3-89

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Belgische Senaat

Handelingen

DINSDAG 21 DECEMBER 2004 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Vraag om uitleg van de heer François Roelants du Vivier aan de minister van Sociale Zaken en Volksgezondheid over «het opstellen van kwaliteitscriteria voor borstklinieken» (nr. 3-500)

M. François Roelants du Vivier (MR). - Le cancer du sein constitue la deuxième cause de mortalité par cancer chez la femme. Il est le cancer le plus fréquent chez la femme et constitue même la première cause de mortalité chez les femmes âgées de 35 à 55 ans.

Toutefois, le dépistage permet de réduire la mortalité de 30%, pour autant qu'il soit réalisé selon des critères de qualité. Selon l'OMS, le dépistage réduirait même de 35% la mortalité due au cancer du sein chez les femmes âgées de 50 à 69 ans.

La Belgique figure parmi les pays les plus touchés. En 2002, sur un total de 51.900 personnes concernées par le cancer en Belgique, 7.400 femmes souffraient d'un cancer du sein et, parmi celles-ci, 2.700 décéderont des suites de cette maladie.

Le dépistage systématique est désormais prévu tous les deux ans pour les femmes âgées de 50 à 69 ans et je m'efforce d'obtenir que l'on étende ce dépistage à la tranche d'âges de 40 à 50 ans. Cependant, il faut signaler qu'il n'est prévu jusqu'à présent aucune norme de qualité en matière de prise en charge du cancer du sein.

Or, pour qu'un traitement soit efficace, il faut qu'il soit accompli par des médecins spécialisés mais également dans une structure répondant à certains critères et selon une approche multidisciplinaire. C'est à ce titre qu'on relèvera toute l'importance des cliniques du sein car, selon le docteur Liebens, présidente d'Europa Donna Belgium, « le cancer du sein est un exemple typique de prise en charge qui nécessite une approche pluridisciplinaire complexe et hautement spécialisée ».

Il est donc essentiel de prévoir des normes spécifiques pour les cliniques du sein. En effet, l'origine de ces cliniques date du début des années 90 où de nombreuses études ont démontré que lorsque les femmes étaient traitées par un chirurgien qui travaillait dans une équipe multidisciplinaire, elles avaient une meilleure survie et une meilleure qualité de vie que celles qui étaient opérées par un « simple » chirurgien.

Cela s'expliquait entre autres par le fait que dans une clinique du sein, tous les experts sont présents et coopèrent. Ces médecins spécialisés ont en effet, à côté de leur spécialité et de leur formation générale, une formation accessoire en matière d'affection du sein. Cela concerna aussi bien les radiologues que les chirurgiens, les gynécologues, etc. Ainsi, à côté de leur aptitude spécifique technique, ils disposent également d'une grande connaissance dans les traitements spécialisés, qui sont importants dans le cadre du cancer du sein.

De plus, l'évolution rapide dans les techniques de diagnostic, traitement, accompagnement psychologique, etc. exige une formation continue de ces experts.

Enfin, lorsque ces experts travaillent ensemble dans un même lieu et quand ils appliquent par patient une approche multidisciplinaire dans le cadre du traitement, le patient a toutes les chances d'être traité de façon optimale, selon les méthodes de traitement les plus récentes.

L'ensemble de ces arguments démontre bien toute l'importance des cliniques du sein, dans le cadre du traitement du cancer du sein.

Cela rejoint les préoccupations d'Europa Donna, dont la présidente estime que « la prise en charge d'une femme touchée par un cancer du sein requiert des outils diagnostiques et thérapeutiques complexes, spécifiques et continuellement en évolution. D'abord, pour en faire le diagnostic, une technologie de pointe et très sophistiquée est requise. Les indications thérapeutiques sont complexes et évoluent sans cesse tant au niveau de la chirurgie que sur le plan du traitement adjuvant : chimiothérapie, hormonothérapie, radiothérapie... »

Mais qu'en est-il en Belgique ?

Le 21 mars 2003, un arrêté royal fixant les normes auxquelles le programme de soins de base en oncologie et le programme de soins d'oncologie doivent répondre pour être agréés a été adopté. Il constitue la première initiative belge visant à réglementer et organiser les soins aux patients atteints du cancer, ce qui est tout à fait remarquable.

Cet arrêté a pour objectif d'améliorer la qualité des soins et de renforcer le caractère pluridisciplinaire de la prise en charge.

Il prévoit notamment des règles relatives à l'encadrement requis, qu'il soit médical ou non.

De plus, toujours selon le docteur Liebens, « pour garantir le caractère pluridisciplinaire de la prise en charge du patient, une mesure parmi d'autres sera l'organisation d'une réunion pluridisciplinaire relative au patient individuel entre ses différents médecins afin d'établir les meilleurs traitements et le suivi ».

En outre, l'arrêté prévoit la création d'une commission pluridisciplinaire d'oncologie qui devra être mise en place pour chaque hôpital et qui disposera d'un programme de soins d'oncologie en vue d'assurer des soins de qualité pour tout patient oncologique.

Bien que cet arrêté royal soit une première dans le domaine oncologique, il est bien trop général et ne s'applique qu'en partie au cancer du sein, lequel nécessite des soins spécialisés. À ce titre, l'arrêté royal précité prévoit : « Il conviendra de développer à l'avenir un certain nombre de programmes de soins spécialisés destinés aux patients atteints de tumeur qui nécessitent une approche pluridisciplinaire complexe et/ou une expertise hautement spécialisée ».

Or, justement, le cancer du sein nécessite une approche pluridisciplinaire complexe et hautement spécialisée.

Et actuellement en Belgique, « tout chirurgien ou gynécologue peut traiter un cancer du sein, qu'il ait suivi une formation spécifique ou non », bien qu'il existe quelques centres multidisciplinaires. Ceux-ci restent toutefois rares.

Cette situation est bien évidemment dommageable, car, comme je viens de le dire, la prise en charge d'une femme atteinte d'un cancer du sein doit pouvoir disposer « d'outils diagnostiques et thérapeutiques complexes, spécifiques et continuellement en évolution ».

C'est à ce titre que l'instauration de cliniques du sein répondant à certains critères de qualité doit être décidée.

En effet, non seulement la résolution de 2003 du Parlement européen énonce que les cliniques du sein constituent une priorité dans la lutte contre le cancer du sein mais il existe également des recommandations scientifiques européennes sur le concept de clinique du sein, par exemple celle de la European Society of Mastology.

Que prévoient-elles ? Les objectifs de ces recommandations sont les suivants :

1. Mettre à la disposition de toutes les femmes en Europe un service spécialisé du sein, de première qualité.

2. Définir les critères d'un tel service ;

3. Recommander la mise en place de moyens d'accréditation et de surveillance des cliniques du sein de façon à ce que ces unités soient toujours reconnaissables pour les patients et les acheteurs en tant que service de haute qualité.

C'est ce qu'on peut lire dans le European Journal of Cancer nº 36.

Il semble qu'il y ait eu, voici quelque temps, une volonté politique de réglementer les cliniques du sein et on a l'impression que ce projet ne figure plus parmi les priorités.

Par conséquent, je voudrais savoir, monsieur le ministre, si vous envisagez d'établir, pour les cliniques du sein en Belgique, des normes de qualité axées sur l'organisation pluridisciplinaire, sur le contrôle de la qualité des soins, et inspirées des recommandations européennes en la matière ?

Dans la négative, pourriez-vous m'expliquer ce qui vous amène à rejeter cette idée qui me semble pourtant importante à la fois pour la santé publique et pour les femmes atteintes de cette maladie ?

M. Rudy Demotte, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique. - Je vous remercie de me donner l'occasion de revenir sur ce sujet qui me tient particulièrement à coeur.

Il entre clairement dans mon intention de revoir les normes de programmation en matière de soins oncologiques qui définissent, entre autres, la prise en charge des néoplasies mammaires dans le cadre de l'organisation des soins dans notre pays. Nous devons en outre nous pencher sur les trajets de soins oncologiques. C'est la raison pour laquelle l'arrêté auquel vous venez de faire allusion avait une portée plus générale.

Les propos de la présidente de « Europa Donna » que vous avez épinglés rejoignent nos préoccupations en matière de trajets de soins. Pour pouvoir intervenir efficacement, il faut que les pouvoirs publics réalisent le meilleur maillage possible. Cela évitera des problèmes de perte de temps, de compétences relatives. Il faut apporter une réponse adéquate à la prise en charge des cancers, et singulièrement, des cancers pointus qui requièrent une bonne maîtrise technologique. Il s'agit là d'un enjeu majeur de santé publique.

Je suis intimement persuadé que les programmes de soins multidisciplinaires garantissent des soins de qualité. Le côté multidisciplinaire ne doit donc pas seulement mettre exergue un mot qui, souvent, ressemble à l'arbre qui cache la forêt. Le côté multidisciplinaire est ici la condition sine qua non de la réussite du maillage à mettre en place.

Des membres de mon équipe ont d'ailleurs récemment rencontré des représentants de « Europa Donna » pour évoquer ce sujet. Dans le cadre des pourparlers d'experts qui se déroulent actuellement, nous avons l'intention de faire un « fine tuning », une analyse beaucoup plus fine des dispositions concrètes à réaliser.

À cette occasion, nous allons aborder un certain nombre de questions qui ont trait à la chirurgie pointue dans le cadre du cancer du sein, tout en gardant en tête la fréquence de cette maladie - une femme sur neuf en sera atteinte. Il est donc essentiel de disposer de traitements et d'organiser des dépistages efficaces et accessibles au plus grand nombre.

En effet, aborder maintenant la question sous ce seul angle de la chirurgie pointue serait extrêmement réducteur. Vos propos ne laissent pas apparaître que vous y songiez. Aujourd'hui, nous précisons les indications relatives aux prises en charge chirurgicales pointues et à celles, plus courantes, que des équipes de chirurgiens ou de gynécologues formés pourraient effectuer non seulement en toute sécurité, mais aussi sur la base de principes de qualité. Ceux-ci constituent les balises nécessaires pour les réponses les plus efficaces possible. Bien entendu, nous rechercherons également des modèles, des exemples organisationnels des soins à l'étranger. Les recommandations sur le sujet nous serviront de points d'appui, non seulement pour cette discussion, mais aussi pour l'ensemble des circuits de soins et des logiques de programmation y afférentes.

J'espère que vous comprenez bien que je n'ai pas voulu fournir une réponse rapide à vos questions pour une raison d'ordre politique. En d'autres termes, je ne remets pas aux calendes grecques ces matières préoccupantes. Au contraire, de concert avec les spécialistes - je me rends régulièrement à des colloques sur ces thèmes - je veux faire en sorte que, pour trouver des réponses à ces pathologies nécessitant des traitements extrêmement pointus, nous ne laissions aucune place à l'improvisation.

M. François Roelants du Vivier (MR). - Je mesure le double engagement du ministre. D'une part, il est très préoccupé par la question dont nous débattons. Je le sens à travers la conviction qu'il exprime. D'autre part, il s'engage à consulter les spécialistes. Je resterai donc très attentif à ce qu'il va faire mais je pourrai déjà faire savoir au secteur que, bien entendu, ce problème continue à être traité à bras-le-corps par le ministre de la Santé publique.