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23 FÉVRIER 2006
Le contexte
Au cours du siècle passé, l'espérance de vie de la population européenne a connu une augmentation spectaculaire et sans précédent. C'est vrai surtout pour ce qui est des femmes, car pas moins d'un cinquième de la population européenne est constitué de femmes de plus de 50 ans.
Les femmes vivent en moyenne six années de plus que les hommes; en 2002, l'espérance de vie à la naissance était, en moyenne, de 75 ans pour les hommes et de 81 ans pour les femmes. À l'âge de 60 ans, l'espérance de vie des femmes est encore de 24 ans contre 20 pour les hommes (1) . Plus l'âge augmente, plus les femmes sont nombreuses. La Région flamande compte 451 000 hommes et 651 000 femmes de plus de 65 ans dont 8 000 hommes et pas moins de 28 000 femmes de plus de 90 ans. En 2004, notre pays comptait 508 personnes de 100 ans et plus, dont 63 hommes et 445 femmes. En 2010, pas moins d'une femme sur quatre aura plus de 60 ans. On peut donc affirmer que le vieillissement est une thématique résolument féminine.
La proportion des femmes âgées dans la société augmente, mais leur « visibilité » n'en demeure pas moins relativement limitée. Heureusement, les choses changent peu à peu, mais un long chemin reste à parcourir. Comme cette catégorie de population a longtemps été négligée, les données et les informations concrètes la concernant sont plutôt rares. De plus, l'examen des thèmes qui sont ceux auxquels on a décidé de s'intéresser actuellement est d'autant plus malaisé qu'ils ne représentent souvent qu'un élément des paradigmes relatifs aux femmes ou au phénomène du vieillissement en général. La réalisation d'études plus détaillées s'impose.
Les études qui ont déjà été réalisées montrent que les femmes âgées risquent davantage d'être confrontées au chômage, à la pauvreté, à la nécessité de prendre en charge des tiers, à la solitude, à l'exclusion sociale et à des problèmes de mobilité. Elles montrent aussi qu'elles ont moins de possibilités d'étudier et qu'elles ont moins d'influence sur les processus décisionnels. En fait, dans tous les domaines de la vie, les femmes âgées occupent une position moins favorable que celle des hommes. Cela ne signifie pas que les hommes âgés ne sont jamais confrontés à des situations spéciales. Il importe de noter que la façon dont une personne vieillit dépend largement des conditions dans lesquelles elle vieillit.
Si nous voulons mener une politique sociale adaptée, nous devons impérativement améliorer notre connaissance des situations de vie des femmes âgées et des problèmes auxquels elles sont confrontées. Il ne faut toutefois pas oublier que les personnes de plus de 50 ans forment aussi un groupe dynamique qui a encore une grande importance dans notre société. Il y a lieu, à notre avis, de mettre mieux en lumière la contribution de ce groupe.
Nous souhaitons aussi souligner qu'il n'y a pas une définition unique de la femme âgée et que le groupe des femmes âgées est un groupe hétérogène qui présente une diversité énorme et toujours croissante, dans différents domaines de la vie. Ces femmes peuvent toutes être grand-mères mais il y a une différence fondamentale entre une petite-fille de 50 ans encore active, une mère attentionnée de 75 ans et une grand-mère dépendante de 95 ans. Chacune de ces trois générations de femmes a subi des influences très spécifiques et possède sa propre culture. Elles ont beaucoup moins en commun qu'on ne le croit généralement.
Commentaire par thème
A. IMAGERIE SOCIALE
Les médias et la publicité jouent un rôle considérable dans notre société et exercent une très grande influence. Ils accordent beaucoup d'attention à la beauté physique et à l'apparence. La plupart des femmes que l'on voit sur nos écrans ou dans les publicités sont jeunes et conformes à un idéal imposé. On accorde très peu de place aux femmes âgées et celles dont il est question sont extrêmement stéréotypées.
L'idée que l'on se fait dans la société du vieillissement et, en particulier, du vieillissement des femmes est plutôt négative. On considère que les femmes vieillissent plus vite et moins bien que les hommes. En fait, les femmes âgées sont confrontées à deux formes de discrimination, à savoir à « l'âgisme », c'est-à-dire la discrimination à l'égard des personnes âgées, et au sexisme, c'est-à-dire la discrimination au détriment des femmes.
Les images stéréotypées de femmes âgées ont un impact important sur les conceptions relatives à leur façon d'être et à la manière dont on estime qu'elles doivent se comporter. Cela influence et limite les choix et les chances qui leur sont offertes. En d'autres termes, les images négatives sont sources d'inégalité et rendent plus difficiles l'acceptation et la gestion du processus de vieillissement. La société doit se défaire de cette image négative de manière que le phénomène du vieillissement puisse être appréhendé d'une manière plus positive.
B. POSITION SOCIALE
B1. Formation et diplômes
L'impact et l'influence du niveau de formation sur la qualité de vie des femmes âgées ont été peu étudiés. Il y a aussi un grand manque d'information concernant la formation pratique en milieu professionnel et l'apprentissage tout au long de la vie. Or, le niveau d'éducation est un facteur déterminant pour ce qui est du statut que l'on a sur le marché du travail, des occasions de carrières et de la situation financière que l'on connaît à un âge avancé. En outre, le niveau de formation influence le degré de participation à la vie publique et la capacité des gens à défendre leurs intérêts.
Les personnes âgées ont généralement un niveau de formation inférieur; globalement, le niveau de formation des femmes est inférieur à celui des hommes. Elles ont eu moins de possibilités de suivre une formation de qualité. Dans la catégorie des personnes âgées de 55 à 65 ans, 23 % des hommes et seulement 17 % des femmes possèdent un diplôme de l'enseignement supérieur. Dans la catégorie des personnes âgées de 65 à 74 ans, 41 % des femmes et 37 % des hommes possèdent au plus un diplôme de l'enseignement fondamental, d'une part, et 9 % des femmes et 12 % des hommes possèdent un diplôme de l'enseignement supérieur, d'autre part. Dans la catégorie des personnes âgées de 75 à 90 ans, la moitié des femmes et 46 % des hommes possèdent au plus un diplôme de l'enseignement fondamental, d'une part, et à peine 4 % de femmes, mais 11 % d'hommes, un diplôme de l'enseignement supérieur (2) .
Les travailleurs âgés bénéficient de moins de possibilités de formation professionnelle ou utilisent moins celles qui leurs sont offertes. Des chiffres du « Steunpunt Werkgelegenheid, Arbeid en Vorming » montrent que, sur le marché belge de l'emploi, 3,8 % d'hommes et de femmes de la catégorie des 50 à 64 ans suivent des formations. Il apparaît que, moins on bénéficie de formations supplémentaires, plus on met fin prématurément à sa carrière professionnelle. Les personnes qui travaillent à temps partiel — il s'agit souvent de femmes — sont elles aussi victimes de discriminations pour ce qui est des possibilités de formation (3) . Chez les non-actifs de la catégorie des 25 à 64 ans, ce sont surtout les hommes qui participent davantage aux formations.
Il y a lieu de tenir compte en outre de la fracture numérique. L'Eurobaromètre indique que le nombre d'utilisateurs de l'Internet diminue avec l'âge, mais que ce nombre augmente de plus en plus vite avec l'âge. Les seniors accusent un certain retard pour ce qui est de l'utilisation de l'Internet, mais ils sont en train de le combler à un rythme accéléré. Parmi les utilisateurs de l'Internet, le groupe des femmes et le groupe des plus de 55 ans augmentent le plus rapidement en nombre au sein de l'Union européenne.
Force est de constater toutefois qu'en Belgique, la fracture numérique entre les hommes et les femmes ainsi qu'entre les divers groupes d'âge ne se réduit pas, bien au contraire. On peut même dire qu'elle s'est aggravée ces cinq dernières années en fonction du sexe, de l'âge, du niveau de formation et des revenus. Il est permis de penser, sur la base de ce constat, que la fracture numérique qui touche les femmes âgées ne s'est pas réduite non plus (4) .
B2. Place sur le marché du travail
Il n'est pas simple de faire une distinction entre les hommes et les femmes pour ce qui est de l'emploi des travailleurs âgés. En effet, on dispose de trop peu de données chiffrées pour pouvoir identifier toujours avec précision les différences entre les sexes. Jusqu'ici, les études qui ont été réalisées et les statistiques officielles ne consacrent pas suffisamment d'attention aux domaines dans lesquels les femmes âgées travaillent et à leurs conditions de travail, ni, d'ailleurs, aux attitudes qui sont adoptées à l'égard des travailleurs âgés. Il faut absolument définir avec précision le profil de la femme active âgée.
Si, d'une manière générale, les Belges travaillent énormément à l'âge adulte, il faut bien constater que le taux d'activité du groupe des 55 à 64 ans est faible quant à lui. Il est à peine de 28 % en Belgique alors qu'il atteint 40 % en moyenne en Europe. À l'heure actuelle, 17,5 % des femmes et 36,1 % des hommes de cette catégorie d'âge sont actifs.
Il est indéniable que ce groupe ne cesse de gagner en importance sur le marché du travail. On considère que d'ici 2010, pas moins de 30 % de la population active sera âgée de 50 à 64 ans (5) . Dans ce groupe, la proportion de femmes ne cessera de croître. Globalement, le groupe de travailleurs âgés compte quelque 40 % de femmes au niveau européen. On estime qu'en Belgique, il y a 300 000 femmes actives dans ce groupe, si bien que plus d'un tiers des personnes actives en son sein sont des femmes. Il est certain que les femmes forment un levier essentiel pour atteindre effectivement, d'ici 2010, la norme européenne de 50 % d'actifs dans le groupe des 55 à 64 ans.
On constate que le taux d'activité des femmes augmente de génération en génération, mais aussi que leur taux d'activité baisse au fur et à mesure qu'elles avancent en âge. La façon dont les femmes d'âge moyen sont actives professionnellement est liée à leur âge et plus encore à la génération à laquelle elles appartiennent. Elles ont eu moins d'opportunités de formation et se sont heurtées à la difficulté de combiner leur rôle de mère avec une carrière professionnelle en raison du manque de structures d'accueil et de la mentalité ambiante. Pour nombre d'entre elles, le pas à franchir pour retourner sur le marché de l'emploi au bout de 25 ans fut trop grand. En outre, 14 % des femmes de 55 à 64 ans et 35 % des femmes de 75 à 90 ans n'ont jamais effectué de travail rémunéré.
La différence par rapport aux hommes ne consiste pas uniquement en un degré d'activité moindre; la nature de la carrière professionnelle des femmes présente, elle aussi, des caractéristiques spécifiques: les femmes travaillent surtout en tant qu'ouvrières (non qualifiées) ou employées, et elles sont sous-représentées parmi les indépendants. Elles occupent souvent des emplois moins valorisants et des postes où les conditions de travail sont moins bonnes.
D'une manière générale, les femmes quittent également le marché du travail plus tôt que les hommes. Il y a donc un fossé plus large entre la fin de leur vie professionnelle et le début de leur retraite. Les femmes recourent aussi plus souvent au système de l'interruption de carrière: quelque 88 % des bénéficiaires de ce régime sont des femmes et 24 % des femmes qui ont recours à l'interruption de carrière sont âgées de 50 ans et plus. Ce pourcentage a augmenté au cours des dernières années, ce qui pourrait signifier que l'on considère de plus en plus ce système comme un moyen d'accéder progressivement à la retraite (6) .
Proportionnellement, les hommes bénéficient plus souvent que les femmes de formules lucratives de sortie du marché du travail. Dans notre pays, 91 015 hommes et seulement 17 867 femmes ont bénéficié d'une prépension complète. 39 % des hommes (plus d'un tiers des hommes en fin de carrière active) et seulement 9,5 % des femmes (moins d'un sixième des femmes en fin de carrière active) sont prépensionnés (7) .
Les chiffres du chômage varient en fonction de l'âge, du sexe, du niveau de formation et du secteur d'activité. Le taux de chômage des femmes de 50 à 64 ans, qui est de 5,0 %, est plus élevé que celui des hommes de la même catégorie d'âge, qui est de 3,9 %. Le taux de chômage des femmes qui se trouvent dans la dernière année de leur carrière est de 24,65 %, alors que celui des hommes ne dépasse pas 15,87 %. Le taux de chômage des femmes de cette catégorie est fortement lié au niveau de formation: il atteint près de 7 % pour les femmes qui n'ont qu'un diplôme de niveau inférieur et à peine 1 % pour celles qui ont un diplôme attestant un certain degré d'instruction (8) .
Les femmes âgées gagnent moins que les hommes âgés. On peut l'expliquer en partie par le type de travail qu'elles accomplissent, par le secteur dans lequel elles sont occupées, par le fait que le taux de chômage et d'inactivité est plus élevé chez les femmes âgées que chez les hommes âgés, par le fait que les femmes âgées sont sous-représentées dans les fonctions dirigeantes et par le fait qu'elles risquent davantage d'être occupées dans des emplois moins bien rémunérés et/ou dans des régimes de travail à temps partiel. En outre, les femmes sont davantage exposées aux risques de santé et aux risques d'invalidité dus à de mauvaises conditions de travail et leurs possibilités de carrière sont souvent limitées par leurs obligations familiales.
Il ne faut pas oublier les femmes dans le cadre du débat sur la fin de carrière. Il importe d'établir pour chacun un « plan de fin de carrière » prévoyant la recherche d'un travail sur mesure. Il est capital de tenir compte à cet égard aussi de la dimension du genre. Comme nous l'avons déjà dit brièvement, la plupart des femmes de plus de 50 ans présentent un parcours professionnel très spécifique: elles constituent la première génération de femmes à avoir pu accéder assez massivement au marché du travail, mais, par rapport aux hommes de la même catégorie d'âge, leur carrière a souvent été plus courte et plus émaillée de périodes d'interruption ou de périodes de travail à temps partiel. Lorsqu'on décide de prendre des mesures, on doit prendre en compte non seulement la « fin de la carrière » mais aussi la totalité de celle-ci.
Enfin, il faut savoir que plusieurs stéréotypes négatifs (faisant état, par exemple, d'une productivité moindre ou d'un risque de maladie plus élevé) peuvent hypothéquer considérablement la situation des travailleuses âgées. Des études confirment en outre que les femmes âgées sont plus souvent confrontées que les hommes âgés à des discriminations fondées sur le sexe ou sur l'âge (9) . C'est souvent lié au fait que leur carrière est moins élaborée, qu'elles ont moins de possibilités de formation, qu'elles sont mal informées, que d'autres travailleurs adoptent à leur égard des comportements négatifs et qu'on leur prête l'intention de prendre leur retraite anticipativement.
C. SITUATION ÉCONOMIQUE
C1. Revenus
Les anciennes générations bénéficient de revenus inférieurs, même si on a pu observer un grand mouvement de rattrapage au cours des dernières décennies, et le niveau de revenu des femmes âgées est inférieur à celui des hommes âgés.
Exemples:
Les femmes qui vivent seules bénéficient d'un revenu inférieur à celui des hommes isolés. L'étude sur les conditions de vie des plus de 55 ans en Flandre révèle que la moitié des femmes qui vivent seules doivent se satisfaire d'un revenu mensuel inférieur à 868 euros, alors que celui des hommes atteint 928 euros. Diverses autres sources indiquent très clairement que les femmes seules de cette catégorie d'âge constituent le groupe le plus vulnérable sur le plan financier (10) . On ne voit pas bien comment il faut situer les femmes d'âge moyen dans ce contexte. Par rapport aux femmes plus jeunes, elles sont plus souvent tributaires de revenus de remplacement, mais la taille de leur famille est plus réduite et elles sont débarrassées de toute une série de charges fixes, comme les charges de remboursement d'un emprunt hypothécaire.
On constate aussi d'importantes différences liées au genre en ce qui concerne les revenus de l'épargne, de la propriété et d'investissements. Lorsqu'on compare les hommes isolés et les femmes isolées, on obtient une image différenciée en fonction de l'âge, en ce sens qu'en moyenne, 28 % des hommes de 55 ans et plus déclarent bénéficier de tels revenus et seulement 21 % des femmes du même groupe d'âge. Cette différence est particulièrement élevée dans la catégorie des plus âgés. Dans celle des 75 à 90 ans, 36 % des hommes et seulement 23 % des femmes disent disposer de tels revenus (11) .
La constatation que les femmes âgées ont un revenu inférieur à celui des hommes âgés est encore plus nette pour ce qui est des femmes non mariées, des femmes des catégories d'âge supérieures et des femmes âgées allochtones. Elles sont donc le plus exposées au risque de sombrer dans la pauvreté. Ce risque résulte de la conjugaison de plusieurs facteurs tels qu'une position de faiblesse sur le marché du travail et la dépendance par rapport à leur partenaire en raison de leur faible participation au travail.
Dans le futur, on observera probablement une dualisation encore plus marquée au sein du groupe des femmes âgées. Il y a, d'un côté, un nombre croissant de femmes qui ont une carrière professionnelle derrière elles et qui se sont constitué leurs propres droits à la pension, et de l'autre, un nombre croissant de femmes (non mariées ou divorcées) qui vivent en grande partie d'un revenu de remplacement.
C2. Pensions
La problématique des pensions est encore abordée la plupart du temps par référence à la situation des hommes, alors que, d'après la réalité démographique, elle concerne davantage les femmes. Parmi les bénéficiaires d'une pension de retraite, on dénombre environ deux fois moins de femmes que d'hommes, alors qu'il y a trois fois plus de femmes bénéficiaires d'une pension de survie que d'hommes. La prédominance des femmes est perceptible surtout dans la tranche d'âge supérieure: dans la catégorie des personnes âgées de 90 ans et plus, près de quatre pensionnés sur cinq sont des femmes, soit, au total, 46 807 femmes et seulement 13 061 hommes (12) .
Les femmes sont toujours plus nombreuses aujourd'hui que les hommes à courir le risque de sombrer dans la pauvreté de manière durable; ce risque est presque deux fois plus élevé que chez les hommes pensionnés chefs de ménage. Une moindre participation au marché du travail et une plus longue espérance de vie peuvent expliquer pourquoi beaucoup de femmes ne bénéficient pas d'une protection sociale suffisante. La politique en matière de pension doit se focaliser en particulier sur le problème des pensions modestes pour femmes. Les personnes âgées de 65 ans et plus peuvent prétendre au revenu garanti aux personnes âgées ou à la garantie de revenus aux personnes âgées. Près de 80 % des bénéficiaires sont des femmes, et il s'agit surtout de femmes isolées de 80 ans ou plus (13) .
La plupart des femmes ne bénéficient aujourd'hui que d'une pension très modeste. Au bout de 45 ans de carrière, la pension d'une ouvrière isolée s'élève à 849 euros et celle d'un ouvrier moyen à 1 075 euros. En ce qui concerne les employés, la pension moyenne est de 1 187 euros pour les femmes, alors qu'elle atteint 1 473 euros pour les hommes, mais la plupart des femmes n'arrivent même pas au montant de 849 euros, parce qu'elles n'ont pas une carrière complète (14) .
Bien des femmes, 35 à 40 % selon les estimations, ont opté pour un temps partiel. En Flandre, la proportion de travailleuses à temps partiel est même de 43 % contre seulement 7 % de travailleurs. Les femmes utilisent 82 % du congé parental et du congé d'assistance et 71 % des interruptions de carrière à temps plein (15) .
Une politique des pensions basée sur la situation de l'homme qui travaille à temps plein est tout à fait contraire à la réalité du monde du travail. Il convient de chercher des incitants politiques spéciques destinés au groupe non négligeable des femmes qui ne bénéficient que d'une pension modeste. Dans ce contexte, la liaison des pensions à l'évolution du bien-être revêt une importance cruciale pour les femmes.
D. RELATIONS DES FEMMES
D1. État civil et réseaux
La situation de vie de bien des femmes, leur espérance de vie plus élevée, leur niveau de formation plus faible et leur situation plus défavorable en termes de revenus influencent considérablement les opportunités qui se présentent à elles et le risque qu'elles courent de rencontrer des difficultés dans le domaine de l'intégration sociale, de la participation et des autres aspects sociaux.
Comme leur espérance est plus élevée que celle des hommes, il faudrait préparer les femmes à vivre seules. Dans la catégorie des personnes âgées de 55 ans et plus, il y a 30 % de femmes qui vivent seules et seulement 13 % d'hommes vivant seuls. Quelque 28 % des hommes âgés de 75 à 90 ans habitent seuls, contre 52 % des femmes de cette catégorie d'âge. À mesure que l'on prend en considération des groupes plus âgés, le pourcentage de femmes mariées diminue et le nombre des veuves augmente. Moins de la moitié des femmes qui ont atteint l'âge de 65 ans sont mariées, alors que les deux tiers des hommes du même âge le sont encore. Comme la probabilité de se retrouver seules à un âge avancé est plus grande pour les femmes, il importe qu'on leur fournisse la possibilité d'occuper leur temps libre de manière positive et de les encourager à le faire.
Il importe de noter que beaucoup de femmes âgées rencontrent des difficultés spécifiques sur le plan de la mobilité. En ce qui concerne les permis de conduire, on constate qu'il n'y a qu'une femme sur trois de plus de 65 ans à en posséder un, contre deux hommes sur trois. En ce qui concerne la mobilité, les femmes sont plus dépendantes de tiers. Elles doivent par conséquent développer des stratégies pour pouvoir conserver leur autonomie ou pour pouvoir la renforcer (16) .
Pour la première fois aussi, il y a une génération de femmes âgées qui a connu l'expérience du divorce. 5 % des personnes âgées sont séparées (de fait ou légalement). Le taux de divorces augmentera dans les années à venir. Pour les femmes âgées de la génération en question, une séparation a souvent un impact financier plus grand que pour les hommes. Certains éléments donnent à penser que, pour les femmes, la séparation a aussi un impact psychologique plus profond et un impact négatif sur le plan social.
Comme elles se marient plus jeunes que les hommes et que leur espérance de vie est plus longue que la leur, les femmes sont plus nombreuses que les hommes parmi les grands-parents. La période de grand-parentalité des femmes a une durée moyenne de trente ans ou plus. Le lien intergénérationnel entre le petit-enfant et la grand-mère est donc plus long et plus durable qu'il ne l'a jamais été.
Les femmes âgées sont intégrées dans un réseau social et jouent un rôle important à divers niveaux. Les données qui suivent en témoignent:
— dans le groupe d'âge des 60 à 64 ans, une personne sur six seulement est dispensée de toute tâche de prise en charge de tiers;
— 67 % des personnes âgées de 60 à 64 ans s'occupent d'une manière ou d'une autre de leurs petits-enfants;
— 33 % des enfants de trois mois à trois ans sont pris en charge par des membres de leur famille et, surtout, par leurs grands-parents;
— 35 % des enfants qui fréquentent l'école fondamentale sont régulièrement pris en charge par leurs grands-parents;
— 25 % des personnes du groupe d'âge de 80 à 85 ans bénéficie régulièrement d'une assistance de base dispensée par leurs enfants;
— les soins de l'entourage prévalent sur l'aide professionnelle. Le conjoint assume la plus grande part des soins et il est suivi en cela par les enfants et, en particulier, par la fille et la belle-fille. Les fils effectuent eux aussi l'une ou l'autre tâche (faire les courses, par exemple), mais leur contribution est généralement plus restreinte. 44 % des personnes du groupe d'âge de 55 à 64 ans ont encore un parent ou un beau-parent en vie;
— la contribution qu'apporte aux femmes leur conjoint en tant qu'intervenant central est non seulement plus restreinte, mais elle diminue aussi avec l'âge.
Indépendamment du type de relation, on peut dire que la fréquence des contacts diminue au fur et à mesure que les gens vieillissent. Un quart des sexagénaires a des contacts au moins une fois par semaine avec des amis, des connaissances ou des voisins. C'est deux fois plus que les octogénaires, dont un quart sont privés de tout contact.
Les études consacrées à la solitude confirment cette tendance. Pour bon nombre de personnes, surtout parmi les plus âgées, la solitude est une réalité (quotidienne). Dès lors, toutes les initiatives visant à leur donner le sentiment d'encore compter méritent d'être soutenues (17) .
D2. Violence et sentiments d'insécurité
Les phénomènes de la violence et de la maltraitance à l'égard des femmes âgées n'ont pas été suffisamment bien analysés. Il n'y a pas assez de statistiques officielles disponibles sur la violence et la maltraitance et beaucoup de résultats d'enquêtes, comme ceux du Moniteur de sécurité pour la Belgique, n'établissent aucune distinction entre les sexes et entre les âges.
On peut dire que, suivant les sources, entre 3 et 10 % des seniors subissent l'une ou l'autre forme de violence (18) . Avec l'âge, les personnes deviennent plus dépendantes, ce qui entraîne pour leur entourage une charge que celui-ci n'est pas toujours à même d'assumer. Aussi, lorsque des actes de violence de natures diverses sont commis dans le contexte de la dispensation de soins à des seniors, les auteurs de ces actes doivent souvent être recherchés dans le proche entourage de ces derniers.
Parmi les sexagénaires, les femmes sont davantage confrontées que les hommes à diverses formes de violence physique, sexuelle, psychologique et financière. Dans le cadre d'une étude réalisée à la fin des années 90, on a interrogé des seniors vivant à domicile. 12 % des femmes ont déclaré être victimes de violences psychiques contre 6,7 % des hommes. Des actes de violence physique ont été rapportés par 3,1 % des femmes contre 1,8 % des hommes. Dans cette enquête, la violence physique était limitée aux femmes: 1,7 % ont déclaré y être confrontées. Certaines données montrent également que les femmes âgées sont plus souvent victimes que leurs homologues masculins de formes directes ou indirectes de violence et de maltraitance dans des centres de soins et des centres résidentiels (19) .
Les seniors sont proportionnellement moins souvent victimes de délits que les jeunes mais, malgré cela, ils se sentent particulièrement vulnérables et éprouvent un sentiment d'insécurité disproportionné. Il ressort de la littérature que l'âge et le sexe ont une influence déterminante sur le sentiment de sécurité/d'insécurité. De manière générale, les hommes et les seniors de la tranche d'âge la plus basse se sentent plus en sécurité que les femmes et que les seniors de la tranche d'âge la plus élevée. Le sentiment de sécurité des hommes et des femmes diminue au fur et à mesure qu'ils vieillissent (20) .
Il s'avère que les expériences de violences et les sentiments d'insécurité entraînent des sentiments de solitude, surtout chez les femmes (21) .
E. PARTICIPATION
Les femmes d'âge mûr sont sous-représentées dans les divers organes de décision et d'avis. Un tiers à peine des membres des conseils consultatifs locaux des seniors sont de sexe féminin. De plus, les femmes assument beaucoup moins souvent des présidences. L'étude révèle que les obstacles suivants sont cruciaux:
— les femmes ont traditionnellement de nombreuses tâches à remplir, si bien qu'il leur reste moins de temps pour honorer leurs autres engagements. De par la répartition traditionnelle des rôles, les femmes âgées ont souvent peu confiance dans leur aptitude à diriger une organisation;
— les femmes ont en général eu moins de chances de perfectionner leurs aptitudes de gestionnaire;
— une organisation basée sur le modèle de culture masculin (où l'on se réunit souvent et longtemps, où l'on se montre distant, ...) constitue, pour beaucoup de femmes, un obstacle à leur participation à la gestion. Des aspects informels tels que les négociations de couloir et le « réseau de vieux garçons » compliquent la situation des femmes;
— la faiblesse du niveau de formation des femmes a une incidence sur leur participation sociale (22) .
En ce qui concerne la participation politique, on constate que, depuis les années '50, l'âge moyen des parlementaires a diminué de manière constante. Alors qu'en 1951, l'âge moyen d'un député était encore de 51 ans, il était pour la première fois inférieur à 45 ans à l'issue des élections législatives fédérales de 2003. Cette diminution de l'âge moyen est plutôt la traduction d'une concentration dans la tranche d'âge médiane se situant entre 40 et 50 ans.
Un examen de la composition actuelle du Parlement fédéral, du Parlement flamand et du Parlement wallon nous amène à tirer les conclusions suivantes. À la Chambre siègent cinquante-trois femmes et nonante-sept hommes. Dix femmes ont plus de 50 ans pour trente-huit hommes. Le député le plus âgé est une femme de 69 ans. Au Sénat siègent 27 femmes et 44 hommes. Dix femmes ont plus de cinquante ans pour vingt-quatre hommes. Les deux sénateurs les plus âgés (une femme et un homme) ont tous deux 66 ans. Au Parlement flamand siègent trente-neuf femmes et quatre-vingt-six hommes. Onze femmes ont plus de 50 ans pour 45 hommes. Le député flamand le plus âgé est un homme de soixante-neuf ans. Au Parlement wallon siègent seize femmes et cinquante-neuf hommes. Cinq femmes ont plus de 50 ans pour vingt-six hommes. Les trois parlementaires wallons les plus âgés sont des hommes de 66 ans.
Il est clair dès lors que la féminisation du parlement va de pair avec un rajeunissement. Alors que plus de la moitié des sénateurs masculins et des députés flamands masculins ont plus de 50 ans, les députées de plus de 50 ans ne représentent même pas un cinquième des députées.
F. SANTÉ
Les informations sur la santé des plus de 50 ans sont abondantes, mais il est fréquent qu'elles ne soient pas ventilées par sexe. Or, on ne peut élaborer une politique ciblée et variée qui si l'on connaît les différences. Par ailleurs, les données qualitatives, c'est-à-dire celles relatives aux expériences individuelles des femmes âgées en matière de santé et de bien-être, sont rares.
Une affection qui réclame beaucoup d'attention est la démence, dont le nombre de cas augmente sensiblement surtout au-delà de 85 ans. Il n'est pas établi que le risque de développer une démence est plus grand chez la femme. Certaines statistiques indiquent qu'elles y sont plus sujettes, mais d'autres indiquent le contraire. Le fait qu'il y ait davantage de cas de démence chez les femmes âgées peut s'expliquer tout simplement par le fait qu'il y a beaucoup plus de femmes âgées que d'hommes âgés. On a aussi constaté que les hommes sont mieux à même que les femmes de dissimuler les symptômes de la démence. Il est souhaitable que l'on poursuive les recherches dans ce domaine (23) .
Dans le domaine de la santé et du comportement améliorant la santé, les femmes âgées n'occupent certainement pas une place privilégiée. Elles connaissent davantage de problèmes de santé, parce qu'elles doivent assumer plusieurs rôles sociaux, mais aussi parce qu'elles sont davantage confrontées à la pauvreté. En outre, on constate souvent que les femmes âgées font passer leurs besoins personnels après ceux de leur entourage.
Les personnes âgées consomment en général davantage de médicaments que les jeunes. Il y a des indices selon lesquels les femmes en consommeraient davantage que les hommes, toutes tranches d'âge confondues.
Les femmes âgées consultent davantage le médecin et reçoivent davantage de traitements médicaux que les hommes. Elles consultent plus souvent un médecin généraliste pour des problèmes psychiques et des affections générales de nature diverse. Il y a aussi des indices selon lesquels on leur prescrirait davantage de médicaments, essentiellement des psychotropes, qu'aux hommes. Au cours des dix dernières années, le recours à un traitement médicamenteux des symptômes liés à la ménopause a aussi progressé. Il arrive que des femmes en ménopause qui souffrent d'un problème cardiaque soient envoyées trop tardivement chez un spécialiste, parce que le diagnostic correct est posé trop tard.
Lorsque les plus âgés ont besoin d'outils techniques, ce sont les femmes qui y ont le plus difficilement accès. Cela s'explique par le fait qu'elles sont financièrement moins nanties que les hommes du même groupe d'âge. Il y a également davantage de risques que les femmes plus âgées deviennent invalides alors qu'elles vivent seules. Une étude montre non seulement que les femmes plus âgées présentent davantage de symptômes douloureux, comme une inflammation des articulations (arthrite), des pertes d'acuité visuelle et de l'ostéoporose, mais aussi qu'elles sont plus souvent atteintes d'affections provoquées par des blessures et des chutes.
Plus les personnes sont âgées, plus elles risquent de devenir dépendantes, dans une plus ou moins large mesure, des soins d'autrui. Il est extrêmement important de pouvoir se mouvoir et circuler librement si l'on veut accomplir toutes sortes d'activités de manière autonome. Les restrictions de la motricité ont une influence considérable dans les divers domaines de la vie. Le nombre de personnes qui souffrent de restrictions de la mobilité croît avec l'âge, mais les chiffres montrent qu'à tout âge, les femmes sont moins mobiles que les hommes. 8 % des femmes de 75 ans et plus souffrent de graves problèmes de mobilité (24) .
G. LE FACTEUR SOINS
Dans notre société, les soins aux personnes âgées et autres sont incontestablement une affaire de femmes. Dans la tranche d'âge de 60 à 64 ans, seule une femme sur six ne doit dispenser aucune forme de soins.
Les femmes d'âge moyen qui soignent leurs (beaux-)parents sont relativement nombreuses. La demande de soins aux personnes très âgées s'adresse principalement au groupe le plus jeune des femmes qui avancent en âge. Dans le cadre de la solidarité familiale, la responsabilité morale et pratique des soins à donner incombe principalement aux femmes.
De nombreuses femmes âgées entre 50 et 60 ans s'occupent également de leurs enfants et petits-enfants. Et dans la classe d'âge de 60 à 64 ans, pas moins de 67 % des femmes s'occupent de leurs petits-enfants.
Souvent aussi, les femmes jouent un rôle central lorsqu'il s'agit d'administrer des soins au conjoint qui en a besoin. Cet élément est également bien présent dans les attentes des seniors eux-mêmes: deux hommes de plus de 65 ans sur trois voient en leur conjointe la figure centrale en ce qui concerne les soins qu'ils nécessitent, alors que, dans le même groupe d'âge, à peine une femme sur trois considère que son conjoint joue un rôle central dans ce domaine.
Les femmes d'âge moyen peuvent être confrontées à diverses demandes en matière de soins, à la suite d'une conjonction d'évolutions démographiques et sociologico-familiales.
Sur la base de prévisions démographiques, on peut s'attendre à ce que, dans l'avenir, les femmes d'âge moyen soient vraisemblablement sollicitées encore davantage pour de tels soins. On ne peut pas encore se prononcer clairement sur les conséquences que ce phénomène aura sur la participation des femmes de cette catégorie d'âge au marché du travail. Actuellement, en effet, près d'une femme sur trois dans la tranche d'âge de 50 à 55 ans exerce une activité salariée. Arrêter de travailler pour dispenser des soins n'est pas sans conséquences sur le bien-être ni sur la situation économique de l'intéressée. Parfois aussi, les femmes d'âge moyen sont en quelque sorte « tiraillées » entre, d'une part, des parents très âgés et, d'autre part, leur conjoint, leurs enfants et leurs petits-enfants.
En 2002, on a dressé la liste de toutes les personnes démentes dans les villes de Gand, Bruges, Courtrai et Ostende. On a constaté à cette occasion que l'âge moyen des personnes qui s'occupaient d'elles était de 61,9 ans. Dans près de la moitié des cas, les soins de proximité étaient dispensés par une fille de la personne démente et, dans un cas sur trois environ, par le partenaire.
Il faut également oser s'interroger sur les conséquences physiques et psychiques qui guettent les femmes qui dispensent les soins, d'autant plus qu'une enquête a révélé qu'elles assument souvent une série d'activités de soins dont elles ne peuvent pas toujours mesurer la portée. Les soins en question représentent souvent une lourde charge physique et émotionnelle, en particulier lorsqu'ils s'inscrivent sur la durée (25) .
Toutefois, les femmes sont également nombreuses à nécessiter des soins. Malheureusement, bon nombre de femmes âgées ne peuvent bénéficier de tous les soins dont elles auraient besoin, parce qu'elles vivent seules ou qu'elles sont trop éloignées de leurs enfants. Les femmes âgées font plus que les hommes appel aux services de soins à domicile.
Les coûts des soins non médicaux sont pris en charge, au niveau flamand, par l'assurance-soins. Le nombre de personnes concernées augmente avec l'âge. Deux ayants droit à une intervention sur trois sont des femmes. Cette distinction liée au sexe se manifeste principalement après l'âge de 70 ans.
Dans le domaine des soins, les femmes sont défavorisées, sans compter qu'elles vivent plus longtemps. Outre qu'elles présentent un plus haut niveau d'inaptitudes fonctionnelles, elles sont aussi, proportionnellement, davantage confrontées au cours de leur vie à des périodes d'invalidité et de mobilité réduite. Il en résulte qu'elles sont de plus grandes consommatrices de soins de santé. Toutefois, leur situation financière précaire ne leur permet pas toujours non plus d'accéder à des soins de santé adéquats. Elles vivent plus souvent seules, autre raison pour laquelle elles ont davantage besoin de soins informels et professionnels.
Comme elles ont une espérance de vie plus longue que les hommes et qu'elles survivent souvent à leur conjoint, les femmes doivent plus fréquemment faire appel à des institutions résidentielles, c'est-à-dire à des maisons de repos pour personnes âgées, des résidences-services ou des centres de jour. Les établissements de soins résidentiels sont occupés à 80 % par des femmes. Même si les femmes sont plus nombreuses que les hommes à bénéficier de soins résidentiels, tout indique qu'elles sont plus réticentes à renoncer à leur indépendance et à entrer dans un home.
Christel GEERTS. |
Le Sénat,
A. Considérant que, du point de vue démographique, le vieillissement est résolument une thématique féminine;
B. Considérant que l'âge joue un rôle considérable dans la vie des individus, dans l'ordre social et dans nos normes et valeurs;
C. Considérant qu'il est nécessaire que le gouvernement prenne conscience et puisse se faire une idée de l'hétérogénéité du groupe des femmes âgées dans diverses situations de vie, et qu'il y a lieu de renforcer et d'améliorer la visibilité de leurs besoins et de leurs contributions;
D. Vu le rapport de 2002 de l'Organisation mondiale de la Santé, intitulé « Vieillir en restant actif », qui conclut que, presque partout dans le monde, les femmes ont l'avantage de vivre plus longtemps mais risquent plus d'être victimes de la violence et de la discrimination en ce qui concerne l'accès à l'éducation, aux revenus, aux emplois intéressants, aux soins de santé, aux mesures en matière de sécurité sociale et au pouvoir politique, de la pauvreté et d'incapacités au cours de leur vieillesse;
E. Vu le thème central auquel est consacrée cette année la Journée internationale des personnes âgées, à savoir « Le vieillissement au nouveau millénaire: la pauvreté, les femmes âgées et le développement au centre de l'attention », dans le cadre duquel on a souligné la nécessité d'inscrire aussi bien un critère de genre qu'un critère d'âge dans le cadre de la législation, de la politique, des programmes et des efforts visant à lutter contre la pauvreté;
F. Vu le Plan d'action de Vienne de 1982, dans le cadre duquel on note que le nombre des femmes âgées augmente de manière constante, on demande d'être attentif à leurs besoins et à leurs rôles spécifiques et attire l'attention sur le niveau inférieur de leurs revenus et sur l'évolution particulière de leur carrière professionnelle;
G. Vu le Plan d'action international de Madrid sur le vieillissement de 2002, dans le cadre duquel on demande aux gouvernements de faire des préoccupations relatives à la situation des femmes âgées une priorité de la politique, on les invite à cesser de considérer les personnes âgées comme des personnes dépendantes requérant des soins et on les exhorte à consacrer aussi une attention particulière au renforcement de leur autonomie de décision (empowerment), de manière qu'elles puissent encore participer pleinement à la vie économique, politique et sociale;
H. Vu les principes de base des Nations unies relatifs aux personnes âgées, tels qu'ils ont été fixés en 1999, à savoir les principes d'indépendance, de participation, de soins, d'épanouissement personnel et de dignité;
I. Vu le Programme d'action de Pékin de 1995, dans le cadre duquel on demande d'abandonner l'habitude tenace d'utiliser des images stéréotypées des femmes dans la publicité et dans les médias et de montrer la réalité telle qu'elle est au moyen d'images plus équilibrées et d'exemples plus nombreux du bouleversement des rôles;
J. Vu la nécessité d'apprendre tout au long de la vie dans notre société et le fait que le niveau d'éducation et de formation est un facteur décisif pour ce qui est de la situation que l'on occupe sur le marché du travail, des possibilités de carrière professionnelle, de la situation financière à un âge avancé, de la participation à la vie publique et de la possibilité de défendre ses propres intérêts;
K. Vu le constat qu'en Belgique, la fracture numérique entre les sexes, les catégories d'âge, les niveaux de formation et les niveaux de revenus s'est aggravée ces cinq dernières années;
L. Considérant qu'au niveau européen, les chefs de gouvernement ont convenu en juin 2005 de tenir compte, dans le cadre de leur politique en matière d'emploi, de directives visant à augmenter le taux de participation pour qu'il atteigne 70 % en 2010, avec 60 % au moins pour les femmes et 50 % au moins pour les personnes âgées de 55 à 64 ans, et qu'ils ont considéré ainsi que les femmes constituent un levier important pour réaliser cet objectif d'ici 2010;
M. Vu la loi du 7 mai 1999 sur l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne la rémunération, l'évaluation des fonctions et les classifications des fonctions, qui consacre le principe de non-discrimination;
N. Vu le déroulement et les caractéristiques spécifiques de la carrière des femmes de plus de 50 ans, laquelle est plus courte, présente plus de périodes d'interruption et repose très souvent sur un régime de travail à temps partiel;
O. Vu le fossé salarial persistant entre les hommes et les femmes;
P. Reconnaissant qu'en ce qui concerne la problématique de la pension, on raisonne encore trop souvent en se basant sur la situation de l'homme qui travaille à temps plein, c'est-à-dire en adoptant un point de vue qui est diamétralement opposé à la réalité qui existe sur le marché du travail;
Q. Vu la résolution concernant la situation des femmes âgées dans la société (A/RES/57/177) qui a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies en 2002 et qui appelle les gouvernements à prendre des mesures pour que les femmes âgées puissent s'investir activement dans tous les aspects de la vie en assumant des rôles divers au sein de la communauté, dans la vie publique et dans la prise de décisions, et à élaborer, en coopération avec la société civile, des politiques et des programmes qui visent à assurer aux femmes âgées une certaine qualité de vie;
R. Considérant que les personnes âgées constituent un groupe particulièrement vulnérable aux mauvais traitements et à la maltraitance en raison de leur dépendance accrue;
S. Considérant que les sentiments d'insécurité et d'angoisse ont une influence négative sur la joie de vivre en général et que ces sentiments sont plus forts chez les femmes et à mesure que l'on avance en âge;
T. Vu la sous-représentation des femmes âgées à de nombreux niveaux décisionnels;
U. Considérant que les femmes âgées ont davantage de problèmes de santé, vont plus souvent chez le médecin et reçoivent davantage de traitements médicaux que les hommes;
V. Considérant que les femmes sont plus que les hommes appelées à fournir des soins, mais qu'elles ont également besoin de davantage de soins en raison de leur espérance de vie plus longue,
Demande au gouvernement fédéral:
1. de promouvoir une recherche qualitative et quantitative dans tous les domaines importants pour les femmes âgées, en vue d'identifier les besoins, les contributions et l'hétérogénéité spécifiques de ce groupe;
2. de s'attacher à ventiler les statistiques officielles en fonction de l'âge et du sexe, afin de pouvoir mener une « politique sur mesure » efficace;
3. de prendre des mesures et des initiatives afin de sensibiliser le public à la situation et aux missions spécifiques des femmes âgées;
4. de mettre sur pied des structures pour promouvoir le dialogue à tous les niveaux entre les services publics responsables de l'égalité des chances et de la politique des personnes âgées;
5. de prendre des initiatives afin que les médias, en général, et la publicité, en particulier, veillent davantage à véhiculer une image positive et réaliste de la femme âgée, et de vérifier concrètement quelle est l'image de la femme âgée que véhiculent leurs propres messages médiatiques et publications;
6. d'améliorer qualitativement et quantitativement les mesures visant à stimuler la participation des femmes âgées à l'apprentissage permanent et complet;
7. d'être attentif en permanence à l'égalité des chances en ce qui concerne la formation professionnelle et le perfectionnement des travailleuses âgées, et de mener une politique proactive à l'égard de celles d'entre elles qui réintègrent le marché du travail;
8. de consentir des efforts supplémentaires afin de permettre au groupe cible des femmes âgées d'accéder aux autoroutes de l'information;
9. d'élaborer de manière durable des mesures d'encadrement favorables aux femmes, en vue de leur faciliter l'accès au marché du travail, l'égalité des chances étant assurée;
10. de mettre tout en œuvre afin d'arriver à l'égalité salariale entre les hommes et les femmes, notamment en supprimant toute discrimination dans l'évaluation des fonctions;
11. d'établir de manière proactive un plan de fin de carrière pour les travailleurs, afin que chacun puisse trouver un travail sur mesure, compte tenu du critère du genre;
12. dans le débat sur les pensions, d'être plus attentif aux spécificités de la carrière des femmes, de faire en sorte que les pensions soient liées à l'évolution du bien-être et d'accorder une attention toute particulière aux pensions les plus basses;
13. d'investir dans des mesures soutenant les femmes âgées et leur permettant de participer activement au développement et au maintien de réseaux et d'organisations d'entraide ayant pour vocation de multiplier les possibilités offertes aux femmes âgées de préciser leurs centres d'intérêt et leurs besoins;
14. de faire mieux entendre la voix des femmes âgées dans le processus de décision politique, en soutenant le travail des organisations de femmes âgées;
15. de veiller à ce que le problème de la maltraitance des personnes âgées faase l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics, notamment en matière de sensibilisation et de formation tant du grand public que des personnes appelées à être en contact avec les personnes âgées;
16. d'entamer un dialogue ouvert concernant la sécurité, la violence et les seniors, en se montrant attentif à l'impact du sentiment d'insécurité, de l'angoisse et de l'expérience de victime sur le sentiment de bien-être et la joie de vivre;
17. de stimuler plus avant la recherche sur la démence et de veiller à ce que les personnes concernées reçoivent également un diagnostic de soins;
18. d'organiser une meilleure information sur les risques sanitaires spécifiques pour les femmes âgées;
19. de faire en sorte que la formation des médecins et des autres thérapeutes soit davantage axée sur la problématique des femmes âgées;
20. d'oser ouvrir le débat de société sur le travail familial du point de vue des femmes, et de prendre des initiatives afin que les femmes soient bien informées de l'incidence qu'aura ce travail sur leur situation économique ultérieure.
8 décembre 2005.
Christel GEERTS. Annemie VAN de CASTEELE. Sabine de BETHUNE. Nathalie de T' SERCLAES. |
(1) SPF Économie, section statistiques, Statistiques de population.
(2) Jacobs, T. e.a., « Op latere leeftijd. De leefsituatie van 55-plussers in Vlaanderen », Centrum voor bevolkings- en gezinsstudie.
(3) Avis no 88 du 1er octobre 2004 du Conseil pour l'égalité des chances entre hommes et femmes relatif aux femmes de 50 ans et plus.
(4) Banque de données Point d'appui Politique de l'égalité des chances (Eurobaromètre — Médias et images).
(5) Stiehr, K. (2004), « Mapping existing research and identifying knowledge gaps concerning the situation of older women in Europe, Proposition Commission européenne QLAM-2001_00372 », Résumé du rapport de synthèse européen, Frankfort sur Main, Institut fur Soziale Infrastruktur.
(6) Office national des pensions, Études statistiques, 2005-10-10.
(7) Voir supra.
(8) VRIND (Vlaamse Regionale Indicatoren), 2004/2005. Voir également: Annuaire statistique 2004, ONEm.
(9) Geerts, C., Horckmans, T. et Ponjaert-Kristoffersen, I. (Eds.) (1998), « Meisjes van 50 », Acco.
(10) Idem note 3 en bas de page 6.
(11) Idem note en bas de page 5.
(12) Idem note en bas de page 8.
(13) Idem note 3 en bas de page 6.
(14) Claes, V. et Vanpeborgh, G., « Generatiepact en Gender: een moeilijk te verzoenen duo ? », Samenleving en Politiek (2005).
(15) Voir supra.
(16) www.mobielvlaanderen.be.
(17) Vanden Boer, L. et Pauwels, K. « Eenzame ouderen: mythe of realiteit ? », site Internet Centrum voor Bevolkings- en Gezinsstudie: http://www.cbgs.be/content/selfware.pl ?pageid=143 &language=NL
(18) De Deken, L. et Pas, L., « Ouderenmisbehandeling, aandachtspunten voor artsen op de eerste lijn ».
(19) Schoenmaekers, D. et J. Breda (Éds.) (2004), « Senioren onder de loep: in hun hemd gezet of naar waarde geschat ? » L'enquête socio-scientifique sur les seniors en Flandre entre 1990 et 2003. Consortium Université d'Anvers et Centre universitaire du Limbourg, Point d'appui Politique de l'égalité des chances et groupe de recherche Bien-être et État-providence.
(20) Vanden Boer, L. et Pauwels, K., « Onveiligheidsgevoelens, angst en slachtofferervaring bij ouderen »,: http://www.cbgs.be/content/selfware.pl ?pageid=143&language=NL
(21) Voir supra.
(22) Geerts, C. et Ponjaert, I. (Eds.) (1997), « Vrouwen van middelbare leeftijd: van onzichtbaar naar onmisbaar. Een onderzoek met betrekking tot hun participatie op het niveau van middenveld- en emancipatiebewegingen, gericht op het formuleren van beleidsrelevante en sociaal-agogische implementaties », VUB, project PBO97/44_4_5/106.
(23) Voir la note en bas de page 5.
(24) Données issues de l'enquête santé 2001 de l'ISSP et de l'INS (Statistiques et informations économiques, SPF Économie).
(25) Voir la note en bas de page 10.