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16 FÉVRIER 2005
Le projet de loi a été adopté par l'assemblée plénière du Sénat et transmis à la Chambre des représentants le 27 janvier 2005.
La Chambre a amendé le projet (article 2) et l'a renvoyé au Sénat le 4 février 2005. Conformément à l'article 64.1 du Règlement du Sénat, « le Sénat n'est saisi du projet ... que pour ce qui concerne les dispositions qui ont été amendées ou ajoutées par la Chambre ».
La commission a réexaminé et réamendé le projet au cours de sa réunion du 16 février 2005.
Au début de la réunion, M. Galand et Mme De Roeck déposent les amendements nºs 3 à 5. M. Dedecker dépose l'amendement nº 6 (doc. Sénat nº 3-991/8). Tous ces amendements concernent bien entendu l'article amendé par la Chambre.
Mme Hermans déclare que le groupe VLD continue à soutenir le projet.
M. Beke regrette que la proposition n'ait malgré tout pas encore pu être finalisée, et ce, en raison de l'adoption, par la Chambre, d'un amendement visant à faire en sorte que l'opération 11.11.11 puisse également bénéficier d'une partie de la contre-valeur des pièces de monnaie remises. Au cours du premier examen de la proposition au Sénat, un amendement identique déposé par Mme Kapompolé a été rejeté surtout au motif que l'extension proposée donnerait lieu à une discrimination d'autres organisations. Une cinquantaine d'ONG sont membres de l'opération 11.11.11, mais cinquante-six autres ONG n'en sont pas membres.
Amnesty International, Foster Parents, Plan Belgique et la « Vlaamse Vereniging voor Ontwikkelingssamenwerking », par exemple, ne font partie ni des organisations membres du consortium Tsunami, ni de celles qui sont partenaires de l'opération 11.11.11.
C'est surtout M. Willems qui a dénoncé ce risque de discrimination à l'époque. Mis à part le groupe PS, l'ensemble du Sénat a suivi son raisonnement. La Chambre, tous partis confondus, a adopté un autre point de vue.
Le groupe CD&V a décidé de prendre son parti de l'amendement déposé à la Chambre, surtout pour éviter des batailles de procédure.
M. Beke signale que plusieurs organisations qui ont déjà promis leur soutien ont l'intention de commencer à collecter des pièces dès que le projet de loi aura été définitivement adopté. Il faut en effet répondre d'abord au besoin de sécurité juridique.
Le délai devient toutefois très court. C'est pourquoi M. Beke invite ses collègues à adopter sans plus tarder le projet de loi dans sa forme actuelle.
M. Galand fait observer que les organisations qui sont vraiment compétentes et spécialisées dans la matière du Tsunami, comme Médecins sans frontières en France, ont déclaré qu'à l'heure actuelle, il n'existe plus de projets urgents.
C'est à ce moment-là que la décision d'élargir l'initiative à l'action 11.11.11 a été prise. Le 11.11.11 est effectivement une plate-forme d'ONG plus large. Malheureusement, cette plate-forme a un problème majeur de gestion. En effet, le compte 11-11 est un compte général. Par conséquent, si l'on veut attribuer l'argent à des objectifs bien précis, il y aura une difficulté.
M. Galand pense que l'idée à la base du projet est excellente. Cependant, il importe de prolonger le délai si l'on veut arriver à monter une campagne.
Le commissaire rappelle aussi que lorsqu'une série d'ONG se sont réunies pour faire appel à l'argent en francs belges des citoyens, elles ne sont arrivées qu'à un total de 100 millions de francs belges. Cela lui paraît décevant. Si le ministre des Finances et le gouvernement appuient cette campagne, il est clair que l'on pourra encore récolter une somme d'argent importante. Pour y arriver, il faudrait que la campagne soit relayée par tous les médias et qu'on lui donne le temps nécessaire.
M. Galand propose donc le mois de juillet comme échéance (voir amendement nº 3).
Deuxièmement, comme le Tsunami, aujourd'hui, a réalisé la rentrée d'argent la plus importante de l'histoire, M. Galand estime qu'il faudrait penser aux « Tsunamis invisibles » et notamment à tous ceux qui se produisent en Afrique. Alors, pourquoi ne pas prévoir que l'argent qui serait récolté ici, serait disponible pour une action cadrant dans les objectifs du Millénaire ? Pour survivre, beaucoup de gens ont surtout besoin d'eau potable.
M. Galand appuie donc la démarche, mais il suggère, plutôt que de cadrer le projet dans la seule opération Tsunami, de préciser que l'opération rentre dans les « Millenium Goals ». Ces objectifs sont entre autres de combattre l'extrême pauvreté. Le public pourra très bien comprendre que dans ce cadre-là, la lutte pour l'eau potable soit prioritaire. Les deux plate-formes nationales, à la fois « 11.11.11-Aktie » et l'opération 11.11.11, sont capables de bien gérer cet argent.
Puisqu'il s'agit finalement de l'argent public, M. Galand propose aussi qu'il soit récolté par le Trésor. Ainsi, ces montants pourront figurer comme une contribution à l'effort du 1 % de la Belgique. En effet, dans la mesure où les pièces seront récoltées par le Trésor, la contrepartie en euros sera de l'argent public.
Mme De Roeck rappelle que la proposition de loi initiale a bénéficié d'un examen rapide au sein de la commission des Finances qui l'a adoptée quasi à l'unanimité de ses membres. L'espoir d'une adoption définitive rapide par la Chambre s'est écroulé à la suite de l'adoption d'un amendement par celle-ci. On peut trouver cela regrettable, mais s'il s'avère qu'il y a eu unanimité pour ce faire, force est d'admettre que cela s'inscrit dans l'ordre normal des choses en démocratie.
L'intervenante invite dès lors le Sénat à prendre son parti de l'amendement en question. Il nous reste en effet peu de temps, surtout si l'on veut continuer à sensibiliser le public, car le mouvement de solidarité avec les victimes du tsunami a déjà dépassé son point culminant et l'on assiste au développement d'un vent de critiques selon lesquelles d'autres régions du monde ont elles aussi un grand besoin d'aide. Personne ne peut trouver d'objection à ce que l'on utilise l'argent récolté pour atteindre les objectifs du Millénaire, à savoir, notamment, assurer l'égalité des chances entre les hommes et les femmes partout dans le monde, lutter contre le sida, organiser un enseignement pour tous les enfants, éradiquer l'extrême pauvreté, etc. Il doit être parfaitement possible d'étendre dans ce sens le champ d'application du projet. Les organisations qui sont membres du consortium Tsunami et qui sont partenaires de l'opération 11.11.11 ont de toute façon l'intention de lancer sous peu des actions en vue de familiariser le grand public avec les objectifs du millénaire. Il serait souhaitable que les organisations qui veulent soutenir ces actions bénéficient d'un peu plus de temps et, dès lors, l'intervenante a déposé, conjointement avec M. Galand, un amendement visant à leur accorder un délai supplémentaire de trois mois pour informer le public au sujet de la collecte et pour organiser celle-ci.
M. Van Nieuwkerke regrette que le législateur se soit, une fois de plus, montré incapable de réagir avec diligence face à un événement. Il estime également que l'on se compliquerait la tâche en voulant sensibiliser le public au moyen d'un projet visant à soutenir deux actions différentes. Il trouve extrêmement dommage que l'on en soit là, mais il a décidé de prendre son parti de la situation.
M. Collas fait observer que son groupe a voté le texte original en séance plénière le 27 janvier 2005. Si maintenant les auteurs disent eux-mêmes qu'ils peuvent accepter le texte tel qu'amendé par la Chambre, son groupe s'y rallie également.
Il constate que de nouveaux amendements ont été introduits, notamment au niveau de la période d'échange et de la comptabilisation de cet effort. Il répète que c'est l'État qui fait l'effort. Le seul effort demandé au citoyen est de donner ses anciennes pièces qui n'ont plus aucune valeur pour lui.
Le président signale que les amendements nºs 3 et 5 de M. Galand et Mme De Roeck sont contraires à l'article 64.1 du Règlement du Sénat et qu'il est dès lors impossible de les adopter.
Le ministre se rallie à cette objection de procédure. Sur l'objet du projet et les demandes qui sont formulées à l'égard du gouvernement, il voudrait faire deux commentaires.
D'abord, en ce qui concerne le mécanisme préconisé, le ministre déclare n'avoir absolument rien contre l'idée qu'il faut davantage sensibiliser la population à un certain nombre d'objectifs et certainement ceux du Millénaire. Toutefois, ici, on a affaire à des pièces de monnaie libellées en francs belges qui ne valent plus rien aujourd'hui. La seule chose que l'on prévoit est que, si les gens les rapportent, soit à La Poste, soit à la Banque nationale, l'État paiera à due concurrence sur des comptes de plate-formes d'ONG, d'abord uniquement de l'action Tsunami, puis celle de 11.11.11.
Personnellement, depuis le début, le ministre a déclaré qu'il aurait été plus sain de mettre l'argent à disposition d'un ensemble beaucoup plus large d'associations. Il peut comprendre que dans une période comme celle que l'on a connu, l'on se focalise sur le compte 12-12. Après quelques semaines, le projet étant passé à la Chambre, avec tout cet argent récolté, il y a eu une demande de transfert vers d'autres associations. Le ministre rappelle encore que, quelles que soient les associations que l'on vise, il s'agit ici de mettre au point un système qui a son avantage en matière de sensibilisation, mais qui est un peu compliqué pour calculer le montant budgétaire que l'État va payer.
Le ministre se demande si l'on veut vraiment dépenser de l'argent de l'État pour faire une campagne d'information afin de ramener des pièces qui ne valent rien. Pour sa part, il préférerait que l'on décide d'emblée de verser directement cet argent aux associations en question. Si le but était de mener une campagne d'information pour inciter le public à faire un effort financier, le ministre comprendrait. Toutefois, le mécanisme prévu ici dépasse la symbolique.
Une autre chose est de se demander quels sont les budgets que l'État est prêt à consacrer pour accompagner, dans les mois qui viennent, tout le débat et toute la sensibilisation nécessaire sur les objectifs du Millénaire.
Le ministre estime que le public a déjà fait des efforts de générosité très importants dans le cadre de l'action Tsunami. À son avis, il ne va pas comprendre cet effort purement symbolique de ramener des pièces sans valeur, l'État faisant un effort à due concurrence. Autant inscrire un montant budgétaire immédiatement.
Deuxièmement, pour ce qui concerne les bénéficiaires, le ministre est de plus en plus convaincu qu'il aurait été beaucoup plus efficace de considérer que ce montant serait inscrit à un poste budgétaire de l'État en matière de coopération au développement et que l'on décide, ensuite, de l'affecter selon des critères à définir, à toutes les associations concernées.
Le ministre fait observer qu'en l'espèce, un certain nombre de citoyens vont décider, en ramenant des pièces, combien tous les autres, en tant que contribuables, vont mettre à disposition de la Coopération au développement.
Toutefois, le ministre ne s'oppose pas à un amendement qui reverra encore le champ d'application. En termes de budget, il en parlera à ses collègues au contrôle budgétaire. Le ministre craint seulement que la campagne publicitaire risque de coûter plus cher que le rendement de l'opération.
Mme De Roeck déclare que les auteurs de la proposition initiale ne demandent pas au gouvernement de mener une campagne coûteuse. Il faut surtout veiller à sensibiliser les bonnes personnes. La Banque nationale a d'ailleurs déjà pris de nombreuses initiatives.
Réagissant au propos de M. Van Nieuwkerke, Mme De Roeck déclare regretter, elle aussi, la manière dont les choses se sont déroulées dans le présent dossier. Force est toutefois de constater que les organisations qui sont membres du consortium Tsunami 12-12 lancent elles aussi des signaux favorables au partage du produit des fonds qui sont versés sur leur compte avec d'autres organisations. C'est ainsi que l'organisation Médecins sans frontières a fait savoir qu'elle a reçu plus d'argent qu'il ne lui en faut pour financer l'aide d'urgence qu'elle pense pouvoir apporter dans la région sinistrée et qu'elle va consacrer le surplus à d'autres actions. Le monde politique ne peut ignorer ces signaux.
Mme De Roeck regrette que le Sénat ne puisse plus prolonger le délai. Elle estime qu'en raison de cela l'amendement principal à ses yeux est sans objet. Elle espère toutefois que la Chambre pourra encore prolonger le délai.
Selon le sénateur Galand, l'observation du ministre concernant le coût élevé de la campagne est d'une importance secondaire. Ce qui importe, ce sont les témoignages de soutien publics du ministre et du gouvernement aux efforts à accomplir en vue d'informer le grand public. L'intervenant espère bien entendu que la campagne permettra de récolter beaucoup d'argent, mais des expériences antérieures lui ont appris que le gouvernement ne doit pas craindre que la loi qui serait issue du projet adopté n'entraîne de lourds revers budgétaires a fortiori inattendus. Il souligne ensuite que le gouvernement s'est engagé à atteindre chaque année le seuil de 0,7 % et que tout effort est dès lors bienvenu. Enfin, il dit souscrire au point de vue de Mme De Roeck et souligne qu'il importe d'adopter rapidement le projet de loi en question et qu'il retire dès lors ses amendements.
M. Beke rappelle la genèse de la proposition de loi initiale qui a vu le jour à la demande d'associations et d'organisations qui souhaitaient pouvoir prolonger l'action Tsunami. On ne demande pas aux pouvoirs publics de lancer une nouvelle campagne coûteuse. Il est toutefois nécessaire d'adopter le projet de loi pour pouvoir donner aux associations l'indispensable sécurité juridique. C'est pour cette raison que l'intervenant ne s'oppose pas à ce que le champ d'application de la loi en projet soit étendu à l'opération 11.11.11. Il est en effet capital qu'un vote intervienne rapidement.
Mme Kapompolé se réjouit de la modification que la Chambre a apportée à la loi en projet et qui correspond à ce qu'elle-même avait voulu obtenir au moyen de son amendement nº 2. Elle souligne que son seul objectif était de faire en sorte que l'on s'intéresse non seulement aux victimes du tsunami, mais aussi aux victimes de bien d'autres fléaux.
M. Dedecker commente brièvement son amendement nº 6 (voir doc. Sénat nº 3-991/2). Il estime tout d'abord que l'amendement que la Chambre a adopté annihile l'objectif initial, qui était d'organiser une action visant uniquement à remédier aux conséquences du tsunami. Il reconnaît cependant que le versement de dons en faveur des victimes du tsunami influence à la baisse les dons en faveur de l'Afrique, mais estime que l'on ne peut pas résoudre ce problème en se contentant d'ajouter les partenaires de l'opération 11.11.11 à la liste des associations pouvant bénéficier de la loi en projet. Il propose dès lors de répartir le produit entre toutes les ONG.
M. Willems fait remarquer qu'il avait déjà attiré l'attention sur le risque de discrimination au cours du premier examen de la loi en projet. Malgré les circonstances particulières qui expliquent la genèse de la loi en projet, l'intervenant continue à mal ressentir le principe selon lequel le produit de l'action doit être réservé à un nombre limité d'organisations et d'associations.
Les sénateurs Beke, De Roeck et Collas disent comprendre le point de vue de M. Dedecker, mais soulignent qu'il faut voter rapidement le texte adopté par la Chambre si l'on veut encore parvenir à un résultat sur le terrain.
Le président fait remarquer qu'en vertu de l'article 79, dernier alinéa, de la Constitution, la Chambre peut encore amender le texte en vue de prolonger la période pendant laquelle il sera possible de remettre les pièces en francs belges.
Les amendements nºs 3 à 5 sont retirés.
L'amendement nº 4 à l'article 2 est adopté par 7 voix contre 5 et 1 abstention.
L'ensemble du projet de loi amendé a été adopté à l'unanimité des 13 membres présents.
Confiance a été faite aux rapporteurs pour un rapport oral.
Les rapporteurs, | Le président, |
Berni COLLAS.
Joëlle KAPOMPOLÉ. |
Jean-Marie DEDECKER. |
Texte adopté par la commission
(voir doc. Sénat, nº 3-991/10 - 2004/2005)