4-579/1

4-579/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2007-2008

25 FÉVRIER 2008


Proposition de loi modifiant l'arrêté royal nº 38 du 27 juillet 1967 organisant le statut social des travailleurs indépendants en vue de la remise des intérêts de retard en cas d'accords de paiement conclus avec les caisses d'assurances sociales

(Déposée par M. Wouter Beke et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition reprend en grande partie le texte de la proposition de loi de M. Steverlynck du 9 mai 2005 (doc. Sénat, 3-1187/1).

Elle vise à permettre au travailleur indépendant en retard de paiement de cotisations sociales de conclure un accord de paiement avec sa caisse d'assurances sociales et d'ainsi obtenir une remise des intérêts de retard.

La publication du livre des chercheurs Johan Lambrechts et Ellen Beens (Zelfstandige Ondernemers in Nood. Ook zij kennen armoede — SVO-EHSAL, Bruxelles et Lannoo, Tielt, 2003) a suscité de larges échos et a contribué notablement à lever le tabou sur la pauvreté chez les travailleurs indépendants.

Les indépendants constituent un groupe vulnérable. Information frappante tirée de l'étude mentionnée ci-dessus: 22 % des indépendants dont le revenu provient d'une activité indépendante exercée à titre principal pendant au moins six ans, se situent pendant au moins un an sous le seuil de pauvreté (chiffres pour la période 1995-2000).

Par conséquent, une partie de ce groupe rencontre des difficultés. Il est courant que des travailleurs indépendants investissent une grande partie de leur propre patrimoine dans leur entreprise. Certes, les investissements constituent l'essence même de leur profession, mais certains indépendants victimes de déboires peuvent se retrouver dans une véritable spirale de dettes. Les dettes s'accumulent et deviennent, à terme, insurmontables, car elles génèrent des intérêts, qui viennent fortement accroître l'endettement.

L'étude susvisée révèle également que les premiers paiements que les indépendants en difficulté omettent de régler sont les cotisations de sécurité sociale, ainsi que la TVA et les dettes fiscales. C'est surtout le non-paiement des cotisations sociales qui entraîne de lourdes conséquences, non seulement pour les travailleurs indépendants, mais également pour leur famille. En effet, les droits sociaux ne sont plus garantis, ce qui peut avoir des conséquences particulièrement douloureuses dans le cas, par exemple, où un membre de la famille devrait être hospitalisé.

Les autorités devraient mettre en place un instrument susceptible de prévenir de tels drames humains ou d'y remédier. Lorsque des individus sont pris dans le cercle vicieux de l'accumulation de dettes, personne n'a intérêt à ce que cette situation s'éternise, ni l'indépendant, ni surtout l'organisme créancier, lequel, dans de nombreux cas, ne pourra de toute façon pas recouvrer les sommes qui lui sont dues.

Le fisc a déjà pris conscience de ce problème. L'article 332 de la loi-programme du 27 décembre 2004 permet, à partir du 1er janvier 2005, d'instaurer, en faveur des personnes physiques de bonne foi aux prises avec une situation fiscale difficile, une surséance indéfinie au recouvrement des impôts directs. Dans ce cas (où il part en fait du principe que les dettes ne sont quand même plus récupérables), le fisc veut laisser aux intéressés la possibilité de prendre un nouveau départ.

Par la présente proposition, les auteurs souhaitent parvenir à un règlement similaire pour les travailleurs indépendants en retard de paiement de leurs cotisations sociales. Le but est de remettre non pas les dettes — il existe à cet effet une procédure devant une « Commission des dispenses de cotisations » — mais plutôt les intérêts, de manière à rendre possible un apurement effectif de la dette réelle liée aux cotisations sociales et à mettre un terme au mécanisme cumulatif des intérêts qui alourdissent la dette.

À l'heure actuelle, les caisses d'assurances sociales prélèvent un intérêt de retard de 3 % sur les dettes encore impayées après l'expiration de chaque trimestre civil. À cela s'ajoute un intérêt de 7 % prélevé sur les dettes qui demeurent impayées à la fin de chaque année civile. Lorsqu'un travailleur indépendant confronté à des arriérés de cotisations sociales convient d'un accord de paiement avec sa caisse d'assurances sociales, ce mécanisme d'intérêts de retard est tout simplement maintenu. Il se peut dès lors qu'un indépendant, malgré des efforts considérables, ne voie ses cotisations sociales diminuer que très progressivement. Sauf demande contraire, tous les paiements sont en effet toujours enregistrés en regard de la dette la plus ancienne, principal et intérêts.

C'est pourquoi la présente proposition vise à instaurer la possibilité de prendre un règlement permettant aux caisses d'assurances sociales de conclure un accord de paiement avec leur client indépendant, et d'ainsi le dispenser du paiement d'intérêts de retard, sous réserve du bon respect de cet accord. De ce fait, la dette en principal sera apurée le plus rapidement possible et l'indépendant en question recouvrera ses droits sociaux en un minimum de temps.

La présente proposition de loi ajoute une condition supplémentaire que le travailleur indépendant qui souhaite, au moyen d'un accord de paiement, s'acquitter du paiement de ses cotisations sociales arriérées, doit remplir pour que la caisse d'assurances sociales puisse lui octroyer une remise des intérêts de retard. Comme il s'agit de cotisations sociales légales, la remise des intérêts de retard nécessite en effet l'intervention d'une autorité publique. On a tenu compte de l'obligation en question en prévoyant qu'il faut demander l'accord préalable de l'Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants. Cet institut peut vérifier si les conditions fixées par le Roi pour qu'il y ait remise des intérêts de retard ont été remplies.

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 2

La présente proposition de loi vise à permettre au Roi de prendre un règlement permettant aux caisses d'assurances sociales, moyennant l'accord de l'Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants, de conclure un accord de paiement avec un indépendant et, dans le même temps, de lui accorder une remise des intérêts de retard, sous réserve du bon respect de cet accord. La solution proposée consiste à insérer un article 16quater dans l'arrêté royal nº 38 organisant le statut social des travailleurs indépendants.

Wouter BEKE.
Hugo VANDENBERGHE.
Tony VAN PARYS.
Pol VAN DEN DRIESSCHE.
Etienne SCHOUPPE.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Dans l'arrêté royal nº 38 du 27 juillet 1967 organisant le statut social des travailleurs indépendants est inséré un article 16quater, libellé comme suit:

« Art. 16quater. — Le Roi peut déterminer les conditions dans lesquelles l'organisme de perception peut conclure un accord de paiement avec le travailleur indépendant ou l'aidant en cas de paiement tardif des cotisations visées à l'article 15 et lui accorder une exonération des majorations visées à l'article 15, § 4, 1º, à la condition que cet accord de paiement soit dûment respecté et moyennant l'accord de l'Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants. »

11 février 2008.

Wouter BEKE.
Hugo VANDENBERGHE.
Tony VAN PARYS.
Pol VAN DEN DRIESSCHE.
Etienne SCHOUPPE.