3-137/6

3-137/6

Sénat de Belgique

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2003

30 JUILLET 2003


Projet de loi-programme (Articles 32, 37 et 40)


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE L'INTÉRIEUR ET DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES PAR MME THIJS


I. INTRODUCTION

Le présent projet de loi a été adopté par la Chambre des représentants et transmis au Sénat le 29 juillet 2003. Le Sénat a évoqué le projet le 30 juillet 2003.

Les articles 32, 37 et 40 ont été envoyés à la commission de l'Intérieur et des Affaires administratives.

En application de l'article 27.1 du règlement du Sénat, la commission a entamé l'examen du texte avant le vote final à la Chambre.

La commission a consacré deux réunions à la discussion des articles, à savoir les 29 et 30 juillet 2003.

II. ARTICLES 32, 37 ET 40

1. Article 32

1. Exposé introductif de Mme Marie Arena, ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale et de la Politique des grandes villes

Cet article vise à prolonger une dérogation à la loi sur la protection de la vie privée. Cette dérogation avait en effet été prévue pour que Child Focus puisse mener une convention qui avait été élaborée avec le gouvernement pour le suivi des mineurs non accompagnés dans les centres pour demandeurs d'asile.

Child Focus a un léger retard dans son étude de cette problématique et l'article vise simplement à prolonger le délai de la dérogation de quelques mois.

2. Article 37

1. Exposé introductif de M. Patrick Dewael, vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur

L'accord de gouvernement prévoit une amélioration du service fourni au citoyen. Pour 2007, l'usage de la carte d'identité électronique doit être généralisé, sans surcoût pour les communes.

La décision de généraliser la carte d'identité électronique en l'espace de trois ans au lieu de cinq ans suppose toutefois une augmentation de l'effectif de personnel des communes, étant donné l'augmentation du volume de travail.

Le gouvernement a donc décidé de développer une synergie entre La Poste et les communes en vue d'accélérer la délivrance des cartes d'identité électroniques. La Poste devrait être le partenaire idéal pour effectuer cette mission aux côtés des communes. La Poste fait déjà actuellement office de maillon entre les autorités et les citoyens pour un grand nombre de transactions. Elle possède en outre sur l'ensemble du territoire un réseau de bureaux et une présence dans chaque commune. Elle remplit aussi déjà actuellement une mission de confiance (distribution du courrier, service postaux financiers, etc.).

Afin de permettre aux communes de déléguer la délivrance des cartes d'identité, une base juridique est toutefois indispensable. À cet effet, il est proposé de modifier l'article 6, § 1er, de la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population et aux cartes d'identité et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un registre national des personnes physiques.

Les modalités de ce régime de délégation seront fixées par le Roi.

Il y a lieu de souligner que c'est dans le cadre de son pouvoir de décision autonome que la commune choisit de faire appel ou non à La Poste pour distribuer les cartes d'identité.

Pour ce qui est de la délivrance des cartes d'identité, La Poste aura accès, comme les communes, au registre national des personnes physiques et au registre des cartes d'identité et elle pourra utiliser les numéros d'identification du régistre national.

L'on a donc tenu compte de l'observation du Conseil d'État au sujet de la limitation de l'accès de La Poste au registre national, accès qui est nécessaire en vue de la distribution des cartes d'identité.

La Poste sera rémunérée pour les services qu'elle fournira. Les modalités de la rémunération seront fixées par un arrêté royal qui prévoira in fine la conclusion d'une convention entre l'État belge et La Poste.

Pour répondre à l'observation du Conseil d'État au sujet de l'article 6, § 2, de la loi précitée du 19 juillet 1991, l'on a prévu au § 2, alinéa 1er, que le délégué de La Poste qui délivre la carte d'identité doit également apposer sa signature.

2. Discussion générale

M. Roelants du Vivier estime qu'il appartient aux communes de décider si elles veulent faire appel à La Poste pour délivrer des cartes d'identité. L'aide financière aux communes qui n'ont pas recours à cette possibilité n'a pas encore été réglée par le gouvernement. Cependant, le problème de l'information du citoyen se pose et le membre souhaite savoir comment le gouvernement entend répondre à cette préoccupation.

Mme Bouarfa demande si l'accès de La Poste aux données du Registre national des personnes physiques ne constitue pas une violation de la vie privée. Elle souhaite savoir si la carte d'identité électronique et les données qui y figurent ne portent pas atteinte à la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel.

Le membre voudrait savoir si le régime des cartes d'identité éléctroniques sera également appliqué aux ressortissants européens et aux citoyens étrangers non naturalisés, établis en Belgique.

M. Brotcorne demande que le ministre explique l'intérêt pour le citoyen que La Poste délivre sa carte d'identité. Est-ce que La Poste se limitera à la délivrance de la carte d'identité électronique ou est-ce qu'elle se chargera également de la délivrance des cartes d'identité telles qu'elles existent à l'heure actuelle.

L'orateur souhaite savoir si, lorsque la commune a décidé de faire appel à La Poste pour la délivrance des cartes d'identité électroniques, le citoyen garde la possibilité de se présenter aux services de la commune pour cette carte d'identité. Est-ce que le choix de la commune sera exclusif ou cumulatif à cet égard.

L'intervenant demande si La Poste sera tenue à un délai différent de celui de l'administration communale pour délivrer la carte d'identité électronique.

L'orateur fait remarquer que La Poste recevra du gouvernement fédéral une rémunération pour ses nouvelles missions, tandis que la commune remplit cette tâche depuis toujours sans aucune contrepartie financière. Le membre estime que ceci constitue une discrimination à l'égard de la commune.

M. Siquet rappelle que la demande d'une carte d'identité est soumise à l'autorisation du Registre national des personnes physiques. Il n'appartient ni à la commune ni à La Poste de décider en la matière.

Mme Thijs note que l'une des missions principales de la commune consiste à tenir à jour les registres de la population. La délivrance des cartes d'identité en fait partie. Si cette mission est dorénavant confiée à La Poste, le citoyen devra en être dûment informé. C'est d'autant plus vrai que la commune décidera elle-même si elle entend confier cette mission à La Poste.

La membre fait remarquer que La Poste, dont la privatisation pourrait se poursuive, aura accès, par cette délégation, à des bases de données, que d'autres entreprises concurrentes n'ont pas le droit de consulter.

L'intervenante estime qu'en vertu de la loi du 25 mars 2003 relative aux cartes d'identité, les pouvoirs publics fédéraux sont tenus de supporter les coûts d'enregistrement du certificat d'identité et de signature.

La membre renvoie à l'article 6, § 8, de la loi du 19 juillet 1991, modifié par la loi du 25 mars 2003, relative aux registres de la population et aux cartes d'identité et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un registre national des personnes physiques. Celui-ci dispose que les frais de fabrication des cartes d'identité sont récupérés par le ministre de l'Intérieur par voie de prélèvements d'office sur le compte ouvert au nom des communes auprès d'une institution de crédit qui, selon le cas, remplit les conditions fixées aux articles 7, 65 ou 66, de la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit.

La membre voudrait savoir si la commune qui a accordé la délégation doit supporter elle-même les frais ou si les pouvoirs publics fédéraux avanceront les fonds pour les récupérer ultérieurement auprès des communes. La membre estime que les ministres de l'Intérieur et des Entreprises publiques doivent clarifier cette question.

L'intervenante voudrait savoir si les services de La Poste, qui peuvent consulter les données du Registre national, seront aussi inclus dans le système de contrôle comme c'est le cas de nombre d'autres organismes. Elle demande pourquoi on n'a pas demandé l'avis de la Commission de la protection de la vie privée à ce sujet.

La membre est d'avis qu'il serait préférable d'attendre avant d'adopter l'article 37 du projet de loi à l'examen que les projets-pilotes en matière de cartes d'identité électroniques aient fait l'objet d'une évaluation.

Elle déplore qu'à l'occasion de ces projets, aucune donnée biométrique n'ait été intégrée dans les cartes d'identité électroniques. Pourtant, la Belgique sera tenue de les inclure dès 2007 dans le cadre de l'Union européenne.

Mme Pehlivan estime que les grandes communes allégeront leur charge de travail grâce à cette délégation. Elle demande si les petites communes qui ne délégueront pas seront indemnisées par les pouvoirs publics fédéraux.

M. Buysse estime qu'il faut attendre que les résultats des projets pilotes soient connus avant d'adopter l'article 37 du projet de loi. Les agents pourraient se rendre au domicile des citoyens qui ne sont pas en mesure de se déplacer. Enfin, il demande si la carte d'identité électronique est sécurisée pour éviter les abus.

3. Répliques du vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur

Le ministre constate que certaines des questions posées par les membres sont prématurées. Il importe de souligner que l'article à l'examen vise uniquement et simplement à créer la base juridique nécessaire, à partir de laquelle une convention pourra être conclue avec La Poste. Les villes et les communes pourront alors choisir si elles souhaitent ou non faire usage de cette option.

La question est devenue passablement urgente parce que l'accord de gouvernement prévoit d'accélérer l'introduction de la carte d'identité électronique. C'est la raison pour laquelle on a procédé par le biais d'une loi-programme.

Initialement, on avait en effet prévu un délai de 5 ans pour l'introduction de ces cartes d'identité électroniques, mais il a été ramené à 3 ans.

Il faudra, pendant ce même délai, évaluer les 11 projets pilotes en cours.

Quant au bénéfice qu'en retirera le citoyen, la question devra faire l'objet d'une évaluation avec le ministre des entreprises publiques.

Pourquoi a-t-on choisi La Poste ? La Poste dispose d'environ 750 bureaux dans notre pays. Grand nombre de ces bureaux sont ouverts le samedi.

L'accord de gouvernement stipule également explicitement que le rôle social du facteur doit être réaffirmé. Pour nombre de personnes âgées, le facteur remplit une véritable mission de confiance. Tels sont les avantages importants qu'offre La Poste.

En outre, il ne faut pas oublier qu'à l'avenir, on devra débattre du rôle de La Poste en tant que telle. Le rôle classique de La Poste est de plus en plus menacé, tandis qu'elle dispose d'un certain nombre de personnels qui seraient en mesure de remplir cette tâche.

À défaut de faire appel à La Poste, on pourrait demander aux communes d'accélérer la délivrance des cartes d'identité et cela les contraindrait à engager du personnel supplémentaire dont le surcoût devrait être financé par le fédéral.

Le but de l'article proposé est donc simplement de créer la base juridique de cette délégation, mais l'exécution comme telle se fera par un arrêté royal d'ici à la fin de l'année 2003. Un débat approfondi pourra alors être mené sur les modalités concrètes du système, sur ses avantages, son coût, etc.

Il est clair également qu'il faudra accorder un incitant financier aux villes et communes pour qu'elles optent pour la délégation à La Poste.

Lors de la phase précédente de modernisation des cartes d'identité, 1 300 fonctionnaires supplémentaires ont du être engagés. Il est clair que cela représente un coût. Le gouvernement préfère éviter que le problème ne se pose à nouveau et suggère donc l'intervention de La Poste.

L'avis de la Commission de la protection de la vie privée n'a pas encore été demandé parce que le ministre souhaite attendre tout d'abord la concrétisation du principe dans un arrêté.

Concernant la problématique des étrangers, européens ou non, des pourparlers sont actuellement en cours avec l'Office des étrangers. L'idée est d'inclure les cartes bleues (valables 5 ans pour le ressortissant européen) et les cartes jaunes (valables 5 ans pour le citoyen non européen) dans le projet des 11 communes pilotes. Les cartes à validité réduite, c'est-à-dire moins de 5 ans, posent un problème de faisabilité au niveau des coûts, entre autres.

Le ministre insiste sur le fait que le gouvernement ne souhaite rien imposer aux villes ni aux communes. Il n'entre donc certainement pas dans ses intentions de restreindre l'autonomie communale. Les communes décideront elles-mêmes de la délégation à faire à La Poste.

Le ministre se dit au contraire particulièrement attaché au principe de l'autonomie communale. Il serait d'ailleurs opportun de prévoir l'élaboration systématique d'un rapport d'impact préalable dès lors que le fédéral prend des mesures ayant des conséquences financières sur le pouvoir communal.

Ces pratiques existent déjà au niveau flamand : chaque fois qu'un gouvernement ou une instance prend des mesures ayant un impact financier sur les communes, le coût en est calculé préalablement. Un amendement en ce sens a été déposé et été adopté à la Chambre.

L'organisation concrète des modalités devra faire l'objet d'une négociation contractuelle avec La Poste, mais il appartiendra également à chaque commune de vérifier le caractère opérationnel de la mesure.

Mme Thijs constate que, pour l'essentiel, la mesure est évoquée au conditionnel. Mais ne vaudrait-il pas mieux procéder avant tout à une évaluation des projets pilotes, plutôt que de voter cette mesure à la hâte dans le cadre d'une loi-programme ? Le ministre a-t-il déjà une idée de la ville qui exécutera le projet pilote la première ?

L'intervenante a l'impression que l'on met la charrue avant les boeufs, alors qu'il faudrait mener un débat approfondi sur les entreprises publiques et le service universel. Ne serait-il pas opportun d'avoir ce débat sereinement à l'automne ?

Le ministre estime au contraire qu'il importe d'anticiper en l'espèce. La période d'introduction de la carte d'identité électronique a été ramenée à 3 ans. Compte tenu des difficultés auxquelles de nombreuses communes ont à faire face, on en est arrivé à l'idée que, à l'avenir, La Poste pourrait devenir un partenaire pour créer une situation de type « win-win ». Elle dispose d'un potentiel en personnel susceptible d'être affecté à cet objectif.

Reporter la discussion à l'automne n'aurait aucun sens, car cela ne ferait que déplacer le problème.

Onze projets pilotes feront l'objet d'une évaluation avant la fin de l'année.

Mme Geerts tient à souligner qu'aux cours des dernières années, la commune où elle réside a également conclu des accords avec La Poste en vue de confier à celle-ci un certain nombre de tâches subsidiaires. Cette collaboration s'est très bien déroulée.

L'intervenante souhaite savoir à quel stade le ministre prévoit de recueillir l'avis de l'Union flamande des Villes et Communes.

Le ministre répond que cet avis sera recueilli lors de la phase suivante. Il est essentiel que les villes et communes du pays soient associées très rapidement à ce projet par l'intermédiaire de leurs organes représentatifs.

3. Article 40

Exposé introductif de Mme Marie Arena, ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale et de la Politique des grandes villes

L'accord du gouvernement prévoit que la réforme Copernic sera réorientée pour plus d'efficacité. Il prévoit aussi que les membres du gouvernement disposent, en marge du soutien fourni par l'administration, d'un secrétariat personnel et d'une cellule stratégique (par compétence fonctionnelle).

Copernic soumettait la cellule stratégique, alors considérée comme une excroissance de l'administration, à une procédure de recrutement organisée par le Selor et aux lois linguistiques.

Cette vision des choses a été revue par le gouvernement actuel dans un souci de bon fonctionnement des équipes ministérielles.

C'est pourquoi le gouvernement propose d'exclure les cellules stratégiques du champ d'application des lois linguistiques. Les personnes seront en effet choisies par le ministre sur base de leur expertise et de leur capacité à guider efficacement la politique du ministre.

Par ailleurs, il est évident que chaque ministre prendra soin de s'entourer des meilleures ressources (francophones, néerlandophones ou germanophones).

À titre d'exemple, alors que les équipes ne sont pas encore entièrement constituées, la ministre compte parmi ses collaborateurs un nombre important de néerlandophones. Il en va de même pour ses collègues flamands qui se sont entourés, eux aussi, de francophones mais qui sont avant tout des experts dans leur matière.

III. DISCUSSION DES AMENDEMENTS ET VOTES

Article 37

Mme Thijs dépose l'amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 3-137/2) qui vise à supprimer au 1º, dans l'alinéa 1er proposé, la deuxième phrase et les points 1º à 3º.

Cet amendement se justifie par la volonté de faire en sorte que les communes demeurent responsables de l'émission des cartes d'identité.

Mme Thijs dépose l'amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 3-137/2) qui vise à remplacer, dans l'alinéa 1er du texte proposé sous le 1º, le mot « délivrance » par le mot « remise ».

Par cet amendement, l'auteur entend faire en sorte que l'émission des cartes d'identité reste une mission centrale des communes.

Le vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur déclare que pareils amendements ont également été déposés à la commission compétente de la Chambre. Il renvoie aux réponses qu'il a formulées devant cette commission (doc. Chambre nº 51 0102/010, pp. 10 et 11) et demande aux membres de la commission de rejeter les deux amendements.

L'amendement nº 21 de Mme Thijs est rejeté par 9 voix contre 3.

L'amendement nº 22 de Mme Thijs est rejeté par 9 voix contre 3.

M. Verreycken souhaite que le vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur lui donne davantage d'informations sur la sécurisation des cartes d'identité électroniques. L'enquête de la Commission du suivi « Criminalité organisée », menée au cours de la législature précédente, a appris à l'intervenant que les acteurs de la criminalité organisée s'intéressent de près à tous les supports d'informations électroniques, tels que les cartes bancaires et les cartes de crédit. On va y ajouter maintenant des cartes d'identité électroniques. Étant donné que par le passé, on a commis de nombreux cambriolages dans les hôtels de ville en vue de voler des cartes d'identité vierges, M. Verreycken estime qu'il faudra soumettre les nouveaux supports vierges de cartes d'identité électroniques à une surveillance renforcée. Précédemment, les communes ont été obligées de sécuriser davantage leurs hôtels de ville contre pareils cambriolages. L'intervenant souhaite que le vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur lui dise si on obligera également les bureaux de poste à effectuer pareils investissements dans la sécurité.

Le vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur reconnaît qu'il faudra prendre les mesures de sécurité supplémentaires pour protéger les bureaux de poste. En outre, il n'y a aucune raison de penser qu'on ne pourrait pas introduire dans les bureaux de poste les mêmes mesures de sécurité que celles qui sont applicables aux centres administratifs des communes.

De plus, il attire l'attention sur le fait que les cartes d'identité destinées aux Belges sont dès à présent fabriquées de manière centralisée. En d'autres termes, les centres administratifs des communes ne disposent pas de documents vierges. Il existe toutefois encore des documents vierges pour les cartes d'identité destinées aux non-Belges, qu'ils soient ressortissants de l'Union européenne ou non. Dès lors, les cambrioleurs s'intéressent surtout à ces derniers documents. On a toutefois également l'intention de centraliser le système des cartes d'identité destinées aux non-Belges, de sorte que les services administratifs des communes ne disposent plus de documents vierges.

Article 40

Alors que Mme Thijs considérait initialement que la réforme Copernic de l'administration fédérale était une réforme positive, elle a été obligée de changer d'avis en constatant que la réforme a été progressivement vidée de son contenu. Les nombreuses nominations politiques qui ont eu lieu au cours des mois de vacances ont remis la réforme Copernic en question, selon l'intervenante.

En soustrayant à l'application des lois sur l'emploi des langues les cellules stratégiques, qui continuent pourtant à faire partie de l'administration, l'on a, selon l'intervenante, créé le risque que leur composition puisse être unilingue, ce qui témoignerait d'un grand manque de respect pour les diverses communautés linguistiques. Elle craint aussi que, de la sorte, le service à la population ne soit remis en question.

Mme Deschamphelaere ajoute qu'elle craint que l'article 40 du projet de loi-programme n'ait de lourdes conséquences pour l'administration. Elle regrette que l'on réintroduise de facto les cabinets ministériels et qu'en conséquence, des fonctionnaires motivés et compétents se verront à nouveau associés moins étroitement à la préparation de la politique.

Elle constate en outre que l'on va assister à un découplage accru des services au sein des pouvoirs publics fédéraux, car les cellules stratégiques ne seront pas soumises à l'application des lois sur l'emploi des langues.

Elle estime que cela rendra moins souple la communication avec la population et qu'il en résultera une vision trop unilatérale de la politique fédérale de la part d'une communauté linguistique et culturelle, et, en conséquence, que l'on verra se développer une politique qui ne sera pas adaptée à toutes les entités fédérées de la Belgique.

Mmes Thijs et Deschamphelaere déposent ensuite l'amendement nº 23 (doc. Sénat nº 3-137/2), qui vise à limiter le champ d'application de l'article en question et, ainsi, à prévoir dans la loi que le chef de la cellule stratégique doit rester attaché au deuxième groupe linguistique.

Mmes Thijs et Deschamphelaere déposent par ailleurs l'amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 3-137/2), qui vise à limiter le champ d'application de cet article et à prévoir ainsi dans la loi que la représentation de chacun des rôles linguistiques est assurée au sein de chacune des cellules stratégiques et du noyau central de chacune d'entre elles.

Le vice-premier ministre et ministre du Budget et des Entreprises publiques précise qu'on ne modifie en rien la réglementation concernant l'emploi des langues. Les lois sur l'emploi des langues n'ont jamais été appliquées non plus aux cabinets ministériels de jadis, étant donné que le lien personnel entre les préparateurs de la politique au sein des cabinets et le ministre était tel que le ministre pouvait choisir les intéressés sans devoir se laisser guider par des critères linguistiques.

En effet, la parité linguistique obligatoire au sein du gouvernement fédéral assurait un équilibre global, même au sein des cabinets. Selon le vice-premier ministre et ministre du Budget et des Entreprises publiques, si telle était la pratique courante, il n'y a jamais eu d'obligation légale.

Les cellules stratégiques ont été placées au sein de l'administration mais elles continuent à entretenir un lien spécifique avec leur ministre. Au cours de la mise en oeuvre de la réforme Copernic, on n'a toutefois jamais décidé de soumettre ces cellules stratégiques à l'application des lois sur l'emploi des langues. Ce fut une conséquence involontaire de cette réforme.

Dans son avis concernant les projets d'arrêtés royaux relatifs au projet Copernic, le Conseil d'État a en effet fait observer que les cellules stratégiques créées au sein de l'administration devaient être soumises à l'application des lois sur l'emploi des langues, à moins que l'on ne prévoie une dérogation légale. C'est pourquoi l'on a inscrit l'article 40 dans le projet de loi-programme.

Le vice-premier ministre demande dès lors à la commission de rejeter les amendements nºs 23 et 24.

M. Verreycken maintient qu'un tel article n'a pas sa place dans une loi-programme, à plus forte raison lorsqu'il concerne une modification des lois linguistiques.

L'intervenant craint que l'on crée ainsi un précédent dans la perspective des prochaines lois-programmes.

M. Verreycken s'abstiendra sur les amendements de Mmes Thijs et De Schamphelaere, parce qu'ils visent non pas à supprimer l'article 40, mais seulement à le nuancer.

Enfin, l'intervenant déplore l'absence, en commission, du ministre compétent en la matière, à savoir la ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale et des Grandes villes.

Mme Thijs estime que la situation aurait été plus claire si le gouvernement s'était inspiré de la situation initiale des cabinets ministériels. Elle estime que dès l'instant où le gouvernement souhaite continuer à ouvrer dans le sens de la création de cellules stratégiques faisant partie de l'administration, il doit en supporter toutes les conséquences, y compris l'application des lois linguistiques.

Le vice-premier ministre et ministre du Budget et des Entreprises publiques répète qu'il n'a jamais été question, dans le cadre de la réforme Copernic, de rendre les lois linguistiques applicables aux cellules stratégiques, et ce, en raison de la fonction très spécifique et du mode de recrutement des membres de ces cellules. En outre, la parité au Conseil des ministres garantira globalement un certain équilibre linguistique au sein des cellules stratégiques.

L'amendement nº 23 de Mmes Thijs et De Schamphelaere (doc. Sénat, nº 3-137/2) est rejeté par 9 voix contre 2 et 2 abstentions.

L'amendement nº 24 de Mmes Thijs et De Schamphelaere (doc. Sénat, nº 3-137/2) est rejeté par 9 voix contre 2 et 2 abstentions.

Les articles envoyés à la commission ont été adoptés par 9 voix contre 4.

Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 9 membres présents.

La rapporteuse, Le président,
Erika THIJS. Ludwig VANDENHOVE.