4-253/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2007-2008

9 OCTOBRE 2007


Proposition de résolution relative à l'annulation de la dette des pays du sud

(Déposée par Mme Isabelle Durant et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition de résolution reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 17 février 2005 (doc. Sénat, nº 3-1039/1 — 2004/2005).

La présente proposition vise à relayer les demandes formulés dans la résolution de la commission des droits de l'homme des Nations unies (2001/27) sur les effets des politiques d'ajustement structurel et de la dette extérieure sur la jouissance effective de tous les droits de l'homme, en particulier les droits économiques sociaux et culturels, et dans la pétition « Jubilé 2000 », signée par 24 millions de citoyens qui demandent l'annulation de la dette des pays en développement.

Isabelle DURANT
Freya PIRYNS
Josy DUBIÉ.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION


Le Sénat,

A. considérant que la dette des pays en voie de développement s'élève en 2001 à environ 2 450 milliards de dollars alors qu'elle était d'environ 560 milliards de dollar en 1980 et que ces pays ont remboursé, pour la même période, 3 400 milliards de dollars;

B. considérant que vingt ans après l'éclatement de la crise de la dette en 1982, les pays endettés ont remboursé presque sept fois ce qu'ils devaient, et qu'ils sont aujourd'hui quatre fois plus endettés;

C. considérant que la dette extérieure des pays en voie de développement en général et des PMA en particulier constitue un des principaux facteurs qui sapent les efforts de développement économique et social de ces pays;

D. considérant que dans les années '70 les institutions financières internationales et les pays industrialisés ont incité les pays du sud, notamment les pays africains nouvellement indépendants et les pays d'Amérique latine, à emprunter;

E. considérant que les emprunts massifs contractés par les dirigeants des pays du sud n'ont pas profité aux populations et qu'une partie importante des sommes empruntées a été détournée par les régimes dictatoriaux de ces pays;

F. considérant que le concept de la dette odieuse a été utilisé pour la première fois en 1898 lorsque les États-Unis ont annexé Cuba et refusé de payer la dette de Cuba envers l'Espagne, sous prétexte que ces prêts n'avaient pas servi au bien-être de la population au su des créanciers et que la dette odieuse s'éteint avec le changement de régime;

G. considérant que les PMA, en majorité des pays africains très endettés, continuent à rembourser près de 40 % de leur budget et que le fardeau de la dette de ces pays constitue un goulet d'étranglement pour le développement;

H. considérant qu'en 1996 la Banque mondiale, le FMI, le G7 et le Club de Paris ont pris l'initiative de l'allégement de la dette en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE);

I. considérant que selon le rapport de la CNUCED de 2002 et après deux décennies de programme d'ajustement structurel la pauvreté continue à augmenter, la croissance est plutôt erratique, les crises rurales se sont aggravées et la désindustrialisation a mis à mal les perspectives de croissance;

J. considérant que, pour briser la spirale de la pauvreté dans laquelle sont enfermés les PPTE, il est indispensable avant tout de substituer à la logique exclusive de croissance économique la notion de développement soutenable endogène répondant aux besoins de la majorité de la population;

K. considérant les objectifs de développement du millénaire qui doivent être atteint d'ici 2015;

DEMANDE AU GOUVERNEMENT:

1. de prendre une initiative audacieuse pour annuler la dette des pays les plus pauvres et pour libérer les fonds nécessaires en vue d'atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement;

2. de considérer les emprunts contractés par les pays du sud sous les régimes dictatoriaux en connaissance de cause des créanciers comme une dette odieuse qui ne doit pas être reprise par les régimes démocratiquement élus;

3. qu'aucun prêt ne soit accordé à l'avenir sans l'approbation des parlements nationaux démocratiquement élus des pays concernés et estime nécessaire que la somme dégagée par l'annulation de la dette soit gérée par un fonds de développement socialement et écologiquement soutenable, démocratiquement contrôlé par les populations locales;

4. de souligner souligner que la gestion de la crise d'endettement des PVD et le remède proposé par le consensus de Washington, y compris l'initiative en faveur des PPTE, n'ont pas permis de sortir de la spirale de la dette dans laquelle ces pays ont été enfermés depuis vingt ans, compromettant ainsi toute stratégie de développement soutenable;

5. d'estimer inacceptable que les PMA dont la majorité des pays africains continuent à rembourser près de 40 % de leur budget total au titre du service de la dette alors que des sommes importantes sont nécessaires pour développer le système d'éducation et les infrastructures de base pour les soins de santé;

6. de regretter que l'application des programmes d'ajustement structurel par les pays les plus pauvres soit une condition sine qua non pour bénéficier de l'initiative PPTE, et de constater que les conditions imposées par les institutions financières, entre autres par la Banque mondiale et le FMI, en vue de rétablir les grands équilibres macro-économiques, ont contribué à une marginalisation et paupérisation de la population;

7. de demander la mise en œuvre de la déclaration des Nations unies sur le droit au développement de 1986 et d'estimer que le droit au développement en tant que droit humain universel et inaliénable doit être traité par l'UE comme les autres droits fondamentaux;

8. de demander la révision des règles de l'OMC en vue de réaliser les objectifs de développement soutenable fixés à New York en 2000 et d'estimer que ces objectifs doivent servir à définir de nouvelles règles des mécanismes directeurs de l'économie mondiale pour lutter efficacement contre la pauvreté;

9.  de demander l'annulation de la dette extérieure selon des modalités de reconversion de la dette vers des programmes de développement. Il va de soi que l'annulation de la dette ne peut servir de prétexte pour diminuer en conséquence les moyens de la coopération au développement mais devrait pouvoir s'ajouter au 0,7 % des dépenses de PNB prévus à ce budget.

12 juillet 2007.

Isabelle DURANT
Freya PIRYNS
Josy DUBIÉ.