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8 JUILLET 2008
I. Procédure
Le présent projet de loi qui relève de la procédure bicamérale facultative a été déposé, le 29 mai 2008, à la Chambre des représentants en tant que projet de loi du gouvernement (doc. Chambre, nº 52-1200/1). Il a été adopté par la Chambre le 3 juillet 2008 et transmis le 4 juillet 2008 au Sénat, qui l'a évoqué le même jour.
La commission de la Justice, qui a été saisie des articles 134 à 142, a examiné ce projet de loi au cours de ses réunions des 1er et 8 juillet 2008, en présence du ministre de la Justice.
Conformément à l'article 27.1, alinéa 2, du règlement du Sénat, la commission a entamé l'examen de ce projet avant le vote final à la Chambre des représentants.
II. Exposé introductif du ministre de la Justice
Le ministre indique que le projet de loi à l'examen apporte quelques modifications ponctuelles.
L'article 134 se rapporte à l'article 216quater, § 2, du Code d'instruction criminelle qui règle la procédure de convocation par procès-verbal et qui prévoit que, lorsqu'un jugement n'a pas été prononcé dans les deux mois de l'audience d'introduction, le procès-verbal établi par le parquet doit être déclaré irrecevable. Des actes de procédure du parquet parfaitement valables sont ainsi déclarés irrecevables à la suite de l'expiration d'un délai de procédure sur lequel le parquet n'a pas de prise. Les circulaires du collège des procureurs généraux déconseillent dès lors de faire application de la procédure de convocation par procès-verbal. L'article en projet maintient le délai de deux mois mais supprime la sanction de l'irrecevabilité du procès-verbal. Le délai est donc indicatif et ne peut pas avoir d'influence sur la validité de la procédure. Toutefois, le non-respect du délai peut éventuellement donner lieu à des mesures disciplinaires. La suppression de la sanction en question est bénéfique aux différentes parties: elle est source d'économies, elle permet au juge d'autoriser plus facilement des mesures d'instruction complémentaires à la demande de la défense et elle implique que la victime ne doive se constituer partie civile qu'une seule fois.
L'article 136 permet au parquet de charger les fonctionnaires de police, les directeurs d'établissements pénitentiaires et les représentants desdits directeurs, à l'instar des huissiers de justice mais sans frais, de la signification ou notification de tous les actes judiciaires en matière répressive. Cet article rétablit un ancien article qui existait depuis 1848. Une loi-programme récente enlevait aux directeurs d'un établissement pénitentiaire la possibilité de signifier un acte, ce qui entraînait un va-et-vient incessant d'huissiers de justice dans les établissements pénitentiaires. La modification proposée répond à la nécessité d'une gestion efficace des institutions.
Les articles 137 à 139 ont trait aux cultes et au subventionnement de l'Union bouddhique belge.
L'article 137 augmente le nombre d'assistants paroissiaux pour l'année 2008. Le ministre renvoie à l'exposé des motifs des articles 167 et 168 initiaux et à l'avis du Conseil d'État en la matière. Le Conseil d'État a signalé que les assistants paroissiaux devraient être ajoutés, dans la loi, à la liste des ministres des cultes. La mesure à l'examen est toutefois prise en attendant qu'un groupe de travail se penche sur l'adoption d'un règlement définitif et qu'un régime uniforme soit adopté pour le statut des ministres de toutes les religions et organisations philosophiques. Ce groupe de travail sera créé par arrêté royal. Le nombre de prêtres étant en baisse, il faut prendre, en attendant, une mesure permettant de maintenir le nombre de ministres.
À la demande de la Cour des comptes, l'article 138 apporte des modifications au régime de cumul pour les ministres des cultes qui officient à plus d'une place reconnue.
L'article 139 tend à opérer la structuration du bouddhisme en Belgique en octroyant à l'Union bouddhique belge un subside spécifique. Cette mesure n'emporte donc pas reconnaissance du bouddhisme en tant que conception philosophique en Belgique. Elle vise néanmoins à octroyer une aide financière limitée qui devra permettre à l'Union bouddhique de s'organiser et de mener les discussions en vue de sa reconnaissance en tant que conception philosophique. Une deuxième étape législative ultérieure sera donc nécessaire.
Les articles 140 et 141 visent à reporter l'entrée en vigueur, d'une part, de la procédure par voie électronique et, d'autre part, des mesures relatives à la protection de la jeunesse, et ceci suivant un plan par phase tel qu'il a été exposé dans le projet de loi portant dispositions diverses II (voir doc. Chambre, nº 52-1201/1).
L'article 142 modifie l'arrêté royal du 27 avril 2007 portant règlement général des frais de justice en matière répressive.
III. Discussion
M. Mahoux ne souhaite pas entrer dans la problématique de l'organisation des cultes, qui n'entre pas dans le rôle des pouvoirs publics, dans un système où la séparation de l'Église et de l'État devrait être une réalité bien plus importante.
Le caractère particulier du système belge est que ce sont les deniers publics qui financent les cultes, et ce de manière disproportionnée par rapport à un culte en particulier qui reste privilégié. L'orateur constate que le nombre de paroisses ne diminue pas, contrairement au nombre de fidèles.
Il cite l'exemple d'un lieu de Wallonie où un seul et même officier du culte dessert cinq paroisses.
Il y a donc un problème manifeste, puisque l'on tente, par le biais des assistants paroissiaux, de trouver une solution à l'absence de vocations.
Certes, il n'appartient pas aux pouvoirs publics de déterminer qui sont les officiants.
Il s'agit d'un problème complexe et sensible, qui touche également, de manière générale, l'organisation de la société en Belgique par rapport à la désertification des lieux de culte.
Le ministre présente les choses comme si l'on stabilisait les choses alors qu'en réalité, on inscrit dans la loi 40 assistants paroissiaux supplémentaires.
L'orateur se demande par ailleurs où l'on va s'arrêter en matière de reconnaissance des cultes.
En ce qui concerne la reconnaissance du culte bouddhique, car il s'agit bien d'un culte, à quel organe — non reconnu ... — va aller le subside de 150 000 euros octroyé et comment s'est opéré le choix d'une structure par rapport à une autre ? Lors des événements dramatiques qui ont eu lieu récemment sur le plan international, on a entendu dire que le lamaïsme était presque plus important à l'extérieur de la Chine qu'à l'intérieur de celle-ci. Existe-t-il, à l'intérieur du monde bouddhique en Belgique, plusieurs organes représentatifs ?
M. Van Den Driessche souligne que l'on se trouve confronté à un paradoxe avec, d'une part, une diminution du nombre de catholiques pratiquants et, d'autre part, une demande croissante de spiritualité et de religiosité. Après s'être entretenu avec le cardinal Danneels, le ministre Stevaert avait à l'époque d'ailleurs pressé la ministre Onkelinx d'augmenter le nombre d'assistants paroissiaux, vu le rôle considérable qu'ils jouent sur le plan sociologique. L'intervenant se réjouit de la mesure prise pour augmenter le nombre d'assistants paroissiaux.
À propos de l'Union bouddhique, l'intervenant continue à demander si le bouddhisme est une religion ou plutôt une règle de vie. L'intervenant estime que les présents subsides représentent un signal important.
M. Collignon souhaite formuler une remarque technique sur la modification de l'article 216quater du Code d'instruction criminelle. L'orateur comprend que l'on veuille éviter l'effet pervers du texte actuel en supprimant le délai de deux mois qui rend irrecevable la convocation. Cependant, cette règle avait été introduite dans un souci d'équilibre et pour éviter que les parquets aient trop facilement recours à la procédure accélérée pour des dossiers qui requéraient une instruction importante. Il s'agissait d'une sorte de filtre naturel.
Ne risque-t-on pas, en supprimant l'irrecevabilité, d'arriver à un effet pervers inverse ? Si l'on convoque directement le prévenu devant le tribunal, ne va-t-on pas aller de remise en remise et encombrer le tribunal ? Que prévoit-on pour éviter cela ? Des directives seront-elles données aux parquets à ce sujet ?
M. Delpérée revient à la question des cultes, et se rallie aux réflexions émises par M. Van Den Driessche.On ne peut à la fois dire que l'on ne veut pas intervenir dans l'organisation interne des cultes et qu'il faut respecter le prescrit constitutionnel de séparation de l'Église et de l'État, et par ailleurs contester à une Église le droit de considérer que les ministres de son culte comprennent, par exemple, les assistants paroissiaux. Par ailleurs, l'orateur pense, comme M. Van Den Driessche, que lorsqu'on évoque la possibilité de reconnaissance du bouddhisme, ce n'est pas au titre de culte reconnu au sens de la Constitution, mais en tant que tendance idéologique ou philosophique visée au même article 181 de la Constitution.
Réponses du ministre
En réponse aux observations de M. Collignon, le ministre confirme qu'il prendra une circulaire, en concertation avec le collège des procureurs généraux, et que le système fera l'objet d'une évaluation, comme indiqué dans l'exposé des motifs. Il pense que le risque d'abus est très limité, car le fait qu'aucune sanction n'est prévue en cas de non-respect du délai de deux mois est aussi en faveur de la défense. Mais il est vrai que le bon usage de la procédure doit être souligné auprès du ministère public, et qu'une évaluation est nécessaire.
En ce qui concerne le nombre d'assistants paroissiaux, il est exact que l'on en a désigné 271. Malgré cela, le nombre de ministres du culte catholique a diminué de 730 unités sur une période de 8 ans, c'est-à-dire depuis la désignation de ces assistants paroissiaux.
Le ministre se réjouit de la constitution d'un groupe de travail qui sera donc chargé de trouver un règlement global pour l'ensemble des religions et des organisations philosophiques. L'exercice ne sera pas sans difficulté.
En ce qui concerne le bouddhisme, l'observation formulée par M. Delpérée est pertinente. L'ASBL à laquelle est alloué un montant est sans contestation possible l'interlocuteur pour le bouddhisme en Belgique. Mais il est vrai que déterminer quel est l'interlocuteur habilité à représenter valablement l'ensemble d'une communauté religieuse ou philosophique n'est pas toujours aisé, comme on l'a vu pour l'Exécutif des musulmans de Belgique. De ce point de vue, l'Église catholique présente un avantage, puisqu'elle est organisée selon une structure pyramidale.
IV. Votes
L'ensemble des articles envoyés à la commission de la Justice a été adopté par 8 voix contre 1.
Confiance a été faite au rapporteur pour la rédaction du présent rapport.
Le rapporteur, | Le président, |
Hugo VANDENBERGHE. | Patrik VANKRUNKELSVEN. |
Le texte adopté par la commission est identique au texte du projet de loi transmis par la Chambre des représentants (voir doc. Chambre, nº 52-1200/20).