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11 OCTOBRE 2007
La présente proposition de loi reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 16 mai 2006 (doc. Sénat, nº 3-1719/1 - 2005/2006).
Contexte
Le commerce équitable est une idée qui a été développée au cours des dernières décennies, essentiellement par des organisations non gouvernementales et diverses fédérations internationales. Aujourd'hui, ce projet influence le mode de consommation d'une partie de la population européenne.
Ce type de commerce concerne actuellement une part certaine, bien que minime, des flux économiques. Les secteurs les plus propices à son développement sont l'agroalimentaire et l'artisanat.
Le système du commerce équitable a la particularité de prendre en compte la situation des personnes qui produisent les biens, qui sont ensuite consommés par les populations de l'hémisphère Nord. Le commerce équitable cherche à offrir une solution structurelle à la situation de précarité, de grande pauvreté et de forte dépendance économique dans laquelle se trouvent de nombreux producteurs de l'hémisphère Sud.
Ce concept éthique part d'une constatation: de nombreux producteurs du Sud sont dans une situation à ce point défavorable qu'ils ne peuvent à la fois couvrir leurs coûts de production et avoir un revenu leur assurant des conditions de vie décentes. Ce problème est très souvent causé par la faiblesse des prix offerts par les entreprises multinationales pour l'achat de leurs produits. En effet, vu leur poids socio-économique, les grands groupes parviennent à imposer des prix très bas. Ces intermédiaires obtiennent ensuite une importante marge bénéficiaire en revendant les denrées sur les marchés de l'hémisphère Nord. Ils parviennent donc généralement à obtenir des profits énormes, alors que les producteurs, à la source de l'échange commercial, n'obtiennent que quelques miettes du gâteau.
Face à ce phénomène, le commerce équitable tente de construire des relations commerciales alternatives. Il se constitue d'un ensemble de normes économiques, sociales et environnementales autour desquelles se construisent des transactions commerciales, des transferts de biens du Sud vers le Nord. Le respect de ces normes signifie concrètement pour le Sud que la production a lieu dans des conditions qui couvrent les coûts de production, assurent aux producteurs des revenus décents, respectent les droits des travailleurs et contribuent à la conservation d'un environnement sain; le tout, dans une perspective de développement durable. Le consommateur du Nord, quant à lui, est informé du respect de ce cadre normatif par des labels qui émanent d'organisations nationales et internationales.
Objectifs
Le Parlement belge a ouvert la discussion à propos du projet de loi portant transposition des directives 2004/17 et 2004/18 du Parlement européen et du Conseil concernant les marchés publics (Doc. 3-1689/1). Dans ce cadre, il semble opportun de prévoir la possibilité pour les autorités publiques belges d'intégrer des éléments de commerce équitable dans leurs contrats. Il s'agirait à la fois de participer directement à ce commerce en tant que consommateur de grande ampleur, et de le promouvoir indirectement en assurant un rôle d'exemple envers la population.
La Belgique peut mettre à profit la marge de manœuvre que lui laissent les directives pour intégrer une telle possibilité de référence au commerce équitable dans la loi de transposition.
L'objectif de la présente proposition de loi est de donner une définition légale au concept de commerce équitable. L'intérêt d'une telle définition se montre au moins à deux égards: d'une part, elle permettra de servir de référence lorsqu'un pouvoir adjudicateur voudra imposer des conditions relatives au commerce équitable dans un marché public; d'autre part, et plus généralement, elle permettra d'aider le consommateur à distinguer ce qui est — ou n'est pas — issu du commerce équitable.
En ce qui concerne ce second point, il faut préciser que, dans le cadre actuel, le consommateur a parfois du mal à s'y retrouver, étant confronté à une masse de produits marqués de labels divers.
L'image dégagée par le commerce équitable est positive dans l'opinion publique, de sorte que certaines entreprises voudraient s'attacher l'étiquette « commerce équitable » afin de bénéficier de son aura positive. Dans certains cas, ce sont des objectifs louables d'aide au développement qui sont qualifiés comme entrant dans le champ du commerce équitable alors qu'ils ne respectent pas suffisamment les critères de ce type de commerce.
Dans d'autres cas, on risque de voir des entreprises s'affubler du vocable « commerce équitable » uniquement dans le but de faire plus de profit et sans respecter les conditions minimales d'exercice d'un tel commerce.
État actuel du droit belge
Il n'existe pas actuellement, en Belgique, de définition légale de la notion de « commerce équitable ». Des thèmes proches ont été abordés par le droit.
Dans le Plan fédéral belge du développement durable 2000-2004, le gouvernement a exprimé son soutien aux labels favorisant le commerce équitable et pris l'initiative d'étudier, en collaboration avec des représentants de la société civile et de l'industrie, les moyens de mieux promouvoir le commerce équitable. Des engagements similaires ont été pris par le secrétaire d'État à la Coopération au développement en mars 2000, dans le cadre de la politique « La qualité dans la solidarité. Partenariat pour le développement durable ».
Le Plan fédéral belge du développement durable 2004-2008 met en exergue la fonction d'exemple que les pouvoirs publics peuvent assumer par l'adjudication de marchés publics porteurs de projets commerciaux « durables » (action 17).
La loi belge du 27 février 2002 visant à promouvoir la production socialement responsable a créé un « label pour la production socialement responsable ». Elle établit des critères minimums pour l'obtention du label social belge: respect des huit conventions de base de l'organisation internationale du travail, qui portent sur quatre grands principes: la liberté syndicale, l'interdiction du travail forcé, l'obligation de non discrimination et la lutte contre le travail des enfants. Les entreprises qui respectent les critères peuvent obtenir un label pour les produits concernés.
Une proposition de résolution relative à la crise qui frappe les producteurs de café a été adoptée à la Chambre des représentants. Elle concerne également le commerce équitable, pour le secteur plus ciblé du café. (DOC Chambre 51 0027/001 à 006).
Prise en compte du droit européen et international
La présente proposition de loi doit être envisagée du point de vue de sa compatibilité avec le droit européen et le droit international. Notamment, il faut tenir compte des exigences dues au respect de la liberté de circulation des marchandises, mais aussi des règles du droit de la concurrence.
Dans cette perspective, il faut noter avant tout que le commerce équitable n'a pas pour vocation de remplacer le système économique libéral par un autre. Au contraire, il se construit sur les bases de celui-ci, en lui apportant des nuances et des particularités.
Tout d'abord, précisons que les États ne sont jamais assignés par la Commission européenne dans le cadre d'un recours en manquement sur base des articles 10 et 81 du Traité de Rome, lequel a pour objet la lutte contre les accords entre entreprises, les décisions d'association d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres ou qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun. Il n'y a donc pas lieu de s'inquiéter en ce qui concerne cette proposition de loi: celle-ci ne risque pas d'être critiquée par la Commission par le biais de l'interdiction des cartels. En effet, la proposition de définition ne crée en rien une organisation de fixation des prix, elle ne fait que se référer à des mécanismes déjà existants et fonctionnant depuis de nombreuses années.
L'État belge ne commettrait donc pas une faute susceptible d'être condamnée par les autorités européennes.
Par ailleurs, il faut encore remarquer que le système de commerce équitable n'impose pas un prix comme le ferait une autorité dans un marché règlementé. Le commerce équitable est une option qui fonctionne au sein d'un marché libre: les agents intéressés ont la possibilité d'adhérer à un système qui leur impose une séries d'obligations. Ces obligations s'imposent donc contractuellement, suite au consentement éclairé des entreprises concernées. Le prix que s'engage à payer l'acheteur est en réalité une modalité interne à l'entreprise quant à l'allocation des revenus.
Cette liberté de participation au système est une condition nécessaire mais suffisante pour permettre la compatibilité du commerce équitable avec le droit communautaire.
Il s'agit donc d'un système qui repose sur la collaboration volontaire de différents acteurs économiques au sein d'une économie de marché; il existe, en outre, suffisamment de variables commerciales pour maintenir le jeu de la concurrence entre les entreprises du secteur. En revanche, il établit un système de contraintes pour les acteurs économiques afin de créer un impact en faveur des producteurs et des travailleurs du Sud. Le prix proposé aux producteurs doit être le plus élevé parmi les trois suivants: le prix sur le marché national, le prix sur le marché international et le prix proposé par les ONG spécialisées en matière de commerce équitable. Le prix est fixé sur les lieux de production, hors du marché européen et ce produit arrive dans l'Union européenne avec ce prix. Il n'y a donc aucune forme de monopole ou de système d'imposition de prix qui serait contraire au droit européen.
Une autre question se pose en ce qui concerne le droit économique: celle des aides d'État. Le problème aurait pu se présenter au niveau de la référence au commerce équitable qui serait faite dans les appels d'offres, dans le cadre des marchés publics.
Ce n'est pas le cas. Il faut savoir que, par nature, une aide d'État correspond à « un prix sans service ». Ce contre quoi les règles européennes veulent lutter, ce sont les comportements de pouvoirs publics qui utilisent leur budget pour assister des entreprises, des groupes d'entreprises ou des types de productions sans rien obtenir en retour. Ce qui est interdit, c'est de débourser de l'argent à fonds perdu. Or, quand on achète un produit issu du commerce équitable, même si l'on paie, dans certains cas, plus cher que pour un produit semblable issu du commerce classique, on sait que la valeur payée correspond à une contrepartie.
Cette contrepartie consiste en l'assurance de savoir que le produit a été fabriqué dans des conditions économiques, sociales et environnementales respectueuses des règles internationales et qu'une dimension de dignité humaine a été prise en compte. En plus d'acheter les caractéristiques intrinsèques d'un produit, on achète un engagement social, on paie pour la caractéristique « équitable ».
Des études économiques ont été réalisées à propos du commerce équitable; on a pu démontrer que celui-ci est tout à fait compatible avec l'efficacité économique et qu'il n'est pas en contradiction avec les conditions du marché.
Pour terminer, on rappelle que l'environnement et le développement durable sont des notions intégrées dans les traités de base de l'Union européenne: les articles 2 et 6 (ancien article 3-c) du Traité de Rome instituant la Communauté européenne en sont de bons exemples.
Ainsi, le droit européen, par une série de mesures prises au cours des dernières années, se montre favorable au commerce équitable:
— la résolution du 19 janvier 1994 du Parlement européen, destinée à promouvoir l'équité et la solidarité dans le commerce Nord-Sud;
— l'avis du 24 avril 1996 du Comité économique et social sur « le mouvement européen « fairtrade marking ». Dans ce document, le Comité invite la Commission à soutenir une ligne de financement en faveur des initiatives de commerce équitable;
— le parlement européen vient de se prononcer récemment en faveur du tourisme équitable (voir DG-INFO_TW(2005)09-05, PAR 015);
— la communication de la Commission du 29 novembre 1999 sur le commerce équitable. La Commission européenne établit pour la première fois sa doctrine en la matière; elle met l'accent sur le renforcement des aides financières pour les ONG et les organisations impliquées dans le commerce équitable ainsi que sur certaines actions en faveur du respect des normes minimales en matière sociale et environnementale. Des mesures tendant à améliorer le contrôle des produits ont été décidées (COM (2001) 366 final);
— le Livre vert de la Commission européenne du 18 juillet 2001 intitulé « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises » et la communication du même jour titrant « Promouvoir les normes fondamentales du travail et améliorer la gouvernance sociale dans le contexte de la mondialisation » manifestent une reconnaissance juridique croissante de la légitimité du mouvement du commerce équitable.
Au-delà de la sphère européenne, il existe aussi une certaine reconnaissance sur le plan international. Ainsi, dès les années 60, la CNUCED (organisme des Nations unies) a lancé la maxime « Trade not aid » qui synthétise la philosophie du commerce équitable.
Enfin, en ce qui concerne l'éventuel obstacle que constitueraient les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), on peut se référer, par analogie, aux propos du professeur F. Dehousse qui expliquait, lors des travaux préparatoires de la loi visant à promouvoir la production socialement responsable, que les normes contenues par cette dernière ne créaient pas une violation des règles du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade — voir également DOC Chambre 50 0704/004).
D'autres États ont déjà légiféré en la matière. C'est le cas de la France qui a intégré une définition du commerce équitable dans une loi de 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. Un décret d'application de cette loi concernant le commerce équitable date du 15 mai 2007. La loi française a opté clairement pour un système de reconnaissance des organisations du commerce équitable. Cette démarche est différente de celle de la présente proposition de loi, mais est cependant animée des mêmes objectifs.
Vu l'ensemble de ces éléments, il semble opportun et juridiquement admissible de prévoir une définition légale du commerce équitable en droit belge.
Méthode
La présente proposition de loi se réfère pour partie au travail de conceptualisation et de pratique du commerce des organisations internationales déjà existantes: Fair Trade Labelling Organisation-International (FLO) et International Federation for Alternative Trade (IFAT). Le but de ces références n'est aucunement de donner une sorte de monopole à ces organismes. D'ailleurs, la proposition de loi ajoute à la référence à ces deux institutions la mention « ou toute autre organisation dont l'objet est l'appui au développement et la recherche d'un équilibre dans les rapports commerciaux, en particulier entre le Nord et le Sud ».
Le choix de cette méthode se justifie par le fait qu'on ne peut pas raisonnablement envisager le détail des critères qui caractérisent le commerce équitable, surtout que ceux-ci varient légèrement en fonction de la nature des produits concernés par la transaction commerciale.
En outre, on opte pour la définition d'une « transaction de commerce équitable », plutôt que pour celle d'une « organisation de commerce équitable ». Certes, on se réfère à des organisations, mais c'est dans le but de prendre en compte les critères établis par celles-ci.
La définition d'une « transaction » est plus objective et plus neutre. Elle permet de dépasser le clivage qui oppose, d'une part, une définition des « organisations de commerce équitable », et d'autre part, une définition des « biens issus du commerce équitable ». Ce choix présente encore l'avantage de comprendre, dans le champ d'application de la définition, à la fois les biens et les services.
Pour parvenir à une définition qui soit suffisamment précise, tout en étant juridiquement efficace, il semble pertinent de ne reprendre dans le texte que les conditions les plus essentielles, et de renvoyer, pour le reste, à l'expérience des organisations internationales du commerce équitable qui ont façonné ce système alternatif au cours des dernières décennies.
Cette méthode recèle plusieurs avantages:
— elle permet de simplifier la définition et d'éviter l'énumération d'une multitude de critères techniques qui, par ailleurs, sont susceptibles d'évoluer avec le temps;
— elle permet de résoudre diverses difficultés quant à la détermination des sujets et de l'objet du commerce équitable.
Les organisations internationales auxquelles il est fait référence ont, en outre, fait preuve, au cours des années, d'une grande transparence et d'une large reconnaissance internationale qui assure leur légitimité dans le secteur du commerce équitable.
Article 2
L'article 2 modifie la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur en insérant une section 12 intitulée « Du commerce équitable » dans le chapitre VI (« De certaines pratiques du commerce ») de cette loi.
Quatre articles constituent cette nouvelle section.
Article 92bis
Cet article contient les définitions de cinq expressions qui sont utilisées par la proposition de loi.
Le point 1º définit la notion d'« organisation de commerce équitable ». Une telle définition s'imposait étant donné que la proposition de loi se réfère à ces organisations à deux reprises: d'une part pour reconnaître les critères économiques, sociaux et environnementaux qui émanent de ces organisations (article 3, alinéa 1er) et, d'autre part, dans l'exigence que les producteurs ou groupes de producteurs soient membres d'une telle organisation ou reconnus par l'une d'elle (article 4).
La définition se réfère à deux fédérations d'organisations de commerce équitable existantes: la FLO et l'IFAT; elle ne ferme pas pour autant la porte à d'autres.
L'équilibre dans les rapports commerciaux, dont il est question dans la disposition, est atteint par le biais de l'implication des organisations de commerce équitable dans les relations commerciales internationales ainsi que par la mise en œuvre des critères économiques, sociaux et environnementaux spécifiques à ces relations et la promotion de ceux-ci.
Les organisations de commerce équitable visées par la loi sont tant celles qui travaillent avec un système de labellisation (octroi d'un label pour certains produits qui respectent les critères du commerce équitable et qui sont mis sur le marché par des tiers), que celles qui fonctionnent par intégration de la chaîne d'approvisionnement (les produits sont mis sur le marché par des organisations de commerce équitable).
Les points 2º, 3º et 4º déterminent les critères économiques, sociaux et environnementaux minimaux. Il s'agit donc d'un seuil que les organisations de commerce équitable doivent au moins respecter en vertu de l'article 3, alinéa 2, de la proposition de loi. Elles peuvent bien entendu prévoir des règles plus strictes.
L'objectif global visé par ces différentes exigences est de promouvoir le développement durable.
Le 5º définit la notion de « coûts de production ». Cette expression est utilisée au point 2º, dans l'énumération des exigences économiques minimales et doit être comprise dans le sens spécifique qui lui est donné au point 5º.
Article 92ter
Cet article est la disposition centrale de la proposition de loi. Il définit le commerce équitable en se basant notamment sur les termes précisés dans l'article 92bis.
Cet article comporte deux alinéas qui correspondent à deux couches d'exigences quant aux critères que doit respecter le commerce équitable: le premier alinéa prévoit que ce sont les critères émanant des organisations de commerce équitable qui doivent être retenus pour caractériser le commerce équitable; le second alinéa fixe un seuil minimal d'exigences: celles qui sont définies dans l'article 92bis.
Article 92quater
Cet article prévoit que les producteurs ou groupes de producteurs doivent être membres d'une organisation de commerce équitable. Cette exigence permet d'éviter les difficultés liées à l'usage d'expressions équivoques telles que « producteurs du Sud » ou « producteurs défavorisés ».
Ces producteurs peuvent aussi bien être des petits producteurs propriétaires que des producteurs employés.
Article 92quinquies
Cette disposition organise un système de contrôle des acheteurs du commerce équitable. La proposition de loi charge la Coopération technique belge de contrôler les pratiques du commerce équitable afin de s'assurer du respect de la loi et d'éviter les abus d'utilisation de l'expression « commerce équitable ».
Article 3
L'article 5, § 2, de la loi du 21 décembre 1998 portant création de la Coopération technique belge sous la forme d'une société de droit public est complété. Cette insertion rend compétente la Coopération technique belge par le contrôle de la définition du commerce équitable.
Isabelle DURANT Vera DUA Josy DUBIÉ Freya PIRYNS. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Il est inséré dans le chapitre VI de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et l'information et la protection du consommateur, une section 12 intitulée « Du commerce équitable », comprenant les articles 92bis à 92sexies, rédigées comme suit:
« Section 12: Du commerce équitable
Art. 92bis. — Pour l'application de la présente section, il y a lieu d'entendre par:
1º une organisation de commerce équitable: une organisation telle que Fair Trade Labelling Organisation-International (FLO) ou membre de cette dernière, ou une organisation reconnue par International Federation for Alternative Trade (IFAT) ou toute autre organisation dont l'objet est l'appui au développement et la recherche d'un équilibre dans les rapports commerciaux, en particulier, entre le Nord et le Sud. Cette organisation se caractérise par ses relations contractuelles avec les producteurs ou groupe de producteurs, par l'accompagnement des producteurs ou groupe de producteurs et par l'information et la sensibilisation des consommateurs;
2º le respect des exigences économiques minimales: le respect des conditions suivantes:
a) un prix équitable est offert au producteur afin de couvrir ses coûts de production, de lui assurer un revenu apte à satisfaire ses besoins fondamentaux et à dégager une marge permettant de réaliser des investissements. Ce prix est le plus élevé parmi les trois suivants: le prix sur le marché national, le prix sur le marché international et le prix désigné par les organisations de commerce équitable;
b) le producteur a la possibilité d'obtenir le paiement anticipé de tout ou partie du prix par l'acheteur;
c) l'acheteur et le producteur entretiennent des relations contractuelles à long terme, c'est-à-dire durant un délai supérieur ou égal à celui fixé par le ministre en charge de la coopération au développement;
d) le commerce associe la recherche de la qualité des produits au respect de l'environnement, des savoirs traditionnels et des méthodes de production artisanales des peuples autochtones;
e) la transparence est assurée à chaque étape des relations commerciales par une obligation réciproque d'information sur les conditions de travail, les salaires, les prix, le processus de production et de distribution;
3º le respect des exigences sociales minimales: le respect des conditions suivantes:
a) le respect de la liberté d'association et de négociation collective, telle que visée par les Conventions de l'OIT nº 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et nº 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective;
b) l'élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire visée par les Conventions de l'OIT nº 29 sur le travail forcé et nº 105 sur l'abolition du travail forcé;
c) l'abolition effective du travail des enfants visée par les Conventions de l'OIT nº 138 sur l'âge minimum et nº 182 sur les pires formes de travail des enfants;
d) l'élimination de la discrimination en matière d'emploi et de profession visée par les Conventions de l'OIT nº 100 sur l'égalité de rémunération et nº 111 concernant la discrimination;
e) la promotion de la santé et la sécurité au travail visée par la Convention de l'OIT nº 155;
f) la fixation de salaires égaux ou supérieurs à la moyenne régionale et au salaire minimum légal, s'il existe, et le paiement régulier de ceux-ci;
g) la transparence en ce qui concerne les conditions de travail, les effectifs, les rémunérations effectivement payées et leur périodicité;
4º le respect des exigences environnementales minimales: le respect des conditions suivantes:
a) le respect de la législation nationale et internationale concernant l'utilisation des produits phytosanitaires, leur maniement, la protection des écosystèmes, l'érosion et la gestion des déchets;
b) la limitation de l'utilisation d'engrais minéraux, de pesticides de synthèse;
c) la sécurisation de la gestion des engrais, des produits phytosanitaires et des matières dangereuses dans des lieux appropriés, afin d'éviter tout risque de contamination tant pour l'humain que pour l'environnement;
d) la gestion de l'eau de façon à respecter l'environnement;
e) la limitation des quantités de rejets dans l'eau et dans l'air ainsi que le traitement des déchets dans des conditions satisfaisantes pour l'environnement;
f) la mise en œuvre de techniques de culture anti-érosive;
g) la priorité donnée à l'utilisation de ressources renouvelables;
5º les coûts de productions: l'ensemble des coûts nécessaires à la production d'un bien ou d'un service, en ce compris, le coût des mesures visant à mettre en œuvre les exigences économiques, les exigences sociales et les exigences environnementales;
6º l'acheteur direct: toute personne physique ou morale qui achète des biens ou des services directement à un producteur ou groupe de producteurs.
Art. 92ter. — Le terme de « contrat de commerce équitable », ou toute dénomination équivalente définie par le Roi, ne peut concerner qu'un contrat commercial entre un producteur ou groupe de producteurs et un acheteur direct, lequel concerne des biens et services produits dans le respect des exigences économiques, sociales et environnementales déterminées par des organisations de commerce équitable, dans une perspective de développement durable.
Les exigences déterminées par une organisation de commerce équitable correspondent au moins aux exigences économiques, sociales et environnementales minimales détaillées à l'article 92bis de la présente loi.
Art. 92quater. — Le producteur ou groupe de producteurs doit être membre d'une organisation de commerce équitable ou reconnu par une telle organisation.
Art. 92quinquies. — Toute personne physique ou morale participant au commerce équitable peut être soumise à un audit.
Si cette personne physique ou morale est un acheteur direct, l'audit vérifie qu'un contrat de commerce équitable a été conclu et respecté entre cet acheteur direct et un producteur ou groupe de producteurs.
Si cette personne physique ou morale n'est pas un acheteur direct, l'audit vérifie que les biens ou services qu'elle met sur le marché trouvent leur origine dans un contrat de commerce équitable, quel que soit le nombre d'intermédiaires intervenus dans la chaîne commerciale.
Cet audit est organisé au sein de la Coopération technique belge, selon des modalités prévues par un arrêté délibéré en Conseil des ministres.
Art. 92sexies. — La présente section constitue une loi impérative au sens de l'article 20 de la loi du 16 juillet 2004 portant le Code de droit international privé. »
Art. 3
Dans l'article 5, § 2, de la loi du 21 décembre 1998 portant création de la Coopération technique belge sous la forme d'une société de droit public, est inséré le point suivant:
« 9º le contrôle du respect de l'usage de la notion de « commerce équitable », ainsi que des dénominations équivalentes qui seraient déterminées par le Roi, sans préjudice de la compétence des services de l'Inspection économique ».
12 juillet 2007.
Isabelle DURANT Vera DUA Josy DUBIÉ Freya PIRYNS. |