2-262

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 16 JANUARI 2003 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van de heer Michel Barbeaux aan de minister van Sociale Zaken en Pensioenen over «de gevolgen van de toepassing van het kunstenaarsstatuut voor de uitgeverijen» (nr. 2-1202)

M. Michel Barbeaux (CDH). - Plusieurs éditeurs ont attiré notre attention sur les dispositions de la loi-programme que nous avons adoptée le 23 décembre dernier et qui organise notamment le statut des artistes. Nous avons dû procéder au vote « à la hussarde » et l'on découvre aujourd'hui toutes ses conséquences, notamment pour les diverses catégories d'artistes. C'est tellement vrai que le bureau du Sénat, qui s'est réuni ce matin, a décidé de rencontrer les différentes catégories d'artistes afin d'examiner cette question avec eux.

Selon les responsables de l'édition, cette loi risque d'engendrer des effets pervers dont les conséquences économiques seront dramatiques, tant pour les auteurs belges que pour l'ensemble du secteur de l'édition en Belgique et donc pour l'emploi qu'il génère. En effet, faute d'harmonisation à l'échelle européenne, la Belgique sera le seul État membre à appliquer une telle loi qui mettra dès lors, sans doute involontairement dans le chef du législateur, un frein à l'édition d'auteurs belges, par des maisons d'édition belges et étrangères. Des charges d'exploitation supplémentaires, liées à l'accroissement des charges patronales - pour les quelques éditeurs qui pourront les assumer - devront nécessairement être répercutées dans les coûts de production de leurs ouvrages et donc auprès du consommateur, plaçant ainsi les livres d'éditeurs belges à des niveaux de prix anormalement élevés par rapport à la concurrence, tant sur le marché belge qu'à l'exportation, et portant ainsi gravement préjudice à la vocation exportatrice de nos éditeurs.

Tout en adhérant à la volonté de protéger adéquatement les créateurs, les éditeurs craignent que si l'on ne prend pas en compte les spécificités du secteur éditorial, on voit disparaître toute création et édition de proximité dans notre pays.

J'aimerais donc connaître, monsieur le ministre, les garanties que vous pouvez donner aux éditeurs pour que la création et l'édition littéraires ne soient pas mises à mal par le nouveau statut de l'artiste.

M. Frank Vandenbroucke, ministre des Affaires sociales et des Pensions. - Une innovation importante et avantageuse de la réglementation récemment approuvée au Parlement est que les artistes, quelle que soit la discipline qu'ils pratiquent, relèveront, pour l'ensemble de leurs activités, d'un même régime de sécurité sociale, à savoir celui des travailleurs salariés ou celui des travailleurs indépendants. Une vaste enquête réalisée par la Plateforme nationale des artistes, en vue de préparer ce dossier, a en effet révélé qu'un peu plus de la moitié des artistes cumulent des disciplines artistiques, tant de création que d'exécution.

Apparemment, des malentendus existent dans certains milieux sur le contenu de la nouvelle réglementation. J'ai l'impression que certains lisent le nouveau statut comme si dorénavant, tous les artistes étaient contraints d'adopter pour leur activité créatrice le statut de travailleur salarié. Il va de soi que tel n'est pas le cas. Les artistes qui n'effectuent pas leurs activités dans des rapports identiques à ceux liant le travailleur salarié à son employeur, peuvent également s'établir comme travailleurs indépendants en ce qui concerne la sécurité sociale. Le commentaire accompagnant le projet de loi, tel qu'il a été examiné au Parlement, énumère une série d'indicateurs qui peuvent être pris en considération pour l'évaluation du statut.

Il y est précisé qu'aucun de ces indicateurs n'est déterminant en soi. Il faut toujours avoir une vue d'ensemble des rapports qui lient l'artiste à ses commanditaires. Un des indicateurs est l'affiliation de l'artiste auprès d'une caisse d'assurances des travailleurs indépendants. Le commentaire précise à ce sujet que cet élément indique la volonté et l'intention de l'artiste. Pour cette raison, cet élément est d'une importance certaine.

Par conséquent, pour les artistes - en l'occurrence, les écrivains - qui, dans le passé, étaient correctement affiliés auprès d'une caisse d'assurances sociales pour travailleurs indépendants, ce qui signifie entre autres qu'ils étaient en mesure de payer les cotisations de ce régime, il y aura peu de changements dans les faits.

Pour les artistes qui relèvent du régime des travailleurs salariés, la nouvelle réglementation présente comme innovation supplémentaire l'avantage d'une réduction considérable des cotisations patronales, en exonérant de celles-ci un montant de 35 euros par jour de travail déclaré. Cet avantage s'applique aussi aux activités de création.

Si l'artiste est rémunéré par le paiement d'une somme globale, un salaire à la tâche, cette somme devra être convertie en un nombre fictif de jours de travail à déclarer à l'ONSS, tout comme cela est calculé pour les autres travailleurs salariés rémunérés au moyen d'un salaire à la tâche.

Ce nombre sera convenu d'un commun accord entre l'artiste et son commanditaire. Pour qu'il puisse être question d'un jour de travail en vue de l'octroi de la réduction de cotisations, il faut toutefois que la rémunération journalière déclarée ne soit pas inférieure à l'équivalent journalier du revenu mensuel minimum garanti.

Par ailleurs, je dois souligner que, pour l'ONSS, les droits d'auteur ne sont pas assujettis aux cotisations sociales et que la nouvelle législation ne change en rien l'article 5 de l'arrêté royal du 27 juillet 1967 réglant la sécurité sociale des travailleurs indépendants, cet article disposant que les royalties sont exonérées des cotisations sociales si l'intéressé dispose d'une protection sociale au moins équivalente à celle d'un travailleur indépendant. Cette protection peut même être constituée des droits sociaux dérivés dont l'artiste concerné jouit en raison de l'emploi de sa ou son partenaire.

En conclusion, conclusion qui sera plutôt une remarque, nous devons tout de même nous demander si les maisons d'édition, compte tenu surtout de la réduction de cotisations précitée, ne sont pas financièrement en mesure de respecter certaines obligations élémentaires parmi lesquelles la fourniture d'une protection sociale à leurs auteurs. Et nous devons nous demander qui occupe la position la plus faible financièrement : la maison d'édition ou l'auteur ?

M. Michel Barbeaux (CDH). - Je remercie le ministre des éléments techniques qu'il nous a fournis. Il y a parfois une mauvaise compréhension de la loi mais il y a aussi des problèmes d'application de la loi. Il est en tout cas utile, si le bureau du Sénat organise une audition des acteurs du secteur des artistes, que vous puissiez apporter des explications, des compléments d'informations. Je pense comme vous qu'il y a lieu de défendre aussi les artistes eux-mêmes, c'est l'objectif de la loi, et notamment par rapport aux maisons d'édition. Dans la mesure où celles-ci sont capables de payer, il convient effectivement de protéger la partie la plus faible dans l'échange, à savoir l'auteur. Mon objectif principal étant de permettre que les auteurs puissent continuer à produire comme ils le faisaient précédemment et à pouvoir vendre leur production, leurs livres, dans des conditions économiques acceptables pour le lecteur, j'ose espérer que cela restera le cas et que les auteurs bénéficieront en outre d'une protection sociale meilleure.

M. Frank Vandenbroucke, ministre des Affaires sociales et des Pensions. - C'est au Sénat de décider s'il organise ou non des auditions. Dans la mesure où nous sommes en train de concrétiser l'application de la nouvelle loi, il serait intéressant que vous nous communiquiez les problèmes dont vous avez connaissance. Si des gens s'adressent à vous en vous soumettant des problèmes d'application, de grâce faites en part à mes collaborateurs qui seront ravis de prendre connaissance de tous les problèmes d'application pratique.

De voorzitter. - Zoals de heer Barbeaux zei, ontvangen wij allemaal heel wat brieven over dit onderwerp. We zullen dus hoorzittingen houden. Mijnheer de minister, we zullen u de resultaten daarvan meedelen.

M. Frank Vandenbroucke, ministre des Affaires sociales et des Pensions. - Dans la mesure où vous organiseriez une audition, ne serait-il pas intéressant d'inviter le ministre pour avoir une réaction générale ? Du côté francophone, il y a un manque d'information assez inquiétant sur l'architecture générale du projet. Je crois qu'il serait intéressant d'avoir un débat lors de ces auditions pour travailler sur les problèmes concrets.

M. le président. - Vous êtes donc prêt à participer à un tel débat ? (Assentiment du ministre). Je vous en remercie.