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1er JUILLET 2004
Le cancer est un véritable fléau.
En effet, il constitue à l'heure actuelle, une des causes de mortalité les plus répandues en Europe. Pour être plus précis, il y constitue même la deuxième cause de mortalité (1). Au sein de l'Union européenne, on estime qu'environ un quart des décès serait dû à un cancer. D'ailleurs, concernant les décès dits « prématurés », c'est-à-dire ceux qui touchent les moins de 65 ans, le cancer est la première cause de mortalité, au sein des quinze pays actuels de l'Union européenne (2).
Bien entendu, ces chiffres ainsi relevés dans une étude publiée au Bulletin épidémiologique hebdomadaire relative à la surveillance du cancer, comprennent toutes les sortes de cancer.
Mais en ce qui concerne la problématique du cancer du sein, l'étude relève qu'un décès sur cinq serait dû à cette maladie chez les femmes (3).
Pour donner quelques chiffres, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Centre international de recherche sur le cancer, relèvent qu'en 2000, 216 000 femmes dans l'Union européenne ont été atteintes d'un cancer du sein et plus de 79 000 d'entre elles sont décédées faisant de cette maladie, la première cause de mortalité chez les femmes de 35 à 55 ans (4).
Actuellement en Belgique, environ 30 000 à 40 000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués par an (5).
La Belgique est d'ailleurs un des pays de l'Union européenne les plus touchés (6).
Concernant le cancer du sein, on estime qu'en Belgique, 5 000 nouveaux cas sont enregistrès chaque année, une femme sur douze sera atteinte de cette maladie au cours de sa vie et une femme sur vingt décèdera des suites de celle-ci (7).
Bien entendu, à l'heure actuelle, le taux de décès lié au cancer du sein, grâce aux dépistages systématiques de plus en plus fréquents, a été considérablement réduit. Selon l'OMS, ce dépistage ainsi pratiqué réduirait de 35 % la mortalité liée au cancer du sein chez les femmes âgées de 50 à 69 ans et de 20 % chez les femmes âgées de 40 à 49 ans (8).
Pour cela, la plupart des pays de l'Union proposent un dépistage pour les femmes âgées de 50 à 69 ans (9) car la maladie est curable à 90 % des cas moyennant un dépistage précoce et des soins de qualité (10).
C'est notamment le cas de la Belgique qui dispose d'un programme national en la matière.
Ce dépistage est essentiel, car plus tôt la maladie est détectée, plus grandes sont les chances de guérison. D'ailleurs, en médecine « le dépistage d'une affection ne se justifie que si le traitement est plus efficace lorsqu'il est administré avant l'apparition de symptômes » (11).
En 2000, un protocole d'accord signé entre l'État fédéral et les Communautés a mis en place un dépistage du cancer du sein par mammographie pour les femmes de 50 à 69 ans. Ce système s'inspirait du programme communautaire « L'Europe contre le cancer » et prévoyait un dépistage (mammographie) gratuit tous les deux ans pour les femmes appartenant à la tranche d'âge visée.
Le choix de la tranche d'âge concernant ce « screening » de masse a été justifié par des considérations épidémiologiques et d'efficience, c'est-à-dire le meilleur rapport efficacité/coût (12).
L'instauration d'un tel dépistage de masse est tout à fait louable, mais le fait qu'il ne vise que la tranche d'âge des 50-69 ans est problématique.
En effet, il faut savoir que près de 30 % des cancers du sein se manifestent avant 50 ans et que la majorité de ceux-ci surviennent entre 40 et 50 ans (13).
De nombreuses études qui ont été publiées dans les meilleures revues médicales et ce dans le monde entier, ont été réalisées à ce sujet (Suède, États-Unis, France, Belgique, Pays-Bas, ...). Elles remettaient en cause la tranche d'âge choisie dans le cadre du dépistage systématique du cancer du sein, confirmant ainsi la justification du dépistage de masse dès l'âge de 40 ans.
Le 5 juin 2003, le Parlement européen a adopté une résolution sur le cancer du sein. Celle-ci invitait entre autre « les États membres et la Commission à faire de la lutte contre le cancer du sein une priorité en matière de politique de la santé, et à développer et mettre en oeuvre des stratégies efficaces en vue d'améliorer la prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement et le suivi de cette maladie, à l'effet d'assurer des soins de meilleure qualité sur tout le territoire de l'Union » (14).
Dès lors, il convient d'instaurer un dépistage de masse systématique pour les femmes âgées de 40 à 49 ans, afin de faire en sorte que le cancer du sein ne soit plus une fatalité pour certaines femmes.
François ROELANTS du VIVIER. |
Le Sénat,
A. vu la résolution du Parlement européen du 5 juin 2003 sur le cancer du sein;
B. vu les recommandations de l'« American Cancer Society » et du « National Cancer Institute »;
C. vu l'évolution des technologies dans le domaine de la cancérologie;
D. considérant que la prévention du cancer du sein doit être une priorité dans le cadre de la politique de santé publique;
E. considérant que le cancer constitue toujours la deuxième cause de mortalité en Europe et qu'il constitue même la première cause de mortalité chez les femmes âgées de 35 à 55 ans;
F. considérant qu'en Belgique environ 30 000 à 40 000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués chaque année et que parmi ceux-ci, 5 000 nouveaux cas de cancer du sein sont répertoriés;
G. considérant qu'une femme sur douze sera atteinte de cette maladie au cours de sa vie et qu'une femme sur vingt décèdera des suites d'un cancer du sein;
H. considérant que le dépistage est essentiel car plus tôt la maladie est détectée, plus grandes sont les chances de guérison;
I. considérant que le dépistage réduirait de 35 % la mortalité liée au cancer du sein chez les femmes âgées de 50 à 69 ans, et de 20 % chez les femmes âgées de 40 à 49 ans. La maladie étant curable dans 90 % des cas moyennant un dépistage précoce et des soins de qualité;
J. se félicitant du Protocole d'accord de 2000 signé entre l'État fédéral et les communautés instaurant un dépistage systématique du cancer du sein par mammographie chez les femmes âgées de 50 à 69 ans, conformément au programme communautaire « L'Europe contre le cancer »;
K. vu les nombreuses études scientifiques provenant de nombreux pays à la pointe de la science concernant la problématique du cancer du sein et plaidant en faveur de la mise en place d'un dépistage systématique chez les femmes dès l'âge de quarante ans;
L. considérant que 30 % des cancers du sein se manifestent avant l'âge de 50 ans et que la majorité de ceux-ci surviennent entre 40 et 50 ans;
M. considérant que bien que l'incidence du cancer du sein augmente avec l'âge, le nombre absolu soit l'incidence multipliée par le nombre de femmes de cet âge de cancer du sein pour les femmes âgées de 40 à 49 ans est plus élevé parce que le nombre de femmes appartenant à cette catégorie est plus important;
N. considérant qu'il n'y a pas de différence anatomo-clinique entre le cancer du sein chez les femmes de 40 à 49 ans et celui des femmes plus âgées et que par conséquent un dépistage adapté permettrait de réduire la mortalité de façon identique;
O. considérant que seule l'organisation d'un dépistage de masse permet de toucher toutes les couches sociales et d'éviter ainsi des inégalités en matière d'accès au soins de santé,
demande au gouvernement :
1. de conclure un accord avec les communautés en vue de mettre en place un dépistage systématique chez les femmes âgées de 40 à 49 ans à l'instar de ce qui est actuellement prévu pour les femmes appartenant à la tranche des 50-69 ans. À titre subsidiaire : de décaler le créneau actuel aux 45-65 ou 45-69 ans en se basant sur un taux de fréquentation diminuant avec l'âge.
2. de suivre de près les nouvelles données épidémiologiques ainsi que l'évolution des technologies en la matière.
3. de participer activement aux actions menées au sein de l'Union européenne concernant la problématique du cancer du sein en vue de réduire le taux de mortalité dû à cette maladie.
4. de conclure un accord avec les communautés en vue de renforcer à tout le moins, l'efficacité du dépistage prévu pour les femmes âgées de 50 à 69 ans en demandant aux communautés d'intensifier leur action à cet effet.
5. de faire rapport chaque année, au Parlement sur la situation du dépistage de masse du cancer du sein.
10 mai 2004.
François ROELANTS du VIVIER. |
(1) Françoise Meunier, « L'EORTC et la recherche clinique en cancérologie en Europe », newsletter d'Europa Donna Belgium, nº 1, 2003, p. 3.
(2) Conclusions d'une étude publiée dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH), nº 41-42, du 21 octobre 2003; Le Monde du 21 octobre 2003.
(3) BEH nº 41-42/2003, p. 198.
(4) Rapport du Parlement européen du 7 mai 2003 sur le cancer du sein dans l'Union européenne, A5-0159/2003 P.E. 323 538, p. 13.
(5) Françoise Meunier, op.cit., p. 3.
(6) Source OMS in La Libre Belgique du 6 juin 2003.
(7) Anne Vandenbroucke, « Programme de dépistage du cancer du sein », Symposium National du 16 octobre 2001 organisé par la Fédération Belge contre le Cancer, p. 40.
(8) Rapport du Parlement européen du 7 mai 2003 sur le cancer du sein dans l'Union européenne, A5-0159/2003, p. 7.
(9) Rapport du Parlement européen du 7 mai 2003 sur le cancer du sein dans l'Union européenne, PE 323 538, p. 16.
(10) Rapport du Parlement européen du 7 mai 2003 sur le cancer du sein dans l'Union européenne, PE 323 538, p. 7.
(11) Anne Vanden Broucke, « Dépistages », newsletter de Europa Donna Belgium, nº 1, 2003, p. 6.
(12) Réponse de Franck Vandenbroucke à la demande d'explications de Monsieur Roelants du Vivier sur « la tranche d'âge retenue pour le dépistage systématique de masse du cancer du sein », doc. nº 2-346.
(13) Dr. Éric Lifrange, Pr. Claude Colin, Pr. Jean-Michel Foidart, « Y a-t-il un dépistage à proposer avant 50 ans ou après 70 ans ? », Medi Sphere, octobre 2003, p. 16.
(14) A5-0159/2003, point 1.