3-127

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 13 OKTOBER 2005 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van mevrouw Christine Defraigne aan de vice-eerste minister en minister van Justitie over «de verspreiding van gerechtelijke opsporingsberichten via de media en internet» (nr. 3-798)

Mme Christine Defraigne (MR). - Ce 1er juillet a été publiée au Moniteur belge une directive ministérielle prévoyant certaines conditions pour la diffusion d'avis de recherche judiciaires dans les médias et sur internet. Je souhaiterais vous interroger au sujet des objectifs poursuivis.

Cette circulaire impose l'obtention de l'autorisation préalable de la commission de sélection pour qu'un avis de recherche puisse être diffusé sur une chaîne télévisée nationale. Or, cette commission est composée d'au moins sept personnes appartenant au monde judiciaire, de membres des polices locale et fédérale et de personnes travaillant à la télévision.

Tout d'abord, ne craignez-vous pas qu'un temps précieux - les premières heures qui suivent la disparition inquiétante d'une personne, pouvant aussi être victime d'un crime, - ne soit gaspillé pour remplir cette exigence ?

Par ailleurs, l'avis de recherche est toujours diffusé à l'initiative des magistrats en charge des dossiers. En imposant ce préalable, ne risque-t-on pas de jeter le discrédit sur le travail de ces magistrats ?

Ensuite, cette nouvelle directive impose également d'obtenir une autorisation de la famille de celle-ci avant de diffuser sur antenne un avis de recherche, éventuellement dans le cadre d'une émission de ce type.

Sur le plan des principes, les poursuites pénales relèvent de la justice. Ne risque-t-on pas l'échec en subordonnant cette diffusion à une autorisation écrite de la famille de la victime ? En cas de disparition, par exemple, il faut élargir le plus possible l'enquête et les premiers suspects appartiennent parfois à la famille même de la victime.

Enfin, la directive impose comme préalable qu'un accord soit conclu entre les ministères de la Justice et de l'Intérieur et la chaîne télévisée. Un tel accord existe-t-il à l'heure actuelle ? Que contient cette exigence contractuelle et son rôle incitatif ou dissuasif à l'égard de telles émissions ?

J'ai le sentiment, à la lecture de cette directive, que ces émissions ne recueillent pas votre approbation. Les conditions imposées donneront peut-être lieu à des difficultés de réalisation.

Si mon analyse est erronée, vous apporterez la rectification qui s'impose, mais je vous remercie d'avance de votre réponse.

Mme Laurette Onkelinx, vice-première ministre et ministre de la Justice. - Madame Defraigne, vous m'aviez adressé un courrier relatif à cette question et je vous ai répondu, point par point, le 5 août.

Mme Christine Defraigne (MR). - Très sincèrement, madame la vice-première ministre, je n'ai pas reçu cette lettre mais je ne doute pas un seul instant que vous me l'ayez envoyée.

Mme Laurette Onkelinx, vice-première ministre et ministre de la Justice. - Je vous en ferai transmettre une copie.

La bonne qualité des divers avis et programmes autour de phénomènes criminels est une préoccupation très importante. La directive rédigée après de longs débats avec la police fédérale et le collège des procureurs généraux en témoigne. La communication sur ces faits et événements criminels peut, dans un environnement de médias en concurrence, très vite donner lieu à une télévision s'inspirant du sensationnel.

La finalité de tels programmes est de permettre à la justice de trouver dans les médias un instrument pour présenter ces dossiers à la population, dans le but d'obtenir des informations supplémentaires, raison pour laquelle j'y suis favorable. L'objectif n'est évidemment pas de rendre la télévision attrayante, grâce à des événements réels.

Ce type de télévision constitue, en outre, un danger grave pour les différents droits de tous les acteurs concernés lors d'un fait criminel. Je pense particulièrement aux droits de la défense, aux droits au respect de la vie privée, à la présomption d'innocence, etc. Je suppose que vous êtes également favorable au respect de ces droits.

Il est inexact qu'une forme de bureaucratisation ait été consciemment créée pour décourager les magistrats de s'adresser aux médias pour résoudre leurs dossiers.

Je suis consciente que de bons avis de recherches ou des reportages peuvent apporter une plus-value. Je ne suis cependant pas aveugle devant le climat négatif qui peut naître à la suite de diffusions où l'aspect informatif laisse la place à l'aspect sensationnel. Heureusement, nous pouvons nous réjouir du fait que la plupart des médias belges partagent cette préoccupation. Comme vous le savez, la disposition en question s'adresse à tous les médias.

Pour ce qui est de la participation des victimes, beaucoup d'initiatives législatives ont été prises ces dernières années afin d'augmenter leur implication pendant l'enquête. Il me semble donc normal que la voix de la victime soit entendue si, pour l'enquête, les données d'un dossier judiciaire sont retirées de « l'intimité » du cabinet du magistrat instructeur et que publicité y est donnée.

Les problèmes pratiques éventuels que vous soulevez me paraissent, soit marginaux, soit susceptibles d'être résolus par une bonne concertation.

Indépendamment de ce constat, il est aussi rassurant pour les médias qui collaborent de ne jamais être confrontés à un tiers qui s'oppose, peu avant une diffusion, à la programmation de l'un ou l'autre avis ou reportage.

Je n'ai évidemment pas d'agenda caché. Dans le courant du mois d'août, j'ai écrit à toutes les télévisions régionales, néerlandophones et francophones, pour les inviter à conclure une convention avec le ministre de l'Intérieur et moi-même pour la diffusion de ces programmes.

Des négociations sont en cours avec quelques diffuseurs néerlandophones. Les télévisions régionales francophones adopteront un point de vue commun qui ne m'est pas encore parvenu. Je suis également prête à examiner la possibilité de conclure une convention de longue durée avec la chaîne qui le demanderait.

Le ministre de l'Intérieur et moi-même sommes donc ouverts au dialogue. Nous sommes d'avis qu'il faut aider les télévisions à réaliser de bons programmes. Cela peut leur être bénéfique, comme l'exemple d'autres pays le montre. Cela peut également être positif pour la justice en contribuant à certaines enquêtes. J'y suis donc tout à fait favorable.

Mais des émissions de ce type peuvent toutefois s'avérer dangereuses. Elles pourraient mettre à mal une enquête judiciaire. Certaines déclarations de magistrats ou d'enquêteurs pourraient en effet compromettre certains droits reconnus aux acteurs du procès judiciaire.

Je veille dès lors à ce que ces droits soient respectés pour ne pas mettre en péril l'enquête judiciaire. Ni plus, ni moins. Pour le reste, nous continuons à négocier avec les interlocuteurs intéressés.

Mme Christine Defraigne (MR). - Je remercie la ministre pour sa réponse. Je lirai avec intérêt son courrier.

Je note que la ministre est désireuse du respect de principes auxquels nous tenons tous, qu'il s'agisse de la présomption d'innocence ou du respect des parties en présence, et qu'elle considère que ces émissions peuvent apporter une plus-value : on a parlé d'un taux d'élucidation d'affaires de 25%.

Je prends également bonne note des solutions que propose la ministre et des préoccupations qui sont les siennes.