4-358/1

4-358/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2007-2008

6 NOVEMBRE 2007


Proposition de loi modifiant le Code civil afin de permettre l'accouchement discret

(Déposée par M. Guy Swennen)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition de loi reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée à la Chambre des représentants le 8 février 2007 (doc. Chambre, nº 51-2900/001).

En Belgique, les possibilités ne sont guère nombreuses pour une femme dont la grossesse est non désirée. Ou bien, elle interrompt sa grossesse de façon prématurée, ou bien, elle accouche officiellement et cède l'enfant en vue d'une adoption. On déplore malheureusement également un certain nombre d'accouchements clandestins qui, dans le meilleur des cas, débouchent sur un abandon d'enfant (cf. les boîtes à bébé).

En Belgique, une femme dont la grossesse est non désirée, qui n'accouche pas de façon clandestine et ne souhaite pas interrompre prématurément sa grossesse n'a d'autre choix que d'accoucher officiellement, ce qui a pour conséquence que l'identité de la mère et/ou du père sera consignée dans l'acte de naissance.

Dans le cas d'un certain nombre de femmes dont la grossesse est non désirée, cette identification pose problème. Elles souhaitent céder l'enfant sans communiquer leurs données personnelles. Dans ces conditions, ces femmes et leur entourage ne peuvent, à l'avenir, être confrontés à la grossesse non désirée, ou à la personne et la circonstance qui en sont à l'origine. Les femmes sont à la recherche d'une possibilité d'accoucher dans l'anonymat total. En Belgique, la loi n'offre aucune possibilité d'accoucher anonymement.

La législation française: l'accouchement anonyme très critiqué

Une femme qui est enceinte sans l'avoir souhaité et qui veut garder l'anonymat peut notamment accoucher en France. Un tiers des femmes qui accouchent dans l'anonymat à Lille sont originaires de Belgique. Le système français d'accouchement anonyme (accouchement sous X) permet aux parents biologiques de garder leur identité secrète et de ne fournir aucune information lors de la naissance de l'enfant. L'acte de naissance mentionne uniquement un X à l'endroit où devrait normalement apparaître le nom des parents. Immédiatement après la naissance, l'enfant est confié à une institution en vue d'une adoption.

Le système français est toutefois fortement remis en question en raison des protestations incessantes des enfants nés sous X en France et en Belgique. Ils trouvent inadmissible de ne pas être autorisés à rechercher leurs parents naturels. Dans une tentative de concilier les droits des enfants nés sous X et le droit des parents à l'anonymat, la France a adapté, en 2002, la procédure de l'accouchement anonyme. Un Conseil national pour l'accès aux origines personnelles a été créé. Il permet aux enfants nés sous X d'entreprendre des démarches en vue de retracer leur origine biologique.

La modification législative ne remet pas en cause le droit des parents de naissance de garder leur identité secrète.

Si les parents de naissance le souhaitent, ils peuvent toujours refuser toute communication d'informations à l'enfant né sous X. Il semble qu'en France, le respect de la vie privée de la mère de naissance prime sur le droit à la connaissance des origines personnelles de l'enfant né sous X. Même la modification de 2002 n'a pas équilibré les droits de la mère de naissance et ceux de l'enfant né sous X.

Un enfant français né sous X, Pascale Odièvre, a entamé une action devant la Cour européenne des droits de l'homme, qui a rendu son jugement le 13 février 2003 (1) .

Pascale Odièvre a fait valoir devant la Cour qu'elle avait été lésée dans son droit au respect de la vie privée, dans la mesure où la loi française fait primer le droit de la mère de naissance à l'anonymat sur le droit de l'enfant abandonné de connaître sa famille de naissance. Selon Mme Odièvre, cette violation a des conséquences discriminatoires graves, comme l'impossibilité de savoir s'il existe un risque d'affections héréditaires et l'impossibilité d'hériter des parents naturels.

Une majorité de dix juges européens contre sept n'adhère pas au raisonnement de Mme Odièvre. Selon la Cour, le législateur français dispose d'une marge qui permet, dans l'intérêt général, de déroger au droit à la vie privée d'un enfant né sous X. Cet intérêt est présent, il s'agit en effet de la prévention des avortements et des abandons d'enfants. Cette dérogation est, selon la Cour toujours, limitée à un minimum par l'accès des enfants abandonnés aux données relatives à la mère biologique, sans que l'identité de celle-ci ne soit toutefois révélée. La Cour souligne que la France, par le biais du Conseil national pour l'accès aux origines personnelles, prête son concours à la réunion de l'enfant abandonné et de la mère biologique, même s'il faut, au préalable, que cette dernière consente à la rencontre et accepte de révéler son identité. Le droit de l'enfant abandonné de connaître sa famille biologique ne prime pas sur le droit de la mère biologique de conserver l'anonymat. C'est donc l'intérêt général qui tient lieu d'arbitre.

Selon la Cour, il n'est pas davantage question de discrimination. L'enfant abandonné hérite, comme les autres enfants adoptés, des parents adoptifs, et a accès aux données essentielles. La juge belge Françoise Tulkens fait partie du groupe des 7 juges qui ne partagent pas l'avis de la majorité de la Cour. Elle reconnaît le droit de chaque être humain à l'accès à son origine et à la connaissance de l'identité de ses parents naturels. Elle souligne qu'outre l'accouchement dans l'anonymat, il existe de meilleures formules permettant de concilier l'intérêt général, l'intérêt de la mère biologique et l'intérêt de l'enfant abandonné, à savoir l'accouchement « discret ».

L'accouchement discret, une alternative équilibrée à l'accouchement anonyme

Lors d'un accouchement discret, les données des parents restent cachées, mais l'enfant abandonné a le droit de les consulter (y compris l'identité) lorsqu'il atteint un certain âge et moyennant le respect d'une procédure déterminée.

En Belgique, les enfants nés sous X, les organismes agréés d'adoption flamands, le Conseil néerlandophone des femmes et d'autres organisations féminines réclament depuis un certain temps déjà une réglementation légale pour les accouchements discrets. Dans ce contexte, elles s'appuient notamment sur un avis de 1998 du Comité consultatif de bioéthique (2) .

Le comité se penche sur la question de savoir s'il est souhaitable d'instaurer les accouchements sous X en Belgique. Selon les partisans de l'accouchement sous X, il existe, en la matière, une confrontation entre deux valeurs, celle de la vie de l'enfant, d'une part, et le droit de toute personne à connaître sa mère biologique, d'autre part, la sauvegarde de la vie de l'enfant étant la première valeur à respecter. Les adversaires, par contre, estiment qu'il est inacceptable que des enfants soient coupés de leurs racines, et qu'il ne faut jamais fermer définitivement la porte aux recherches de filiation.

La conclusion générale du Comité est la suivante:

« Les situations où l'accouchement anonyme apparaît comme une possibilité sont des situations humainement difficiles où s'entrechoquent la détresse des futures mères, la protection de la santé et de la vie des enfants, mais aussi les situations douloureuses au plan de la filiation qui peuvent surgir ultérieurement et affecter tant la mère que l'enfant. C'est la raison pour laquelle le Comité, soucieux à la fois de protéger l'enfant et de répondre à la détresse des mères qui ne peuvent assumer leur maternité, même juridiquement, pense devoir recommander une modification de la situation actuelle. ».

Un système permettant d'accoucher dans la discrétion est une solution honnête pour protéger les enfants nés sous X sans perdre de vue les intérêts des mères « anonymes ». Un accouchement dans la discrétion permet de ne pas mentionner le nom de la mère dans l'acte de naissance, mais uniquement dans un registre fermé, qui ne pourra être accessible qu'à condition de suivre une certaine procédure, et qu'à condition que tant la mère que l'enfant aient donné leur autorisation.

L'enfant pourra donner son autorisation à partir de l'âge de seize ans. La limite est fixée à cet âge, car il ne s'indique pas de confier une décision aussi importante et émotionnelle à un enfant de douze ans. À cet âge, un enfant n'est pas encore assez mûr sur le plan émotionnel. Un enfant en pleine puberté, en route vers l'adolescence, traverse souvent une période difficile et troublante. Il est confronté à de nombreux changements, d'ordre physique, sexuel et émotionnel, mais également d'ordre relationnel, en ce qui concerne les relations avec ses parents, et d'ordre social, les enfants du même âge prenant une importance croissante. Pendant cette période de sa vie, un enfant passe par différentes phases de développement, durant lesquelles il entre en conflit avec lui-même et avec son environnement. Il vit l'expérience de la puberté, de la préadolescence, du développement intellectuel, etc. Il est emporté dans un tourbillon de sentiments. Il ne semble donc pas indiqué de le troubler encore davantage en lui confiant la responsabilité de rencontrer ou non sa mère, qui l'a abandonné. Tous les événements importants vécus par un enfant lors de sa puberté marqueront inévitablement de leur sceau son développement ultérieur. Il importe donc de veiller à ce que ce développement se déroule dans les meilleures conditions possibles et que l'enfant ne soit impliqué dans la procédure qu'au moment où il a atteint un âge où il est capable de gérer ses sentiments de manière rationnelle.

Le système conserve les avantages de l'accouchement sous X, mais il en supprime les effets négatifs. Une femme enceinte qui, pour l'une ou l'autre raison, le souhaite, peut garder le secret autour de sa grossesse ou de son accouchement. La naissance a lieu sous encadrement professionnel et dans les meilleures conditions. Si elle le souhaite, la mère peut également bénéficier d'un accompagnement après la naissance.

L'accompagnement est une nécessité absolue, d'une part, pour préserver la santé de la mère et de l'enfant, et d'autre part, en raison des problèmes psychiques auxquels la mère est confrontée à la fois avant, pendant et après l'accouchement. Avant l'accouchement, il est important que la mère soit accompagnée, de manière à ce qu'elle sache qu'elle n'est pas toute seule.

Elle pourra mieux gérer les sentiments de déshonneur, de honte, de déception, etc ... auxquels elle ne manquera pas d'être confrontée. Un accompagnement adéquat contribuera également à lui permettre de prendre une décision mûrement réfléchie. Dans certains cas, on pourra sans doute même éviter que la mère aille jusqu'à l'abandon. On garantit en outre que l'accouchement aura lieu dans un bon hôpital offrant l'assistance médicale correcte nécessaire.

Il va de soi qu'un accompagnement est également crucial après l'accouchement. Il n'est pas rare que des mères qui abandonnent leur enfant traversent plus tard une période difficile, traumatique, au cours de laquelle elles doivent perpétuellement affronter le poids de leurs actes et les sentiments de culpabilité qui vont souvent de pair. Plusieurs années après les faits, elles sont encore en proie à la douleur et au chagrin. Souvent, en remplacement de l'enfant, elles fuient dans une relation vouée à l'échec. Dans de nombreux cas, ces femmes ont le sentiment qu'elles ne peuvent parler de leurs problèmes à personne. Elles se forcent dès lors à faire comme si rien ne s'était passé. Pourtant, elles doivent vivre nuit et jour avec leurs problèmes et elles y sont constamment confrontées (par exemple, le jour de l'anniversaire de l'enfant). Il n'est pas rare que ces femmes tombent en dépression. Un accompagnement psychologique adéquat peut les aider à accepter le passé.

L'enfant aura également besoin d'un accompagnement, et pourra par conséquent aussi demander une aide. L'influence de l'ignorance de ses racines ne doit pas être sous-estimée. Un enfant abandonné par sa mère est poursuivi par ce sentiment quotidiennement, et souvent, se lance dans une quête désespérée. En outre, le fait qu'il se sache abandonné se répercutera négativement sur le développement de l'enfant. Cela peut le mener à la dépression et l'inciter à se réfugier dans de mauvaises fréquentations. Il va dès lors sans dire que ces enfants doivent également bénéficier d'un accompagnement adéquat pour qu'ils se sentent de nouveau en sécurité.

Le registre fermé permet à un enfant abandonné de rechercher, plus tard, ses liens de filiation, pas tout seul, mais en bénéficiant de l'aide et de l'encadrement d'un service professionnel. Une mère ayant abandonné son enfant peut faire des recherches pour savoir comment va celui-ci. Le père (présumé) peut également avoir accès au registre.

Concrètement, nous envisageons la création d'un seul registre national fermé, qui sera tenu par un service qui a suffisamment prouvé sa capacité à accompagner les mères et les enfants qui ont vécu un abandon. Le registre comprendra deux listes: la première reprendra les informations générales relatives à la mère (caractéristiques physiques, ébauche du profil, données (génétiques) nécessaires, message personnel éventuellement laissé par la mère ou les parents, éventuellement raisons et circonstances de l'abandon, etc.) sans que l'identité de la mère soit révélée. Cette formule permet de répondre au souhait de l'enfant qui n'éprouve pas le besoin de faire la connaissance de sa mère. En outre, le registre comprendra une liste qui mentionnera ces mêmes informations mais également le nom de la mère.

La réglementation doit préciser clairement à quelles conditions, à qui, quand et selon quelles modalités le registre est accessible.

L'article 55 du Code civil dispose que toute naissance doit être déclarée à l'officier de l'état civil de la commune sur le territoire de laquelle l'enfant est né, dans les quinze jours qui suivent celui de l'accouchement. En vertu de l'article 56 du Code civil, le médecin, l'accoucheuse, le responsable d'une clinique ou toute autre personne qui a assisté à l'accouchement sont tenus de donner à l'officier de l'état civil avis de l'accouchement, au plus tard le premier jour ouvrable qui suit celui-ci. Si ce dernier remarque, après la notification, que la déclaration n'a pas été faite dans le délai de quinze jours, il demande à la personne qui l'a averti de l'accouchement de faire la déclaration.

L'acte de naissance est ensuite dressé. Il énonce notamment le nom, la date et le lieu de naissance de la mère.

Ces articles doivent être modifiés pour permettre l'accouchement discret. Toute femme enceinte doit avoir la possibilité, à son arrivée à l'hôpital (ou chez un médecin ou une accoucheuse), d'opter pour une procédure d'accouchement discret. Dans ce cas, l'obligation de notification et de déclaration est maintenue, en ce sens que le responsable de l'hôpital ne notifie pas l'accouchement à l'officier de l'état civil mais à l'administration du registre central des accouchements discrets. Celle-ci assume alors l'obligation de déclaration et déclare la naissance dans les quinze jours à l'officier de l'état civil de la commune de la naissance, sans toutefois divulguer les données relatives à la filiation, qui sont conservées dans le registre central. La procédure suit alors son cours normal, et l'officier de l'état civil dresse un acte de naissance avec mention, en marge, du fait qu'il s'agit d'une naissance discrète et sans énoncer les données relatives à la mère. Ensuite — lorsque l'enfant a un domicile définitif — l'acte de naissance est transmis au service de la population de la commune du domicile de l'enfant. Au cours de la vie de celui-ci, toutes les données supplémentaires éventuelles (concernant la filiation de l'enfant par exemple) peuvent être mentionnées en marge de l'acte.

L'accouchement discret est également la meilleure solution pour les services d'adoption et les organisations féminines. Le Vrouwenraad, aux Pays-Bas, et la Federatie van Erkende Vlaamse Adoptiediensten qualifient la décision d'accoucher clandestinement ou dans l'anonymat de « prénatale » tandis que la décision d'abandonner l'enfant est postnatale, ce qui suppose un tout autre état d'esprit. L'accompagnement de la mère après la naissance est capital. Pour 80 % des femmes qui se présentent pour faire part de leur souhait d'abandonner l'enfant, l'on recherche avec succès une autre solution, si bien que les mères ont la possibilité d'élever elles-mêmes leur enfant ou, du moins, de rester en contact avec lui. Ces solutions peuvent consister à: mettre en ordre des demandes d'asile, faire valoir le droit au minimum de moyens d'existence, trouver un travail pour la mère, organiser une médiation avec les parents de celle-ci, veiller au placement temporaire de l'enfant et régler le problème du logement. Ces décisions sont toujours prises en concertation avec la mère candidate à l'abandon et avec l'accord de celle-ci, bien entendu. Seules 1/5 des femmes s'étant présentées pour un abandon concrétisent malgré tout leur projet. Toutes les mères envisageant l'abandon bénéficient d'un délai de réflexion, avec encadrement, de deux à six mois.

Ce sont de beaux résultats, qu'un système d'accouchement dans l'anonymat ne permet pas d'enregistrer.

Le service chargé de tenir à jour le registre central pourra collecter toutes les informations et le savoir-faire utiles. Il sera ainsi possible, d'une part, d'avoir une idée du nombre de femmes qui ont recours à l'accouchement discret et, d'autre part, d'utiliser les données recueillies à des fins de prévention, d'accompagnement, etc. Les jeunes filles seront mieux accueillies, dans un cadre plus chaleureux, qui apaisera leur souffrance.

Malgré la contraception, les lois sur l'interruption volontaire de grossesse et les aides socioéconomiques en faveur des jeunes mères en difficulté, on constate qu'il y a encore des femmes qui souhaitent garder l'anonymat lors de l'accouchement. Il ressort d'une étude du docteur Catherine Bonnet qu'il est rare que des difficultés d'ordre socioéconomique poussent la mère à ne pas accepter l'enfant. Cette attitude est souvent liée à des problèmes d'ordre psychologique. Des femmes peuvent découvrir (tardivement) leur grossesse bien après l'expiration du délai légal pour pratiquer l'interruption volontaire de grossesse ou, pour diverses raisons, ne souhaitent pas avoir recours à une interruption de grossesse. Différents éléments peuvent soumettre les femmes à une pression psychique extrême, pour qu'elles n'acceptent pas leur enfant. Un accouchement discret pourrait constituer une solution, en permettant à la mère de garder l'anonymat tout en n'empêchant pas définitivement la recherche de la filiation.

Le législateur a pour mission de dégripper les procédures administratives « rouillées », en les adaptant à une réalité sociale qui a évolué. En décembre 2005, les députées sp.a Magda De Meyer et Karin Jironflée ont déposé une proposition de résolution visant à permettre les accouchements discrets dans notre pays. Dans les milieux gouvernementaux, elle a été accueillie favorablement et a même débouché sur une note d'orientation, mais aucun projet de loi n'a vu le jour jusqu'à présent. La situation difficile dans laquelle se retrouve, du jour au lendemain, le groupe toujours plus nombreux des mères qui ont accouché au terme d'une grossesse non désirée, constitue un tel changement que le législateur doit réagir, sans ignorer les droits des enfants victimes d'un abandon. Il s'agit d'un exercice d'équilibriste auquel le système de l'accouchement dans la discrétion peut apporter une solution.

Les lignes de force de l'application pratique de la proposition

La proposition de loi prévoit l'adaptation de trois articles du Code civil, en ce sens que lorsqu'une mère ne souhaite pas révéler son identité, la naissance devra être déclarée dans un registre central. L'administration du registre central des accouchements discrets doit en informer l'officier de l'état civil de la commune sur le territoire de laquelle l'enfant est né. Les données relatives à la filiation ou l'identité de la mère ne peuvent être révélées sans le consentement de cette dernière. Le Roi fixe les modalités de cette procédure.

En cas d'accouchement discret, les données de la mère ne sont donc pas inscrites dans l'acte de naissance, mais dans le registre central des accouchements discrets.

Le registre central des accouchements discrets contient, par mère, deux listes:

1. la liste de filiation

La liste de filiation comprend l'identité de la mère. Lorsque l'enfant atteint l'âge de seize ans, il peut demander à la Commission du registre central à pouvoir prendre connaissance de cette identité, et ce, à l'intervention de services d'encadrement professionnels désignés par le gouvernement. La Commission effectue ensuite une tentative de médiation afin d'obtenir le consentement de la mère. À défaut de celui-ci, les données ne seront pas communiquées.

2. la liste des données non identifiables

Cette liste comprend des informations générales sur la mère (les caractéristiques physiques, une ébauche du profil, un message personnel éventuellement laissé par la mère ou les parents, toutes les données génétiques nécessaires, éventuellement, les raisons et les circonstances de l'abandon, etc.). L'enfant peut consulter cette liste, par le biais d'un service d'encadrement professionnel, à partir de l'âge de seize ans. À tout âge de l'enfant, les tuteurs légaux peuvent cependant demander à consulter cette liste.

Les mères qui envisagent d'abandonner leur enfant bénéficient d'un encadrement correct, assorti d'une période de réflexion de quatre mois après l'accouchement. Le gouvernement désigne ces services d'encadrement, auxquels les enfants abandonnés peuvent toujours aussi s'adresser pour obtenir tout le soutien nécessaire. Les dispositions de la proposition de loi et les lignes de force s'appliquent aussi, le cas échéant, aux « pères qui abandonnent leur enfant ».

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 2

Cet article prévoit que, lorsqu'une mère ne souhaite pas révéler son identité, la naissance doit être déclarée auprès d'un registre central. L'administration du registre central des accouchements discrets doit en informer l'officier de l'état civil de la commune sur le territoire de laquelle l'enfant est né. L'article prévoit également que les données relatives à la filiation sont conservées dans le registre central et que ces données ne peuvent être révélées sans l'autorisation de la mère.

Les conditions et les règles concernant l'enregistrement des données relatives à la filiation et la révélation des données sont fixées par le Roi.

Article 3

En cas d'accouchement discret, les données de la mère ne sont pas reprises dans l'acte de naissance, mais l'acte de naissance renvoie au registre central des accouchements discrets.

Article 4

Le Roi organise un registre central des accouchements discrets. Il semble indiqué de l'organiser au SPF Justice. Le Roi en fixe le fonctionnement.

Guy SWENNEN.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

L'article 55 du Code civil, remplacé par la loi du 30 mars 1984, est complété par les alinéas suivants:

« Si toutefois la mère demande à l'institution ou à la personne qui l'assiste de garder le secret sur son identité et son accouchement, l'institution ou la personne qui l'assiste en informe le registre central des accouchements discrets le premier jour ouvrable qui suit celui de l'accouchement. La notification se fait suivant les modalités déterminées par le Roi.

L'administration du registre central des accouchements discrets déclare la naissance dans le délai prévu à l'alinéa 1er à l'officier de l'état civil de la commune de la naissance, sans toutefois divulguer les données relatives à la filiation maternelle.

Les données relatives à la filiation restent dans le registre central et ne peuvent être divulguées sans le consentement de la mère.

Le Roi détermine les modalités de l'enregistrement des données relatives à la filiation et les conditions auxquelles elles peuvent être communiquées à l'enfant. ».

Art. 3

À l'article 57 du même code, remplacé par la loi du 30 mars 1984, sont apportées les modifications suivantes:

A. au 2º, les mots « de la naissance, le nom, » sont remplacés par les mots « de la naissance. S'il ne s'agit pas d'un accouchement discret, l'acte de naissance mentionne également le nom, »;

B. le 3º est complété comme suit:

« ou l'adresse du registre central des accouchements discrets ».

Art. 4

Le Roi organise un registre central des accouchements discrets. Il en règle également le fonctionnement.

26 octobre 2007.

Guy SWENNEN.

(1) Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Odièvre du 13 février 2003, Hudoc, http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/search.asp ?sessionid=10347476&skin=hudoc-fr.

(2) http://www.health.fgov.be/bioeth/fr/avis/avis-n04.htm