Questions et Réponses

SÉNAT DE BELGIQUE


Bulletin 3-71

SESSION DE 2005-2006

Questions posées par les Sénateurs et réponses données par les Ministres (Art. 70 du règlement du Sénat)

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Ministre des Affaires étrangères

Question nº 3-4943 de M. Cornil du 20 avril 2006 (Fr.) :
Philippines. — Menace de coup d'état. — Position de la Belgique.

Le 24 février 2006, la présidente des Philippines, Gloria Macapagal-Arroyo, décrétait l'état d'urgence dans l'archipel alors que circulait la rumeur d'un coup de force contre son régime fomenté par de hauts gradés de l'armée. Ironie de l'histoire : c'est dans un pays placé sous l'état d'urgence que les Philippins ont célébré le samedi 25 février 2006 le vingtième anniversaire de la chute de Ferdinand et Imelda Marcos.

Auparavant, Gloria Macapagal-Arroyo donna instruction à l'armée et à sa police d'arrêter tous ceux qui, de près ou de loin, soutiendraient une tentative de coup d'état. Elle a élargi les mesures répressives, dont une d'interdiction de manifester et une mise sous tutelle étatique des médias indépendants.

Même si madame Arroyo a assuré « contrôler la situation », à en juger par les arrestations, les choses paraissent pourtant avoir pris mauvaise tournure pour elle après plusieurs semaines de tensions politiques.

Pouvez-vous nous préciser quelle est la position de la Belgique face à cette situation ?

Réponse : 1. J'ai suivi de près les développements politiques aux Philippines fin février-début mars, notamment le fait que l'état d'urgence ait été proclamé. Le lundi 6 mars 2006, la Chargée d'affaires des Philippines à Bruxelles, est venue expliquer à mes services — à sa propre demande — pour quelles raisons l'état d'urgence a été proclamé. Elle a indiqué la nécessité de « maintenir la stabilité du pays », face à des tentatives « d'aventuriers politiques » qui visent à s'emparer du pouvoir. Selon la Chargée d'affaires, « les dispositions constitutionnelles ont été respectées » lors de la proclamation de l'état d'urgence. Mes services ont réagi avec scepticisme à ce plaidoyer de la Chargée d'affaires et ils ont fait référence au conflit qui traîne depuis des décennies entre le NPA et les autorités philippines, et qui trouve son origine dans les situations sociales intolérables dans son pays.

Le mardi 7 mars, les chefs de poste des États membres de l'Union européenne à Manille ont également reçu la même explication de la part du Secrétaire exécutif Eduardo Ermita, bras droit de la présidente et premier ministre Arroyo. La présidence de l'Union européenne a répliqué à l'explication du Secrétaire exécutif renvoyant aux diverses arrestations et à la restriction de la liberté de la presse. La présidence a rappelé qu'un éventuel accord de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et les Philippines contiendra en tout cas des dispositions afin de respecter les droits de l'homme.

2. Le 26 mars, les chefs de poste de l'Union européenne ont été convoqués auprès du ministre philippin des Affaires étrangères, A.E. Romulo, qui a fourni des explications à propos de la situation aux Philippines après la levée de l'état d'urgence. Il s'agit à nouveau d'un plaidoyer qui devait démontrer que le gouvernement philippin respecterait un État de droit « malgré la situation interne difficile ». Le Conseil présidentiel de sécurité nationale, Norberto Gonzales, qui a assisté à cet entretien, a alors avoué que des exécutions extrajudiciaires posaient un problème, et que souvent les autorités philippines elles-mêmes n'arrivent pas à en identifier les responsables.

3. La situation aux Philippines a été traitée dans le détail lors d'une réunion du groupe de travail d'Asie du Conseil européen (COASI) le 15 mars 2006. À cette occasion, les chefs de poste à Manille ont été chargés de continuer à suivre de près la situation et de présenter régulièrement un rapport aux capitales.