Questions et Réponses

Sénat de Belgique


Bulletin 2-54

SESSION DE 2001-2002

Questions posées par les Sénateurs et réponses données par les Ministres

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Ministre des Affaires sociales et des Pensions (Affaires sociales)

Question nº 1963 de Mme van Kessel du 14 mars 2002 (N.) :
Programmes de soins « médecine de la reproduction » et dons de gamètes. ­ Enregistrement des données.

1. À la suite de l'incident qui s'est produit dans un hôpital néerlandais où 18 enfants conçus au moyen de matériel génétique provenant de donneurs ont potentiellement été exposés à une contamination par une maladie héréditaire, j'aimerais savoir où en est la question de l'enregistrement de données en cas d'insémination artificielle à l'aide de matériel provenant de donneurs.

J'avais déjà interrogé l'honorable ministre à ce propos en avril 2001. Il m'avait alors répondu qu'il examinerait un modèle d'enregistrement des dons de sperme.

L'incident récent aux Pays-Bas montre que cet enregistrement est un des éléments les plus importants pour ce qui est de la sauvegarde de la qualité.

Renseignements pris, il n'existe manifestement en Belgique aucun enregistrement des dons de sperme ni des enfants qui en sont issus. Dans le domaine des dons de gamètes, la situation n'est guère meilleure.

Existe-t-il depuis lors un modèle d'enregistrement pour les dons de sperme et de gamètes ?

2. Un modèle d'enregistrement était également annoncé pour les programmmes de soins « médecine de la reproduction ». Ce modèle devait même être opérationnel à partir du 1er avril 2001. L'enregistrement de données est en effet une des obligations à remplir dans le cadre des programmes de soins et il s'effectue sous la direction d'un médecin spécialiste en gynécologie. L'article 14, § 2, de l'arrêté royal du 15 février 1999 énumère les conditions de ce type d'enregistrement interne.

Où en est ce dossier ? Le modèle d'enregistrement est-il déjà opérationnel ?

Réponse : Les questions de l'honorable membre se rapportent, d'une part, à l'opportunité de créer un registre belge des dons de gamètes (dons de sperme, dons d'ovocytes) et d'embryons et, d'autre part, à l'état d'avancement de l'enregistrement des données relatives à l'activité des programmes de soins « médecine de la reproduction » (Moniteur belge du 25 mars 1999). La première réflexion fait suite à l'incident récent survenu aux Pays-Bas, où 18 enfants, conçus grâce aux techniques de procréation médicalement assistée utilisant du sperme de donneur, risquent d'être atteints d'une maladie génétique grave. Le géniteur, en bonne santé au moment du don de gamètes, s'est révélé plus tard atteint d'une affection héréditaire sévère, dont les symptômes ne se sont manifestés que tardivement, et dont le risque de transmission à la descendance est de 50 %. Le donneur ignorait l'existence d'une maladie héréditaire dans sa famille.

Question 1

Pour la première partie de la question posée par l'honorable membre, qui a trait à l'opportunité de créer un système d'enregistrement officiel pour les banques de sperme en Belgique, il faut souligner ici que cette tâche n'entre pas dans les missions explicitement confiées au collège de médecins « médecine de la reproduction ». À ce titre, elle ne fait pas partie des projets actuels de ce collège.

Il n'y a donc pas de projet de création de registre pour les dons de sperme à l'heure actuelle en Belgique.

Dans notre pays, le contrôle du fonctionnement des banques de sperme est confiée aux seuls médecins responsables. Ces médecins sont déontologiquement tenus de respecter les principes de bonne pratique clinique en la matière. L'ensemble des principes destinés à limiter le risque de transmission de maladies infectieuses ou héréditaires ainsi que les risques de consanguinité sont largement diffusés dans la littérature scientifique, en particulier au niveau européen. Certaines options telles que le respect de l'anonymat pour le donneur diffèrent néanmoins de pays en pays. À titre de référence, on peut citer l'ouvrage intitulé « Gamete donation : current ethics in the European Union », Y. Englert ed., publié dans la revue Human Reproduction en mai 1998, volume 13, supplément 2. Sur le plan médical, les recommandations ou règles de bonne pratique clinique suivantes peuvent être citées à titre d'exemple :

­ Restriction du nombre d'enfants conçus par donneur, ou plutôt, du nombre de familles d'enfants concernées par une conception avec le sperme d'un même donneur.

­ Utilisation exclusive de sperme congelé, conservé en banque pendant une période de quarantaine d'au moins 6 mois (pendant lesquels une maladie infectieuse en incubation éventuelle pourra se déclarer).

­ Questionnaire d'ordre médical, personnel et familial, examen médical, tests de laboratoire visant à détecter des infections bactériennes ou virales, ainsi que certaines anomalies génétiques chez le donneur. L'anamnèse familiale est destinée à dépister une éventuelle maladie héréditaire. Les tests microbiologiques visent à se prémunir contre les maladies infectieuses sexuellement transmissibles (virus de l'hépatite, du sida par exemple). Il n'existe pas de test de laboratoire de dépistage qui permette d'exclure en absolu le risque de transmission d'anomalies génétiques latentes. Pour certaines de ces maladies, aucun test n'est d'ailleurs disponible; pour certaines autres, des tests existent mais ne sont pas toujours applicables dans le cadre d'une politique de dépistage non ciblée.

Les risques liés aux techniques de procréation médicalement assistée avec sperme de donneur ne peuvent donc pas être totalement prévenus dans l'état actuel d'évolution de la science et de la médecine. Ces risques sont d'ailleurs présents lors de toute conception naturelle (ils sont même supérieurs lors d'une conception naturelle car, dans ce cas, des tests de dépistage préconceptionnels ne sont généralement pas pratiqués). La création d'un registre national pour les donneurs de sperme, bien que susceptible de fournir des données épidémiologiques sur cette pratique, ne semble pas de nature à résoudre les problèmes posés (voir exemple néerlandais).

L'opportunité de créer ce type d'enregistrement pourrait être soumis à un avis préalable du comité de bioéthique. En effet, cette problématique, au centre de laquelle se situe le choix belge de l'anonymat pour le donneur, est également liée aux concepts sensibles de filiation et de droits pour l'enfant à connaître ses origines.

Question 2

L'enregistrement de l'activité des programmes de soins « médecine de la reproduction » a été confié au collège de médecins pour cette spécialité. Cet enregistrement est obligatoire dans tous les programmes de soins « médecine de la reproduction », conformément à l'arrêté royal du 15 février 1999. Les travaux du collège progressent régulièrement. Comme mentionné par l'honorable membre, l'enregistrement « on line » est opérationnel depuis le 1er avril 2001. De plus, depuis le 1er janvier 2002, un nouveau modèle d'enregistrement encore plus performant est utilisé. Cet enregistrement comprend un ensemble de données sélectionnées par les membre du collège et par un comité d'experts. La nouvelle banque de données mise sur pied par le collège remplace définitivement le « Belgian Register for Assisted Procreation » antérieur.

Les paramètres sélectionnés couvrent l'ensemble des activités de médecine de la reproduction, en tenant compte des limitations imposées par la législation sur le respect de la vie privée : données administratives, indication du traitement (diagnostic et origine de l'infertilité féminine et/ou masculine), précisions techniques relatives aux caractéristiques du cycle et du transfert, techniques de fertilisation artificielle employées, nombre d'embryons implantés, complications, évolution de la grossesse et caractéristiques des nouveau-nés qui en sont issus sont entre autres enregistrés. En particulier, les cycles de fécondation in vitro (et les grossesses qui en résultent) ayant recours à des dons d'ovocytes, de sperme ou d'embryons sont enregistrés dans la nouvelle banque de données.

Un large consensus s'est dégagé pour soutenir activement ce projet dans tous les programmes de soins « médecine de la reproduction » agréés.