Questions et Réponses

SÉNAT DE BELGIQUE


Bulletin 3-80

SESSION DE 2006-2007

Questions posées par les Sénateurs et réponses données par les Ministres (Art. 70 du règlement du Sénat)

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique

Question nº 3-6310 de Mme Thijs du 24 novembre 2006 (N.) :
Encéphalomyélite myalgique (EM). — Syndrome de fatigue chronique (SFC). — Règles de remboursement.

Le syndrome de fatigue chronique a été officiellement reconnu par l'OMS en 1969. En Belgique, on parle généralement de l'encéphalomyélite myalgique (EM). Dans l'attente d'une meilleure description de la maladie, la dénomination neutre « syndrome de fatigue chronique » est préférable.

L'un des symptômes les plus caractéristiques du SFC est une fatigue prononcée qui réduit les capacités d'activité et de travail des patients à un niveau minimal. La fatigue chronique est présente de manière constante ou récurrente durant 6 mois d'affilée ou plus, en combinaison avec plusieurs autres symptômes, notamment de la fièvre, des maux de tête, des courbatures, des douleurs articulaires, des maux de gorge, des ganglions douloureux, des insomnies, des problèmes de concentration et de mémoire.

Il est très difficile d'établir un traitement efficace : la guérison complète est illusoire, on peut obtenir une diminution des douleurs, mais la thérapie adéquate varie d'une personne à l'autre. De nombreux patients se retrouvent socialement isolés car du fait de leur fatigue et de leurs douleurs prononcées, toute participation, même basique, à la vie sociale devient pénible, voire impossible. Nous constatons dès lors aussi que de nombreux patients évoluent vers un état dépressif.

Bien qu'elle soit reconnue comme affection neurologique par l'OMS, il est encore question, en Belgique comme dans de nombreux autres pays, d'une attitude négative à l'égard de cette maladie.

De plus, le SFC a été reconnu comme une maladie par l'INAMI. Le traitement et le diagnostic différentiel doivent être établis dans un des cinq centres flamands de référence agréés officiellement (1). Le patient doit en premier lieu se présenter chez son médecin généraliste habituel, qui l'adresse ensuite à ces centres par le biais d'un formulaire de renvoi standardisé. Comme je l'ai déjà dit, diagnostiquer le SFC n'est pas une sinécure. En Belgique, on opte pour les critères de l'OMS.

Le traitement dans les centres est principalement basé sur la thérapie comportementale cognitive et sur la revalidation physique. Cela équivaut en réalité à un traitement psychiatrique, ce qui a un effet stigmatisant pour les intéressés. Les diagnostics établis dans les centres agréés par l'INAMI ne sont cependant pas pris en compte pour la détermination du degré d'invalidité lors de l'évaluation par l'INAMI.

J'aimerais obtenir une réponse aux questions suivantes :

1. L'INAMI indemnise les centres officiels pour le diagnostic et l'établissement d'un plan de traitement. Lorsqu'un diagnostic est établi par ces médecins, il semble logique que ce diagnostic soit également reconnu par l'INAMI lors de la détermination du degré d'invalidité. L'honorable ministre reconnaît-il que les possibilités fonctionnelles des patients souffrant du SFC sont gravement hypothéquées, ainsi que le montrent les critères officiels, et que cela implique une réduction importante de la capacité de travail ? Pourquoi le constat du centre de référence n'est-il pas, dans tous les cas, pris en considération par l'INAMI ? Le jugement de l'équipe du centre de référence sera-t-il toujours suivi à l'avenir ? Dans l'affirmative, inclut-on des mécanismes de contrôle prévoyant, par exemple, que les patients soient obligés de subir un examen annuel dans le centre et que ces résultats soient reliés au dossier d'évaluation de l'INAMI ?

2. Quelle est la valeur discriminative du diagnostic posé sur la base des critères de l'OMS ?

3. Combien de patients souffrant du SFC sont-ils reconnus officiellement ? Quels sont les degrés d'invalidité minimum et maximum accordés à ces patients ? Combien de patients reçoivent-ils une indemnité et quel est alors le coût total pour l'INAMI ?

4. Le fait que l'INAMI reconnaisse la maladie peut difficilement être considéré comme un élément négatif. La reconnaissance du SCF en tant que maladie psychique fait toutefois apparaître un obstacle pratique et, à nouveau, financier. La plupart des polices en matière d'assurance hospitalisation ou d'assurance invalidité complémentaire excluent les affections psychiques. Est-il possible de ranger le SFC — vu que jusqu'à présent, la cause ne peut pas être ramenée à une simple cause psychopathologique — dans la catégorie « causes indéfinies » ?

(1) UZ Leuven, UZ Anvers, UZ Gand, centre de référence UCL et centre de référence AZ-VUB.

Réponse : 1. Vous posez un certain nombre de questions concernant l'octroi d'indemnités d'incapacité de travail aux patients souffrant du syndrome de fatigue chronique. Il convient de distinguer deux situations.

a) Lorsqu'un bénéficiaire chez qui a été posé le diagnostic du syndrome de fatigue chronique suit un programme de revalidation dans un centre de référence SFC, il est censé conserver le taux d'incapacité de travail exigé. Il peut alors prétendre à des allocations lorsqu'il satisfait aux autres conditions d'assurabilité.

b) Lorsqu'un bénéficiaire chez qui a été posé le diagnostic du SFC ne suit pas de programme de revalidation mais qu'il pense qu'en raison de sa pathologie, il doit être considéré comme en incapacité de travail, il doit déclarer cette incapacité de travail auprès du médecin-conseil de la mutuelle. Au cours de la première année, le médecin-conseil peut fixer une incapacité primaire. À partir de la deuxième année, c'est le Conseil médical de l'invalidité (CMI) du Service des indemnités qui est compétent.

Lors de l'évaluation de l'incapacité de travail, il est tenu compte de toute lésion ou de toute pathologie fonctionnelle, donc également du syndrome de fatigue chronique. Afin de pouvoir être reconnu en incapacité de travail, une incapacité de travail d'au moins 66 % est toutefois requise. Dans le cadre de l'assurance incapacité de travail, il ne s'agit donc pas de la « reconnaissance de certaines maladies », mais bien de l'évaluation des répercussions des lésions ou des troubles fonctionnels sur les capacités qu'a l'intéressé de gagner sa vie.

Il ressort du rapport de l'INAMI qui a été publié récemment sur les centres de référence SFC que 24 % des patients chez qui les centres ont établi le diagnostic de SFC travaillent à temps partiel ou à temps plein et ne satisfont donc pas à la règle des 66 %. Vous pouvez consulter le rapport de l'INAMI sur le site Internet de l'INAMI.

2. Je ne connais pas les critères de l'Organisation mondiale de la santé auxquels vous faites référence dans votre deuxième question. La définition que les centres de référence SFC utilisent, et qui est généralement admise, est la définition de Fukuda (1994) qui est utilisée par les Centers for Disease Control.

Il s'agit d'une définition descriptive qui ne comporte pas de jugement quant à un facteur causal des plaintes, parce qu'il n'est pas connu. Selon moi, une estimation de la valeur discriminatoire du diagnostic sur la base de la définition descriptive n'est pas possible.

3. En ce qui concerne la question concernant le nombre de patients SFC reconnus officiellement, je suppose que vous parlez du nombre de patients chez qui les centres de référence ont posé un diagnostic de SFC. Le 30 juin 2005, selon le rapport de l'INAMI, on en comptait 1 106.

Vous demandez aussi quelques données statistiques, spécifiquement sur le groupe des patients souffrant de SFC qui reçoivent des indemnités d'incapacité de travail. Le Service des indemnités ne dispose pas de données pour les bénéficiaires en incapacité de travail. Le Service ne dispose pas non plus de données précises en ce qui concerne le nombre de bénéficiaires invalides. Le Service des indemnités de l'INAMI a l'intention d'instaurer un nouveau système de classification (ICD-10 au lieu de ICD-9). De cette façon, à l'avenir, il pourrait disposer de plus de données précises pour les bénéficiaires invalides.

4. Enfin, vous prétendez que l'INAMI considérerait le SFC comme une pathologie psychique. Selon moi, ce n'est pas correct. L'INAMI ne prend pas position quant à la cause du CFS parce qu'il n'existe pas de consensus en la matière. Cela figure aussi littéralement dans la convention entre l'INAMI et les centres de référence. Le concept des centres de référence est multidisciplinaire. Les équipes des centres sont également composées d'internistes et de spécialistes en médecine physique. Le mode de traitement des centres, qui se base sur la thérapie comportementale cognitive et la revalidation physique progressive, peut aussi être difficilement considéré comme un mode de traitement psychiatrique.