3-131

3-131

Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 27 OCTOBRE 2005 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Question orale de Mme Joëlle Kapompolé au vice-premier ministre et ministre des Finances sur «la défiscalisation des biocarburants» (nº 3-826)

Mme Joëlle Kapompolé (PS). - Ma question porte sur la directive 2003 relative aux biocarburants et, plus précisément, sur la possibilité de réduire les accises en la matière.

Le nécessaire a été fait à la faveur de la loi-programme du 12 juillet 2005 mais je voudrais savoir ce qu'il en est des arrêtés d'application.

L'Institut pour un Développement Durable a réalisé une étude remettant en cause la filière des biocarburants. Selon cette étude, les mesures fiscales adoptées seraient un peu trop larges et il y aurait mieux à faire. Qu'en pense le ministre ?

M. Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des Finances. - Le premier élément est la défiscalisation des biocarburants, régie par la loi du 11 juillet 2005, qui permet, dans un cadre budgétairement neutre, de défiscaliser partiellement la partie d'origine végétale contenue dans un mélange, soit d'essence sans plomb d'origine fossile à faible teneur en soufre et en aromatiques, avec au moins 7% de volume de bioéthanol, relevant du code NC 2207 10 00, d'un titre alcoométrique d'au moins 99% de volume, pur ou sous forme d'ETBE, soit de gasoil pauvre en soufre avec au moins 2,45% de volume.

La neutralité budgétaire est obtenue en augmentant à due concurrence l'accise frappant la partie fossile du mélange. Les produits mis sur le marché ne seront pas des produits purs mais bien des produits contenant une part de biocarburants, en tout cas pour la production de volumes importants.

En outre, l'huile de colza, utilisée comme carburant et obtenue par trituration chez un agriculteur, à partir de ses propres matières de base ou de matières de base d'origine locale et vendues sans intermédiaire à un consommateur final, est entièrement exonérée de l'accise. Ce point sera probablement précisé dans la prochaine loi-programme.

Ces dispositions ont été notifiées à la Commission européenne conformément aux dispositions de l'article 88, paragraphe 3, du Traité CEE. Leur mise en oeuvre est soumise à son autorisation formelle. Nous aurions dû la recevoir le 15 octobre 2005 mais la Direction générale Concurrence de la Commission nous a demandé des précisions au sujet de la surcompensation.

Selon la directive relative à la taxation des produits énergétiques, la défiscalisation de l'huile végétale ne peut permettre une surcompensation par rapport à l'huile fossile qu'elle remplace. En clair, le prix du biocarburant ne peut être inférieur, toutes taxes comprises, à celui du carburant fossile qu'il remplace.

Il va de soi que l'objectif de 2% prévu par la directive ne pourra être atteint en 2005 parce que la Commission ne nous a pas encore donné son aval.

La mise en oeuvre s'effectuera, à l'instar de ce qui se fait en France, par le biais d'un cahier des charges et d'un appel d'offres au niveau européen. Les autorités régionales et fédérales concernées étudient actuellement ces documents.

La défiscalisation sera limitée à six ans, comme le prescrit la directive, mais pourra éventuellement être renouvelée.

Deuxième élément : comment évoluer à court terme ? Nous sommes en discussion avec les Régions pour finaliser le cahier des charges et les réponses communes que nous donnerons à la Commission européenne.

Nous pourrons vraisemblablement lancer les procédures afin d'autoriser la mise sur le marché de ces produits cette année encore.

Troisième élément. Vous m'avez fait part d'un certain nombre de réflexions concernant les biocarburants. Pour le moment, je me conforme évidemment aux directives élaborées à l'échelon européen. Les ministres de l'Énergie, notamment, ont en effet pris des initiatives concernant l'intégration progressive des biocarburants dans les carburants généralement utilisés. Les ministres des Finances, quant à eux, appliquent les décisions prises.

Par ailleurs, tant la Région flamande que la Région wallonne nous demandent de progresser rapidement dans ce domaine. Mais si la Région flamande est en mesure de mettre des biocarburants sur le marché, en Région wallonne, par contre, il faudra apparemment attendre l'automne 2007.

Pour le moment, j'applique donc les directives de la Commission européenne et je tente de répondre aux demandes pressantes émanant des Régions mais, si vous le souhaitez, je suis entièrement favorable à l'organisation, en commission, d'un débat relatif à l'intérêt réel que présentent les biocarburants en terme de développement durable.

Il serait alors souhaitable d'obtenir l'avis des experts européens et nationaux qui ont plaidé en ce sens, voire des représentants des ministres régionaux. Je suis bien entendu ouvert à ce type de débat.

Mme Joëlle Kapompolé (PS). - Concernant la proposition de la Commission européenne, j'aurais aimé savoir si l'imposition incombant à la Belgique n'est pas plus importante que celle réclamée, en son temps, à la France.

Concernant l'intérêt réel du biocarburant, je considère qu'il s'agit d'une piste très intéressante en termes de développement économique et de nouveaux débouchés. Je souhaiterais effectivement qu'un tel débat soit mené en commission.

M. Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des Finances. - Concernant la Commission européenne, nous préparons actuellement la réponse, en collaboration avec les Régions. Nous tenons évidemment compte des exemples étrangers pour justifier notre position.

Je vous ai décrit la situation actuelle, à l'échelon tant européen que régional, mais je suis, je le répète, favorable à un débat de fond en commission.