4-17

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 21 FEBRUARI 2008 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van de heer Philippe Monfils aan de minister van Landsverdediging over «de beslissing om een einde te maken aan de steun van Defensie aan projecten betreffende de gedachtenisplicht» (nr. 4-147)

De voorzitter. - De heer Jo Vandeurzen, minister van Justitie, antwoordt.

M. Philippe Monfils (MR). - J'aurais souhaité la présence du ministre de la Défense, ce qui nous aurait permis de débattre de l'objet de ma question mais aussi des réponses qu'il a données et qui me paraissent tout à fait insatisfaisantes.

La presse nous apprend que le ministre De Crem a décidé de ne plus mettre à la disposition des rescapés belges du camp de Buchenwald un bus de la Défense pour leur traditionnel pèlerinage annuel.

Par ailleurs, nous apprenons également qu'il retire son soutien au projet « La Jeunesse européenne sur les rails de la démocratie et de la liberté » dont l'objectif est, en avril prochain, d'acheminer par train spécial près de 400 jeunes des quatre coins du pays vers Weimar pour visiter le camp de Buchenwald.

Les anciens combattants se sont bien évidemment émus de ces décisions. Quant au ministre De Crem, il a certes donné quelques explications mais celles-ci sont tout à fait insuffisantes.

Concernant le « train de la liberté », il a justifié sa décision en disant que les Communautés n'avaient pas encore fixé leur contribution à ce projet et que cela créait des difficultés. Or, Marie Arena, socialiste et ministre-présidente de la Communauté française, a annoncé qu'elle tenait très fort à la concrétisation du projet, que la Communauté française y enverrait 150 jeunes et qu'elle avait prévu un budget de 22.500 euros à cette fin. De même, Christos Doulkeridis, Écolo et président du parlement francophone de Bruxelles, déclare ce qui suit : « ce travail pour la mémoire est plus que jamais indispensable et c'est pourquoi, avec nos moyens limités, nous soutenons le projet (...) ».

Tout le monde semble donc estimer que ces projets sont fondamentaux. Alors que nous assistons à une résurgence des extrémismes et du racisme, il est essentiel d'apprendre aux jeunes ce qu'était le combat pour la liberté.

Concernant le bus demandé par les anciens combattants, la décision du ministre m'apparaît assez malheureuse. Chacun sait que les anciens combattants aiment se retrouver dans l'environnement militaire. Il est vrai qu'ils pourraient louer un bus et qu'un autocariste pourrait les conduire à Buchenwald. Il faut cependant se rendre compte de l'âge de ces personnes. Je ne vois pas en quoi la mise à disposition d'un bus de la Défense créerait des problèmes et inciterait les autocaristes privés à introduire un recours en concurrence déloyale, comme l'a prétendu le ministre.

Ce qui me gène particulièrement, c'est que le nouveau ministre de la Défense vient de rompre la chaîne de solidarité et de reconnaissance que l'on s'efforce d'établir depuis des années. Je sais que dès que l'on parle de l'ancien ministre Flahaut, M. De Crem devient hystérique mais, en l'occurrence, il ne s'agit pas d'une décision prise par le seul ministre Flahaut. Tous les parlementaires des partis démocratiques ont, au sein de la commission de la Défense que je présidais à l'époque, contresigné et voté des propositions dans ce domaine. Je citerai comme exemples le Pôle historique de la Défense, qui permet de dresser un inventaire du patrimoine historique et d'envisager la restauration de sites et de monuments militaires, la prise en compte de la durée de la présence en Corée des membres du corps expéditionnaire, la gratuité des soins médicaux dans certains secteurs jusque-là oubliés, la pension de veuve accordée dans certains cas, le rôle supplémentaire confié à l'Institut national des invalides de guerre dans la lutte contre l'extrémisme, le racisme et pour la commémoration de l'holocauste. Toutes ces décisions ont été prises en parfaite intelligence et rapidement, chacun estimant qu'il s'agissait là d'un devoir de reconnaissance envers ceux qui se sont battus et qui sont morts pour notre liberté.

Personne ne comprend. Les anciens combattants sont choqués et déçus. Tous ceux qui ont travaillé pour rencontrer leurs justes revendications ainsi que de nombreux parlementaires ne le comprennent pas non plus. Cette décision donne un coup d'arrêt brutal à toutes ces actions alors qu'il est bien temps de restaurer des notions comme le civisme, le devoir de mémoire et le rappel des sacrifices accomplis pour que nous vivions aujourd'hui dans des États démocratiques. Les raisons invoquées - la concurrence avec un autocariste privé ou les quelques dizaines milliers d'euros que paierait ou non la communauté - me semblent de bien peu de poids par rapport au problème.

Pourquoi a-t-on fait cela ? Ne peut-on arranger les choses ? D'autres projets seraient-ils concernés ? Envisagerait-on un revirement de la politique de solidarité qui a été menée à l'égard des anciens combattants et de tous ceux qui ont combattu pendant la guerre ? Ne peut-on envisager un réexamen de ce dossier de manière à régler le problème et à montrer que M. De Crem, comme ses prédécesseurs et comme les parlementaires, est soucieux de poursuivre ce devoir essentiel de mémoire.

M. Jo Vandeurzen, ministre de la Justice. - Je vous lis la réponse du ministre de la Défense.

Les anciens combattants et anciens prisonniers de guerre continueront à bénéficier de l'appui du ministère de la Défense et de moi-même. Ils méritent tout mon respect et toute mon estime.

En ce qui concerne le dossier des bus militaires pour les voyages scolaires, l'Inspection des Finances est d'avis que ce que l'on appelle l'aide aux tiers doit d'abord être fixée sur les plans légal et réglementaire. En tant que ministre de la Défense je ne peux intervenir que dans un cadre légal.

Les directives en cours d'élaboration relatives à l'aide aux tiers devront apporter clarté et transparence. L'intention finale doit être de faire plus avec moins de moyens.

Dans ce contexte je me réfère à l'arrêt prononcé récemment concernant le transport d'organes humains, où était mise en évidence la concurrence déloyale vis-à-vis du secteur privé.

Concernant le dossier Jeunesse européenne sur la voie de la démocratie et de la liberté, je dois vous informer que le dossier n'était pas finalisé sur le plan financier. I1 fallait encore que chaque instance concernée apporte sa contribution. Lorsque le dossier sera finalisé, la mission pourra être exécutée.

Néanmoins, je tiens à insister sur le fait que les objectifs de cette organisation sont très importants pour la société et méritent des éloges. Je peux personnellement témoigner du bien-fondé de ce genre d'initiative, comme le montre ma récente visite à Auschwitz en compagnie de la commission de la Défense à laquelle se sont joints 120 jeunes.

M. Philippe Monfils (MR). - En général, les ministres font des effets d'annonce positifs. M. De Crem a inventé les effets d'annoncé négatifs. Il annonce qu'il ne fera pas un certain nombre de choses et ensuite, il corrige, en disant qu'on pourrait éventuellement essayer d'arranger la situation.

Pour le premier point, je maintiens mon point de vue. Je suis parlementaire depuis vingt-six ans et j'ai aussi été ministre pendant sept ans. Je sais parfaitement que certains subsides ne peuvent être octroyés sauf base légale. Il est tout de même curieux qu'aujourd'hui, pour ce petit problème, on soulève tout d'un coup cette question de la base légale. On aurait pu sans difficulté régler le problème cette année-ci et expliquer aux anciens combattants et aux autres personnes concernées que l'année prochaine, il y aurait quelques modifications, sans les mettre brutalement devant le fait accompli. Je répète que la raison invoquée est un problème financièrement mineur mais pour les anciens combattants, pour des raisons psychologiques que je peux comprendre, l'affaire est importante.

Pour le deuxième élément, indépendamment des discussions entre la communauté et l'État fédéral, il me semble particulièrement malvenu d'annoncer que l'on supprime un voyage de 400 jeunes alors qu'on affirme avoir le souci d'entretenir la mémoire collective. Ces 400 jeunes sont enthousiastes à l'idée de partir rencontrer leurs aînés. Quand nous sommes partis en airbus à Auschwitz et Birkenau, j'ai pu constater que les jeunes ne riaient pas ; ils étaient frappés par la situation et comprenaient, sur le terrain, ce qui s'était passé.

Tous ces jeunes sont prêts à partir, mais on leur annonce qu'il n'en sera rien car la Défense nationale, qui bénéficie de 2,5 milliards d'euros, n'est pas capable de trouver une formule à cause de quelques dissensions entre la Communauté française et l'État fédéral.

J'espère simplement que le bon sens prévaudra et que des formules seront trouvées, quitte à élaborer ultérieurement des solutions définitives, puisqu'il est vrai qu'un nouveau ministre vient d'entrer en fonction, que des dossiers doivent être étudiés, etc.

J'insiste une fois encore pour que l'on remédie à ce mauvais vaudeville qui scandalise de nombreux parlementaires, décourage et désespère tous ceux qui se sont battus pour notre liberté.