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Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 30 MARS 2006 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Questions orales

Question orale de Mme Clotilde Nyssens à la vice-première ministre et ministre de la Justice et au ministre des Affaires étrangères sur «la problématique des rapts parentaux» (nº 3-1076)

Question orale de Mme Marie-José Laloy au ministre des Affaires étrangères sur «le fonctionnement de la cellule interministérielle en charge des rapts parentaux» (nº 3-1070)

Question orale de Mme Marie-Hélène Crombé-Berton au ministre des Affaires étrangères sur «les rapts d'enfants» (nº 3-1071)

Mme la présidente. - Je vous propose de joindre ces questions orales. (Assentiment)

M. Vincent Van Quickenborne, secrétaire d'État à la Simplification administrative, adjoint au premier ministre, répondra.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Voici huit jours, lorsque j'ai déposé ma question, je ne savais pas encore à quel point elle serait d'actualité. En effet, hier encore, l'asbl SOS Rapts parentaux manifestait son désarroi.

Le nombre de plaintes à la suite de conflits entre parents sur le droit d'hébergement ou le droit aux relations personnelles ne cesse d'augmenter. Une partie de ces plaintes concerne des conflits parentaux avec déplacement d'enfants vers l'étranger. Le phénomène frappe particulièrement les grandes villes. Rien qu'à Bruxelles, plus de deux mille plaintes ont été enregistrées au cours de l'année 2000. Ce phénomène est inquiétant.

Sans préjudice des conventions internationales ni des propositions et projets de loi pendants à la Chambre en ce qui concerne l'exécution forcée des décisions judiciaires contenant des mesures relatives à la personne des enfants et à l'hébergement alterné, il me revient que des groupes de travail étudieraient la problématique des rapts parentaux.

De nouveaux outils doivent donc être imaginés afin de compléter les moyens actuellement mis en place et des mesures concrètes doivent être prises pour sortir de cette impasse. Le parquet de Bruxelles mènerait, en partenariat avec les ministres compétents, les services de police, des avocats et des parents victimes d'enlèvements, une réflexion en la matière dans le cadre de groupes de travail. Des questions restent toutefois pendantes, notamment pour les parents concernés et qui attendent impatiemment un heureux dénouement de leur dossier.

Je souhaite obtenir des informations complémentaires concernant ces groupes de travail.

1. Qui a institué ces groupes de travail et quelles sont exactement leur composition et leur mission ?

2. Comment les parents « désenfantés » sont-ils associés à ces groupes de travail ? Sont-ils représentés dans tous les groupes de travail ? Pourquoi ne pas les associer davantage ? La question est importante car elle était au centre de la manifestation qui a eu lieu hier.

3. Quelle est l'échéance assignée à ces groupes de travail ?

4. Quels sont les véritables objectifs de ces groupes de travail ? Ceux-ci visent-ils à mettre au point des procédures de médiation nationale et internationale ?

5. Sous quelle forme les résultats de leurs travaux seront-ils diffusés ? Des circulaires seront-elles élaborées à l'intention des acteurs concernés ?

6. Quelle est l'incidence des travaux sur les propositions et projets pendants à la Chambre sur le même sujet ?

Mme Marie-José Laloy (PS). - Monsieur le ministre, à la demande insistante de l'association « SOS rapts parentaux », votre prédécesseur, M. Louis Michel, s'était engagé à mettre sur pied une cellule interministérielle chargée d'aider les personnes confrontées à une situation de rapt parental dans leurs démarches administratives.

Les groupes de travail ainsi mis en place se donnaient pour objectif, outre l'aspect préventif, de mettre en évidence les failles, voire les incohérences juridiques, empêchant une résolution de ces drames familiaux.

Ils devaient également formuler des propositions d'actions concertées.

Cependant, ces bonnes intentions ne semblent pas avoir été concrétisées dans le calendrier puisqu'il n'y eut que quatre réunions en trois ans. Le fonctionnement et le contenu de ces groupes ne semblent pas non plus à la hauteur de l'engagement initial, la dimension humaine des situations de rapts n'étant pas suffisamment prise en compte.

La création de ces groupes répondait pourtant à un réel besoin. De l'avis des parents concernés, ces groupes sont plus qu'utiles. Encore faut-il leur donner les moyens de leur mission et manifester une volonté claire en ce sens.

Monsieur le ministre, quelles initiatives comptez-vous prendre pour donner un nouvel élan à ces groupes de travail et apporter cet indispensable soutien des autorités aux parents qui vivent séparés de leurs enfants, parfois depuis plusieurs années ?

Mme Marie-Hélène Crombé-Berton (MR). - Mmes Nyssens et Laloy ont déjà posé une série de questions. Je serai donc brève.

Existe-t-il des propositions concrètes afin d'éviter ce genre de situation ? Des propositions visant à rapatrier éventuellement ces enfants sont-elles avancées ? Des solutions permettant de reconstruire ces familles sont-elles en vue ?

Ces drames humains méritent toute notre attention et appellent d'urgence des solutions. Où en sont les groupes de travail mis en place en mars 2003 ?

M. Vincent Van Quickenborne, secrétaire d'État à la Simplification administrative, adjoint au premier ministre. - Je vous lis la réponse du ministre des Affaires étrangères.

J'ai effectivement veillé au respect des engagements pris précédemment par M. Michel. En janvier 2005, nous avons, la ministre de la Justice et moi, inauguré un « Point de contact fédéral » qui a pour mission d'informer les parents sur la marche à suivre en cas d'enlèvement et de les orienter vers les services compétents.

Par ailleurs, nous avons mis en place quatre groupes de travail.

Le groupe « police-justice » est composé de magistrats et de policiers. Il s'est réuni six fois en 2005 et deux fois en 2006. Il a mis au point un texte de loi adaptant, au niveau belge, le nouveau règlement européen Bruxelles II bis. Le texte vient d'être approuvé par le Conseil des ministres.

Le groupe « police-justice » s'attaque à présent au volet prévention. Il met sur pied des formations destinées aux policiers et aux magistrats. Il diffuse des brochures d'informations et des affiches. Il propose un « mémento » aux policiers de terrain qui doivent souvent intervenir dans l'urgence lorsqu'il y a enlèvement ou risque d'enlèvement.

Le groupe « psychosocial » est composé de psychologues, de pédopsychiatres et de travailleurs sociaux. Après concertations et travaux préparatoires, il a officiellement entamé ses travaux en novembre 2005. Depuis lors, il s'est réuni deux fois. Il a décidé d'articuler sa réflexion en trois étapes : un suivi adéquat des parents et des enfants avant, pendant et après l'enlèvement.

Il a commencé par aborder l'aspect le plus sensible pour les parents, à savoir l'aliénation parentale pendant l'enlèvement. I1 s'est attelé à définir ce concept et à développer des mécanismes susceptibles de l'enrayer.

Dans le but de maintenir un lien entre les enfants enlevés et les parents lésés, un fonds « Affaires étrangères » pour les enlèvements parentaux a été constitué en juillet 2005. Il finance les déplacements des parents qui se rendent à l'étranger pour rencontrer leurs enfants. Ce budget a déjà permis à des parents de renouer avec leurs enfants dans dix cas et payé le retour d'enfants en Belgique dans deux cas.

Le groupe « médiation » abordera la médiation internationale.

Le groupe « parents » s'est réuni à quatre reprises. Les parents ont été sondés à propos des thèmes pour lesquels ils souhaiteraient témoigner de leur expérience au sein des autres groupes, voire y apporter certaines suggestions.

Sur base des résultats de ce sondage, quatre parents ont déjà été invités aux deux réunions tenues ce mois de mars, la première, par le groupe police-justice et la seconde, par le groupe psychosocial. D'autres parents seront également invités, selon leurs intérêts, aux prochaines réunions des groupes de travail.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Le malaise vient du fait que certains parents faisant partie du groupe de travail « parents » ont l'impression, d'une part, d'être écartés des autres groupes de travail et, d'autre part, de ne pas être informés.

J'insiste donc pour que les autres groupes informent les parents mécontents ou les invitent autour de la table. Ce problème de communication doit être éliminé.

Mme Marie-José Laloy (PS). - Je rejoins tout à fait Mme Nyssens. Les parents ne se sentent pas réellement concernés. De plus, on a tendance à se limiter à quelques parents, alors que les cas sont nombreux.

Les groupes devraient donc être élargis. Je demande que l'on associe un maximum de parents à la réflexion, car certains se sentent écartés de la démarche qui répond à une réelle volonté politique.

Mme Marie-Hélène Crombé-Berton (MR). - Je voudrais insister sur le caractère d'urgence des mesures à prendre.

Il s'agit d'un problème de relations affectives, très difficile à vivre au quotidien pour toutes les femmes concernées. Quand j'apprends qu'un groupe de travail s'est réuni quatre fois en trois ans, j'éprouve quelques craintes.