les intéressés.

Le Code d'instruction criminelle n'a prévu de règles d'anonymat qu'en matière d'observation et d'instruction ou dans le cadre du témoignage.

En effet, la loi du 6 janvier 2003 concernant les méthodes particulières de recherche et quelques autres méthodes d'enquête prévoit qu'en matière d'observation et d'infiltration, le rapport de l'officier de police judiciaire est couvert par le secret professionnel et ne mentionne aucun élément susceptible de compromettre la garantie de la sécurité et l'anonymat des fonctionnaires chargés de l'observation ou de l'infiltration. Lorsque la chambre des mises en accusation de la cour d'appel contrôle la mise en œuvre des méthodes particulières de recherche, elle peut charger le juge d'instruction d'entendre les fonctionnaires de police concernés sous le régime du témoignage anonyme.

La loi du 8 avril 2002 relative à l'anonymat des témoins, quant à elle, ne protège le fonctionnaire de police que dans le cadre de l'enquête et non pas lorsqu'il fait lui-même l'objet d'une plainte. Un anonymat partiel ou complet au cours de l'enquête est prévu spécifiquement en raison de possibles représailles parce que l'identité et l'adresse de l'enquêteur sont mentionnées dans le dossier pénal.

Or, lorsque les policiers sont visés par une plainte avec constitution de partie civile entre les mains du procureur du Roi ou du juge d'instruction, il n'y a pas de règles spécifiques.

Dans la pratique, si une plainte est déposée contre un enquêteur ou un membre des services de police pour obtenir ses coordonnées personnelles dans un but de représailles, le procureur du Roi ou le juge d'instruction peut dans certains cas refuser l'accès au dossier.

Il ne s'agit cependant pas d'une solution adéquate parce qu'il n'est pas toujours aisé de percevoir les intentions réelles du plaignant.

C'est pourquoi, il serait opportun d'imposer comme règle générale la protection de l'identité des membres des services d'intervention et d'arrestation des unités spéciales de la police fédérale qui font l'objet d'une plainte avec constitution de partie civile.

Pour cela, le procureur du Roi ou le juge d'instruction devra prendre toutes les mesures raisonnablement nécessaires pour protéger l'identité des membres du service d'intervention et du service d'arrestation des unités spéciales de la police fédérale qui font l'objet d'une plainte avec constitution de partie civile.

On entend par « toutes mesures raisonnablement nécessaires » notamment, dans le respect des droits de la défense, la protection de l'identité des policiers poursuivis aux premiers stades de l'information ou de l'instruction, ainsi qu'une communication limitée du domicile des policiers visés. En outre, le juge pourrait envisager d'attribuer un domicile élu plutôt que le domicile effectif des personnes poursuivies, dans les phases ultérieures de la procédure pénale.

Pour terminer, la présente proposition vise également à répondre aux demandes des parquets qui émettent le souhait que des dispositions légales protègent dorénavant l'identité des membres des services de police dans le cadre des instructions judiciaires.

Marc ELSEN
Vanessa MATZ.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Dans le Code d'instruction criminelle, il est inséré un article 64bis rédigé comme suit:

« Art. 64bis. Le procureur du Roi et le juge d'instruction prennent, chacun pour ce qui le concerne, toutes les mesures raisonnablement nécessaires pour protéger l'identité des membres du service d'intervention et du service d'arrestation des unités spéciales de la police fédérale qui font l'objet d'une plainte avec constitution de partie civile ».

13 novembre 2008.

Marc ELSEN
Vanessa MATZ.