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24 NOVEMBRE 2008
Introduction
La présente proposition de loi est une version remaniée d'une proposition qui avait été déposée au Sénat le 20 août 2003 et qui avait fait l'objet d'amendements (doc. Sénat, nº 3-157/1 et 157/2).
Vouloir adopter un enfant est un véritable parcours du combattant. Les parents adoptifs doivent être jugés « aptes » et ont besoin d'une autorisation pour pouvoir adopter. Dans bien des cas, ils restent jusqu'au dernier moment dans l'incertitude quant à la venue de l'enfant.
À cela s'ajoute que la procédure d'adoption grève lourdement leur budget car ils doivent supporter les frais de toute la procédure.
La proposition de loi vise à introduire une mesure venant en aide à ces familles. Elle instaure en effet une réduction d'impôts pour les familles candidates à l'adoption.
La présente proposition s'inscrit dans une ambition plus large de rendre notre société plus ouverte à l'adoption et dans le souci de mettre parents adoptifs et parents biologiques sur un pied d'égalité.
Frais d'adoption
L'agence flamande Kind & Gezin a calculé le coût d'une adoption.
Elle évalue à 7 275 euros le coût total d'une adoption nationale en Communauté flamande.
Ce montant se décompose comme suit:
— préparation de l'adoption (25 euros);
— entretien préliminaire (250 euros);
— entretiens avec le service d'adoption débouchant sur une acceptation de la candidature et sur la conclusion d'un contrat de médiation (2 500 euros);
— suivi à vie (3 000 euros);
— frais variables (1 500 euros).
Dans le cas d'une adoption nationale en Communauté française, le coût avoisine les 3 000 euros. (Source: données fournies par la Communauté française Wallonie-Bruxelles, Service de l'adoption, Autorité centrale communautaire (ACC), mai 2008).
Dans le cas d'une adoption internationale en Communauté flamande, le coût varie entre 7 187 euros (pour l'adoption d'un enfant en Thaïlande) et 23 517 euros (pour l'adoption d'un enfant en Russie), en fonction du service d'adoption choisi, du pays d'origine et des frais de déplacement à supporter pour ramener l'enfant.
Le coût se décompose comme suit:
— frais liés à la procédure d'aptitude (77 euros);
— indemnité de prestation pour le personnel et le fonctionnement du service (de 1 000 à 2 650 euros);
— frais de dossier en Belgique (de 350 à 2 100 euros);
— frais de dossier à l'étranger (de 100 à 11 890 euros);
— frais de voyage et de séjour (de 2 050 à 7 000 euros);
— frais de suivi (de 500 à 800 euros).
D'après les données fournies par la Communauté française Wallonie-Bruxelles, le coût d'une adoption internationale oscillerait entre 7 200 et 15 200 euros. Ce coût est assez comparable à celui d'une adoption internationale en Flandre (Source: données fournies par la Communauté française Wallonie-Bruxelles, Service de l'adoption, Autorité centrale communautaire (ACC), mai 2008).
Adopter un enfant exige donc un effort financier considérable de la part des parents adoptifs. À cela s'ajoute le fait que certains d'entre eux ont déjà supporté des frais médicaux considérables (examens, FIV, etc.) avant d'engager la procédure d'adoption.
Réduction d'impôts — Technique
La présente proposition vise à instaurer une réduction d'impôts au titre des frais d'adoption et à alléger ainsi la charge financière pour les parents adoptifs. Dans l'esprit de cette proposition, les frais d'adoption donneront droit à une réduction d'impôts correspondant à 20 % des frais exposés, avec un maximum absolu de 4 350 euros (montant de base 3 280 euros) (exercice 2009).
Cela signifie que les frais réellement exposés donneront lieu à une diminution de l'impôt à payer, sans modification de la base imposable sur laquelle l'impôt est établi. Une réduction d'impôts prend en compte d'une manière plus directe les frais réellement exposés, ce qui la rend donc préférable à une déduction desdits frais de la base imposable. En outre, une réduction d'impôts est préférable à une déduction d'impôts parce que dans ce dernier cas, ce sont surtout les plus hauts revenus qui bénéficient de l'avantage effectif le plus important, alors qu'avec une réduction d'impôts, l'avantage effectif est identique pour tous, à la condition, bien entendu, de payer suffisamment d'impôts (1) .
La technique existante de la réduction d'impôts est utilisée dans le cadre de l'impôt des personnes physiques, notamment pour octroyer des avantages fiscaux aux contribuables ayant exposé certaines dépenses: épargne à long terme (épargne-pension, épargne-logement, etc.), recours aux services d'agences locales pour l'emploi (ALE), prestations payées à l'aide de titres-service, investissements économiseurs d'énergie, maisons passives, etc.
La proposition prévoit de limiter les dépenses ouvrant droit à un avantage fiscal. Elle instaure en effet un plafond général de 4 350 euros (montant de base 3 280 euros) (exercice 2009) et énumère de manière exhaustive les dépenses ouvrant droit à un avantage fiscal.
Dans la présente proposition de loi, le pourcentage appliqué aux frais d'adoption est fixé à 20 % et le plafond instauré s'élève à 4 350 euros (montant de base 3 280 euros) (exercice 2009). Le montant maximum de la réduction d'impôts (4 350 euros) correspond à peu près à 20 % du coût maximal d'une adoption internationale (23 517 euros pour une adoption internationale en Russie) (4 703 euros). Ainsi, le montant de la réduction d'impôts est proportionnel au coût réel de l'adoption.
Le contribuable néerlandais dispose également d'un régime comparable puisqu'il peut déduire fiscalement les frais d'adoption à la rubrique « charges exceptionnelles » (art. 6:23 Wet Inkomstenbelastingen 2001). Dans le système néerlandais, les frais énoncés ci-dessous sont en tout cas déductibles (Source: Stichting Adoptievoorzieningen).
De l'inscription à l'autorisation de principe:
— frais de traitement de la demande d'autorisation de principe;
— frais d'information;
— frais de déplacement vers les établissements en question.
Durant la phase de médiation:
— frais de documents liés à la procédure d'adoption internationale;
— frais de bureau à concurrence de 1 000 euros maximum;
— frais de procédure à l'étranger;
— escorte: frais de déplacement de l'accompagnateur et de l'enfant;
— frais de déplacement des parents adoptifs (un aller et un retour maximum);
— frais de déplacement dans le pays d'origine;
— frais de déplacement de l'enfant adopté;
— frais de déplacement entre le bureau des détenteurs des autorisations et l'aéroport.
Adoption en droit néerlandais:
— frais d'avocat;
— frais de port, de téléphone et de déplacement;
— frais de traduction des documents étrangers.
Dans la présente proposition de loi, les frais suivants exposés en Belgique dans le cadre d'une « adoption nationale » ouvrent droit à une réduction d'impôts:
— les dépenses liées à la procédure d'aptitude;
— les frais facturés par un service d'adoption agréé.
Ces frais devront être précisés par le Roi. En ce qui concerne les frais liés à la procédure d'aptitude, sont visés par exemple les frais du programme de préparation et ceux liés à l'obtention d'une autorisation de principe en Belgique.
En cas d'adoption d'un enfant à l'étranger, la présente proposition de loi prend en considération les dépenses suivantes pour l'octroi d'une réduction d'impôts:
— les dépenses liées à la procédure d'aptitude;
— les frais facturés par un service d'adoption agréé;
— les frais de dossier dans le pays d'origine;
— les frais de voyage et de séjour des deux parents adoptifs et les frais de transport de l'enfant adopté jusqu'au domicile des parents adoptifs.
Ces frais devront être précisés par le Roi. Les frais de dossier exposés dans le pays d'origine sont intégralement pris en compte pour le droit à une réduction d'impôts, dans les limites du plafond général de 4 350 euros (montant de base 3 280 euros) (exercice 2009). Les frais de dossier exposés dans le pays d'origine étant plus difficiles à identifier, ils peuvent être interprétés largement: il s'agit par exemple des frais liés aux services à l'étranger, des frais de procédure judiciaire à l'étranger, des dons effectués à l'étranger, etc.
Les frais de voyage et de séjour que les parents adoptifs ont exposés dans le cadre de la procédure d'adoption à l'étranger ou pour aller chercher l'enfant, et les frais de transport de l'enfant jusqu'au domicile des parents adoptifs sont eux aussi intégralement pris en compte, dans les limites du plafond général de 4 350 euros (montant de base 3 280 euros) (exercice 2009), pour l'octroi d'une réduction d'impôts.
Coût
L'impact budgétaire de la mesure proposée est limité, dès lors que le nombre annuel d'adoptions est assez faible. Les estimations sont basées sur le nombre d'adoptions enregistrées en 2006.
En 2006, les services d'adoption flamands agréés ont placé au total 186 enfants, dont une centaine d'origine étrangère (61,73 %). Sur le plan géographique, les adoptions internationales se répartissent comme suit: Chine (29 %), Colombie (1,85 %), Éthiopie (35,80 %), Philippines (6,17 %), Inde (9,26 %), Russie (10,49 %), Sri Lanka (1,85 %), Thaïlande (0,62 %) et Afrique du Sud (4,94 %). (Source: Kind & Gezin, Rapport annuel 2006). L'évaluation du coût budgétaire tient compte du nombre d'adoptions nationales et internationales.
Pour le calcul du coût budgétaire minimum, on a tenu compte, pour les adoptions nationales, du coût réel, et pour les adoptions internationales, du coût correspondant au pays d'adoption le moins cher (qui est la Thaïlande, voir ci-dessus).
Le coût budgétaire minimal pour la Flandre est évalué à 268 870 euros:
— 125 130 euros pour les adoptions nationales (= 86 adoptions nationales en 2006 × 7 275 euros, soit le coût d'une adoption nationale × 20 % d'avantage fiscal);
— et 143 740 euros pour les adoptions internationales (= 100 adoptions internationales × 7 187 euros, soit le coût de l'adoption internationale la moins chère, c'est-à-dire l'adoption d'un enfant originaire de Thaïlande × 20 % d'avantage fiscal).
Le calcul du coût budgétaire maximal tient compte, pour les adoptions nationales, du coût réel, et pour les adoptions internationales, du maximum fiscal prévu pour la réduction d'impôts.
Pour la Flandre, la réduction d'impôts proposée correspond à un coût budgétaire maximal d'environ 552 130 euros.
— 125 130 euros pour les adoptions nationales (cf. supra);
— 435 000 euros pour les adoptions internationales (= 100 adoptions internationales × 4 350 euros, soit le maximum fiscal (ex. imp. 2009)).
En ce qui concerne la Communauté française, elle a encadré en 2006 exactement 248 adoptions, dont 27 adoptions en Belgique et 221 adoptions internationales (Source: Service de l'adoption Autorité Centrale Communautaire (ACC), Rapport des Activités, septembre 2005 — décembre 2006). Sur le plan géographique, les adoptions internationales se répartissent comme suit: Afrique du Sud (1,36 %), Chine (47,96 %), Colombie (11,76 %), Éthiopie (13,57 %), Haïti (0,45 %), Inde (5,88 %), Mali (2,71 %), Mozambique (0,45 %), Pérou (0,45 %), Philippines (0,90 %), Pologne (0,45 %), Russie (8,14 %), Thaïlande (5,43 %) et Ukraine (0,45 %).
Pour le calcul du coût budgétaire minimum, il a été tenu compte, pour les adoptions nationales, du coût réel, et pour les adoptions internationales, du coût enregistré pour le pays d'adoption le moins cher (conformément aux informations communiquées par la Communauté française Wallonie-Bruxelles, le coût minimum d'une adoption internationale oscillerait entre 7 200 et 15 200 euros).
Le coût budgétaire minimal pour la Communauté française est évalué à 335 520 euros:
— 17 280 euros pour les adoptions nationales (= 27 adoptions nationales en 2006 × 3 200 euros, soit le coût d'une adoption nationale × 20 % d'avantage fiscal);
— 318 240 euros pour les adoptions internationales (= 221 adoptions internationales × 7 200 euros, soit le coût minimum d'une adoption internationale, conformément aux renseignements communiqués par la Communauté française Wallonie-Bruxelles × 20 % d'avantage fiscal).
Le calcul du coût budgétaire maximal tient compte, pour les adoptions nationales, du coût réel, et pour les adoptions internationales, du montant maximum (15 200 euros).
Pour la Communauté française (Wallonie et Bruxelles), la réduction d'impôts proposée correspond à un coût budgétaire maximal d'environ 689 120 euros:
— 17 280 euros pour les adoptions nationales (cf. supra);
— 671 840 euros pour les adoptions internationales (= 221 adoptions internationales en 2006 × 15 200 euros, soit le montant maximum d'une adoption internationale × 20 % d'avantage fiscal).
Le coût budgétaire minimum est estimé à un total de 604 390 euros.
Le coût budgétaire maximum est estimé à un total de 1 241 250 euros.
Compte tenu du nombre d'adoptions enregistrées en 2006, le coût réel de la réduction d'impôts proposée se situe entre ces deux limites et dépend des pays d'adoption respectifs dans lesquels un enfant est adopté dans le cadre d'une adoption internationale.
Sabine de BETHUNE. Wouter BEKE. Hugo VANDENBERGHE. Els VAN HOOF. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Il est inséré au titre II, chapitre III, section Ier, du Code des impôts sur les revenus 1992, une sous-section IIquaterdecies nouvelle, intitulée « Réduction pour les dépenses exposées dans le cadre d'une procédure d'adoption », qui contient un article 145/33, libellé comme suit:
« Sous-section IIquaterdecies. Réduction pour les dépenses exposées dans le cadre d'une procédure d'adoption.
Art. 145/33 — Il est accordé une réduction d'impôts à hauteur de 20 % des dépenses exposées dans le cadre d'une procédure d'adoption, plafonnée à un montant maximum de 4 350 euros (montant de base 3 280 euros).
Pour une adoption nationale, les dépenses suivantes exposées en Belgique entrent en ligne de compte pour une réduction d'impôts:
— les dépenses liées à la procédure d'aptitude;
— les frais facturés par un service d'adoption agréé.
Pour une adoption internationale, les dépenses suivantes entrent en ligne de compte pour une réduction d'impôts:
— les dépenses liées à la procédure d'aptitude;
— les frais facturés par un service d'adoption agréé;
— les frais de dossier dans le pays d'origine;
— les frais de voyage et de séjour des deux parents adoptifs et les frais de transport de l'enfant adopté jusqu'au domicile des parents adoptifs.
Le Roi fixe les conditions auxquelles les dépenses visées au présent article doivent satisfaire pour donner droit à la réduction d'impôts. »
Art. 3
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 2009.
19 juin 2008.
Sabine de BETHUNE. Wouter BEKE. Hugo VANDENBERGHE. Els VAN HOOF. |
(1) Dans le cas d'une déduction d'impôt, le contribuable bénéficie d'un avantage au taux marginal (progressivité des tranches d'imposition en fonction du montant du revenu imposable). Dans le cas d'une réduction d'impôts, la réduction est directement imputée sur l'impôt dû et elle est donc la même pour tous les contribuables, à condition qu'ils paient suffisamment d'impôts pour pouvoir épuiser entièrement cet avantage fiscal.