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12 JUIN 2008
L'impôt est défini généralement comme une contribution imposée par les institutions publiques, pour les besoins de leurs services d'intérêt général, aux personnes ou aux groupes établis sur le territoire régi par ces institutions ou qui y ont des intérêts, à condition que cette contribution soit reconnue comme un impôt par une loi ou un décret.
Les impôts servent, d'une part, à financer les services des autorités et, d'autre part, à redistribuer la prospérité.
Un remboursement d'impôt solidaire est un remboursement d'une partie des impôts, d'un montant égal pour tous les citoyens.
La présente proposition vise à:
— adopter à court terme une mesure simple et efficace pour lutter contre la diminution du pouvoir d'achat;
— fournir au gouvernement un nouvel instrument politique important permettant de réguler notre économie à court terme;
— alléger la pression fiscale devenue trop élevée, d'une manière simple et non discriminatoire;
— instaurer la solidarité, car les personnes ayant un revenu modeste bénéficient d'un remboursement d'impôts plus important par rapport à leur revenu que les personnes ayant un haut revenu.
1. Adopter à court terme une mesure simple et efficace pour lutter contre la diminution du pouvoir d'achat
Nous constatons actuellement une érosion du pouvoir d'achat, en particulier pour les personnes qui perçoivent des revenus n'ayant pas été indexés ou pas suffisamment. Cette diminution du pouvoir d'achat est due notamment à l'augmentation des impôts en valeur absolue, par exemple sur les carburants et, plus récemment, sur l'alimentation. En effet, l'application de taux de TVA fixes sur des prix à la hausse fait augmenter les recettes fiscales.
Une baisse du pouvoir d'achat ne pose pas seulement des problèmes à la population, elle nuit également à l'emploi. En effet, les gens commencent alors à économiser et reportent des achats, par exemple pour la construction ou la rénovation d'une maison. Cette situation est néfaste pour l'emploi dans le secteur horeca, la distribution, l'industrie et la construction.
Le but de la présente proposition de loi est de permettre au gouvernement de reverser, au moyen d'un virement, une partie des impôts d'un même montant à tous les citoyens. En supposant que cette mesure soit appliquée une fois par an et que la prime s'élève à 100 euros, le coût total brut de ce remboursement serait d'environ 1 milliard d'euros (10 millions de fois 100 euros).
Ce montant étant dépensé par la population, l'impact budgétaire net de la mesure est beaucoup moins important. En effet, cette injection de pouvoir d'achat procure des recettes supplémentaires non seulement en termes de TVA et d'accises, mais aussi au niveau des impôts sur les revenus et des cotisations de sécurité sociale de ceux qui pourront conserver leur emploi grâce à cette mesure.
En fonction du taux d'épargne et de la nature des dépenses, on peut estimer que l'impact budgétaire net d'un tel remboursement d'impôts équivaudra environ à 75 % du montant brut, soit 750 millions d'euros dans notre exemple.
2. Fournir au gouvernement un nouvel instrument politique important permettant de réguler notre économie à court terme
Aujourd'hui, les autorités manquent d'instruments leur permettant de réguler l'économie du pays. Nombreux sont ceux qui pensent même que nous n'avons aucune prise sur la situation économique.
La régulation « à court terme » mise en œuvre actuellement est le fait principalement de la politique de la Banque centrale européenne, qui intervient au niveau du taux d'intérêt. En agissant sur les taux d'imposition et sur les allocations, l'État peut avoir un certain impact à plus long terme.
Le taux d'intérêt sert toutefois à réguler quatre choses différentes à la fois: contenir l'inflation, stimuler l'économie lorsque cela est nécessaire, influencer le taux de change de l'euro par rapport aux autres monnaies et maîtriser les dettes publiques. Cependant, l'instrument du taux d'intérêt seul ne suffit pas, car pour maîtriser les différents facteurs, il faut parfois entreprendre des actions allant dans des directions opposées. Par exemple, il est possible d'avoir de l'inflation à un moment où l'économie stagne. Par ailleurs, la Banque centrale européenne a pour mission d'utiliser l'instrument du taux d'intérêt uniquement à des fins de stabilité des prix.
Avec le remboursement d'impôt solidaire, les autorités disposent d'un instrument bien plus efficace que le taux d'intérêt pour réguler l'économie. Par de petites interventions simultanées sur le pouvoir d'achat de l'ensemble des citoyens, il est possible de stimuler ou de ralentir l'économie.
Un petit remboursement d'impôt universel injecte du pouvoir d'achat dans l'économie et la stimule donc. Si l'économie fonctionne très bien, il n'est absolument pas nécessaire d'injecter du pouvoir d'achat ni d'employer la possibilité d'un remboursement d'impôt. À cet égard, il est essentiel que le gouvernement puisse décider lui-même quand et dans quelle mesure il effectue un remboursement d'impôt, afin que cet outil puisse réellement servir d'instrument stratégique.
Dans cette optique, la présente proposition de loi définit plutôt le cadre dans lequel on peut effectuer pareil remboursement d'impôt, en laissant au Roi le soin de déterminer le moment et le montant du remboursement.
Cet instrument politique permet aussi de reverser à la population les recettes fiscales perçues en trop, comme c'est le cas actuellement en raison de la hausse des prix. En effet, si le gouvernement ne le fait pas, il se résigne à surtaxer la population (en appliquant des taux d'imposition fixes sur des prix à la hausse) qui voit ainsi son pouvoir d'achat dégringoler. Si les impôts étaient calculés par kilo de sucre, par litre de lait ou par litre de diesel, indépendamment du prix (ce qui serait en fait préférable au niveau économique mais trop compliqué sur le plan administratif), les recettes fiscales ne seraient pas aussi élevées qu'elles ne le sont à l'heure actuelle.
En raison de la nature technique de notre système fiscal, l'augmentation des prix entraîne une baisse malsaine du pouvoir d'achat des ménages au profit du budget public, et ce alors que les dépenses publiques sont déjà bien trop élevées dans notre pays.
Le principe fondamental qui sous-tend la présente proposition de loi est donc que les pouvoirs publics ne peuvent en aucun cas s'enrichir du seul fait de l'augmentation des prix de certains biens et services.
3. Alléger la pression fiscale devenue trop élevée, d'une manière simple et non discriminatoire
Des études économiques montrent qu'il n'est pas bon pour un pays d'avoir une pression fiscale trop faible ou trop forte.
Si les recettes fiscales sont trop faibles, le pays ne peut pas accomplir ses missions fondamentales. Au contraire, une pression fiscale trop forte entraîne l'évasion fiscale, la fraude et la délocalisation.
La pression fiscale idéale se situe entre 25 et 40 % du PIB. Avec une pression fiscale de 46 %, la Belgique dépasse largement la limite supérieure.
Un remboursement d'un montant égal d'une partie des impôts que les citoyens ont payés d'une manière ou d'une autre (impôt sur le revenu, TVA, ...) doit, en termes budgétaires, être déduit des recettes fiscales, faisant ainsi baisser notre pression fiscale totale.
4. Instaurer la solidarité entre les citoyens
Étant donné que tous les citoyens se voient rembourser le même montant, indépendamment du fait qu'ils ont payé peu ou beaucoup d'impôts, le remboursement d'impôt solidaire profite davantage aux personnes les plus faibles de notre société.
Justification budgétaire de la proposition
En raison de la hausse des prix (notamment les prix des denrées alimentaires), les autorités perçoivent plus d'impôts que prévu.
Par exemple, si le prix d'un produit soumis à un taux de TVA de 21 % augmente de 10 % pour passer de 121,00 euros à 133,10 euros, l'État perçoit 23,10 euros au lieu de 21,00 euros. Par conséquent, le prix du produit n'augmente pas de 10,00 euros mais de 12,10 euros.
Considérer simplement ce mécanisme comme une « aubaine budgétaire » ne serait pas un signe de bonne gouvernance, vu qu'il s'agit ici, en principe, d'impôts payés en trop qui affaiblissent directement le pouvoir d'achat.
Roland DUCHATELET. Nele LIJNEN. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Le gouvernement est autorisé à effectuer un remboursement d'impôt solidaire d'un même montant pour tous les citoyens.
Le Roi détermine, par un arrêté délibéré en Conseil des ministres, le montant, le moment et les modalités du remboursement.
9 mai 2008.
Roland DUCHATELET. Nele LIJNEN. |